vendredi 31 mai 2013

Libéralisme Ch. 17 et 18

XVII
Diverses manières dont un catholique peut, sans être libéral, se faire complice du libéralisme
Un catholique peut se rendre complice du libéralisme en plusieurs manières, sans être précisément un libéral. C'est là un point pratique, plus pratique encore que le précédent, et sur lequel en ce temps-ci la conscience du fidèle doit soigneusement être mise en garde.

Tout le monde sait qu'il y a des péchés dont nous nous rendons coupables, non par véritable et directe commission, mais par pure complicité et connivence avec leurs auteurs, complicité de telle nature qu'elle va souvent jusqu'à égaler en gravité l'acte criminel directement commis. On peut donc et l'on doit appliquer au péché de libéralisme ce que les auteurs de théologie enseignent relativement à la complicité.
Notre intention est seulement de noter ici en quelques mots les différentes manières dont on peut aujourd'hui, en ce qui concerne le libéralisme, se rendre coupable par complicité.

1° - L'affiliation formelle à un parti libéral est la plus grande complicité en cette matière ; c'est à peine si elle se distingue de l'action directe à laquelle elle se rattache. Beaucoup d'esprits, à la seule lumière de leur entendement, voient toute la fausseté doctrinale du libéralisme, connaissent ses sinistres projets et ont en horreur son abominable histoire. Mais par tradition de famille, haines héréditaires, espérances personnelles, reconnaissance de bienfaits reçus, crainte de préjudices à venir ou enfin pour tout autre motif, ils acceptent une situation dans le parti qui professe de pareilles doctrines et favorise de semblables desseins, permettant ainsi qu'on les compte publiquement parmi les affiliés qui s'honorent d'en avoir le titre et travaillent sous son drapeau.
 
Ces malheureux sont les premiers complices, les grands complices de toutes les iniquités de leur parti ; encore qu'ils ne les connaissent pas en détail, ils en sont les véritables coauteurs et participent de l'immense responsabilité qu'elles entraînent.

C'est ainsi que nous avons vu dans notre patrie de véritables hommes de bien, excellents pères de famille, commerçants ou artisans honorables, figurer dans les rangs de partis dont le programme comprend des usurpations et des rapines, sans aucune justification possible par-devant l'honnêteté humaine.

Ils sont donc responsables devant Dieu de ces attentats comme le parti qui s'en est rendu coupable, pourvu toutefois que le parti ne les considère pas comme des faits accidentels, mais comme la conséquence logique de la marche qu'il s'est tracée. L'honorabilité de ces individus sert seulement à rendre leur complicité plus grave, car il est clair que, si un parti n'était composé que d'hommes sans aveu, il n'y aurait pas grand'chose à craindre de lui. Ce qu'il y a d'odieux, c'est le prestige donné à un parti mauvais par des personnes relativement bonnes, qui lui font honneur et le recommandent en figurant dans ses rangs.

2° - Sans être formellement affilié à un parti libéral, et même en déclarant hautement ne pas lui appartenir, on contracte néanmoins la complicité libérale lorsqu'on manifeste pour lui des sympathies publiques, lorsqu'on loue ses membres, lorsqu'on défend et qu'on excuse ses journaux ou que l'on assiste à ses fêtes. La raison en est évidente : l'homme, s'il brille quelque peu par son intelligence ou sa position sociale, favorise grandement une idée quelconque, du moment qu'il se montre en relations plus ou moins amicales avec ses fauteurs. Il fait plus par son prestige personnel que s'il donnait de l'argent, des armes ou quelque autre secours matériel ; ainsi, par exemple, un catholique et surtout un prêtre qui honore de sa collaboration un journal libéral le favorise manifestement par le prestige de sa signature, quoiqu'avec elle il ne défende pas la partie mauvaise du journal, quoique sous cette même signature il rende public son éloignement pour ce qu'il y a de mauvais dans ce journal. On dit quelquefois que c'est là un moyen de faire entendre la voix de la vérité à un grand nombre de lecteurs qui ne l'écouteraient pas sous le couvert d'une autre feuille ; cela est vrai, mais d'un autre côté, la signature d'un homme de bien dans les colonnes d'un mauvais journal, suffit pour l'accréditer aux yeux des lecteurs peu habiles à distinguer la doctrine d'un article d'avec celle d'un autre. D'où il suit que ce qui devait faire contrepoids au mal ou en être la compensation, se transforme, pour la généralité des lecteurs, en une effective recommandation. Que de fois nous avons entendu dire : «Ce journal mauvais ? Non, certes, puisqu'un tel y collabore.»
 
C'est ainsi que raisonne le vulgaire, et le vulgaire forme la presque totalité du genre humain. Malheureusement une pareille complicité est bien fréquente de nos jours.

3° - C'est se rendre coupable d'une véritable complicité que de voter pour des candidats libéraux, même quand on ne vote pas pour eux parce qu'ils sont tels, mais à cause de leurs opinions en économie politique, en administration, etc, etc. Car, alors même que ce député serait d'accord avec le catholicisme sur une question, il est évident que sur les autres, il parlera et votera en hérétique et que, se fait le complice de ses hérésies, quiconque le met à même d'en scandaliser le pays.

4° - C'est faire acte de complicité que de s'abonner à un journal libéral ou de le recommander dans un journal de saine doctrine, de déplorer sa chute ou sa suspension par un faux esprit de camaraderie ou par un sentiment de courtoisie non moins faux. S'abonner à un journal libéral, c'est fournir de l'argent pour fomenter le libéralisme, et de plus, c'est porter par son exemple un autre imprudent à le lire. En outre, c'est procurer à sa famille et aux amis de la maison une lecture plus ou moins empoisonnée. Combien de mauvais journaux seraient obligés de renoncer à leur pernicieuse et déplorable propagande s'ils n'étaient soutenus par des souscripteurs trop naïfs ! Nous dirons la même chose des lieux communs usités entre journalistes. Notre estimable confrère ; nous vous désirons de nombreux abonnements ; nous prenons part aux ennuis de notre collègue, clichés en usage quand il s'agit de l'apparition ou de la suspension d'une feuille libérale.
Ce compérage ne doit pas exister entre soldats combattant sous deux bannières aussi opposées que celles de Dieu et de Satan. Quand un de ces journaux est suspendu ou qu'il cesse de paraître, il faut rendre grâce à Dieu, parce que sa divine majesté compte un ennemi de moins ; et au jour de son apparition, bien loin de saluer sa venue, il faut la pleurer comme une calamité.

5° - Administrer, imprimer, vendre, distribuer, annoncer ou subventionner des journaux ou livres libéraux, bien que ce soit avec d'autres qui sont bons et que cela se fasse par pur métier, comme moyen matériel de pourvoir à sa subsistance quotidienne, c'est encore pécher par complicité.

6° - C'est complicité chez les pères de famille, les directeurs spirituels, les chefs d'atelier, les professeurs et les instituteurs que de garder le silence quand on les interroge sur ce sujet, ou même simplement de ne pas s'expliquer sur cette question quand ils sont obligés d'éclairer la conscience de leurs subordonnés.

7° - Quelquefois aussi, c'est complicité que taire ses bonnes et saines convictions, donnant ainsi l'occasion de penser qu'elles sont mauvaises.
Il ne faut pas oublier qu'en mille circonstances il y a obligation pour le chrétien de rendre un public témoignage à la vérité, même sans en être formellement requis.

8° - C'est complicité qu'acheter, sans autorisation de l'Église, des biens appartenant au clergé ou aux œuvres de bienfaisance, même mis aux enchères publiques, à moins que ce ne soit pour les rendre à leur légitime propriétaire. C'est complicité que racheter des cens ou redevances ecclésiastiques sans la permission de leur véritable possesseur, si lucrative que doive être l'opération. C'est complicité qu'intervenir comme agents dans de tels achats et ventes, de publier les annonces d'enchères, d'imposer des amendes, etc, etc. Tous ces actes entraînent de plus, par eux-mêmes, l'obligation de restituer au prorata de la spoliation.

