mercredi 21 février 2018

Père Onésime Lacouture - 2-36 - La vie de Jésus, fin


TRENTE-CINQUIÈME INSTRUCTION
JESUS CRUCIFIÉ.
«C’est ainsi qu’ils crucifièrent Jésus-Christ, et avec lui les deux larrons, l’un à droite et l’autre à gauche, Jésus au milieu.» Jo.  19-18
Plan  Jésus, dépouillé de ses vêtements.  Jésus cloué à la Croix.  Triomphe de ses ennemis.  Sentiments de Jésus.  Les sept paroles de Jésus.  sa mort.  L’angoisse des amis de Jésus.  Le deuil de Marie.
Conclusion pour nous: la mort mystique pour tous.
JÉSUS, DEPOUILLÉ DE SES VETEMENTS
Saint Paul, aux Héb.  13-12: «Jésus pour nous purifier dans son sang a consommé son sacrifice hors la porte de la ville; parcourons donc le même chemin en portant la croix avec lui.» Et Paul parle au point de vue moral.  Mais pour la contemplation, essayons de le suivre en esprit et avec le coeur jusqu’au Calvaire.  Heureux ceux qui ont la faveur insigne de parcourir le même chemin réellement en faisant le chemin de la croix à Jérusalem, un vendredi saint!  Que Dieu soit béni de me l’avoir accordé en 1938!
Nous partons du prétoire où Jésus fut flagellé et nous descendons du palais de Pilate et nous suivons les anciennes ruelles du temps de Jésus apparemment d’une dizaine de pieds de larges à peine et en différents paliers qui montent et qui descendent à travers les sales bazars ou magasinets le long des ruelles.  Une foule de curieux nous regardent passer sans doute comme ils l’ont fait au temps de Jésus.  Les uns ricanent, mais la plupart sont sérieux et respectent notre défilé.  C’est aux croisées de ces ruelles sans doute que Jésus rencontre sa sainte Mère, quoique l’Evangile n’en dise rien.  La tradition le rapporte et comme elle était sûrement au pied de la croix il n’y a pas de doute qu’elle suivait le cortège avec ses amies après s’être mise à quelque coin pour le voir passer.  C’est pendant ce trajet que Véronique vient lui essuyer la face, couverte de sueurs et de crachats.  Jésus la récompense en laissant sa figure imprimée sur son voile qui servit de modèle pour les saintes faces répandues dans le monde avant d’avoir le portrait du suaire de Turin.
Le Calvaire est une petite éminence de quinze à vingt pieds au plus, juste en dehors des anciens murs de la ville.  Il est d’après une tradition enfermé maintenant dans la basilique du Saint Sépulcre bâtie d’abord par Ste Hélène, puis restaurée plus tard.  Quand on dit la messe on a une idée des cris et des vociférations au temps de Jésus, à sa mort.  Il y a là plusieurs groupes qui se font une guerre véritable autour des différentes parties de la basilique que chacun a à son usage.  Pendant les offices de l’un les autres crient leurs chants aussi fort que possible afin d’enterrer les autres.  Ils beuglent littéralement et hurlent comme des fous pour ennuyer les catholiques, représentés par les Franciscains.  D’abord on est scandalisé puis ensuite on est ému en pensant que c’est une bonne reproduction de ce qui avait lieu au temps de Jésus quand on le conduisit au Calvaire.
Arrivé au Calvaire les Juifs le dépouillent de tous ses habits; il va mourir absolument nu comme il est né.  Les Pères sont unanimes à voir là la pratique du parfait renoncement et détachement que Jésus a prêchés.  Il est ignominieusement exposé devant cette foule et va subir le plus honteux châtiment du temps.  Comme il nous montre à nous débarrasser des deux amours naturels que nous avons tous.  Il n’en avait pas besoin pour lui-même, mais il veut nous instruire par son exemple.  Il nous montre qu’il en coûte pour tuer ces deux amours, pour les créatures et pour soi, mais qu’il faut s’en défaire à tout prix, quelque pénible que ce soit.  Si le détachement effectif n’est pas obligatoire, qu’on n’oublie pas que le détachement du coeur est absolument requis pour tout le monde sans aucune exception… et cela sous peine de damnation!  Trop de chrétiens regardent ce détachement comme du luxe en perfection et comme une question de conseil; c’est absolument faux!  C’est une obligation pour tous.  «Quiconque ne renonce pas à tout ce qu’il possède ne peut être mon disciple.» Cela n’est pas dit pour des religieux mais pour tout le monde sans exception.
Ses vêtements étaient collés à sa peau ensanglantée et on les lui arrache avec violence et sans pitié pour un condamné à mort.  C’est symbolique pour signifier que tout détachement réel coûte à la nature.  Ceux qui pensent que c’est facile n’ont pas commencé encore à le faire.  Combien rares sont ceux qui ont la force morale de le faire?  Même quand on en est convaincu, comme il en coûte!  La preuve est dans ce fait qu’un grand nombre de religieux qui ont fait voeu de se dépouiller et l’ont fait en acte sont très habiles pour se reprendre par toutes sortes de moyens.  Comme ils sont attachés à leurs aises et aux biens «communs» de la communauté qui peuvent captiver le coeur aussi bien que des biens privés si on ne fait pas attention.  Comme ils aiment les beaux habits, comme ils en ont beaucoup et souvent, comme ils les jettent à peine usés, comme ils sont particuliers à table, comme il leur faut de la première classe partout et comme ils critiquent dès qu’il leur manque la moindre chose!  Tout cela prouve que le vrai détachement du coeur est très difficile à cause de notre manque de foi.  Demandons donc à Jésus la grâce de pratiquer réellement le détachement des créatures au point de les mépriser souverainement et de les regarder toutes comme du fumier afin de donner tout notre coeur à Jésus.  Demandons aussi le renoncement à notre personnalité morale, à notre égoïsme et amour-propre.  C’est encore bien plus difficile que de se détacher des créatures extérieures.  Tout de même il le faut, avec la grâce de Dieu.  Supplions Dieu à deux genoux très souvent, avec toute l’ardeur dont nous sommes capables, de nous accorder le mépris souverain de nous-mêmes jusqu’à la mort dont parle saint Paul, la mort à soi-même, pour ne plus avoir aucun intérêt à défendre, mais que morts à nous-mêmes, nous ne vivions plus que pour les intérêts de Jésus.  Que toutes les humiliations, les mépris des autres, les insultes et les injures nous laissent pratiquement froids, puisque nous n’avons plus rien à défendre, que nous sommes tout à Jésus et lui seul vit en nous.  Quelle sublime grâce à demander tous les jours de notre vie!  Ce sont ces deux amours qui empêchent l’amour de Dieu de venir en nous.  Il n’y a plus de place dans notre hôtellerie pour Jésus en proportion que nous avons ces deux amours.  On voit pourquoi les démons poussent tous les prêtres à attaquer les péchés; tant qu’ils perdent leur éloquence là, ils ne pensent pas à attaquer nos deux amours naturels et permis «in se»!  Il n’y a pas de mal à cela!  disent nos philosophes… et l’amour de Dieu ne peut pas entrer avec ces deux amours dans le coeur.  Quel dommage que les prêtres ne sachent pas qu’il leur reste tout à faire après qu’ils ont tonné contre le péché!
JESUS EST CLOUÉ À LA CROIX
C’est tout ce que les évangélistes nous disent de ce terrible tourment, pas plus que le seul fait de la flagellation ou du couronnement d’épines.  C’est que Dieu veut laisser à l’amour de descendre dans les détails.  Lui seul est capable de le faire.  En proportion qu’on aime Jésus on verra facilement tous les détails de cet affreux supplice.  Ils le couchent sur la croix étendue par terre, puis les bourreaux lui prennent la main droite, la posent sur la poutre transversale et enfoncent un gros clou en haut de la paume d’après le suaire de Turin.  Ces clous avaient environ cinq pouces de long, carrés et très pointus avec une grosse tête ronde, d’après celui qui est encore gardé à l’église de Sainte-Croix, à Rome.
Voyons le corps frémir et se tordre de douleur et la figure se crisper d’angoisse; le sang coule abondamment et Jésus endure ce tourment pour expier nos péchés.  Puis ils attrapent le bras gauche et font de même.  Puis ils prennent le pied gauche qu’ils posent sur le pied droit avec un seul clou pour percer les deux et les fixer au bois.  Les tortures augmentent sensiblement.  Enfin ils prennent la croix, la soulèvent et la laissent tomber dans le trou du roc qui lui avait été préparé et Jésus commence son agonie de trois heures suspendu à la croix!  Le secret pour réussir dans ces contemplations est de prendre son temps dans les petits détails.  Par exemple, ici, voyons le bourreau qui lève son marteau et qui frappe le clou posé sur le poignet; il déchire les chairs et fait jaillir un courant de sang qui coule le long du bois et jusqu’à terre.  Tiens, pécheur, c’est pour toi, ce sang et ces douleurs!  C’est toi qui viens de frapper ce coup pour me clouer à la croix!  Tu as ta part dans mes souffrances.  Encore un coup!  et encore un coup de marteau!  Ce sont tes péchés répétés qui enfoncent ce clou!  Pour tes touchers sensuels la justice divine m’impose ces souffrances!  Considère-les bien; ce n’est rien en comparaison de ce que tu auras un jour si ta pénitence ne rachète pas tes péchés!  Approche ta main près de la mienne, touche à ce clou qui la retient au bois!  Trempe-la dans mon sang encore chaud, c’est un échantillon de mon amour pour toi!  Vas-tu recommencer ces touchers coupables?  Vas-tu commettre encore des péchés par ces membres qui m’ont cloué à la croix?  Fais pénitence!  Tu souffriras encore plus que moi si tu n’expies pas tes péchés!  Eh bien, répondons à Jésus par des actes de contrition aussi sincères que possible, par un ferme propos de ne plus jamais l’offenser et de faire pénitence pour nos péchés passés; voilà ce qui peut mieux le consoler et adoucir ses tourments de la crucifixion.  Mais il faut passer aux actes; ces bonnes paroles ne valent pas grand-chose si elles restent là.  Tout de suite il faut commencer à vider son coeur de l’amour des créatures.  Mettons de côté tout de suite une satisfaction qu’on a coutume de prendre, qu’on abandonne un plaisir habituel qu’on prenait sans scrupule.  Qu’on ajoute un acte de religion pour augmenter en amour divin; par exemple un chemin de croix au lieu d’une partie quelconque.  Une visite aux malades au lieu d’aller aux vues; aller chercher un pécheur au lieu d’aller faire une veillée de païen dans un grand salon, etc.  En un mot il faut crucifier nos deux amours naturels et faire plus pour l’amour de Dieu; se retirer des créatures et se rapprocher du Créateur; voilà la plus belle consolation que nous pouvons donner à Jésus saignant sur la croix pour l’amour de nous!  Après le dépouillement Jésus est cloué à la croix pour nous montrer qu’après s’être vidé des deux amours naturels il faut s’attacher à l’amour divin qui est Jésus sur la croix.  Il faut que le coeur soit cloué à Jésus crucifié comme il l’était aux créatures.  Il faut que Jésus crucifié soit notre vie et donc qu’il inspire tous nos actes, tous nos désirs et toutes nos pensées; qu’il soit le mobile de toute notre activité.  Il faut que le coeur colle à quelque chose!  Il faut qu’il s’attache à un objet; il est actuellement attaché aux créatures, qu’on fasse tout au monde pour le détacher de là et l’attacher à la croix de Jésus avec Jésus.  et s’il faut souffrir, eh bien, souffrons comme Jésus a souffert: étant attaché à la croix.
TRIOMPHE DE SES ENNEMIS.
Pour que l’humiliation de Jésus soit réelle et parfaite il faut que ses ennemis triomphent réellement sur lui.  Ce n’est pas seulement une question de mots, mais de faits.  Ils ont un succès parfait; ils voulaient le crucifier et ils l’ont fait crucifier!  Il va mourir et cesser de les contredire, de les supplanter auprès du peuple.  Sa vie et sa doctrine étaient un blâme pour leur vie et leur doctrine; ce censeur importun est enfin cloué à la croix et ils ne l’auront plus dans leur chemin.  Ses disciples ont fui et avec leur chef mort, c’en est fini d’eux aussi; ils ne peuvent plus rien faire.  Ils n’ont qu’à disparaître pour cacher leur honte.
En effet Jésus meurt et son oeuvre avec lui; c’est un fiasco absolu.  Pendant trois ans il a eu une immense vogue et il dominait les princes des prêtres et les pharisiens et tout le peuple.  Son règne promettait une grande gloire et voilà que tout est fini; il meurt comme un vulgaire homme, méprisé de tout le monde et ne laissant rien après lui.  Peut-on imaginer pareille destruction?  C’est que le grain de blé qui tombe en terre doit pourrir et mourir avant de renaître.  Les prêtres et les pharisiens ont donc raison de jubiler sur leur triomphe parfait sur Jésus.  Il ne peut plus leur échapper et il va mourir crucifié comme ils l’ont voulu.  Après avoir tiré sa robe au sort, les soldats s’assirent autour de la croix en s’amusant et en le ridiculisant.  A part un petit groupe d’amis, tout le monde est contre lui et l’insultent.  L’Evangéliste dit: «Et les passants le blasphémaient en branlant de la tête et en disant: Va, toi qui détruis le temple de Dieu et qui le rebâtis en trois jours, sauvetoi!  Si tu es le Fils de Dieu, descends de la croix et nous croirons en toi.  De même les princes des prêtres se moquaient de lui avec les scribes et les anciens, en disant: Il a sauvé les autres, il ne peut se sauver lui-même!  S’il est le roi d’Israël, qu’il descende maintenant de la croix et nous croirons en lui.  Il se confie en Dieu, qu’il le délivre maintenant s’il le veut puisqu’il a dit: Je suis le Fils de Dieu.» Mt.  27.  Et dire que Jésus aurait pu les pulvériser et les anéantir en un instant!  Mais non, son amour pour nous est plus fort que la haine de ses ennemis; il va rester sur la croix et y mourir pour nous donner la vie divine et éternelle!  Quand le temps sera venu pour nous d’être bafoués par les autres et persécutés, Dieu disposera toutes choses pour que nous ayons un échantillon de ce fiasco de Jésus et du triomphe de ses ennemis.  Il permettra que nous soyons si calomniés même par des prêtres qui croiront défendre les traditions de l’Eglise comme les pharisiens croyaient défendre les traditions de leur nation que les supérieurs nous condamneront à une espèce de mort en enlevant toute notre activité extérieure, nous bâillonnant complètement et les témoignages seront si concluants pour eux que nous ne pourrons rien faire pour nous disculper… et il faudra mourir au monde et à ses oeuvres!  Ceux qui sont responsables de notre mort «apparente» triompheront, se réjouiront enfin d’avoir débarrassé l’Eglise d’un hérétique ou d’un pauvre fou sincère mais ignorant sa théologie et victime de son zèle mal éclairé.  Nous savions qu’il finirait là!  Il l’a bien mérité!  Lui seul avait le St-Esprit!  L’imbécile se croyait une mission de réformer le clergé!  et le monde!  Il voit maintenant son erreur; qu’il étudie et prie pour son propre salut avant de vouloir travailler au salut des autres… et les mois passent… et les années s’en vont… et le pauvre illusionné finit par être oublié et son oeuvre aussi!  Il ne reste plus rien des deux et nous pouvons suivre nos traditions ancestrales, fumer nos bons cigares et suivre les sports comme du monde du 20ième siècle!… Ce traitement est si divin qu’il ne contient pas d’amertume ni d’ennui.  Quel bonheur de pouvoir dire à Jésus: je suis traité un tout petit peu comme vous pour les mêmes raisons et par les mêmes gens: les pharisiens modernes, nos philosophes de la théologie!  Tout disparaît dans ce point de ressemblance avec notre bon Maître!  Dire qu’il nous permet de surveiller le monde pendant notre «mort» et de voir que les idées qui nous sont chères font leur chemin quand même et même mieux que lorsque nous prêchions.  Quelle bonté de Dieu de nous donner du temps pour goûter la persécution pour son amour!  Que ces loisirs sont précieux!  On peut prier, méditer et contempler tant qu’on veut; approfondir davantage les Ecritures et écrire les idées que le StEsprit veut bien nous suggérer pour le salut du monde et pour la gloire de Dieu.  Quelle consolation que de mourir d’une certaine façon avant la mort réelle!  et cela pour avoir voulu faire mieux connaître Jésus-Christ!  Rien au monde ne vaut cette faveur!

