«
On voudrait se redire avec tant de douceur et de justesse les paroles de
vérité, les simples paroles de la doctrine surnaturelle apprises au catéchisme,
que l’on n’ajoute pas encore au mal mais plutôt que l’on se laisse profondément
persuader par l’enseignement de la révélation, que Rome, un jour, sera guérie;
que l’église apparente bientôt sera démasquée d’autorité. Aussitôt elle tombera
en poussière, car sa principale force vient de ce que son mensonge intrinsèque
passe pour la vérité, n’étant jamais effectivement désavouée d’en haut. »[i]
Voilà
l’espérance que le R.P. Calmel avait au cœur : un jour l’église apparente
démasquée d’autorité tombera en poussière et Rome alors sera guérie.
Mais
l’église apparente ne tombera pas en poussière comme par enchantement. Pour le
Révérend Père, cette intruse, qui occupe et occulte l’Église réelle, tombera en
poussière le jour où elle aura été « démasquée d’autorité ». Aussi longtemps
qu’on s’y refusera, aussi longtemps qu’on laissera « son mensonge intrinsèque passer
pour la vérité », l’église apparente continuera à prospérer et à occulter
l’Église réelle « car sa principale force vient de ce que son mensonge
intrinsèque passe pour la vérité, n’étant jamais effectivement désavoué d’en
haut ».
L’
«église apparente » ! C’est celle qui apparaît, celle qui se présente comme
étant l’Église catholique et que le monde tient pour telle. C’est l’ «église
conciliaire », l’organisme installé à Rome aux lieux et place de l’Église
véritable. Le Père Calmel l’appelle « église apparente », surtout pour rappeler
qu’elle n’est pas l’Église et que, n’étant pas l’Église du Christ, on ne devait
pas les confondre. C’est en cela que consiste son mensonge intrinsèque.
Un
mensonge, tout le monde le sait, c’est une affirmation contraire à la vérité.
Le mensonge intrinsèque de l’église apparente, c’est qu’elle se dit l’Eglise de
Jésus-Christ alors qu’intrinsèquement, dans son être même, dans sa réalité
profonde, aux yeux de Dieu et au regard de la foi, elle ne l’est pas.
Convaincu
que la principale force de l’église apparente lui vient du fait que ce mensonge
intrinsèque passe pour la vérité, le Révérend Père espère que bientôt elle sera
« démasquée d’autorité ».
L’autorité
est une participation au domaine de Dieu sur ses créatures. Lui seul peut l’accorder.
Voilà pourquoi l’Apôtre est si formel : « Il n’y a pas d’autorité qui ne
vienne de Dieu « (Rom, XIII, 1). Qui ne comprend dès lors que Dieu ne peut en
aucune façon avoir délégué ses droits, son pouvoir, son domaine à cet organisme
qui ne possède de l’Eglise de son Fils que des apparences trompeuses.
L’autorité
de la nouvelle église est une autorité factice, une autorité d’emprunt, « un
masque d’autorité ».
La
démasquer d’autorité, c’est lui enlever ce masque sous lequel elle se cache; c’est
la montrer telle qu’elle est dans la réalité, devant Dieu, un néant.
La
démasquer d’autorité, c’est aussi expliquer, faire comprendre et proclamer à
temps et à contre-temps, que cette église n’ayant aucune autorité, les
doctrines qu’elle enseigne, les décisions qu’elle prend, les changements qu’elle
fait, les nouveautés qu’elle promulgue, les sanctions qu’elle porte, tout est
nul et sans valeur.
La
démasquer d’autorité, c’est enfin « rappeler à temps et à contretemps, mais
toujours en instruisant » (II Tim. IV, 2), en quoi elle n’est pas l’Eglise et
ne possède de l’Epouse du Christ que les apparences qu’elle se donne. L’Eglise
du Christ, c’est « la maison de Dieu. C’est la colonne et le fondement de la
vérité » (Eph. II, 19. I Tim. III, 15). La nouvelle église n’est rien de tout
cela.