9° - C'est aussi complicité, en quelque manière, que de prêter sa maison ou de la louer pour des œuvres libérales, telles par exemple que : écoles laïques, clubs, bureaux de rédaction de journaux libéraux, etc, etc.

10° - C'est complicité que célébrer des fêtes civiques ou religieuses en l'honneur d'événements notoirement libéraux ou révolutionnaires ; d'assister volontairement à de telles fêtes ; d'organiser des obsèques patriotiques à caractère plus révolutionnaire que chrétien ; de prononcer l'éloge funèbre de défunts notoirement libéraux ; d'orner leurs tombes de couronnes et d'écharpes, etc, etc. Combien d'imprudents ont, pour ces diverses causes, vacillé dans leur foi !
Nous comprenons seulement dans ces quelques indications les complicités les plus fréquentes en cette matière. Elles peuvent varier autant que les actes de la vie de l'homme, dont le nombre infini défie toute classification.
La doctrine que nous venons d'établir est sans doute grave, mais, si la théologie morale est sûre, appliquée à d'autres erreurs et à d'autres crimes, pourquoi ne le serait-elle pas appliquée à l'erreur, objet actuel de notre examen ?

XVIII
Signes ou symptômes auxquels on peut reconnaître qu'un livre, un journal ou une personne sont infectés ou seulement entachés de libéralisme

Dans cette variété, ou mieux, dans cette multitude de nuances et de demi-teintes qu'offre la famille bizarre du libéralisme, découvre-t-on des signes ou des notes caractéristiques, au moyen desquels il soit facile de distinguer celui qui est libéral de celui qui ne l'est pas ?

Voici encore une autre question très pratique pour le catholique de notre temps, question qui se présente tantôt sous une forme, tantôt sous une autre, et que le théologien moraliste est fréquemment appelé à résoudre.

Pour en faciliter la solution, nous diviserons les libéraux (personnes ou écrits) en trois classes :

1° - Libéraux exaltés
2° - Libéraux modérés
3° - Libéraux improprement dits, ou seulement entachés de libéralisme.

Essayons une description semi-physiologique de chacun de ces types. C'est une étude qui ne manque pas d'intérêt.

Le libéral exalté se reconnaît tout d'abord parce qu'il ne cherche ni à nier ni à cacher sa perversité. Il est l'ennemi déclaré du Pape, des prêtres, et de tout ce qui est ecclésiastique ; il suffit qu'une chose soit sacrée pour qu'elle excite son implacable haine.
 
Parmi les journaux il recherche les plus incendiaires ; il vote pour les candidats les plus ouvertement impies, et de son funeste système il accepte jusqu'aux conséquences les plus extrêmes.

Il se fait gloire de vivre en dehors des pratiques religieuses, et à grand peine il les tolère chez sa femme et ses enfants ; il appartient ordinairement aux sociétés secrètes et meurt presque toujours privé des secours de l'Église.

Le libéral modéré est d'ordinaire aussi mauvais que le précédent ; mais il prend grand soin de ne pas le paraître. Les bonnes manières et les convenances sociales sont tout pour lui ; ce point excepté, le reste lui importe peu.

Incendier un couvent ne lui paraît pas bien, s'emparer du sol du couvent incendié lui semble beaucoup plus régulier et tolérable.

Qu'une misérable feuille de mauvais lieu vende ses blasphèmes en prose, vers ou gravures à deux sous l'exemplaire, c'est un excès qu'il prohiberait, et il se plaint même qu'un gouvernement conservateur ne le prohibe pas ; mais, qu'on dise absolument les mêmes choses en style élégant, dans un livre bien imprimé ou dans un drame aux vers sonores, surtout si l'auteur est un académicien ou quelque chose de ce genre, il n'y voit plus aucun inconvénient. Au seul nom de club il est pris de sueurs froides et de fièvre parce que, dit-il, c'est là qu'on séduit les masses et qu'on bouleverse les fondements de l'ordre social ; mais, selon lui, on peut parfaitement consentir à l'ouverture d'athénées libres.

Qui oserait condamner la discussion scientifique de tous les problèmes sociaux ? En effet, une école sans catéchisme est une insulte à la nation catholique qui la paie ; mais une Université catholique, c'est-à-dire une université entièrement soumise au catéchisme, ou plus exactement au critère de la foi, n'était bonne qu'aux temps de l'Inquisition. Le libéral modéré ne déteste pas le Pape; seulement il blâme certaines prétentions de la Curie romaine et certaines exagérations de l'ultramontanisme  qui ne cadrent pas avec les idées du jour. Il aime les prêtres, surtout ceux qui sont éclairés, c'est-à-dire ceux qui pensent comme lui à la façon moderne, quant aux fanatiques et aux réactionnaires, il les évite ou les plaint. Il va à l'Église et parfois même s'approche des sacrements ; mais sa maxime est que, dans l'Église, on doit vivre en chrétien, et que, hors de l'Église, il convient de vivre selon le siècle où l'on est né, sans s'obstiner à ramer contre le courant. Il navigue ainsi entre deux eaux, meurt d'ordinaire avec un prêtre à ses côtés, et sa bibliothèque pleine de livres défendus.

Le catholique simplement entaché de libéralisme se reconnaît à ceci homme de bien et de pratiques sincèrement religieuses il exhale néanmoins une odeur de libéralisme par tout ce qu'il dit, écrit, ou tient entre ses mains. Il pourrait dire à sa manière, comme Madame de Sévigné, « Je ne suis pas la rose, mais je m'en suis approché et j'ai pris quelque chose de son parfum ». Ce brave homme raisonne, parle et agit comme un libéral sans qu'il s'en doute. Son fort c'est la charité, il est la charité même. De quelle horreur il est rempli pour les exagérations de la presse ultramontaine ! Traiter de méchant l'homme qui répand de mauvaises idées, c'est aux yeux de ce singulier théologien pécher contre le Saint-Esprit. Pour lui il n'y a que des égarés. On ne doit ni résister ni combattre ; ce qu'il faut sans cesse s'efforcer de faire, c'est d'attirer. Étouffer le mal sous l'abondance du bien, c'est sa formule favorite, lue un jour par hasard dans Balmès, et la seule chose qu'il ait retenue du grand philosophe catalan. De l'Évangile, il cite seulement les textes à saveur de sucre et de miel. Les effrayantes invectives contre le pharisaïsme lui font, on le dirait, l'effet de bizarreries et d'excès de langage chez le divin Sauveur. Ce qui ne l'empêche pas de s'en servir fort bien lui-même, et très durement, contre ces agaçants ultramontains qui compromettent chaque jour par leur défaut de mesure la cause d'une religion toute de paix et d'amour.

Contre eux, ce teinté de libéralisme d'ordinaire si doux se montre acerbe et violent.

Contre eux son zèle est amer, sa polémique est aigre, sa charité agressive. C'est à lui que s'adressait le Père Félix, dans un discours célèbre où, à propos des accusations dont l'éminent Louis Veuillot était l'objet, il s'écriait :

« Messieurs, aimons et respectons jusques à nos amis ». Mais non, notre homme à teinte libérale n'agit pas de la sorte. Il garde tous les trésors de sa tolérance et de sa charité pour les ennemis jurés de sa foi ! Quoi de plus naturel, le pauvre homme ne veut-il pas les attirer ? En échange, par exemple, il n'a que sarcasmes et cruelle intolérance pour les plus héroïques défenseurs de cette même foi.

En résumé, ce teinté de libéralisme n'a jamais pu comprendre l'opposition per diametrum dont parle saint Ignace dans les Exercices spirituels. Il ne connaît pas d'autre tactique que celle d'attaquer par le flanc, tactique qui, en religion, peut être la plus commode, mais qui n'est point la plus décisive. Il voudrait bien vaincre, mais à la condition de ne pas blesser l'ennemi, de ne lui causer ni mortification, ni ennui. Le seul mot de guerre lui agace les nerfs et il donne toutes ses préférences à la pacifique discussion. Il est pour les cercles libéraux dans lesquels on pérore et on délibère, et non pour les associations ultramontaines dans lesquelles on dogmatise et on blâme... En un mot, si on reconnaît le libéral exalté et le libéral modéré à leurs fruits, c'est principalement par ses affections que l'homme à teinte libérale se fait reconnaître.