SENTIMENTS DE JÉSUS
Les sentiments de Jésus au milieu de ses indicibles tourments devaient résumer tous les enseignements de sa vie et de sa doctrine.  Mais les évangélistes n’en mentionnent aucun.  Comme on l’a déjà dit il faut aller dans les prophètes et dans les psaumes pour les trouver.  Là le St-Esprit a inspiré les sentiments de l’humanité en général et donc de celle de Jésus en particulier.  Comme nous sommes une partie de cette humanité, c’est là que nous devrions prendre nos sentiments dans toutes nos épreuves: il y en a de toutes sortes.  Pour le mystère actuel du crucifiement, on trouve dans le psaume 21e justement ce qui se passait dans l’âme de Jésus en croix.  Il gémit et il se plaint, mais d’une façon amoureuse et abandonnée à Dieu son Père.  Il lui dit ce qu’il souffre et ce qu’il attend de lui.
Psaume 21:
«Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’avez-vous abandonné?  Je gémis et le salut reste loin de moi!  Mon Dieu, je crie durant le jour et tu ne me réponds pas!  La nuit et je n’ai point de repos.  Pourtant tu es saint, Tu habites parmi les hommes d’Israël!
Quand nous souffrons il est donc bon de tout dire à Dieu; de lui énumérer nos misères et de lui dire nos sentiments, même si nous sommes découragés, abattus, qu’on le lui dise avec confiance en son extrême bonté.  Si on le trouve dur on le lui dit aussi, mais simplement pour qu’il ait pitié de nous, sans aigreur.  Puis il donne des arguments pour toucher le coeur de Dieu; il lui parle de ses miséricordes passées envers ses pères qui ont pourtant bien moins souffert que lui et que Dieu a exaucés.  Il se fait tendre et humble en parlant à son Père afin qu’il ait pitié de lui.  C’est un beau modèle de sentiments amoureux dans les épreuves:
Psaume 21:
«En toi se sont confiés nos pères, Ils se sont confiés et tu les a délivrés.  Ils ont crié vers toi et tu les as sauvés.  Ils se sont confiés en toi et ils n’ont pas été confondus Et moi je suis un ver et non un homme.  L’opprobre des hommes et le rebut du peuple.  Tous ceux qui me voient se moquent de moi; Ils ouvrent les lèvres, ils branlent la tête; Qu’il s’abandonne à Yahweh!  Qu’il le sauve!  Qu’il le délivre puisqu’il l’aime!»
Dieu sait tout cela mais Jésus veut nous apprendre comment traiter avec son Père.  Il est très utile de rappeler à Dieu le souvenir de ce qu’il a déjà fait pour nous; il se dit: En voilà un qui me donnera bien de la gloire si je fais quelque chose pour lui puisqu’il garde le souvenir de ce que j’ai fait pour d’autres.  N’ayons donc pas peur d’énumérer dans le détail nos peines et nos misères comme un enfant montre ses bobos à sa mère pour qu’elle les guérisse.
Psaume 21:
«Autour de moi sont de nombreux taureaux.  Les forts de Basan, les taureaux de Basan m’environnent Ils ouvrent contre moi leur gueule, Comme un lion qui déchire et rugit, Je suis comme l’eau qui s’écoule Et tous mes os se sont disjoints.  Mon coeur est comme de la cire, Il se fond dans mes entrailles.  Ma force s’est desséchée comme un tesson d’argile, Et ma langue s’attache à mon palais.  Tu me couches dans la poussière de la mort, Car des chiens m’environnent; Une troupe de scélérats rôdent autour de moi; Ils ont percé mes pieds et mes mains, Je pourrais compter tous mes os.  Eux, ils m’observent; ils me contemplent; Ils se partagent mes vêtements, Ils tirent au sort ma tunique.» Plus loin Jésus promet que si son Père l’exauce, il chantera sa gloire partout et toujours.  Il ne faut pas manquer cette idée!  La gloire de Dieu est ce qui le fait marcher pour nous!  Elle est capitale dans la vie d’un chrétien.
On ne peut pas assez insister sur cette manière d’énumérer ses souffrances à Dieu dans le détail; car le coeur humain est pris par ce détail et le nôtre est fait à l’image de N.S.; ce qui nous touche le touchera aussi.  C’est notre familiarité qui développe la confiance et l’amour.  On ne perd pas ses mérites non plus en gémissant sur notre triste sort et en pleurant pourvu que ça soit dans les bras de Dieu comme un enfant dans les bras de sa mère.  St.  Paul, aux Héb.  5-7: «Aussi durant les jours de sa chair, ayant offert à Celui qui pouvait le sauver de la mort ses prières et ses supplications, avec de grands cris et des larmes, il a été exaucé à cause de son humble respect.» Voilà donc un peu ce qui se passait dans l’esprit et le coeur de Jésus pendant qu’il pendait à la croix; il priait surtout et s’offrait pour le salut du monde.  Eh bien, offrons aussi nos souffrances et nos misères pour nos péchés et ceux des autres; cela console Jésus sur la croix et nous attire des grâces.
LES SEPT PAROLES DE JÉSUS…
On estime toujours beaucoup les dernières paroles d’un mourant, combien plus celle de notre Sauveur!  C’est le Saint Esprit qui les a fait écrire pour notre instruction sûrement.  Méditons-les donc avec amour et avec un grand désir d’en profiter.  «Père, pardonnez-leur, car ils ne savent ce qu’ils font.» Sa première parole est pour ses ennemis pratiquant ainsi sa doctrine de l’amour des ennemis.  Plusieurs étaient coupables de péché sachant bien le mal qu’ils faisaient, mais même ceux-là ignoraient le résultat de leurs actes, par exemple, que Jésus rachetait le monde en étant leur victime.  On a montré ailleurs que toute personne peut-être un instrument aveugle entre les mains de Dieu comme un scalpel dans les mains d’un chirurgien.
Personne ne peut être plus innocent que Jésus et personne plus méchant que les princes des prêtres et pourtant Jésus demande leur pardon; combien plus devons-nous le faire pour nos ennemis!  Ne manquons pas de pratiquer ce que nous disons si souvent dans le notre Père: «Pardonnez-nous nos offenses comme nous les pardonnons à ceux qui nous ont offensés».  Celui qui condamne son frère se condamne donc lui-même.  «Je te le dis en vérité: aujourd’hui tu seras avec moi en Paradis.» Après ses bourreaux Jésus pense aux pécheurs.  Au larron contrit, il promet le ciel ce jour-là.  Ce pécheur montre un grand esprit de foi: dans un supplicié mourant, il voit bien l’auteur de la vie!  Dans un crucifié il voit le roi céleste: «Souvenez-vous de moi dans votre royaume.» dit-il à Jésus.
Isaïe, 53-12, avait prédit qu’il serait compté parmi les malfaiteurs.  Il semble que les deux blasphémaient au début de leur crucifiement, mais ensuite que le bon larron fut touché par la patience de Jésus et par la grâce.  Il fait un bel acte d’humilité en disant: «Nous souffrons justement, mais lui, quel mal a-t-il fait?» Les autres faveurs suivent cet acte d’humilité.
Ceux qui se servent de ce cas pour exalter la miséricorde divine ne devraient pas manquer de signaler l’impénitence de l’autre pour exalter la justice divine.
Personne n’a le droit de donner ce converti de la dernière minute comme un modèle de conversion tardive.  Ce n’est pas un retardataire, c’est la première fois qu’il voyait Jésus et il se convertit.  D’ailleurs si lui se convertit à la dernière minute, l’autre ne se convertit pas.  Ne parlons donc pas seulement du premier, mais aussi de l’autre qui meurt en blasphémant.
« Femme, voilà votre fil!  Voilà votre Mère!» S’il s’agissait simplement de trouver un gîte pour sa Mère, Jésus y aurait pourvu avant sa passion.  C’est donc d’un intérêt général qu’il s’agit.  Comme il nous a donné la doctrine du corps mystique qui nous fait tous frères, il veut nous donner aussi notre Mère.  Voilà pourquoi il emploie le nom générique de Femme.  La famille surnaturelle se trouve au complet: nous avons notre Père céleste et maintenant notre Mère selon la grâce avec notre Frère Jésus qui est divin.  C’est la reproduction de la Sainte Famille de Nazareth.  C’est dire à tout chrétien: considérez ma Mère comme je l’ai considérée moi-même.  Elle est aussi vraiment notre Mère comme Jésus est notre Frère et que Dieu est notre Père.  Ce dogme se tient dans l’ordre surnaturel.
« Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’avez-vous abandonné? » Après s’être occupé de ses bourreaux, des amis, de ses ennemis, enfin il s’occupe de lui-même.  Il se plaint de ce que la divinité semble avoir abandonné son humanité non pas physiquement mais moralement.  Jésus veut nous mériter la grâce de supporter cet abandon si pénible dans la vie spirituelle.  Après avoir goûté les douceurs de l’union avec Dieu combien de bonnes âmes sentent cet abandon comme si Dieu les quittait; elles attribuent cette épreuve à leurs péchés, ce qui est vrai, et pensent que Dieu les quitte pour tout de bon, ce qui n’est pas vrai.