C’est
parce qu’elle n’est rien de tout cela que l’autorité dont elle se prévaut n’est
qu’un maque derrière lequel elle dissimule sa nullité. Voilà pourquoi le
Révérend Père Calmel assure que « démasquée d’autorité, cette église apparente
tombera aussitôt en poussière, car sa principale force vient de ce que son
mensonge intrinsèque passe pour la vérité. »
Vous
avez bien lu, sa force principale, je dirais sa force tout court, ce qui lui
permet de se maintenir, de durer, de continuer à occuper abusivement et d’occulter
totalement la véritable Eglise, c’est que « son mensonge intrinsèque passe pour
la vérité.»
Le
mensonge intrinsèque de l’église apparente, je l’ai expliqué plus haut. Il me
suffit d’ajouter qu’il constitue une véritable imposture, une mystification
sans précédent. Voilà plus de vingt ans qu’il dure; voilà plus de vingt ans que
l’église apparente occulte l’Eglise réelle et trompe le monde entier. Voilà
plus de vingt ans que cette effrontée, sans se gêner, trafique ouvertement la
doctrine. Il n’est pas d’hérétique qu’elle n’ait excusé, pas de dogme dont elle
ne laisse remettre en question la vérité définitive. Et, comble de
scélératesse, voilà plus de vingt ans que cette impudente a si complètement
médusé les meilleurs fils de l’Eglise, qu’elle est arrivée à faire commettre
tous ses sacrilèges par des âmes consacrées! Comment expliquer ce mystère d’iniquité?
Le
Père Calmel nous l’a dit. Le mensonge intrinsèque perdure parce que jamais il n’a
été « effectivement désavoué d’en haut ». Le jour où il le sera, l’église
apparente s’écroulera, elle tombera en poussière.
Mais,
demanderont certains, n’a-t-il pas déjà été désavoué? Ne l’avez-vous pas
dénoncé, vous, Père Barbara, dans vos sermons du dimanche, dans vos
conférences, dans votre revue et jusqu’à la radio? Et Mgr Lefebvre, avec les
prêtres de sa Fraternité et tous ceux qui les soutiennent dans leur combat ne l’ont-ils
pas dénoncé aussi? L’église apparente n’en est pas tombée en poussière pour
cela; elle occupe encore la véritable Église, se fait toujours passer pour l’Epouse
et, plus que jamais, se pare de son autorité.
Oui,
ayant compris l’imposture de l’église apparente, Dieu m’a fait la grâce de la
dénoncer jusqu’à Rome[ii].
Mais, simple prêtre, ma dénonciation n’était pas un « désaveu d’en haut ».
Seuls, les successeurs des Apôtres, les évêques, détiennent cette autorité.
Seuls, ils peuvent « désavouer d’en haut » le mensonge intrinsèque de l’église
apparente. Malheureusement, ni Mgr Lefebvre, ni Mgr de Castro Mayer, ni aucun
prélat catholique ne l’a encore fait.
Sans
doute, Mgr. Lefebvre et ceux qui le soutiennent ont vivement attaqué l’église
apparente et lui ont résisté publiqueemnt. Mais jamais ils n’ont accepté de la
« démasquer d’autorité ». Que dis-je! Non seulement, ils ne l’ont pas démasquée
d’autorité mais, sur ce point précis, Mgr Lefebvre lui a apporté le concours le
plus inespéré que cette intruse pouvait attendre de ses meilleurs auxiliaires,
il a reconnu son autorité et a pris publiquement son parti. Bien mieux, il a
fait savoir qu’il se séparait de ceux qui niaient toute validité à la synaxe de
l’église apparente, ou qui refusaient de célébrer la messe catholique « una cum
», en union avec Jean-Paul II.
Oui,
Mgr Lefebvre a fait cela. Il l’a fait dans une déclaration officielle qu’il a
diffusée autant qu’il a pu[iii].
Lorsque
le R.P. Calmel voulait « que l’on se laisse profondément persuader par l’enseignement
de la révélation, que Rome, un jour sera guérie; que l’église apparente tombera en poussière », il ne pensait, ni ne
disait que cela arriverait à condition de résister et d’oser braver
publiquement les autorités installées. Mieux que nous il savait que jamais la
révélation n’avait enseigné pareil scandale. Lui qui l’avait bien étudiée,
savait que « toute autorité vient de Dieu et que résister aux autorités, c’est
résister à Dieu qui les a établies, et c’est attirer sur soi la condamnation »
(Rom. XIII, 1-2). Mais il savait aussi que les loups excellent à se couvrir de
vêtement de brebis. Voilà pourquoi il avait affirmé que Rome serait guérit le
jour où l’église apparente serait démasqué d’autorité, le jour où l’on aurait
arraché au loup la peau de brebis, le jour où le mensonge intrinsèque de l’église
apparente aurait été désavoué d’en haut. Ce jour-là, oui, l’intruse tombera en
poussière. Mais ce jour-là n’est pas encore arrivé.