Ces traits mal profilés, qui ne vont pas jusqu'au dessin, ni même jusqu'au croquis, encore moins jusqu'à un véritable portrait, suffisent cependant à faire discerner promptement les types de la famille libérale à leurs degrés divers.

Pour résumer en quelques mots le trait le plus caractéristique de leur respective physionomie, nous dirons que le libéral exalté rugit son libéralisme, que le libéral modéré le pérore et que le pauvre libéral teinté le soupire et le gémit. « Tous sont pires » comme disait de ses parents le coquin du conte populaire. Néanmoins il faut reconnaître que le premier est souvent paralysé dans son action par sa propre fureur ; que le troisième de condition hybride est, par sa nature, stérile et infécond, tandis que le second est le type satanique par excellence ; il est à notre temps la véritable cause des dévastations libérales.

mercredi 29 mai 2013

Doctrine forte

« Aujourd’hui plus que jamais, qu’on le comprenne bien, la société à besoin de doctrine forte et conséquentes avec elles-mêmes. Au milieu de la dissolution générale des idées, l’assertion seule, une assertion ferme, nourrie, sans alliage, pourra se faire accepter. Les transactions deviennent de plus en plus stériles et chacune d’elle emporte un lambeau de vérité. Comme aux premiers jours du christianisme, il est nécessaire que les chrétiens frappent tous les regards par l’unité de leurs principes et de leurs jugements. Ils n’ont rien à emprunter à ce chaos de négations et d’essais de tout genre qui atteste si haut l’impuissance de la société présente. Elle ne vit plus cette société, que de rares débris de l’ancienne civilisation chrétienne que les révolutions n’ont pas encore emportés et que la miséricorde de Dieu a préservés jusqu’ici du naufrage. Montrez-vous donc à elle tel que vous êtes au fond, catholique convaincu. Elle aura peur de vous peut-être quelques temps ; mais soyez-en sûr, elle vous reviendra. Si vous la flattez en parlant son langage, vous l’amuserez un instant, puis elle vous oubliera ; car vous ne lui aurez pas fait une impression sérieuse. Elle se sera reconnue en vous plus ou moins, et comme elle a peu de confiance en elle-même, elle n’en aura pas en vous d’avantage. Il y a une grâce attachée à la confession pleine et entière de la foi.

Cette confession, dit l’Apôtre, est le salut de ceux qui la font et l’expérience démontre qu’elle est aussi le salut de ceux qui l’entendent. Soyons catholiques et rien d’autre que catholiques (…) »

Dom Guéranger – Le sens chrétien de l’Histoire

Libéralisme Ch. 15 et 16

XV
Très simple observation qui achèvera de montrer la question sous son véritable jour 

Je ne comprends pas que les libéraux de bonne foi, s'il en est qui méritent encore cet adoucissement charitable de leur triste dénomination, ne se fassent pas chaque jour une réflexion que je me suis faite mille fois : la voici.

De nos jours le monde catholique attache avec autant de justice que de raison l'idée d'impiété au qualificatif de libre-penseur appliqué à une personne, à un journal, à une institution quelconque. Académie libre-penseuse, société de libres-penseurs, journal écrit sous l'inspiration de la libre-pensée sont des expressions odieuses qui font dresser les cheveux sur la tête de nos frères, même de ceux qui affectent le plus de dédain pour l'intraitable intransigeance ultramontaine.

Et cependant voyez ce que sont les choses, et quelle ridicule importance on attache en général à de simples mots. Les personnes, les associations, les livres, les gouvernements, que ne régit pas en matière de foi et de morale le critère unique et exclusif de l'Église catholique sont libéraux. Ils reconnaissent qu'ils le sont eux-mêmes, s'honorent de l'être, et nul ne songe à s'en scandaliser, hors nous, les terribles intransigeants !
Maintenant changez l'expression, appelez-les libres-penseurs : aussitôt ils rejettent l'épithète comme une calomnie, et il faudra rendre grâces à Dieu s'il ne vous en demandent pas raison comme d'une insulte.
Mais, voyons, mes amis, pourquoi ces variations, cur tam varie ?

N'avez-vous pas banni de votre conscience, de votre gouvernement, de votre journal, ou de votre académie le veto absolu de l'Église ?

N'avez-vous pas érigé en critère fondamental de vos idées et de vos résolutions la raison libre ?

Donc, vous le dites à bon droit, vous êtes libéral, et, personne ne vous marchandera ce titre. Mais sachez-le, vous êtes par cela même des libres-penseurs, encore que cette dénomination vous fasse rougir. Tout libéral, à n'importe quel degré, ou de n'importe quelle nuance, est ‘’ipso facto’’ libre-penseur ; et tout libre-penseur, si odieux et si blessant que puisse être ce nom au point de vue des convenances sociales, n'est rien de plus qu'un libéral logique. C'est là une doctrine exacte et précise comme une proposition mathématique ! C'est, comme on dit vulgairement, une médaille sans revers.

Applications pratiques. Vous êtes un catholique plus ou moins condescendant ou faux d'allures et pour vos péchés vous appartenez à un athénée libéral. Recueillez-vous un moment, et posez-vous la question suivante : continuerais-je d'appartenir à cet athénée si demain il se déclarait publiquement et hardiment libre-penseur ?
Quelle réponse vous dictent la conscience et la pudeur ? Une réponse négative ?

Eh bien alors, donnez des ordres pour qu'on biffe votre nom sur le registre de cet athénée. Comme catholique vous ne pouvez pas en faire partie.

Vous recevez un journal, vous le lisez et sans scrupule vous le faites lire aux vôtres quoiqu'il s'intitule libéral, parle et raisonne en conséquence. Continueriez-vous à Je suis convaincu que non.

Donc fermez-lui d'ores et déjà les portes de votre maison. Ce libéral modéré ou violent n'était depuis des années ni plus ni moins qu'un libre-penseur.

Ah ! de combien de préjugés nous nous débarrasserions en réfléchissant seulement un peu au sens véritable des mots ! Toute association scientifique, littéraire ou philanthropique, libéralement constituée, est une association libre-penseuse. Tout gouvernement, libéralement organisé, est un gouvernement libre-penseur. Tout livre ou journal, libéralement écrit, est un journal ou un livre de libre-penseur. Rejeter avec dégoût le mot et non la chose qu'il représente, c'est un aveuglement manifeste. Avis à ceux de nos frères, à conscience trop endurcie, trop molle ou trop accommodante, qui consentent sans scrupule aucun, à faire partie de cercles, de concours littéraires, de rédactions, de gouvernements, d'institutions établis avec pleine indépendance du magistère de la foi.

En toutes ces institutions règne le libéralisme et par conséquent la libre-pensée. Or, aucun catholique ne peut, sans cesser de l'être, faire partie d'un groupe libre-penseur, car il ne le peut sans accepter comme sien le critère libre-penseur du groupe en question. Donc il ne lui est pas permis non plus d'appartenir à un groupe libéral.

Combien de catholiques servent malgré cela, bravement, le diable, en participant à des œuvres de ce genre ! Seront-ils convaincus maintenant de la perversité du libéralisme, convaincus de la juste horreur avec laquelle un bon catholique doit considérer les choses libérales, convaincus enfin que rien n'est plus naturel et plus légitime que notre intraitable intransigeance ultramontaine ?


XVI
La bonne foi peut-elle, aujourd'hui, se rencontrer dans l'erreur du libéralisme ?

J’ai parlé plus haut des libéraux de bonne foi, et je me suis permis d'exprimer un doute sur la question de savoir si oui ou non il existe in rerum natura quelque type de cette rarissime famille. J'incline à croire qu'il y en a fort peu, car de nos jours l'erreur de bonne foi dans le libéralisme, qui seule pourrait parfois l'excuser, est à peu près impossible. Je ne nierai cependant pas absolument que tel ou tel cas exceptionnel peut se produire, mais je maintiens que ce serait en vérité un cas phénoménal.