Dieu se cache pour nous sevrer des consolations sensibles.  Combien prennent ces consolations pour Dieu même et la preuve est que lorsqu’elles perdent ces consolations elles pensent avoir perdu Dieu.  Si c’était Dieu seul qu’elles aimaient, elles ne se plaindraient pas de ne pas le goûter.  Or Dieu veut être aimé pour lui-même et non pas pour ses consolations.  «J’ai soif!» Il est certain qu’après avoir perdu tant de sang Jésus a vraiment soif d’eau.  Mais il n’y a pas de doute aussi qu’il a soif au point de vue surnaturel, comme on le voit dans les psaumes dont il a l’esprit rempli.
Ps.  41:
« Comme le cerf altéré soupire après les sources d’eau vive, Ainsi mon âme soupire après toi, ô Dieu!  Mon âme a soif de Dieu, du Dieu vivant: Quand irai-je et paraîtrai-je devant la face de Dieu? »
Tout ce psaume exprime les sentiments intérieurs de Jésus et surtout celui d’abandon qu’il vient d’exprimer.  Ps.  42:
« Rends-moi justice, ô Dieu, défends ma cause contre une nation infidèle; Délivre-moi de l’homme de fraude et d’iniquité.  Car tu es le Dieu de ma défense; pourquoi me repousses-tu?  Pourquoi me faut-il marcher dans la tristesse sous l’oppression de l’ennemi? »
Quand Jésus dit à la Samaritaine qu’il a soif, on sait qu’il aiguille cette soif sur la grâce: «Il te donnerait de cette eau qui jaillit jusque dans la vie éternelle!» Voilà la soif dont Jésus souffre.  «Tout est consommé»:
Dans le sens que tout ce que les prophètes ont dit de lui est accompli selon sa propre interprétation dans St.  Luc, 18-21: « Voici que nous montons à Jérusalem et que va s’accomplir tout ce que les prophètes ont écrit du fils de l’homme.» La veille, il disait: «Je vous ai glorifié, j’ai accompli l’oeuvre que vous m’avez donnée de faire.» Combien pourront dire la même chose à l’heure de leur mort: J’ai fait tout ce que Dieu m’avait ordonné de faire!
« Je remets, Père, mon âme entre vos mains! »
Il a donc gardé son âme uniquement pour Dieu de qui il l’avait reçue.  Il est sûr de son salut éternel!  C’est qu’il a vécu uniquement pour Dieu en tant qu’homme et la mort va éterniser sa vie temporelle toute pour Dieu et en Dieu.
Pendant trois heures les ténèbres couvrent la terre pour montrer que celui qui était venu pour éclairer le monde se meurt et que les Juifs ont refusé cette lumière.
Approchons-nous du petit groupe des amis de Jésus autour de sa Sainte Mère et regardons fixement notre divin Sauveur durant son agonie consciente et essayons de sonder ses douleurs immenses pour mieux comprendre son amour intense pour nous tous, selon sa parole que personne ne peut aimer plus qu’en donnant sa vie pour ses amis.  Disons-lui que nous allons l’aimer plus que jamais d’une façon concrète en nous débarrassant de nos deux amours naturels.
SA MORT.
Après qu’il eut goûté le vinaigre et dit: Tout est consommé, il inclina la tête et rendit l’esprit.  Au même moment le voile du temple se déchira de haut en bas, il y eut un tremblement de terre et des morts ressuscitèrent et furent vus en plusieurs endroits.  Les anciens sacrifices cessaient donc avec celui de Jésus.  La messe devait remplacer les sacrifices d’animaux.  Dieu voudrait bien déchirer le voile qui cache la foi aux Juifs, mais là intervient la liberté de l’homme que Dieu ne veut pas violenter.  Ce voile est l’attache à nos deux amours naturels.
Comme c’était la veille de la Pâque, on ne pouvait pas laisser les cadavres sur la croix, alors les Juifs demandèrent à Pilate de les achever pour les enterrer tout de suite.  On brisa les jambes des deux larrons pour les tuer, mais quand les soldats arrivèrent à Jésus ils le trouvèrent mort.  Alors un soldat perça le côté de Jésus de sa lance et ouvrit le coeur d’où il sortit de l’eau et du sang.
Ils accomplissaient ainsi deux prophéties de Zach.  12-19: «Ils tourneront les yeux vers moi qu’ils ont transpercé et ils feront le deuil sur lui comme sur un fils unique.» Et Exode 1246: «On ne mangera la pâque que dans la maison; vous n’emporterez point de chair hors de la maison et vous ne briserez aucun os. »
Jésus nous a tout donné: sa doctrine, sa tête couronnée d’épines, son corps flagellé et crucifié, son sang, sa vie, son honneur et sa gloire; pour montrer que tout cela avait été donné par amour pour nous il ouvre son coeur, symbole de l’amour, comme pour dire: Je vous ai aimés jusqu’à la limite du possible!  Et il nous ouvre un passage à son amour en nous invitant à y rentrer.  Même après sa mort, il nous donne encore de son sang: la dernière goutte!  Tous les saints ont vu dans cette ouverture du coeur la porte d’entrée à son amour divin.  Il se cache au fond d’une plaie pour signifier que c’est par la souffrance qu’on arrive à son amour.  Comme Eve était sortie du côté ouvert d’Adam, ainsi l’Eglise sort du côté ouvert du Nouvel Adam.  Les Pères ont vu dans l’eau et le sang un symbole des sacrements et de la messe.
L’ANGOISSE DES AMIS DE JÉSUS EST EXTRÊME.
N’allons pas l’amoindrir par la pensée de la résurrection.  Jésus a eu beau leur dire qu’il ressusciterait, cela n’entrait pas du tout dans leur coeur.  Jo.  20-8, dit positivement: «Alors cet autre disciple qui était arrivé le premier au sépulcre y entra et il vit et il crut, car ils ne savaient pas encore l’Ecriture, qu’il fallait qu’il ressuscitât des morts!» Donc mettons-nous à leur place.  Pour Jésus ils ont tout sacrifié et pendant trois ans ont vécu de sa vie, l’aimant beaucoup jusqu’à vouloir mourir pour lui et voilà que tout est fini, qu’il est mort comme n’importe quel mortel et donc que tout son travail est ruiné, et sans aucune espérance!  Ils sont obligés de retourner chez eux pour être la risée de tout le monde!  et leur propre vie gâchée!…
LE DEUIL DE MARIE EST IMMENSE.
Elle ne spécule pas sur les résultats possibles de cette mort; elle est toute à sa douleur, la plus grande qui ait jamais existé après celle de Jésus.  C’est là que s’accomplit la prophétie de Siméon: qu’un glaive de douleur transpercera son coeur comme celui de Jésus a été transpercé physiquement, le sien l’est moralement ou mystiquement.  Personne n’a sympathisé avec le S.C.  de Jésus comme ce coeur transpercé de douleur; demandons-lui de nous obtenir tout ce qu’il faut pour mériter d’entrer dans ces deux coeurs si pleins de divin pour nous tous.

CONCLUSION POUR NOUS:
MORT MYSTIQUE POUR TOUS.
Puisque nous devons faire une seule chose avec Jésus pour arriver au ciel, il nous faut donc l’imiter dans l’anéantissement de tout le naturel mental ou des deux affections naturelles et pour les créatures et pour soi.  Nous avons toute la vie pour mourir à ces deux amours, mais comme nous ne savons pas combien de temps nous est alloué par Dieu nous devons nous y mettre et tout de suite et efficacement.  Dieu ne veut pas seulement une science de tête par laquelle nous savons qu’il faut le faire, ni des paroles que nous allons le faire; mais il veut des faits.  Il faut donc attaquer sérieusement ces deux amours en retranchant ce qui les alimente.  Il faut à tout prix cesser d’affectionner les plaisirs de la terre et cesser de travailler pour ses propres intérêts ou pour alimenter son amour propre.  Il faut tailler là-dedans à coups de sacrifices de tout ce qu’on estime et qui sert à notre propre gloire et propre bonheur sur terre.
Ce que Jésus déroule devant nous dans sa vie et surtout dans sa passion doit nous servir de modèle pour notre vie de chaque jour.  Dieu nous laisse la vie uniquement pour que nous débarrassions notre coeur de ces deux amours en coupant les attaches qui nous les gardent dans le coeur.  Voilà ce que Saint Paul et les Saints après lui appellent une mort continuelle au monde et à soi-même.  Il nous faut être crucifié au monde et le monde crucifié pour nous: c’est donc une vie absolument contraire de celle que le monde mène et aime qu’un chrétien doit mener.
Les premiers chrétiens abjuraient les plaisirs même permis afin de mieux mourir à ces deux amours; ils n’allaient pas au cirque, ils ne fréquentaient pas les bains publics, ni les endroits d’amusement.  C’est pour cela que les païens en tuaient.  Voilà ce que nous devons faire aussi de nos jours; fuir le plus possible tout ce qui alimente la vie des sens et l’orgueil de la vie.  Il faut que nous puissions dire avec St.  Paul: «Ce n’est plus moi qui vis, c’est Jésus qui vit en moi.» Ou encore: «Je suis crucifié au monde et le monde est crucifié pour moi.» Il faut donc que tous les chrétiens cultivent cet amour du sacrifice tous les jours.  «Si quelqu’un veut être mon disciple, qu’il se renonce lui-même tous les jours, qu’il porte sa croix et qu’il me suive.» La Croix doit être la vie de ceux qui espèrent aller avec Jésus au ciel; il n’y a pas d’autre chemin.  Les prêtres devraient bien cesser d’attaquer seulement le péché et se mettre à attaquer l’affection pour les choses créées, permises ou défendues, et l’affection pour soi-même.  Voilà les deux amours naturels bons en soi, mais que Dieu ne veut pas du tout en nous; il veut que nous les semions pour récolter son amour à lui.  Voilà ce que tous, les prêtres au monde devraient garder dans l’esprit et dans le coeur pour en vivre eux-mêmes puis ensuite le prêcher au monde le plus possible et de toutes les façons possibles. 
Prenons donc comme résolution; à la fin de cette série sur la vie de Jésus de mourir à nous-mêmes en détruisant le plus possible avec la grâce de Dieu nos deux amours naturels; en retranchant les choses qui les alimentent, les permises, comme les autres, et surtout lutter contre l’amour de soi et de ses intérêts personnels et temporels pour mettre ceux de Jésus à la place.  Que la SteVierge nous vienne en aide de sa puissante intercession et que le St-Esprit nous donne ses dons avec toutes les dispositions nécessaires pour les recevoir.  La vision béatifique est au bout de tout cela!