Quelle
que soit la vénération qu’on peut avoir pour Mgr Lefebvre, elle ne change pas
la réalité et la réalité est que cet évêque, à qui Dieu a fait la grâce de
comprendre l’imposture de l’église apparente, ne l’a pas encore démasquée d’autorité,
pas plus du reste qu’il n’a démasqué son chef, Jean-Paul II.
A
ce jour, Mgr Lefebvre a préféré nier l’évidence et s’installer dans l’incohérence
la plus complète et la plus opposée à l’enseignement de la révélation. Il a
choisi de dire n’importe quoi[iv]
plutôt que de démasquer d'autorité l’église apparente et son chef.
Car,
ne nous y trompons pas, démasquer d’autorité l’église apparente c’est surtout
démasquer d’autorité son chef; c’est lui enlever le vêtement de brebis dont il
se couvre. C’est expliquer et proclamer que son autorité est une autorité
factice, une autorité usurpée. En fait, devant Dieu, il n’a pas d’autorité. Et
il n’en a pas parce qu’il n’est pas Vicaire du Christ, lui qui enseigne
officiellement des erreurs condamnées par l’Eglise. A lui aussi, la force
principale vient de ce que son mensonge intrinsèque passe pour la vérité. Son
mensonge intrinsèque, c’est qu’il se présente comme Vicaire du Christ alors qu’il
ne l’est pas. Le démasquer d’autorité, c’est donc faire comprendre qu’il n’a du
pape que l’apparence que lui donnent son élection et son installation sur le
Siège de Pierre. Ce n’est que dans la mesure où un vrai successeur des Apôtres
fera comprendre aux fidèles que le « pape » de l’église apparente n’est pas le
Vicaire du Christ, que le Christ ne l’a pas revêtu de son autorité, qu’on l’aura
démasqué d’autorité. Alors, mais alors seulement, on verra se réaliser la
prédiction du Père Calmel. Démasqués d’autorité, désavoués d’en haut, l’église
apparente et son chef tomberont en poussière et la Rome éternelle sera guérie.
Forts
dans la Foi, 1er trimestre 1990, 9/10
[i]
R.P. R.-Th Calmel, o.p. Itinéraires n°173, mai 1973, p.79-80.
[ii] Le
19 novembre 1976, j’avais tenu à Rome une conférence de presse internationale
au cours de laquelle j’avais dénoncé l’hérésie, le schisme et l’apostasie de
Paul VI. Le lendemain, plus de dix-neuf quotidiens italiens en avaient rendu
compte, certains, en première page et sur plusieurs colonnes.
[iii]
Position de Mgr Lefebvre sur la nouvelle messe et le pape. « Mgr Lefebvre nous
demande de faire connaître la synthèse de sa position sur ce qu’il a écrit et
dit au sujet de deux problèmes qui agitent les conscience des catholiques
fidèles à la Tradition, la validité du n.o.m. et l’existence actuelle d’un pape…
En conséquence, la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X des pères, des frères,
des sœurs, des oblates ne peut pas tolérer dans son sein de membres qui
refusent de prier pour le pape et qui affirment que toutes les messes du nouvel
ordo missae sont invalides. » Fideliter
n°13, février 1980, d’après Cor unum, novembre 1979. Cette déclaration,
reproduite par tous les bulletins de la Fraternité et des chapelles qui sont
dans sa mouvance, a été éditée en tract et distribuée à plus de dix mille
exemplaires rien qu’à Saint-Nicolas-du-Chardonnet.
[iv]
Monseigneur est allé jusqu’à faire croire que le Christ avait doté l’Eglise d’un
chef visible « à mi-temps », tantôt «Vicaire du Christ », tantôt « antichrist
».
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