Dans toutes les périodes historiques où une hérésie a dominé, on a vu très fréquemment un ou plusieurs individus, entraînés malgré eux par le torrent envahisseur, devenir participants de l'hérésie, sans autre cause explicative d'une telle participation à l'erreur qu'une souveraine ignorance.

Il faut convenir cependant que, si jamais une erreur a été dépourvue de toute apparence qui l'excuse, c'est bien celle du libéralisme. La majeure partie des hérésies, dont le sein de l'Église a été déchiré, ont essayé de se travestir sous des dehors de piété affectée, capables de dissimuler leur criminelle origine. Les Jansénistes, plus habiles qu'aucun de leurs devanciers, parvinrent à se faire un grand nombre d'adeptes, auxquels peu s'en fallut que le vulgaire aveugle ne décernât les honneurs dus seulement à la sainteté. Leur morale était rigide, leurs dogmes redoutables, tout l'extérieur de leur personne ascétique et en quelque sorte illuminé. Ajoutons que la majorité des anciennes hérésies portèrent sur des points très subtils du dogme, qu'un habile théologien pouvait seul discerner, et sur lesquels la multitude ignorante était incapable par elle-même de porter d'autre jugement que celui qu'elle recevait de confiance de ceux qu'elle reconnaissait pour ses maîtres. Par une conséquence toute naturelle, lorsque le supérieur hiérarchique d'un diocèse ou d'une province tombait dans l'erreur, la plus grande partie de ses subordonnés, pleins de confiance en leur pasteur, y tombait avec lui. Cela était d'autant plus aisé que la difficulté des communications avec Rome, à cette époque, privait la voix infaillible du Pasteur universel d'un accès facile auprès du troupeau. La diffusion de beaucoup d'anciennes hérésies, que nous nous permettrons d'appeler purement théologiques, n'eut pas d'autre cause. C'est ce qui explique le cri d'angoisse poussé au quatrième siècle par saint Jérôme, lorsqu'il disait : Ingemuit universus orbis se esse arianum. « Le monde entier gémit de se trouver arien. » C'est aussi ce qui explique comment, au milieu des plus grands schismes et des plus grandes hérésies, comme le schisme russe et l'hérésie anglaise, il est possible que Dieu possède beaucoup d'âmes, dans lesquelles la racine de la vraie foi n'est pas morte, quoique, dans sa profession extérieure, cette foi apparaisse difforme et viciée. Ces âmes, unies au corps mystique de l'Église par le baptême, à son âme par la grâce intérieure sanctifiante, pourront parvenir avec nous à la jouissance du royaume éternel.

Peut-il en être ainsi avec le libéralisme ?

Il s'est présenté d'abord sous le masque de pures formes politiques ; mais, dès le début, ce masque fut tellement transparent, que bien aveugle fut celui qui ne devina pas toute la perversité du misérable ainsi travesti.

Le libéralisme ne sut pas conserver les voiles d'hypocrisie et de piétisme dont quelques-uns de ses panégyristes le couvrirent à ses débuts. Promptement il les déchira et proclama par des lueurs sinistres son origine infernale. Il mit à sac les églises et les couvents, il assassina les religieux et les prêtres, il lâcha la bride à toute impiété et déchargea sa haine de damné jusque sur les images les plus vénérées. Il accueillit immédiatement toute la lie sociale sous sa bannière, partout la corruption calculée fut son précurseur et son introducteur.

Les dogmes nouveaux qu'il prêchait et voulait substituer aux anciens n'avaient rien d'abstrait ni de métaphysique, c'était des faits brutaux qu'il suffisait d'avoir des yeux pour voir et du simple bon sens pour abhorrer.

Un important phénomène, qui prête beaucoup aux sérieuses méditations, se produisit alors.

Le peuple simple, illettré, mais honnête, fut le plus réfractaire à la nouvelle doctrine. Les grands talents, corrompus par le philosophisme, furent les premiers séduits, tandis que le bon sens naturel des peuples fit immédiatement justice des hardis réformateurs. Ici comme toujours il est démontré que la pureté du cœur est plus clairvoyante que la perspicacité de l'intelligence. Si ce que nous venons de dire s'applique justement au libéralisme à son aurore, que ne pourrait-on pas dire de lui, aujourd'hui que tant de lumière a été faite sur son odieux développement ?

Jamais aucune erreur n'a été frappée par de plus sévères condamnations, portées à la fois par l'expérience, l'histoire et l'Église. Ceux qui refusent de croire celle-ci en bons catholiques devront, s'ils ne sont pas dépourvus d'honnêteté naturelle, se rendre au témoignage des deux autres.

En plus de cent ans de règne sur l'Europe, le libéralisme a donné tous ses fruits ; la génération présente recueille les derniers, qui sont bien amers et troublent sa tranquille digestion. La leçon du divin Sauveur nous recommandant de juger l'arbre par ses fruits a rarement trouvé une application plus opportune.

D'autre part, ne vit-on pas clairement dès son principe quelle était l'opinion de l'Église sur la nouvelle réforme sociale ? Parmi ses ministres, quelques-uns, il est vrai, furent entraînés à l'apostasie par le libéralisme, et c'était là pour les simples fidèles une première donnée propre à leur faire juger une doctrine qui faisait de pareils prosélytes. Mais, quand donc la hiérarchie catholique dans son ensemble n'a-t-elle pas avec pleine et entière raison été considérée comme hostile au libéralisme ? Le mot de cléricalisme dont les libéraux ont honoré l'école la plus énergiquement opposée à leurs doctrines, que prouve-t-il, sinon que l'Église enseignante fut toujours leur implacable adversaire ? Pour qui a-t-on tenu le Pape ? Pour qui a-t-on tenu les évêques, les curés et les religieux de tout habit ? Pour qui a-t-on pris les personnes de piété et de conduite régulière ? Pour des cléricaux toujours, c'est-à-dire pour des anti-libéraux. Comment donc pourrait-on exciper de la bonne foi dans une question où le courant orthodoxe apparaît si manifestement distinct de celui qui ne l'est pas ? Ainsi, ceux qui comprennent clairement la question peuvent en saisir les raisons intrinsèques, et ceux qui ne la comprennent pas ont dans l'autorité extrinsèque plus qu'il ne leur est nécessaire pour former exactement leur jugement, comme il doit l'être en tout bon chrétien sur les choses qui touchent à la foi.

Par la miséricorde de Dieu, la lumière n'a pas manqué, mais l'indocilité, les intérêts bâtards, le désir de mener une vie facile ont surabondé. Ce n'est pas ici la séduction qui produit l'erreur en aveuglant l'esprit par de fausses clartés, mais bien la séduction qui en souillant le cœur obscurcit l'entendement. Croyons donc que, à quelques exceptions près, il faut de grands et d'ingénieux efforts de charité pour admettre de nos jours, en raisonnant selon les vrais principes de la morale, l'excuse de la bonne foi dans un catholique sur la question du libéralisme. 

lundi 13 mai 2013

Pour changer le mal de place

Un peu d'humour ... pour changer les idées.



Au Père Spicace,
Un grand malheur est arrivé à l'abbaye et j'ai la pénible mission de vous en faire part.

Mardi soir, pendant que l'abbé Nédictine donnait les dernières grâces, l'abbé Quille perdit l'équilibre
dans l'escalier et tomba inanimé dans les bras du Père Iscope.
Les révérends pères, en perdant l'abbé Quille, perdaient leur seul soutien.

Un seul restait joyeux : le père Fide.
Quant à l'abbé Tise, il n'y comprenait rien. Il aurait bien voulu que le saint Plet l'aide à comprendre ce qui s'était passé mais rien n'y fit.

Après l'accident de l'abbé Quille, on alla chercher le Père Manganate et le Père Itoine, les deux médecins de l'abbaye.
Ils pensaient ranimer le malheureux mais leurs efforts furent vains et celui-ci décéda peu après.