FIN


mardi 20 février 2018

Père Onésime Lacouture - 2-35 - Le couronnement d'épines


TRENTE-QUATRIÈME INSTRUCTION
LE COURONNEMENT D’ÉPINES.
«Alors les soldats l’amenèrent dans la cour du prétoire et assemblèrent toute la cohorte; et l’ayant revêtu de pourpre, ils lui mirent une couronne d’épines entrelacées et commencèrent à le saluer: Salut, Roi des Juifs.  Ils lui frappaient la tête avec un roseau et crachaient sur lui et fléchissant le genou, ils l’adoraient.» Mt.  15-16
Plan Remarque.  Le couronnement d’épines.  L’Ecce Homo.  Outrages dans le prétoire.  Ils l’amenèrent au Calvaire.  Jésus parle aux filles de Jérusalem.
REMARQUE  C’est la même passion qui se continue à tout point de vue, mais pour notre esprit limité il est bon de la diviser en parties comme nous faisons ici.  Comme on nourrit l’estomac bouchée par bouchée ainsi l’âme a besoin de morceler les considérations pour en profiter spirituellement.  Comme la vingtième bouchée contient la même nourriture que la première et cependant on l’aime autant, ainsi attendons-nous à rencontrer les mêmes considérations de la passion pour nourrir l’âme.  Comme nous ne pouvons pas contempler sans notre esprit, il faut bien le prendre tel qu’il est.  Or de sa nature il cherche des idées; il faut donc lui en fournir quelques unes, mais simplement comme pour amorcer la volonté ou l’amour.  Dès qu’on peut émouvoir la volonté il faut aiguiller là le plus vite possible toute notre activité spirituelle.  L’amour ne s’exprime pas en beaucoup de paroles, mais il faut fixer son objet et trouver son contentement, là.  Ainsi pouvons-nous imaginer la Ste-Vierge suivant son Fils bien-aimé durant la passion pour être intéressée par de nouvelles considérations!  Pas du tout: Son coeur est submergé dans un océan de douleur et plein de compassion pour Jésus.  Toute son âme s’en va dans son Chéri qui souffre pour souffrir avec lui… et c’est tout!  On peut la suivre pour lui demander de faire comme elle.  Jésus pleure souvent et sa mère aussi, à moins que sa douleur soit trop profonde pour des larmes.

Prenons donc son attitude mentale pendant qu’elle accompagne Jésus dans ses différentes souffrances.  Compatissons avec lui dans le couronnement d’épines comme nous avons fait dans la flagellation et que toute notre âme s’en aille avec la sienne pour partager ses douleurs intérieures… et répétons; c’est pour moi!  C’est pour moi!  et c’est mon Dieu que j’ai offensé!  C’est mon Dieu que j’ai offensé!  Il me faudra souffrir comme lui d’une façon ou d’une autre pour aller au ciel.  Le seul moyen d’éviter les châtiments que je mérite, c’est l’amour!  Si je puis l’aimer assez pour que mon amour souffre un vrai martyre de l’avoir offensé, il me dira comme à Madeleine: Parce que tu as beaucoup aimé, beaucoup de péchés te sont remis!  Mais comment l’aimer si je ne l’aime pas quand il souffre?  Comment l’aimer si je ne souffre pas comme lui?  Si son amour se montre à moi quand il donne sa vie pour moi, est-ce que je ne lui montre pas mon amour quand je meurs à moi-même, par le renoncement et la mortification et par les épreuves de la vie?  St Paul embrasé d’amour pour Jésus disait qu’il ne connaissait pas autre chose que Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié.  C’est là que tous les saints s’abreuvent d’amour.  Si donc je veux aimer Jésus il faut que je l’aime dans ses souffrances.  Lui-même dit que pour le suivre il faut porter sa croix tous les jours.  C’est donc un amour concret qu’il veut de nous; il ne se contente pas de soupirs et de paroles, il veut des actes et des actes contre les deux amours naturels que nous avons tous et qui empêchent son amour d’entrer dans notre coeur.  Voilà ce qui doit dominer en nous pendant que nous contemplons ses mystères douloureux.
Le couronnement d’épines. 

Si par la flagellation Jésus voulait expier les péchés d’impureté, par le couronnement d’épines il veut expier nos péchés d’orgueil et en général de l’esprit.  Evidemment ce n’est pas tranché ainsi, mais pour nous cela peut nous aider à mieux considérer les effets et les leçons qu’il veut nous donner.  C’est l’enfer qui poursuit Jésus, le Christ-Roi, que ces démons n’ont pas voulu pour Maître et Seigneur dans leur épreuve et qu’ils continuent de haïr comme alors et même bien plus après leur malédiction.  Il n’y a que les démons pour inventer un pareil supplice pour Jésus.  L’idée de roi les enrage; alors ils vont se moquer de lui pour tout de bon.  Ils inspirent à leurs suppôts de tresser une couronne d’épines entrelacée, et de la lui mettre sur la tête avec un manteau d’écarlate sur les épaules après l’avoir dépouillé de ses vêtements.  Ils le font asseoir sur un tabouret quelconque et lui mettant un roseau à la main en guise de sceptre, ils fléchissent les genoux devant lui en le frappant sur la tête avec son roseau et disant: Salut, Roi des Juifs!  et ils lui crachent au visage et le frappent de toutes façons.  Heureux ceux qui peuvent contempler cette scène autant du coeur que de l’esprit, qui peuvent fixer les yeux de l’esprit longtemps sur leur Sauveur traité de la sorte pour l’amour d’eux!  Ce n’est pas perdre son temps que de pouvoir le fixer ainsi même sans rien dire ni même sans rien penser, pourvu que le coeur regarde aussi.  Si le coeur peut s’y mettre ce ne sera pas long que le St-Esprit donnera quelque rayon de foi pour mieux pénétrer dans ce foyer du plus pur et du plus ardent amour qu’il y ait jamais eu pour nous.  Jésus veut expier les péchés d’orgueil surtout.  Quand l’homme refuse d’obéir comme Adam a fait, il se fait le roi de sa propre existence et il ne reconnaît plus Dieu comme son Maître.  Il le rejette comme les Juifs rejettent Jésus.  Maintenant c’est ce que nous faisons tous par nos péchés personnels.  C’est nous qui le frappons avec le roseau pour lui enfoncer les épines dans la tête et le faire souffrir terriblement; c’est nous qui nous moquons de Lui et de sa Royauté quand nous ne suivons pas ses commandements, sa doctrine et sa vie.  Nous lui préférons les idées du monde, nos propres satisfactions, les créatures captivantes!  ce sont nos Barabbas!  Ce sont ces ingratitudes et ces mépris qui lui percent la tête et font répandre son sang.  Nos mauvaises pensées et nos mauvais désirs, nos consentements aux choses défendues et aux satisfactions de païens en dehors de l’amour de Dieu et tous nos projets pour contenter nos deux amours naturels; voilà ce qui le blesse sérieusement à la tête.  Eh bien, pour le dédommager un peu, acceptons à l’avenir tout ce qui nous fera souffrir de la part du prochain: ses mépris, ses moqueries, ses insultes et ses mauvais traitements de toutes sortes qui peuvent nous venir des autres, tout cela devrait être accepté en union avec les outrages que Jésus a reçus au couronnement d’épines.  ecce homo!

Après que la flagellation a déchiré tout le corps sacré de Jésus et qu’on l’a couronné d’épines, il est tellement défiguré et exténué que Pilate croit qu’il va apitoyer les Juifs.  Mais ces tigres, assoiffés de sang, ne vocifèrent que plus fort pour sa mort.  Tous crient: Crucifiez-le!  Crucifiez-le!  Là encore Pilate affirme qu’il ne le mérite pas, mais les Juifs hurlent plus fort et les clameurs augmentent tellement que Pilate a peur et finalement il leur livre Jésus pour être crucifié.  Peu importe ce que voulait Pilate directement ou immédiatement, Dieu aussi avait son idée en montrant Jésus ainsi aux prêtres et au peuple.  C’était aussi pour apitoyer non pas des assassins, mais tous les chrétiens sur ce qu’ils ont fait à leur Sauveur par leurs péchés et pour qu’ils apprennent à sympathiser avec Jésus si cruellement traité pour l’amour de nous tous.
Voilà le tableau que Dieu veut que nous gardions tous dans notre mémoire et surtout dans notre coeur pour toute notre vie.  Comme St-Paul ne voulait pas garder autre chose dans son coeur que J.C.  crucifié, tous les chrétiens ne devraient pas garder autre chose dans leur esprit et dans leur coeur que Jésus outragé pour nos péchés.  Cet Ecce Homo devrait dominer toute notre vie subjective ou intérieure.  Comme Jésus n’a jamais perdu la vue de sa passion qui s’en venait ainsi nous devrions jamais perdre de vue le souvenir de ce Jésus flagellé et couronné d’épines pour nous.  Cela nous aiderait à pratiquer cette expiation qui doit faire la trame de toute vie chrétienne.  Dieu veut que nous gardions le souvenir vivace de la passion de Jésus comme il le montre en laissant le portrait de sa sainte face sur le voile de Véronique en route pour le Calvaire et sur son suaire que l’on conserve à Turin.  C’est évidemment pour les mêmes raisons que Dieu exhibe Jésus tout défiguré aux prêtres et au peuple.  Si les prêtres contemplaient plus souvent Jésus dans sa passion, ils seraient plus mortifiés, ils se renonceraient plus et ensuite ils prêcheraient la folie de la croix et le mépris du monde ce que très peu font dans le monde.  Tous les prédicateurs de la seule miséricorde sont des prêtres qui vivent en dehors de la passion de Jésus et pour eux-mêmes et pour les autres.  Ce Jésus massacré pour nos péchés ne les attire pas quoiqu’il ait dit qu’une fois élevé de terre il attirerait tout à lui, c’est-à-dire ceux qui n’y mettraient pas d’obstacles par les deux amours naturels.  Le genre philosophe dont la doctrine païenne conserve précieusement les deux amours naturels n’est pas intéressé à ce qui est la mort de ces deux amours: toute la passion de Jésus.  Ces philosophes aiment à prêcher tout ce que
Jésus a fait pour soulager la nature humaine, comme ses miracles pour guérir, ses exhortations de s’aimer les uns les autres dans le sens de se rendre la vie facile les uns les autres… comme les païens… que Jésus a passé en faisant le bien, etc.  Mais les parties de la vie et de la doctrine de Jésus qui condamnent les deux amours naturels, ils les évitent avec grand soin.  C’est à nous tous de revenir à cet Ecce Homo qui doit faire notre propre vie dans le concret autant que possible, qui doit faire le sujet ordinaire de nos contemplations, de nos prédications et de notre étude.  C’est ce Jésus qui contrarie nos deux amours, qui sauve le monde et lui seul.  C’est toute sa doctrine contre ces deux amours naturels que nous devons méditer et prêcher aux autres.
C’est le Père éternel qui nous montre son Fils comme pour nous dire: Voyez ce que vos péchés ont fait de lui!  Voyez ce que ma justice pense du péché et ce qu’elle fera un jour aux vrais coupables!  Isaïe, 53, l’a vu dans cet état: «Beaucoup ont été dans la stupeur, en le voyant, tant il était défiguré, son aspect n’était plus celui d’un homme, ni son visage celui des enfants des hommes… il n’avait ni forme ni beauté pour attirer nos regards, ni apparence pour exciter notre amour.  Il était méprisé et abandonné des hommes, homme de douleur et familier avec la souffrance, comme un objet devant lequel on se voile la face, en butte au mépris, nous n’en faisions aucun cas.  Vraiment c’était nos maladies qu’il portait et nos douleurs dont il s’était chargé et nous, nous le regardions comme un puni, frappé de Dieu et humilié.  Mais lui, il a été transpercé à cause de nos iniquités; le châtiment qui nous donne la paix a été sur lui et c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris…»
Voilà des paroles que tout chrétien devrait connaître par coeur pour en faire le sujet ordinaire de ses réflexions.  Tout ce ch.  d’Isaïe devrait nous aider à mieux sympathiser avec Jésus et nous encourager à mieux souffrir avec lui.  Les membres de son corps mystique devront passer par quelque chose de semblable pour arriver au ciel.  Cette conviction ne viendra pas toute seule dans l’esprit.  Eh bien!  nous avons un fait historique d’une punition bien authentique du péché et cela dans celui que Dieu aime le plus au monde, son Fils unique et qui n’était pas le vrai coupable.  Alors qu’est-ce que la justice divine ne fera pas avec les vrais coupables?  Nous ne pensons pas assez à la justice divine.  En nous montrant son Fils dans cet état pitoyable Dieu veut que nous y pensions plus.
Un bon moyen d’y penser, c’est d’accepter sans murmurer les contrariétés de la vie, toutes ces petites croix dans le train de vie journalier, qui nous viennent des choses et des personnes qui nous entourent.  C’est la justice divine qui se paye graduellement dans toutes ces épreuves qui nous arrivent si souvent.  Ce sont des échantillons de sa passion que Jésus nous envoie: si nous les acceptons en union avec ses souffrances, il nous épargnera dans la même proportion les châtiments que nous avons mérités pour nos péchés.  Où sont les chrétiens qui comparent leurs petits coups d’épingles aux tortures de Jésus?  Qui pensent même à expier leurs péchés?  Une des raisons est la prédication de nos philosophes sur le sacrement de pénitence.  Selon leur habitude ils en parlent «in se», ils parlent de sa vertu «en soi», de ce qu’il peut faire par la grâce de Dieu et évidemment il peut pardonner tous les péchés avec une seule absolution et en lever toute la peine temporelle due aux péchés.  Tout cela est vrai quant à la puissance de Dieu.  Mais ce n’est pas vrai ordinairement avec les dispositions subjectives des pécheurs de nos jours, qui ne sont pas suffisamment disposés pour recevoir ce que Dieu peut donner dans ce sacrement.  Il leur reste même souvent la coulpe de leurs péchés si peu regrettés; le sacrement est nul pour plusieurs il n’y a pas de doute.  Et pour la masse, à cause du peu de contrition, il reste une bonne partie de la peine temporelle à expier dans l’autre monde puisqu’ils ne le font pas en celui-ci.  Qu’est-ce que les philosophes gagnent à dire qu’il suffit de passer par la confession pour que tout soit oublié devant Dieu?  Dans les cas concrets qu’est-ce qu’ils en savent?  Voilà des abus lamentables des «in se».