Le lendemain fut donc célébré son enterrement. Chacun fut appelé à l'abbaye par les célèbres cloches du Père Sonnage. La messe fût dite sur une musique de l'abbé Thoven.
Le père Ocquet fut chargé du sermon et comme il n'y avait pas de chaire, il monta sur les épaules du Père Choir.
A la fin de l'homélie, le Père Cepteur fit la quête et remit les dons ainsi recueillis à notre frère africain, l'abbé N'Pé.

Après la messe, une grande discussion s'engagea pour le transport de la bière : l'abbé Canne et l'abbé Trave voulaient passer par les champs.
Le Père Clus s'y opposa.
L'abbé Casse en fut enchanté.
Le Père San avec sa tête de turc ne voulait rien entendre.
Le Père Vers et le Père Nicieux semaient le doute dans les esprits.

Finalement on décida que, comme à l'accoutumée, l'abbé Taillière serait chargé du transport du corps du défunt.
Devant la tombe creusée par le Père Forateur et en l'absence du Père Missionnaire, l'abbé Nédiction donna l'absolution.
Le Père Venche et l'abbé Gonia avaient joliment fleuri la tombe.

Celle-ci fut recouverte d'une belle pierre tombale préparée par l'abbé Tonneuse.
Sur le chemin du retour, le spectacle fut déchirant.
Le Père Pendiculaire était plié en deux de douleur et de chagrin.
L'abbé Vitré était lui aussi plein de larmes.
La Mère Cédés, invitée pour l'occasion, fermait la marche en compagnie du frère du Père Igord.

A l'arrivée, le Père Sil et l'abbé Chamelle préparèrent le repas tout en consultant les livres culinaires du saint Doux.
Le Père Nod et le Père Collateur servirent à boire et chacun put se remettre de ses émotions.


la tradition...


dimanche 12 mai 2013

Libéralisme Ch. 13 et 14


XIII

Notes et commentaires sur la doctrine exposée dans le chapitre précédent

Nous avons dit que les formes de gouvernement démocratiques ou populaires, pures ou mixtes, ne sont pas libérales de soi, ex se, et nous croyons l'avoir suffisamment démontré. Cependant, ce qui spéculativement ou abstraitement parlant est une vérité, ne l'est pas au même degré en pratique, c'est-à-dire dans l'ordre des faits que doit toujours et surtout avoir devant les yeux le polémiste catholique.
 

En effet, quoique considérées en elles-mêmes ces formes de gouvernement ne soient pas libérales, elles le sont dans notre siècle, étant donné que la révolution moderne, qui n'est pas autre chose que le libéralisme en action, ne nous les présente que basées sur ses doctrines erronées. Aussi le vulgaire, qui n'est pas fort en distinctions, qualifie-t-il très sagement de libéralisme tout ce qui de nos jours se présente comme réforme démocratique dans le gouvernement des nations ; parce que, s'il ne l'est pas au point de vue de l'essence même des idées, il l'est de fait. Voilà pourquoi nos pères montraient un grand tact et une singulière prudence quand ils repoussaient, comme contraire à leur foi, la forme de gouvernement constitutionnelle ou représentative, et lui préféraient la monarchie pure, qui dans ces derniers siècles était le gouvernement de l'Espagne. Un certain instinct naturel faisait comprendre aux moins avisés que les nouvelles formes politiques, si inoffensives qu'elles fussent en elles-mêmes, en tant que formes, leur venaient imprégnées du principe hérétique libéral, raison pour laquelle ils faisaient très bien de les appeler libérales. Par ailleurs la monarchie pure qui de soi pouvait être très impie et même hérétique, leur apparaissait comme forme de gouvernement essentiellement catholique, parce que, depuis de longs siècles, les peuples ne l'avaient connue qu'imbue de l'esprit du catholicisme.
 

Idéologiquement parlant, nos royalistes se trompaient donc quand ils identifiaient la religion avec l'antique régime politique, et réputaient impies les régimes constitutionnels ; mais ils touchaient juste, pratiquement parlant, parce que, à la clarté de leur foi, ils voyaient l'idée libérale cachée sous ce qu'on leur présentait comme une pure forme politique indifférente.
 

Au reste, les coryphées et les sectaires du parti libéral firent par leurs blasphèmes et leurs attentats tout leur possible pour que le véritable peuple ne méconnût pas quelle était au fond la signification de leur odieux drapeau.
 

Il n'est pas non plus rigoureusement exact que les formes politiques soient indifférentes à la religion, quoiqu'elle les admette toutes. La saine philosophie les étudie, les analyse, et sans en condamner aucune, ne laisse point toutefois de manifester sa préférence pour celles qui sauvegardent le mieux le principe d'autorité basé spécialement sur l'unité ; ce qui revient à dire que la monarchie est de toutes les formes de gouvernement la plus parfaite, parce que, plus que toute autre, elle se rapproche du gouvernement de Dieu et de l'Église ; de même que la plus imparfaite est la république, pour la raison contraire. La monarchie n'exige la vertu que d'un seul homme, la république l'exige de la majorité des citoyens. Il est donc, logiquement parlant, plus difficile de réaliser l'idéal républicain que l'idéal monarchique. Ce dernier est plus humain que le premier, parce qu'il exige moins de perfection humaine, et s'accommode davantage à l'ignorance et aux vices du grand nombre.
 

Mais de toutes les raisons qui doivent tenir le catholique de notre temps en garde contre les gouvernements de forme populaire, la plus forte doit être l'empressement que la franc-maçonnerie a mis toujours et partout à les établir. Avec une intuition merveilleuse, l'enfer a reconnu que ces systèmes de gouvernement étaient les meilleurs conducteurs de son électricité, et qu'aucun autre ne pouvait mieux le servir à souhait. Il est donc hors de doute qu'un catholique doit tenir pour suspect tout ce que sous ce rapport la révolution lui recommande comme mieux approprié à ses fins, et, partant, considérer comme libéralisme véritable tout ce qu'elle vante et recommande sous le nom de libéralisme, bien qu'il ne soit question que de formes ; car dans ce cas, les formes ne sont autre chose que le vase ou l'enveloppe dont on se sert pour faire pénétrer jusqu'à lui la contrebande de Satan.
 

XIV

Ceci posé, est-il oui ou non permis à un bon catholique de prendre en bonne part le mot libéralisme, et peut-il se glorifier d'être libéral ?

 

Nous demandons la permission de transcrire intégralement ici un chapitre d'un autre de nos opuscules (Choses du jour), car il répond aux questions posées en tête de cette page :
 

« Que Dieu me vienne en aide, cher lecteur, avec ces grands mots de libéralisme et de libéral ! Vous en êtes véritablement épris, et l'amour vous a rendu aveugle comme tous les amoureux. Quels inconvénients peut bien avoir, me demanderez-vous, l'usage de ces mots ? Il en a tant, à mon point de vue, que je vais jusqu'à y trouver matière de péché ! Ne vous effrayez pas, mais écoutez-moi patiemment ; vous me comprendrez vite et sans difficulté. Il est bien certain que le mot libéralisme signifie en Europe, dans le siècle présent, une chose suspecte qui n'est pas entièrement d'accord avec le vrai catholicisme. Ne me dites pas que je pose le problème en termes exagérés. Vous devez, en effet, m'accorder que, dans l'acception ordinaire du mot, libéralisme et libéralisme catholique sont des choses réprouvées par Pie IX. Laissons de côté pour le moment ceux qui en plus ou moins grand nombre, prétendent pouvoir continuer à professer un certain libéralisme, qu'au fond ils ne veulent pas reconnaître pour tel. Mais ce qui est incontestable, c'est que le courant libéral en Europe et en Amérique au moment où nous écrivons, est anticatholique et rationaliste. Passez le monde en revue: voyez ce que signifie parti libéral en Belgique, en Allemagne, en Angleterre, en Hollande, en Autriche, en Italie, dans les républiques hispano-américaines, et dans les neuf dixièmes de la presse espagnole. Demandez à tous ce que signifie en langage ordinaire ‘’critère libéral, courant libéral, atmosphère libérale,’’ etc, etc ; voyez, si parmi les hommes qui se vouent aux études politiques et sociales en Europe et en Amérique, quatre-vingt-dix-neuf pour cent n'entendent pas par libéralisme le pur et franc rationalisme appliqué à la science sociale.
 

«En vain maintenant vous et quelques douzaines de personnes vous obstinez à donner un sens de chose indifférente à ce que le courant général a marqué de son sceau comme chose anticatholique : il n'en est pas moins certain que l'usage, arbitre et juge suprême en matière de langage, persiste à tenir le libéralisme pour un drapeau dressé contre le catholicisme. Par conséquent, quoiqu'au moyen de mille distinctions, exceptions et subtilités, vous arriviez à former pour vous seul un libéralisme qui n'ait rien de contraire à la foi, dans l'opinion du grand nombre, dès que vous vous appelez libéral, vous appartenez comme tous les autres libéraux à la grande famille du libéralisme européen, tel que tout le monde le comprend. Votre journal, si vous le rédigez comme libéral et que vous lui donniez ce nom, sera dans l'opinion générale un soldat de plus parmi ceux qui, sous cette devise, combattent l'Église catholique de front ou de flanc. Vainement vous vous en excuserez quelquefois : ces excuses et ces explications, vous ne pouvez les donner tous les jours ; ce serait par trop ennuyeux. En revanche, vous devez vous servir à chacun de vos paragraphes du mot libéral. Vous ne serez donc, dans la commune créance, qu'un soldat de plus, militant comme tant d'autres sous cette devise, et lors même que, en votre intérieur, vous seriez aussi catholique que le Pape (ainsi que se vantent de l'être certains libéraux), il est hors de doute que vous influerez, non comme catholique, mais comme libéral sur le mouvement des idées et sur la marche des événements ; et même malgré vous, vous serez un satellite, forcé de vous mouvoir dans l'orbite général que décrit le libéralisme. Et tout cela à propos d'un mot ! D'un simple mot ! Oui, mon ami, c'est là ce que vous gagnerez à vous appeler libéral et à qualifier votre journal de libéral. Point d'illusion ! L'usage de ce mot vous rend presque toujours et pour une grande part solidaire de tout ce qui s'abrite à son ombre. Or, ce que son ombre abrite vous le voyez et n'avez pu le nier : c'est le courant rationaliste. Cela étant, à votre place, je me ferais un cas de conscience d'accepter cette solidarité avec les ennemis de Jésus-Christ.
 

« Passons à une autre réflexion :
 

« Il est aussi impossible de mettre en doute que, parmi ceux qui lisent vos journaux et entendent vos conversations, peu sont en état de subtiliser comme vous le faites dans vos distinctions entre libéralisme et libéralisme. Il est donc évident que le plus grand nombre prendra ce terme dans le sens général et croira que vous l'employez ainsi. Sans en avoir l'intention, et même à l'encontre de vos intentions, vous obtiendrez le résultat suivant : procurer des adeptes à l'erreur rationaliste.
 

« Et maintenant, dites-moi, savez-vous ce que c'est que le scandale ? Savez-vous ce que c'est qu'induire le prochain en erreur par des paroles ambiguës ? Savez-vous ce que c'est que semer le doute, la méfiance et d'ébranler la foi des simples par attachement plus ou moins justifié à un mot ? Quant à moi, en ma qualité de moraliste catholique, je vois en cela matière à péché, et si vous n'avez pas l'excuse d'une souveraine bonne foi ou de quelqu'autre circonstance atténuante, matière à péché mortel.
 

« Écoutez cette comparaison :
 

« Vous savez que de nos jours a pris naissance une secte qui s'appelle : la Secte des vieux catholiques. Elle a eu la fantaisie de se donner elle-même ce nom : laissons-la faire. Supposons maintenant que moi, par exemple, qui suis, par la grâce de Dieu et quoique pécheur, catholique, et un des plus vieux par-dessus le marché, puisque mon catholicisme date du calvaire et du Cénacle de Jérusalem, toutes choses qui remontent très loin, supposons, dis-je, que je fonde un journal plus ou moins équivoque et que je l'intitule : Journal vieux catholique, ce titre sera-t-il un mensonge ? Non : car je suis un vieux catholique, dans la bonne acception du terme. Mais, m'objecterez-vous, pourquoi adopter ce titre mal sonnant qui est la devise d'un schisme ? Il donnera occasion aux esprits peu attentifs de croire que vous êtes schismatique, et aux vieux catholiques allemands d'entrer en liesse, persuadés qu'il leur est né un nouveau confrère. Pourquoi scandaliser ainsi les simples ? - J'use de cette expression dans le bon sens ! - Soit : mais ne vaudrait-il pas mieux éviter de faire croire que vous l'employez dans le mauvais ?
 

« Voilà le langage que je tiendrais à quiconque s'obstinerait à considérer encore comme inoffensif le titre de libéral, réprouvé par le Pape, et cause de scandale pour les vrais croyants. Pourquoi se parer de titres qui exigent des explications ? Pourquoi exciter des soupçons qu'il faudra se hâter de dissiper ? Pourquoi prendre rang parmi les ennemis et arborer leur devise si dans le fond on est du nombre des amis ?
 

« Vous dites que les mots n'ont pas d'importance ! Ils en ont bien plus que vous ne vous l'imaginez, mon ami. Les mots sont la physionomie extérieure des idées, et vous n'ignorez pas combien la bonne ou la mauvaise physionomie d'une affaire importe à son succès. Si les mots n'avaient aucune importance, les révolutionnaires ne s'en serviraient pas avec un si grand soin pour travestir le catholicisme, ils ne l'appelleraient pas à toute heure obscurantisme, fanatisme, théocratie, réaction : ils l'appelleraient tout simplement catholicisme, et eux-mêmes ne s'enguirlanderaient pas à chaque instant des vocables flatteurs de liberté, de progrès, d'esprit du siècle, de droit nouveau, de conquête intellectuelle, de civilisation, de lumière, etc., etc. Ils s'intituleraient toujours en usant de leur véritable nom : Révolution.
 

« Il en a de tout temps été ainsi, toutes les hérésies ont commencé par être de simples jeux de mots et ont fini par devenir de sanglantes luttes d'idées. Quelque chose de semblable dut avoir lieu au temps de saint Paul, ou bien le grand Apôtre en a eu l'intuition pour l'avenir lorsque, s'adressant à Timothée (1 Tim., 6, 20), il l'exhorte à se tenir en garde non seulement contre la fausse science (oppositiones falsi nominis scientiæ), mais encore contre la simple nouveauté dans les expressions (profanas vocum novitates). Que dirait aujourd'hui le docteur des nations s'il voyait des catholiques se décorer de l'épithète de libéraux en opposition avec les catholiques qui portent purement et simplement l'antique nom de famille et rester sourds aux réprobations tant de fois répétées, qu'a lancées avec tant d'insistance la chaire apostolique, contre cette nouveauté profane ? Que dirait-il les voyant ajouter à l'immuable expression de catholicisme, cet odieux appendice que n'ont connu ni Jésus-Christ, ni les Apôtres, ni les Pères, ni les Docteurs, ni aucun des Maîtres autorisés qui forment la magnifique chaîne de la tradition chrétienne ?
 

« Méditez tout cela, dans vos moments lucides, si tant est que l'aveuglement de votre passion vous en ménage quelques-uns, et vous reconnaîtrez la gravité de ce qui à première vue vous paraît n'être qu'une question de mots. Non, vous ne pouvez être catholique libre, vous ne pouvez porter ce nom réprouvé, quoique, à l'aide de sophismes subtils, vous parveniez à découvrir un moyen secret de le concilier avec l'intégrité de la foi. Non, la charité chrétienne vous le défend, cette sainte charité que vous invoquez à toute heure, et qui, si je comprends bien, est pour vous synonyme de tolérance révolutionnaire.
 