Nos gens se confessent et continuent leur vie comme avant sans amélioration et même souvent deviennent pires.  En tout cas ils n’ont plus aucune inquiétude pour leurs péchés passés une fois qu’ils les ont confessés.  S’ils avaient reçu la vraie théologie du péché et de la pénitence ils pleureraient leurs péchés toute leur vie et en feraient pénitence toute leur vie même après les avoir confessés.
Tous ceux qui veulent suivre Jésus au ciel doivent le suivre dans sa passion; c’est la doctrine bien claire et souvent donnée par St-Paul dans ses épîtres.  Les prêtres ne les exploitent pas assez dans leur vie et dans leur prédication.  On pourrait dire que c’est l’idée dominante dans ses écrits.  Est-ce pour cela que si peu de prêtres et encore moins de fidèles les lisent?  Que tous ceux qui connaissent cette sagesse de St-Paul fassent donc tout en leur pouvoir pour répandre la lecture de StPaul parmi les prêtres et les fidèles.  «Je suis crucifié au monde et le monde l’est pour moi.»
2 Cor.  12-10: «C’est pourquoi je me complais dans mes faiblesses dans les outrages, dans les nécessités, dans les persécutions, dans les angoisses que je souffre pour J.C.; car quand je suis faible, c’est alors que je suis fort.»
1 Cor.  4: «Nous sommes devenus un spectacle au monde, aux anges et aux hommes, nous sommes insensés, nous, à cause de J.C.; nous sommes faibles, nous sommes méprisés.  Jusqu’à cette heure nous souffrons la faim, la nudité; nous sommes meurtris de soufflets, nous n’avons point de demeure stable; nous nous fatiguons à travailler de nos propres mains; on nous maudit et nous bénissons; on nous persécute et nous le supportons; on nous accable d’injures et nous répondons par des prières; nous sommes devenus jusqu’à présent comme de l’ordure du monde et les balayures rejetées de tous…»
Voilà ce que Jésus avait prédit à ses Apôtres et cela leur est arrive.  Or il nous prédit les mêmes traitements à nous tous qui voulons le suivre au ciel.  Si cela ne s’accomplit pas pour nous c’est donc que nous avons abandonné de le suivre sur le chemin du ciel.  C’est donc que nous sommes devenus les amis du monde, que nous vivons une vie toute naturelle, puisque les démons ne nous attaquent pas.  Ils ne voient pas que nous nous unissons à la vie surnaturelle de Jésus qu’ils détestent tant.  Voilà pourquoi ils nous laissent tranquilles.  Mais que des fidèles comme des prêtres et des religieux se mettent sérieusement à la suite de Jésus pour reproduire dans leur vie d’une façon concrète la vraie vie divine de Jésus et tout de suite ils verront tout le monde et les démons leur faire la guerre à mort, comme à J.C.  et aux Apôtres.  Qu’un chrétien refuse de fumer, de jouer aux cartes, de s’intéresser aux sports, de ne pas boire, mais d’être tout aux choses de Dieu et il verra ce que le monde lui fera!  Qu’une fille méprise la mode, ne fasse pas usage de poudre ou de couleur, ne fume pas, n’aille pas aux vues ni aux danses, etc., comme une chrétienne devrait le faire et se donne tout aux choses de Dieu et les gens du monde vont lui faire une véritable persécution; se moquer d’elle, la disputer, la dénoncer comme une folle et lui faire la vie aussi amère qu’ils pourront.
Tous ont si peur de cela que c’est justement pour éviter cette persécution que tant de chrétiens suivent les maximes du monde et la vie du monde, au moins d’assez près pour ne pas encourir sa disgrâce et ses moqueries.  Ils veulent bien plaire à Jésus, mais ne pas déplaire au monde.  C’est une attitude de lâche et de païen qui ne peut pas plaire à Jésus.  Ces gens n’ont pas saisi les exigences de la foi ni de notre destinée surnaturelle.  Jésus dit clairement que celui qui n’est pas pour lui est contre lui.  Donc ces gens qui ont peur d’être tout à lui sont contre lui.  C’est pour cela que les démons ne les persécutent pas.  C’est justement cette peur d’être persécuté qui empêche un grand nombre de se donner tout à fait à Dieu et aux choses de Dieu.  outrages dans le prétoire.  Après l’Ecce Homo Pilate mena Jésus en dehors du prétoire en un lieu appelé Lithostrotos où il s’assied sur son tribunal vers la 6ième heure: il dit aux Juifs: «Voici votre roi!» Mais ceux-ci criaient: «Ôtez-le, ôtez-le du monde; crucifiez-le!» Pilate leur dit: «Crucifierai-je votre roi?» Les princes des prêtres répondirent: «Nous n’avons pas d’autre roi que César!» C’était dire que la prophétie qui annonçait la venue du Messie lorsque le sceptre serait sorti de Juda s’accomplissait.  Les Juifs auraient dû s’attendre au Messie puisqu’il n’y avait plus de roi en Juda.  Alors Pilate leur livre Jésus pour être crucifié.  La même scène horrible qui s’était produite après que Caïphe eût décidé sa mort, se répète; ils se jetèrent sur lui, le frappaient de coups, lui arrachaient la barbe, lui enfonçaient la couronne d’épines encore plus et se moquaient de lui comme roi des Juifs.  Ils le tenaient cette fois par la plus haute autorité du pays de sorte qu’il ne pouvait plus leur échapper.

Comme ils le ridiculisaient, l’insultaient et l’injuriaient!  La foule semblait oublier tout le bien qu’il lui avait fait.  Voyant les prêtres si contents de le tenir et de l’abîmer d’insultes et d’outrages, elle les suivit aveuglement et fit comme eux.  Voyons Jésus au milieu de cette foule enragée et complètement abandonné par ses amis: seul!… après avoir fait tant de bien, tant de miracles et se voir rejeté par tout le monde devenu ses ennemis juste au temps où il allait répandre son sang pour eux!  Peut-on imaginer pareil traitement?  Il est exténué par la flagellation et la tête toute endolorie par le couronnement d’épines.  L’abjection complète!  Et renié par son peuple qu’il vient sauver!
Faufilons-nous à travers cette foule et essayons d’approcher de Jésus le plus possible; nous n’avons pas à avoir peur de la foule… elle n’est pas là.  Après l’avoir contemplé quelques minutes, est-ce que nous ne pouvons pas trouver quelques bonnes paroles à lui dire?  Est-ce si difficile de lui exprimer notre profonde douleur de l’avoir offensé et de lui avoir attiré ces châtiments!  Disons-lui que nous sommes les vrais coupables et que nous ne voulons plus pécher jamais, que nous voulons faire pénitence le reste de notre vie pour le soulager d’autant en prenant sur nous-mêmes le châtiment de nos péchés.  Plus que cela, protestons sincèrement de vouloir compenser par notre amour concret, plein de sacrifices pour les péchés de notre vie.  Disons-lui que nous voulons devenir des saints pour l’amour de lui et que nous voulons glorifier sa miséricorde infinie par une vie toute divine avec l’aide de sa grâce.  Si nous aimons Jésus tant soit peu il nous faut expier par nous-mêmes le plus possible notre vie de péché par tous les moyens à notre disposition.  Ce sont nos péchés qui l’ont réduit dans ce pitoyable état.