« La charité vous le défend, parce que la première condition de la charité est de ne point trahir la vérité, de ne pas être un piège destiné à surprendre la bonne foi des moins avisés de vos frères. Non, mon ami, non, il ne vous est point permis de vous appeler libéral ».
 

Nous n'avons plus rien à dire sur ce point, il est résolu pour tout homme de bonne foi.
 

Au surplus, les libéraux eux-mêmes emploient plus rarement aujourd'hui qu'autrefois ce qualificatif de libéral, tant il est usé et discrédité par la miséricorde de Dieu. Ce qu'on rencontre plus fréquemment ce sont des hommes qui, tout en reniant à chaque jour et à chaque heure le libéralisme, en sont imbus jusqu'à la moelle des os et ne savent écrire, parler, agir que sous son inspiration : ces hommes-là sont, de nos jours, les plus à craindre.

jeudi 9 mai 2013

Libéralisme Ch. 11 et 12


XI

De la dernière et de la plus solennelle condamnation du libéralisme par le Syllabus
 

Résumant tout ce qui a été dit du libéralisme par le Pape en divers documents, nous ne pouvons que rappeler les suivantes et très dures épithètes dont, en différentes occasions, il l'a qualifié. Dans son bref à Mgr de Ségur au sujet de son livre si connu l’Hommage., il l'appelle perfide ennemi ; dans son allocution à l'évêque de Nevers, la véritable calamité actuelle ; dans sa lettre au Cercle catholique de Saint-Ambroise à Milan , un pacte entre la justice et l'iniquité ; dans le même document, il le dit plus funeste et plus dangereux qu'un ennemi déclaré ; dans la lettre à l'évêque de Quimper déjà citée, un virus occulte ; dans le bref aux Belges , une erreur sournoise et insidieuse; dans un autre bref à Mgr Gaume , une peste très pernicieuse. Tous ces documents peuvent se lire en entier dans le livre de Mgr de Ségur que nous avons mentionné, Hommage aux catholiques libéraux.
 

Cependant le libéralisme pouvait avec une certaine apparence de raison récuser l'autorité de ces déclarations pontificales, parce que toutes avaient été faites dans des documents de caractère purement privé. L'hérésie est toujours sophistiquée et tenace, elle se raccroche à tous les prétextes et à toutes les excuses pour éluder une condamnation. Un document officiel, public, solennel, d'un caractère général, universellement promulgué, et par conséquent définitif, était donc devenu nécessaire. L'Église ne pouvait refuser cette formelle et décisive parole de son souverain magistère à l'anxiété de ses fils. Elle la leur accorda, et ce fut le Syllabus du 8 décembre 1864.
 

Tous les bons catholiques l'accueillirent avec un enthousiasme qui n'eut d'égal que le paroxysme de fureur avec lequel le saluèrent les libéraux. Quant aux catholiques-libéraux, ils crurent plus prudent de le frapper de côté au moyen d'interprétations artificieuses. Les uns et les autres eurent raison de lui accorder une souveraine importance. Le Syllabus est un catalogue officiel des principales erreurs contemporaines en forme de propositions concrètes, telles qu'on les rencontre dans les auteurs les plus connus parmi ceux qui les ont propagées. On y trouve donc en détail toutes celles qui constituent le dogmatisme libéral. Quoique le libéralisme ne soit nommé que dans une seule de ces propositions, il est certain que la plupart des erreurs mises là au pilori sont des erreurs libérales ; et que par conséquent de la condamnation de chacune d'elles résulte la condamnation totale du système. Nous ne ferons que les énumérer rapidement ici.


Condamnation

- de la liberté des cultes (propositions 15e, 77 e et 78 e) ;

- du placet gouvernemental (propositions 20e et 28e) ;

- de la désamortisation (propositions 16e et 27e) ;

- de la suprématie absolue de l'État (proposition 39e) ;

- du laïcisme dans l'enseignement public (propositions 45e, 47e et 48e) ;

- de la séparation de l'Église et de l'État (proposition 15e) ;

- du droit absolu de légiférer sans Dieu (proposition 56e) ;

- du principe de non-intervention (proposition 63e) ;

- du mariage civil (propositions 73e et autres) ;

- de la liberté de la presse (proposition 79e) ;

- du suffrage universel comme source d'autorité (proposition 60e) ;

- enfin du nom même de libéralisme (proposition 80e).
 

Plusieurs livres, exposant clairement et succinctement chacune de ces propositions, ont été écrits depuis lors ; on peut y recourir. Mais l'interprétation et le commentaire les plus autorisés du Syllabus se doivent à ceux qui l'ont combattu, aux libéraux de toutes nuances nous le présentant comme leur ennemi le plus détesté, comme le symbole le plus complet de ce qu'ils appellent le cléricalisme, l'ultramontanisme et la réaction. Satan, qui, si mauvais qu'il soit, n’est pas un sot, vit très clairement où portait un coup si bien asséné ; aussi a-t-il apposé à cette œuvre grandiose le sceau le plus autorisé après celui de Dieu, le sceau de son inextinguible haine. Croyons-en sur ces point le père du mensonge ; car ce qu'il abhorre et ce qu'il diffame tire de là une garantie sûre et certaine de sa vérité.

 

XII

D'une chose qui ressemble au libéralisme et qui ne l'est pas, et d'une autre qui est le libéralisme quoiqu'elle ne lui ressemble pas
 

Le diable est un grand maître en artifices et en fourberies ; sa plus habile diplomatie consiste à introduire la confusion dans les idées, et ce maudit perdrait la moitié de son pouvoir sur les hommes, si les idées bonnes ou mauvaises nous apparaissaient en toute netteté et franchise. Remarquez, en passant, qu'appeler le diable, diable, n'est pas de mode aujourd'hui, sans doute parce que le libéralisme nous a donné l'habitude de traiter messire le Diable avec un certain respect. Donc la première chose que fait le diable en temps de schisme et d'hérésie, c'est de brouiller et de changer le sens propre des mots moyen infaillible de fausser et de troubler promptement la plupart des intelligences.
 

Ce fait se produisit avec l'arianisme, au point que divers évêques d'une haute sainteté en arrivèrent à souscrire, au concile de Milan, une formule qui condamnait l'illustre Anasthase, marteau de cette hérésie ; et ces prélats auraient figuré dans l'histoire comme véritables fauteurs de cette hérésie, si le saint martyr Eusèbe, légat pontifical, ne fût arrivé à temps pour délivrer de ses pièges ce que le bréviaire appelle la Simplicité captive de quelques-uns de ces naïfs vieillards. Pareille chose se produisit avec le pélagianisme, et plus tard avec le jansénisme ; il en est de même aujourd'hui avec le libéralisme.
 

Pour quelques-uns le libéralisme consiste dans certaines formes politiques ; pour d'autres dans un certain esprit de tolérance et de générosité opposé au despotisme et à la tyrannie ; pour d'autres, c'est l'égalité civile ; pour beaucoup, une chose vague et incertaine qui pourrait se traduire simplement par l'opposé à tout arbitraire gouvernemental. Il est donc indispensable de poser de nouveau ici cette question. Qu'est-ce que le libéralisme ? Ou mieux, qu'est-ce qui ne l'est pas ?
 

En premier lieu, les formes politiques de quelque nature qu'elles soient, si démocratiques ou populaires qu'on les suppose, ne sont pas d'elles-mêmes (ex se) le libéralisme. Chaque chose est ce qu'elle est ; les formes sont des formes, et rien de plus. République unitaire ou fédérale, démocratique, aristocratique, ou mixte, gouvernement représentatif ou mixte, avec plus ou moins de prérogatives du pouvoir royal, c'est-à-dire avec le maximum ou le minimum de roi que l'on veut faire entrer dans la mixture ; monarchie absolue ou tempérée, héréditaire ou élective, rien de tout cela n'a de soi (remarquez bien ces mots de soi) quelque chose à voir avec le libéralisme. Ces gouvernements peuvent être parfaitement et intégralement catholiques. S'ils acceptent au-dessus de leur propre souveraineté la souveraineté de Dieu, s'ils confessent l'avoir reçue de lui et s'ils en soumettent l'exercice à la règle inviolable de la loi chrétienne ; s'ils tiennent pour indiscutable dans leurs parlements tout ce qui est défini par cette loi ; s'ils reconnaissent comme base du droit public la suprématie morale de l'Église et son droit absolu dans toutes les choses qui sont de sa compétence, de tels gouvernements sont véritablement catholiques, et le plus exigeant ultramontanisme ne peut rien leur reprocher, parce qu'ils sont vraiment ultramontains.
 

L'histoire nous offre l'exemple réputé de puissantes républiques très ferventes catholiques. Telles furent la république aristocratique de Venise, telle la république marchande de Gênes, telles sont de nos jours celles de certains cantons suisses. Comme exemple de monarchies mixtes très catholiques, nous pouvons citer notre si glorieuse monarchie de Catalogne et d'Aragon, la plus démocratique et en même temps la plus catholique du monde au Moyen Age ; l'antique monarchie de Castille jusqu'à la maison d'Autriche ; la monarchie élective de Pologne jusqu'a l'inique démembrement de ce religieux royaume. Croire que les monarchies sont de soi, ex se, plus religieuses que les républiques, c'est un préjugé. Précisément les plus scandaleux exemples de persécution contre le catholicisme ont été donnés, dans les temps modernes par des monarchies, citons celle de la Russie et celle de la Prusse.
 

Un gouvernement quelle que soit sa forme est catholique, si sa constitution, si sa législation et sa politique sont basées sur des principes catholiques ; il est libéral s'il base sa constitution, sa législation et sa politique sur des principes rationalistes. Ce n'est point l'acte de légiférer accompli par un roi dans la monarchie, par le peuple dans une république, ou par tous deux ensemble dans les formes mixtes, qui constitue la nature essentielle d'une législation ou d'une constitution. Ce qui la constitue c'est que tout y porte ou n'y porte pas le sceau immuable de la foi et soit ou non conforme à ce que la loi chrétienne commande aux États comme aux individus. De même que, parmi les individus, un roi avec sa pourpre, un noble avec son blason, et un ouvrier avec sa blouse peuvent être catholiques, ainsi les États peuvent être catholiques, quelle que soit la place qu'on leur assigne dans le tableau synoptique des formes gouvernementales. Par conséquent le fait d'être libéral ou antilibéral n'a rien à voir avec l'horreur naturelle que doit professer tout homme pour l'arbitraire et la tyrannie, ni avec le désir de l'égalité civile entre tous les citoyens ; bien moins encore, avec l'esprit de tolérance et de générosité qui, dans leur acception légitime, sont des vertus chrétiennes. Et cependant tout cela, dans le langage de certaines gens et même de certains journaux, s'appelle libéralisme. Voilà donc une chose qui a les apparences du libéralisme et qui ne l'est nullement en réalité.
 

Il existe en revanche une chose qui est bien réellement le libéralisme, quoiqu'elle n'en ait pas les apparences. Supposez une monarchie absolue comme celle de la Russie, ou de la Turquie, si vous aimez mieux ; ou bien encore un de ces gouvernements conservateurs d'aujourd'hui, et le plus conservateur qui se puisse imaginer ; supposez que la constitution et la législation de cette monarchie ou de ce gouvernement conservateur soient basées sur le principe de la volonté libre du roi ou sur celui de la volonté libre de la majorité conservatrice, au lieu de l'être sur les principes du droit catholique, sur l'indiscutabilité de la foi, ou sur le respect rigoureux des droits de l'Église ; cette monarchie et ce gouvernement conservateur sont parfaitement libéraux et anti-catholiques. Que le libre-penseur soit un monarque avec ses ministres responsables, qu'il soit un ministre responsable avec ses corps législatifs : au point de vue des conséquences, c'est absolument la même chose. Dans l'un et l'autre cas, la politique marche sous la direction de la libre-pensée, et elle est par conséquent libérale. Qu'il entre ou n'entre pas dans ses vues de mettre des entraves à la presse ; que, sous n'importe quel prétexte, elle flagelle le pays ; qu'elle régisse ses sujets avec une verge de fer : le misérable pays qui lui sera soumis pourra ne pas être libre, mais il sera certainement libéral. Telles furent les anciens empires asiatiques, telles diverses monarchies modernes ; tel sera, si le rêve de M. de Bismarck se réalise, l'empire allemand ; telle est la monarchie actuelle de l'Espagne, dont la Constitution déclare le roi inviolable, mais non pas Dieu.
 

Voici donc quelque chose qui, sans ressembler au libéralisme, l'est véritablement, et le plus raffiné et le plus dangereux, précisément parce qu'il n'en a pas l'apparence.
 

On voit par là de quelle délicatesse il faut user, quand on traite de pareilles questions. Il importe avant tout de définir les termes du débat et d'éviter les équivoques qui favorisent l'erreur plus que tout le reste.

mardi 7 mai 2013

C'est un Scandale!

Un grave problème circule sur plusieurs sites catholiques en ce moment. Après la visite sur certains sites, nous constatons que des photos qui devraient être cachées à la vue du monde sont présentées sans scrupule. Nous parlons des photos de femmes, nues ou en petite tenue provocatrice.
 
Cela crée pour plusieurs des péchés graves. Pour ceux qui font les sites en question vous mettez les gens en péché d’impureté, et nous savons ce que cela entraine de mettre en occasion de péché d’autres personnes que soi-même. Ceux qui vont sur ces sites en questions peuvent très facilement tomber dans les péchés d’impuretés (Regard, pensée, désir…).
 
Comment ce fait-il que des sites catholiques font la propagande de photos indécentes? Ce n’est certes aucunement normal de montrer les FEMEN seins nue pour donner une explication de celle-ci, ni de montrer une femme en sous-vêtements ou certaines parties du corps nu pour nous expliqué que telle femme est provocatrice, mauvaises mères puisque leur habillement détruit la pureté de leurs enfants, d’une telle secte du diable, etc.
 
Nous ACCUSONS de SCANDALE! Si vous voulez former de bon catholique, commencez premièrement par éloigner ces tendances démoniaques. Nul ne peut servir deux maîtres.
 
« Le scandale consiste dans des paroles, des actes ou des omissions qui heurtent le prochain et peuvent le faire tomber dans le péché »(1)
 
Nous prions ceux qui connaissent les administrateurs de ces sites soi sédévacantiste, « lefebvriste », semi-libéral et moderniste, : http://lafemmecatholique.wordpress.com/, http://www.la-question.net/, http://bibliothequedecombat.wordpress.com/, http://www.civitas-institut.com/ (Il y a probablement d’autres sites que nous oublions ou ne connaissons pas) de leur faire part qu’il transgresse les commandements de Dieu qui défend tout ce qui pourrait blesse notre innocence ou celle de notre prochain.
 
Si ceux-ci veulent être vraiment catholiques et porter la vérité qu’il commence à retirer ces images immondes.  Nous demandons à tous de ne pas aller sur ces sites tant et aussi longtemps qu’ils ne retireront pas ces images.
 
 « Ne craignez point ceux qui tuent le corps et ne peuvent tuer l’âme; mais craignez plutôt celui qui peut précipiter l’âme et le corps dans le géhenne. » Matthieu 10 : 28
 
 « Il est clairement défendu d’avoir des pensées et des désirs contraires à la pureté, des paroles et des actions qui blessent l’innocence, des regards effrontés et trop curieux, des regards sur des tableaux indécents, l’assistance à des pièces de théâtre mauvaises, la lecture de livres ou de journaux immoraux et les vêtements indécents ou par trop luxueux. »
 
« Les impudiques tombent en d’innombrables vices et folies, s’attirent de la part de Dieu de sévères châtiments et la damnation éternelle ».
 
N’oubliez pas Sodome et Gomorrhe.
 
(1) Tout ce qui est en italique vient du Catéchisme de Spirago, Édition canadienne, 1950