Par miséricorde pour nous il a pris sur lui sa justice, mais si nous ne l’imitons pas en prenant aussi sur nous la justice divine en faisant pénitence pour nos péchés, la miséricorde n’agira pas pour nous ou très peu.  Pour avoir le courage moral de se mortifier il faut le demander à Dieu avec ferveur exactement comme notre persévérance finale puisque les deux mènent au même but; car c’est notre pénitence qui nous obtiendra la persévérance finale.  Il est certain que nous ne prions pas assez et parce que nous ne voyons pas l’abîme épouvantable que nos péchés ont creusé entre nous et Jésus. 
Nous avons une idée de cet abîme dans les souffrances de Jésus.  Pouvons-nous en supporter de semblables?  Voilà le pont pour couvrir cet abîme: la passion de Jésus.  A nous de le prendre sérieusement!… ils l’amènent au calvaire.
Nous voici rendus au suprême sacrifice de notre divin Sauveur: la sentence est portée et elle va être exécutée avec la même cruauté que tout le reste de la passion.  N’essayons pas d’analyser les sentiments de Jésus, ce n’est pas un fleuve qui coule entre ses rives, c’est un océan de maux et de douleurs qui déborde de son âme humiliée jusqu’à la limite.  Ecoutons la prophétie de Jérémie dans ses lamentations, 1-12: «O vous tous qui passez par le chemin regardez et voyez s’il est une douleur semblable à la mienne, moi que Yahweh a frappé au jour de son ardente colère.  D’en haut il a lancé dans mes os un feu qui les dévore»… puis, 3-53: «Ils m’ont donné la chasse comme à un passereau ceux qui me haïssent sans cause.  Ils ont voulu anéantir ma vie dans la fosse et ils ont jeté une pierre sur moi.  Les eaux montaient au-dessus de ma tête, je disais: je suis perdu.»
Assistons à ce départ terrible pour Jésus.  Après lui avoir ôté le manteau d’écarlate, ils lui remettent ses vêtements, puis le chargent de sa croix selon la coutume des crucifiés, qui devaient porter leur croix.  De véritables enragés l’entourent de toutes parts, se moquant de lui et l’insultant de toutes façons.  Le tout petit groupe des amis composé de la Ste-Vierge, de quelques femmes et de St-Jean évidemment ne peuvent approcher de lui à cause des ennemis qui ne le permettent pas, mais ils le suivent comme ils peuvent.  Ils sont absolument impuissants à l’aider ou à le consoler.
Enfin le cortège se met en branle: le centurion marche en tête avec ses soldats et l’un porte le titre de sa condamnation:
Jésus de Nazareth roi des Juifs. 
Une foule de curieux venus en grand nombre à la fête de Pâque le suit sans aucune sympathie pour lui; ce sont des étrangers de fait ou qui agissent comme tels pour le moment.  Un bon nombre étaient de ceux qui complotaient sa mort et qui ont vociféré pour le faire crucifier: on comprend qu’ils soient contents de leur coup.  Voilà l’heure que Jésus a désiré ardemment comme il le disait la veille: il a hâte d’accomplir son sacrifice pour sauver ces tigres qui le dévorent vivant!  Il a hâte de donner son sang pour nous tous afin de nous avoir avec lui dans le ciel!  pour nous faire participer à la vie intime de la Trinité!  Comment comprendre cet amour divin?  Est-ce possible que sous les crachats qu’on lui lance à la face il médite de manifester sa gloire céleste et sa face adorable que les chrétiens contemplent avec un bonheur ineffable?
Il veut inonder de délices ceux qui l’inondent d’injures et de moqueries!  Il veut laver dans son sang nos souillures à nous tous pour nous permettre de pénétrer les trésors infinis de sa sagesse divine.  Essayons de nous faire une idée de son amour qu’il nous montre d’une façon si réelle en prenant sa croix pour aller mourir crucifié.  Entendons-le nous dire: Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il se renonce lui-même tous les jours, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive!» Ce n’est donc qu’en portant notre croix que nous suivons Jésus; c’est une condition absolument nécessaire donc pour arriver au ciel avec Jésus où il s’en va.  Remarquons que Jésus ne parle jamais du portement de croix «in se», mais en nous; qu’il porte sa croix; non pas qu’il approuve le portement de la croix «en soi», mais en luimême.  Jésus ne parle jamais dans l’abstrait, mais toujours dans le concret et bien pratique.  Ce n’est pas lui qui s’arrêterait à la philosophie de la religion.  Mais il prend toujours le point de vue vraiment théologique, c’est-à-dire, dans le coeur ou en rapport avec notre salut éternel en Dieu.  Comme les philosophes doivent être mal à l’aise devant Jésus portant réellement sa croix et nous disant de faire comme lui!  Ce n’est pas sans intention que Dieu a placé les choses de manière que Simon de Cyrène porte la croix de Jésus.  Il n’y a pas de doute que Jésus aurait pu la porter tout seul jusqu’au bout, mais il voulait nous donner une leçon de chose.  Jésus veut nous faire comprendre justement ce que nous venons de dire: qu’il nous faut porter notre croix à sa suite.  Simon pratique l’idée que StPaul nous donne en disant qu’il accomplit ce qui manque à la passion de Jésus, dans ce sens que ses membres doivent partager sa passion dans la mesure où ils sont ses membres.  Qu’on ne prenne jamais le sens protestant de cette idée que les souffrances de Jésus nous dispensent de souffrir nous-mêmes.  Ce n’est pas vrai.  Mais ce que les souffrances de Jésus font c’est de rendre les nôtres acceptables à Dieu, car sans Jésus elles ne le seraient jamais.
Jésus parle aux filles de Jérusalem. 

Plusieurs femmes de Galilée et d’autres de Jérusalem et des environs suivaient en pleurant le cortège lugubre, quand Jésus se retourna et leur dit: «Ne pleurez pas sur moi, mais pleurez sur vous-mêmes et vos fils.  Car voici que des jours s’en viennent dans lesquels on dira: Heureuses les stériles et les entrailles qui n’ont point enfanté et les mamelles qui n’ont point allaité!  Alors on se mettra à dire aux montagnes: Tombez sur nous et aux collines: couvrez-nous; car si on traite ainsi le bois vert, que ne fera-t-on pas au bois sec?» Jésus veut donc que nous pensions plus à nos péchés pour les regretter en pleurant que de sympathiser avec lui dans ses souffrances qui sont causées par nos péchés.  Nos larmes de contrition passent donc avant nos larmes de compassion.  C’est important de savoir cela pour bien méditer et contempler la passion de Jésus.  N’oublions pas que c’est Dieu qui nous avertit que nous serons traités encore plus sévèrement que lui!  Quelle pensée terrible!  Nous ne voulons rien souffrir en ce monde; nous gardons tout pour l’autre monde.  Car le fait d’oublier nos péchés ou de ne pas les considérer comme sérieux ne change rien pour le jugement de Dieu; il sera terrible d’après ce qu’il a infligé à Jésus.  Cet avertissement de Jésus au moment de sa mort devrait produire des effets dans notre conduite.  Il faut à tout prix que nous expions nos péchés par la pénitence concrète.  Qu’on nous laisse la paix avec ces distinctions entre pénitence intérieure comme essentielle et pénitence extérieure.  Ce sont des philosophes qui distinguent de la sorte, ce n’est pas Jésus.  Quand même ces distinctions sont vraies, elles ne sont pas du tout pratiques.  Quand on a le coeur brisé de douleur d’avoir offensé Dieu, on se punit dans le concret et ces deux pénitences ne se distinguent plus.  L’une est la cause de l’autre, mais à quoi bon parler d’une cause séparée de son effet, ou de l’effet sans cause; cela n’existe pas dans la nature, mais seulement dans les esprits des philosophes.  Certains prêtres croient faire merveille en insistant sur la pénitence intérieure et d’autres sur la pénitence extérieure; ce sont des prêtres trompés par le diable tout simplement.  On ne sépare pas Jésus de la croix comme ont fait les protestants… et les philosophes qui les imitent, mais on laisse Jésus attaché à la croix.  L’Eglise catholique nous a transmis non pas la croix seule comme les Anglicans, mais J.C.  attaché au crucifix.  Eh bien, que tout chrétien fasse de la pénitence tout court sans distinction!  Qu’il jeûne pour souffrir un peu pour expier ses péchés.  Demandons à Dieu d’être concret et pratique dans ce portement de notre croix ou de nos croix à la suite de Jésus.  Intéressons notre bonne Mère pour nous obtenir cette grâce par toutes ses propres douleurs qui étaient bien concrètes et vécues, Que tous les martyrs intercèdent pour nous…

Père Onésime Lacouture - 2-34 - La flagellation de Jésus


TRENTE-TROISIÈME INSTRUCTION
LA FLAGELLATION.
«Je ne trouve rien en lui qui mérite la mort; je le ferai
châtier et je le renverrai.» Luc.  23-22
Plan Remarque.  (La raison ne voit que faiblesse, folie et cruauté.  Dans la Passion: (La foi voit la puissance, la sagesse et l’amour.  (Tourment affreux.  La flagellation: (Motifs de Jésus.  (Soumission à son Père.  (Sentiments de Jésus.  (Confiance en Dieu.
REMARQUE  Souvent, moins il y a d’espèces sensibles dans les mystères de la vie de Jésus plus ils cachent de richesses spirituelles pour nous.  C’est que l’amour ne se livre pas au premier venu; plus il est précieux et plus il se cache afin de se faire désirer davantage pour se faire mieux apprécier.  Ainsi les Saints ont tiré grand profit spirituel de la contemplation de ce supplice de Jésus, pourtant l’Evangile n’a qu’un mot: Il fut flagellé.  Aucun détail n’est donné, ni aucun développement.  Pourtant ce devait être un des plus grands tourments de la passion.  Ceux-là seuls qui réussiront à se frayer un passage jusqu’au Coeur de N.S.  découvriront les trésors de sagesse et d’amour que Jésus manifeste dans la flagellation.  Aucun mondain ni aucun qui a des attaches, ni ceux qui aiment le monde ne sont capables d’y pénétrer.  Il n’y a que ceux qui veulent sincèrement aimer Dieu et qui le montrent par leurs sacrifices des échantillons qui entreront dans les sentiments intérieurs de Jésus pendant sa passion.  C’est en proportion qu’un chrétien se vide le coeur des deux amours naturels que nous avons tous par nature: l’amour des créatures et l’amour de soi, qu’il lui sera permis de pénétrer dans ce foyer immense de l’amour divin.  Tout de même les imparfaits ne doivent pas abandonner la méditation des souffrances de Jésus, même s’ils restent vides.  Jésus voit leur bonne volonté et il ne manquera pas de leur donner quelque bonne grâce qui leur aidera à se vider le coeur des amours naturels.  Donc quelque soit la difficulté de méditer sur la flagellation, faisons-le avec bonne volonté et grand désir d’arriver un jour à l’amour concret de Dieu.  Demandons à la Ste-Vierge de nous aider à concevoir les sentiments de Jésus pendant cet horrible supplice.
N’allons pas aborder ce sujet avec la raison ou mieux selon la façon de juger de la raison, mais uniquement au point de vue de la foi.  Nous sommes tellement habitués à tout juger selon la raison que nous sommes exposés à le faire quand il s’agit d’un sujet surnaturel et d’une sagesse toute divine.  C’est là un échec pour plusieurs.  Ce n’est pas l’esprit qui doit pénétrer le premier dans le monde surnaturel, mais le coeur et l’amour.  Et comme les hommes ont de la difficulté de s’adapter au monde qu’ils considèrent!  Dieu est amour et Jésus dit que c’est dans sa passion qu’il nous montre le plus son amour.  Or est-ce que c’est par l’esprit qu’on gagne le coeur d’une personne?  C’est par l’amour.  L’amour se révèle à l’amour seul.  Eh bien!  ne manquons pas d’essayer de mettre le plus d’amour possible dans ces contemplations sur les mystères de la passion de Jésus. 
Dans la passion….
La raison ne voit que faiblesse, folie et cruauté.  Il est certain que la raison avec ce que les sens lui fournissent de la passion de Jésus est révoltée.  On voit un homme qui agit comme un enfant sans défense; il se laisse garrotter par les soldats de Judas, se laisse conduire chez Anne et Caïphe sans rien dire et se laisse outrager affreusement sans une plainte… et il se dit celui qui gouverne le ciel et la terre: S’il est Dieu, il était si facile de s’échapper de ses ennemis!
Quelle folie pour un médecin qui veut nous guérir en se laissant blesser!  Qui se fait pauvre pour nous enrichir: et qui meurt pour nous donner la vie!  et il veut que nous ayons confiance en lui!  La cruauté dont il est l’objet fait frémir la nature humaine.  Des pieds à la tête il n’est que plaies et après avoir été flagellé cruellement, il meurt dans un supplice infâme sur la croix.
Voilà donc comment la sagesse humaine est arrêtée au seuil de la passion de Jésus par des considérations de ce genre qui lui répugnent souverainement.  La raison se détourne de tant de choses qui la contrarient.  Par conséquent c’est parfaitement inutile d’essayer de contempler la flagellation au point de vue de la raison humaine.  Prenons tout de suite le Point de vue de la foi.
A cette lumière tout change; avec la lumière du St-Esprit la face de la terre est renouvelée et les choses sont créées de nouveau comme dans un monde nouveau.  Jésus dit qu’il doit boire le calice que son Père lui présente.  Puisque sa passion vient d’une certaine façon de son Père, c’est donc qu’elle vient de la sagesse, de la bonté et de la miséricorde infinies.  Si nous voyons le côté divin de la passion de Jésus nous finirons peut-être par voir aussi le côté divin de nos croix qui sont des échantillons de la passion de Jésus.
C’est difficile de voir ce point de vue; nous avons tant d’obstacles en nous pour arriver au divin.  Mais est-ce que les hommes regardent les difficultés quand ils savent qu’ils vont trouver la richesse au fond?  Par exemple comme les mineurs d’Alaska travaillent dur pour trouver un peu d’or à des cinquante pieds sous terre et cela à travers la terre gelée.  Eh bien, nous savons par l’Ecriture que les trésors de la sagesse et de la science divines sont cachés dans la passion de Jésus ou dans la doctrine de la croix.  Est-ce que cela ne doit pas nous suffire pour nous encourager à contempler les souffrances de Jésus malgré notre répugnance naturelle?  Dieu devait avoir de bonnes raisons pour laisser son Fils unique souffrir tous ces tourments.  Essayons de les trouver pour en faire notre profit spirituel.
Jésus montre une puissance extraordinaire pour préparer sa venue dans le monde pendant tant de siècles et en conduisant son peuple où il le voulait malgré ses ennemis et les résistances du peuple même.  Il prêche malgré ses ennemis tant qu’il le veut et il se laisse prendre quand il le veut et comme il le veut.  «Je donne ma vie et je la reprends quand je veux», dit-il.  Quand par un mot il étend les soldats qui viennent pour l’arrêter, qu’il guérit l’oreille de Malchus coupée par l’épée de Pierre: c’est de la puissance cela!  Pour le tenir attaché à la colonne de la flagellation, il faut une puissance infinie pour dominer le Tout-Puissant.  C’est l’amour infini qui est plus fort que sa toute-puissance infinie!  C’est parce qu’il veut nous sauver qu’il se fait faible aux mains des pécheurs.  Il veut expier nos péchés et nous avoir avec lui au ciel.  Voilà pourquoi il s’abandonne à ses ennemis.  On sait qu’il faut une certaine force morale pour se laisser piquer par un simple maringouin et d’autant plus qu’il est facile de le chasser et de le tuer.  Eh bien, imaginons la force morale de Jésus qui subit tant de tortures quand il pourrait d’une parole anéantir ses bourreaux!  Jésus montre sa sagesse infinie en nous enseignant l’énormité du péché et les châtiments qu’il mérite en même temps nous méritant la grâce de n’y plus retomber si nous suivons Jésus.  Les faits sont plus éloquents que les paroles.  Ces souffrances de Jésus devraient nous éloigner de tout péché quelque passionnant qu’il puisse être, puisqu’il faut l’expier si cruellement.  Que pouvait-il faire de mieux que de se montrer à nous expiant nos péchés tels qu’ils apparaissent à Dieu.  C’est la bonté infinie et la miséricorde infinie qui traitent Jésus de la sorte; alors les hommes devraient mieux comprendre la gravité des péchés et se déterminer à ne jamais plus en commettre.  Voilà ce que nos jouissances de quelques minutes ont coûté à Jésus qui n’était pas le vrai coupable!  Qu’est-ce que Dieu ne fera pas aux vrais pécheurs qui n’expient pas leurs péchés avant la mort?…
Les hommes sont portés à juger les péchés comme des péchés contre les hommes; ils sont bien indulgents les uns pour les autres; ils excusent facilement les péchés contre la pureté.  De là ils passent facilement à Dieu pour dire qu’il est si bon qu’il aura bien pitié des pécheurs et ils en profitent pour pécher encore plus.  C’est une présomption très dangereuse.  Qu’ils voient donc comment ce Dieu si bon a puni le péché dans son Fils bien-aimé.  Ils ne veulent pas considérer les souffrances de la passion comme trop grandes.  Mais voilà un fait historique d’une punition de Dieu!  Or les vrais pécheurs seront sûrement encore plus punis.  Jésus nous le dit: «Si on traite ainsi le bois vert que ne fera-t-on pas du bois (mort) sec?» La miséricorde divine était pourtant là aussi, mais la justice divine aussi.  Pourquoi tant de prêtres et de fidèles aiment tant à isoler la miséricorde comme si la justice n’était pas là?  C’est l’erreur à l’opposé de celle des Jansénistes; eux ne parlaient que de justice et les modernes ne parlent que de miséricorde; les deux sont dans l’erreur.  On ne sépare pas ces deux attributs de Dieu.  Comme on le voit dans Jésus la justice divine punit comme la miséricorde pardonne.
Quand on sait que tout ce qu’il y a de cruel dans la passion est nécessaire pour enlever la pourriture du péché, on regarde ces souffrances comme celles que cause le chirurgien pour enlever ce qui est pourri en nous.  C’est un mal pour un grand bien et cela lui enlève ce qu’il pourrait avoir d’odieux.  Dans une opération on pense plus à la vie que nous sauvons qu’au membre que nous perdons.  Qu’on fasse de même dans la passion de Jésus; pensons plus à ce qu’il nous mérite qu’à ses seules souffrances.
C’est à force de nous arrêter au point de vue divin que nous arriverons à nous affectionner à cette contemplation si utile pour la vie spirituelle.  Les saints y revenaient constamment et toujours avec plus de profit surnaturel.  Le secret est de ressembler à Jésus autant que possible.  Mieux on accepte les croix que Dieu nous envoie et plus nous pouvons comprendre le coeur de Jésus dans les souffrances et sympathiser avec lui.  Or c’est quand on commence à sympathiser avec lui qu’il manifeste aussi son amour et alors on est heureux de s’associer à ses souffrances par la contemplation de sa passion.  Quand on a passé par une opération chirurgicale difficile et dangereuse on est bien plus intéressé à la même opération dans un autre; on sympathise tout de suite avec lui.  On se comprend mieux.  Il en sera de même quand on aura souffert avec Jésus et pour lui, on comprendra bien mieux sa passion et on entrera plus facilement dans les secrets de son amour pour nous, parce qu’il nous voit intéressés à ses souffrances.
La flagellation.  Le tourment de la flagellation. 
Ce supplice eut lieu dans la cour du prétoire pavé de grandes pierres de deux pieds par trois que l’on voit encore autour et sous le couvent des Soeurs de Lion.  En 1938, en mars j’avais l’honneur et le bonheur de dire la messe à cet endroit, d’offrir le sang de Jésus où le sien a coulé réellement.
Ce supplice était tout ce qu’il y a de plus infamant, en même temps que de plus douloureux.  Dans les pénitenciers où l’on donne parfois le fouet, on en donne seulement dix coups à la fois, parce que peu d’hommes sont capables d’en endurer plus sans perdre connaissance.  Pourtant ils sont donnés par des hommes qui n’ont pas de haine contre la victime et même beaucoup de pitié.  D’après le suaire de Turin dont l’authenticité est admise par Pie XI et la plupart des critiques, les plaies, après avoir été agrandies, semblent faites par des espèces de petites haltères grosses comme des gros pois et l’on en compte quatre-vingt à part des autres.  Jusqu’à 1930 à peu près on ne connaissait que le négatif du portrait laissé par Jésus sur la toile.  Mais en le photographiant on a eu un positif qui se trouve un vrai portrait de Jésus tel qu’il paraissait sur le suaire.  C’est un vrai miracle de la Providence qui a voulu nous laisser une bonne ressemblance de Jésus après sa mort.  Il n’y a pas un artiste au monde qui aurait pu faire cela.

En tout cas avec ce que le prophète dit qu’on pouvait lui compter tous les os, le suaire peut nous aider beaucoup à faire une bonne méditation de la flagellation, qui a été très cruelle.  Pilate voulait apitoyer ces tigres, on peut imaginer comme il a été labouré par les coups de lanières avec ces billes au bout.
D’abord on commence par lui enlever tous ses habits de sorte qu’il était nu devant toute cette foule avide d’un pareil spectacle.  Puis on lui attacha les deux mains à une colonne.  Etait-elle plus basse que lui pour qu’il ait le dos courbé et que les coups frappent mieux, ou était-elle haute pour qu’il ait les bras attachés au-dessus de la tête.  Les coups qui paraissent sur la poitrine du portrait sur le suaire de Turin semblent favoriser la dernière posture.  Peu importe pour ce détail.  Que chacun prenne ce qui lui semble le plus vrai.  Deux soldats se placent de chaque côté et le frappent de toutes leurs forces encouragés par les juifs.  C’étaient de vrais brutes comme on peut le voir par leur manière de traiter Jésus aussitôt qu’il fut condamné par les prêtres.
A chaque coup la chair se tuméfiait, il se formait des bourrelets violets et le sang coulait… il frémit… se tord de douleur… il gémit… il pleure… il se lamente à son Père.  S’il avait eu les mains attachées à une basse colonne, il se serait écrasé par terre et ils n’auraient pu le battre à leur goût.  Dans les cachots de la maison de Caïphe on voit que les mains des esclaves et des prisonniers étaient attachées en haut pour qu’ils aient tout le corps bien exposé aux coups.  Pendu à cette colonne, il ne peut se défendre d’aucun coup.  Il a des blessures de la tête aux pieds.
On ne sait pas combien de temps elle a duré, mais c’était assez pour le faire mourir si le divin ne l’avait pas soutenu.  Ils se sont arrêtés quand ils virent qu’il était pour expirer afin de le réserver pour le supplice de la croix, encore plus humiliant.  Voilà donc pour la partie sensible et matérielle pour ainsi dire.  Du sensible allons maintenant à l’invisible ou aux souffrances de Jésus.  Au point de vue physique qui peut se faire une idée de ces tortures?  Ceux qui se sont déjà donné la discipline peuvent s’en faire une idée en proportion qu’ils ont eu bon bras pour se frapper eux-mêmes.  Les saints ont en général employé ce moyen de se mortifier pour imiter Jésus qui a voulu librement subir ce châtiment du fouet.  Tous les chrétiens devraient user de ce moyen facile d’expier une partie de leurs péchés et de s’attirer des grâces de Dieu.  En voyant Jésus se tordre de douleur, essayons de pénétrer dans son âme pour sympathiser avec lui.  Demandons-lui le pardon de nos péchés, surtout de la chair, en pensées, en désirs et en actes.  Promettons-lui de ne plus jamais l’offenser et de l’aimer assez pour compenser nos offenses.  Si le coeur n’est pas ému avec Jésus qu’on fasse des actes d’humilité d’avoir si peu de foi et encore moins d’amour pour lui.  Comme des parents regardent agoniser leur fils qu’ils aiment, regardons Jésus agoniser sous les coups de lanières qui déchirent son corps et le torturent épouvantablement.
Cette flagellation n’est qu’un échantillon de ce que nous aurons pour nos péchés sinon en ce monde au moins dans l’autre.  Le purgatoire est du feu et tous les péchés non expiés ici-bas le seront là avant d’entrer au ciel.  Qu’on imagine la fureur des démons en enfer contre les membres de Jésus quand Dieu leur abandonnera les pécheurs pour être torturés non pas pendant quelques minutes ou quelques heures comme Jésus, mais pendant toute l’éternité.  Mieux vaut donc imiter Jésus fouetté en ce monde que d’aller tout expier dans l’autre.  Qu’on prenne une bonne résolution de souffrir n’importe quelle tentation ou privation de jouissances défendues plutôt que de pécher et de mériter un pareil supplice; qu’on se fasse souffrir d’une manière ou d’une autre comme tous les saints l’ont fait à la suite de Jésus.
Motifs de Jésus.  Le premier est de satisfaire à son Père.  Il faut à tout prix que la justice divine soit satisfaite par un châtiment adéquat.  Un Dieu-homme seul pouvait le faire; en tant qu’homme il pouvait souffrir et en tant que Dieu son mérite était infini.  Jésus offre donc toutes ses souffrances pour cette fin.  C’est parce que nous sommes appelés à aller participer à la vie intime de la Trinité que Dieu est si exigeant sur la réparation de l’offense du péché.  Là il ne peut y avoir l’ombre même de péché ou de toute dette envers la justice divine.  Que les prédicateurs de la seule miséricorde divine réfléchissent bien sur la flagellation.  Est-ce que ce n’est pas la justice divine qui s’exerce là comme dans les autres tourments de la passion?  Est-ce que Dieu a un autre plan de réparation pour nous?  Pas du tout.  Nous sommes les membres de Jésus et nous aurons le même traitement que lui et même d’après Jésus encore plus sévère comme il le dit aux filles de Jérusalem: «Si on traite le bois vert de cette manière que ne fera-t-on pas au bois sec?»
Commençons donc tous par satisfaire la justice de Dieu et ensuite nous pourrons espérer en la miséricorde divine.  C’est absurde, c’est de la présomption que de compter sur la miséricorde sans vouloir satisfaire la justice divine.  Les protestants soutiennent que Jésus a assez souffert pour que nous n’ayons plus à souffrir.  Ce n’est pas le sens et ce n’est pas vrai.  Tout ce que les souffrances de Jésus font c’est de nous obtenir que les nôtres soient acceptées par Dieu à cause de celles de Jésus.  Tant que nous n’avons pas souffert pour nos péchés, il manque encore quelque chose à la passion de Jésus, comme le dit St-Paul.  Les prêtres ne devraient pas avoir peur de demander aux fidèles de s’imposer des pénitences volontaires; porter la croix est un art qui s’acquiert par la répétition des actes.  Les Apôtres et les Saints s’ingéniaient pour se faire souffrir de toutes sortes de façons afin d’expier leurs péchés et de ressembler davantage à Jésus qui a subi sa passion librement et volontairement.  Notre amour pour nous est ce qui détermine Jésus à vouloir satisfaire son Père.  Il veut tellement nous avoir avec lui dans la vision béatifique qu’il est prêt à endurer ce supplice et les autres que la justice divine peut exiger pour cette fin.  St-Jean dit que Jésus nous a aimés jusqu’à la limite du possible et c’est dans sa passion qu’il nous montre cet amour sans limite.  Cette constatation ne suffit pas pour nous enflammer d’amour de Dieu, mais elle nous montre au moins notre divin idéal.  Car nous devons l’aimer comme il nous a aimés; il est bon de considérer un peu jusqu’où il est allé dans son amour pour nous.  Comme St-Jean dit: il nous faut aller jusqu’à donner notre vie pour Jésus comme il a donné la sienne pour nous.  Donc il nous faut souffrir comme lui.  Personne ne peut aimer Jésus sans le montrer par sa pénitence pour ses péchés: tout le reste ne peut être que des mots et des illusions.  Nos protestations d’amour ne vont pas loin si elles ne sont pas appuyées sur la mortification réelle et concrète.  La genèse de l’amour n’est pas comme celle des idées, surtout l’amour de Dieu.  N’oublions pas que c’est en proportion qu’on se débarrasse de nos deux amours naturels pour les créatures et pour nous-mêmes que l’amour de Dieu viendra prendre la place laissée par ces deux amours.  Par conséquent c’est parfaitement inutile d’essayer ou de croire aimer Dieu sans la mortification et sans le renoncement à soi-même.  L’amour de Dieu est aussi impossible sans cela que la récolte sans semailles.  Or Jésus dans sa passion nous donne des échantillons de tous les genres de souffrances qu’il veut pour nous d’une façon ou d’une autre.  Voilà pourquoi il est important de considérer attentivement les différentes souffrances de Jésus.  On comprend maintenant qu’un prêtre ne peut pas facilement donner des considérations qui vont enflammer les autres pour l’amour de Dieu.  L’amour ne se transmet pas comme les idées.  Tout de même il est bon de faire ces considérations afin de disposer le coeur au moins à faire des sacrifices pour l’amour de Jésus et après cela l’amour divin viendra dans nos coeurs dans la même proportion qu’on se renonce.  Le prédicateur, comme certains livres, ont beau faire des actes d’amour de Dieu où s’exclamer sur notre insouciance, notre ingratitude, ou se répandre dans des exclamations d’amour, tout cela nous laisse froid.  Ce n’est pas la façon de susciter l’amour de Dieu.  Jamais on ne l’aura réellement si on n’attaque pas les deux amours naturels.  Eh bien notre modèle est bien Jésus qui les a tués parfaitement en lui-même et qui veut que nous fassions de même en nous.  Après la mortification et le renoncement qui enlèvent les obstacles positifs à l’amour de Dieu, il faut encore désirer ardemment le surnaturel; le divin veut être désiré et aimé avant de se donner.  Donc il faut prier longtemps et le vouloir de tout son coeur et le montrer par la persévérance dans la prière et dans ces désirs intenses de l’amour de Dieu.  C’est alors que le St-Esprit viendra produire en nous une augmentation d’amour.
Qu’on sache donc une bonne fois que l’amour de Dieu s’achète aux dépens des créatures captivantes ou se récolte par celles que l’on sème.  Tout autre façon est miraculeuse et exceptionnelle; on ne peut pas compter sur des miracles pour arriver au ciel.  Défions-nous des belles prières que l’on fait et des protestations d’amour que l’on lit dans les livres; tout cela est bon mais ne suffit pas.  Si ces bons sentiments ne nous poussent pas au sacrifice de nos deux amours naturels, ils sont vains.  «Ce ne sont pas ceux qui disent: Seigneur Seigneur!  qui entreront dans le royaume des cieux, mais ceux qui font la volonté de mon Père céleste.» Or cette volonté est que nous devons expier nos péchés par la pénitence concrète… pas seulement intérieure, ni seulement extérieure, mais par les deux ensemble.  Les sentiments de Jésus sont encore plus importants pour nous que ses souffrances physiques et nous devons essayer de monter jusque là avec ce que l’Ecriture nous dit des sentiments du Juste qui souffre.  On sait que les gémissements des prophètes et du psalmiste sont l’expression de l’humanité en général et donc celle de Jésus et par suite devraient être les nôtres dans nos tribulations.  On les trouve exprimés un peu partout dans ces écrits inspirés.
Ps.  31: «Aie pitié de moi, Yahweh, car je suis dans la détresse; mon oeil est usé par le chagrin ainsi que mon âme et mes entrailles.  Ma vie se consume dans la douleur et mes années dans les gémissements.  Ma force est épuisée à cause de mon iniquité et mes os dépérissent.  Tous mes adversaires m’ont rendu un objet d’opprobre, un fardeau pour mes voisins, un objet d’effroi pour mes amis.  Ceux qui me voient dehors s’enfuient loin de moi.  Je suis en oubli; comme un mort, loin des coeurs.  Je suis comme un vase brisé, car j’ai appris les mauvais propos de la foule, l’épouvante qui règne à l’entour, pendant qu’ils tiennent conseil contre moi, ils ourdissent des complots pour m’ôter la vie.  fit moi je me confie en toi Yahweh…etc.» Voilà quelques plaintes de l’humanité souffrante résumée en Jésus; tous les élus doivent y passer!  Mais après ces gémissements, il faut se réfugier dans la confiance en Dieu comme le Juste le fait ici.  Ps.  37.  Vulg.  Ce psaume est plein de ces gémissements.  «Yahweh ne me punis pas dans ta colère… il n’y a rien de sain dans ma chair à cause de ta colère, mes meurtrissures sont infectes et purulentes… Je suis courbé, abattu à l’excès, tout le jour je marche dans le deuil.  Un mal brûlant dévore mes reins et il n’y a rien de sain dans ma chair.  Je suis sans force, brisé outre mesure, le trouble de mon coeur m’arrache des gémissements; Seigneur, tous mes désirs sont devant toi et mes soupirs ne te sont pas cachés. 
Mon coeur palpite, ma force m’abandonne et la lumière de mes yeux n’est plus avec moi… c’est en toi, Yahweh que j’espère.»
Ps.  128 Vulg.  «Ils ont labouré mon dos, ils y ont tracé de longs sillons.  Mais Yahweh est juste, il a coupé les liens des méchants.» Les sentiments des lamentations de Jérémie peuvent s’appliquer à Jésus, par exemple, 3: «Je suis l’homme qui a vu l’affliction sous la verge de sa fureur; il m’a conduit et m’a fait marcher dans les ténèbres et non dans la lumière, contre moi seul il tourne et retourne sa main tout le jour.  Il a usé ma chair et ma peau, il a brisé mes os.  Il a bâti contre moi, il m’a environné d’amertume et d’ennui.  Il m’a fait habiter dans les ténèbres comme ceux qui sont morts depuis longtemps.» Plusieurs passages de Job reflètent les sentiments de l’humanité souffrante et donc celle de Jésus.
Dans nos peines et dans nos misères nous devrions aller chercher dans les psaumes et les prophètes leurs sentiments et leurs expressions pour répandre devant Dieu notre douleur.  Ces paroles et ces sentiments sont inspirés par le St-Esprit et par conséquent sont plus agréables à Dieu.  Plusieurs vont dire qu’ils n’ont pas ces angoisses de l’âme dont on parle ici.  Peutêtre.  Mais pourquoi?  c’est qu’ils commettent n’importe quel péché plutôt que de souffrir la moindre privation.  Mais ceux qui ne veulent pas à aucun prix offenser Dieu, c’est extrêmement difficile et angoissant de rester ferme.  On dirait que Dieu en profite quand il sait que nous allons endurer plutôt que de l’offenser.  Une tentation suit une autre et toujours plus forte, une épreuve suit l’autre, et l’autre.  On est porté à lui dire: Allez-vous débarquer de sur mon dos?  Que vous ai-je fait pour que vous soyez toujours contre moi?  Et toutes les plaintes des prophètes et des psaumes y passent tant cela est pénible à la longue.
Soumission à son Père.  A travers toutes ses plaintes et ses gémissements une chose reste inébranlable dans son âme, c’est sa parfaite soumission à son Père: le «que votre volonté soit faite et non la mienne» de son agonie est le refrain continuel de sa volonté humaine.  Il sait que le Père est offensé par toutes les désobéissances depuis celle d’Adam et Eve et il va les expier par son obéissance absolument parfaite.  Imitons-le dans nos épreuves à travers nos gémissements et nos douleurs intérieures, répétons ce refrain de Jésus: «Que votre volonté soit faite et non la mienne.» Là est le mérite.  Mais comme c’est pénible d’aller contre toutes les tendances de la nature!  Comme il faut de la foi pour que ces directives l’emportent sur les répugnances si fortes de la nature.  Mais la grâce de Dieu est capable de le faire si nous la demandons à Dieu habituellement dans de ferventes prières.  Le secret est de s’exercer dans les petites croix de chaque jour, autrement on ne pourra pas résister dans les grandes tentations de la vie.  Or ce sont ces grands examens de la vie spirituelle qui décident de notre salut éternel.  Préparons-nous par des exercices quotidiens que Dieu nous présente dans la vie ordinaire de tout chrétien.

Confiance en Dieu. 
Les psaumes et les prophètes sont pleins de ces expressions de confiance en Dieu.  Jésus plaide avec son Père; il lui rappelle tout ce qu’il a fait pour les patriarches et pour sa nation en général afin de le toucher davantage.  C’est un moyen que nous devrions tous employer dans nos prières.  Quand on rappelle à Dieu ce qu’il a fait pour d’autres on lui donne une gloire très sensible.  Dieu se dit: S’il remarque ce que j’ai fait pour d’autres, il me donnera bien de la gloire pour ce que je ferai pour lui.  Et il est plus porté à nous exaucer.  Judith, Daniel, Moïse et David s’en servent très souvent comme on peut le voir en lisant leurs écrits.  J’insiste sur cette idée car elle n’est pas du tout dans nos moeurs.  Nous ne voyons que notre petite personnalité et nous oublions ce que Dieu a fait aux autres.  Dieu veut que nous le glorifions pour tout ce qu’il fait dans le monde: il n’aime pas l’égoïsme étroit qui ne pense qu’à soi.
Il n’est pas probable que nous soyons fouettés comme Jésus l’a été.  Mais la divine Providence nous les donne séparément dans toutes ces petites croix qui se présentent tous les jours; essayons de les prendre comme les disciples d’un Sauveur flagellé si cruellement et chaque fois mettons notre confiance en lui pour qu’il nous pardonne nos péchés.  Ne les offrons pas d’une façon vague, mais d’abord pour nous-mêmes, puis pour tous les pécheurs du monde exactement comme Jésus a fait.  Au lieu de s’impatienter contre les choses et les personnes à l’avenir qu’on fasse des actes de conformité à la volonté divine et de confiance en Dieu qu’il nous pardonnera nos péchés puisqu’il nous fait participer à la flagellation de Jésus d’une certaine façon.  C’est quand nous commençons à endurer pour l’amour de Dieu les coups de la Providence que nous pouvons dire que nous commençons à aimer Dieu véritablement et que nous suivons Jésus-Christ de fait.  Au lieu de trouver à redire contre les croix, acceptons-les comme Jésus.


Dans ces méditations sur la passion, ne manquons pas de prier beaucoup la Sainte Vierge qui a le mieux compris l’intérieur de Jésus et qui a le mieux sympathisé avec lui et qui a le plus souffert intérieurement.  Le St-Esprit l’exige pour nous donner une augmentation de la vie de Jésus en nous.  Ayons une grande dévotion à ses sept douleurs où elle montre son immense amour pour Dieu en se soumettant parfaitement à ces croix bien pénibles pour elle.