vendredi 19 février 2016

Instruction sur la pénitence du carême - Abbé Ballet


INSTRUCTIONS
SUR LA PÉNITENCE DU CARÊME,
TIRÉES DE L'ÉCRITURE, DES CONCILES ET DES PÈRES

Chapitre XLIV

Le déchet de la sainte pénitence du carême qui nous afflige aujourd’hui, est une suite du déchet de la foi.

Pour peu qu’on réfléchisse sur l’antiquité de la pénitence du carême, qu’on fasse attention à l’autorité de ceux qui l’ont établie, aux témoignages de ceux qui en ont parlé, à la ferveurs des chrétiens qui l’ont observés si religieusement pendant une longue suite de siècles, à l’esprit de l’Eglise qui n’a jamais varié sur l’essence de cette sainte pratique, et à la solennité avec laquelle elle annonce encore aujourd’hui ces jours de jeûne et d’abstinence; on aperçoit un déchet déplorable de la foi : on ne trouve plus aucune conformité avec celle de nos pères.

La plus vénérable antiquité, les traditions apostoliques, les lois de l’Eglise, la soumission de ses enfants, tout est critiqué, censuré, blâmé aujourd’hui.

Or d’où vient ce mépris? Quelle est la source de cette révolte, de ces désobéissances, de ces transgressions publiques? L’irréligion de notre siècle, les funestes progrès de l’incrédulité, les coupables productions de certains savants superbes, sans religion.

L’esprit a voulu régner, briller; ses sacrilèges efforts ont séduit, on les a admirés; la simplicité de la foi a déplu, parce qu’elle humilie l’orgueilleuse raison de l’homme. On n’a pas redouté les écrits des savants incrédules, on les a lus, ils se sont débités, ils ont même reçu des applaudissements. De là des doutes sur les plus grandes vérités, ensuite des désaveux solennels des faits les plus graves les mieux attestés; enfin, les progrès du déisme, du matérialisme, et de tous les systèmes qui s’accommodent aux penchants, aux passions du cœur humain.

On gémit aujourd’hui de ces funestes progrès, on aperçoit le danger pour la foi dans ce royaume : ce ne sont pas seulement certains savants, certains mondains distingués, mais ce sont des chrétiens de tous les états qui ont été séduits, qui méprisent la simplicité de la foi, que ses saintes obscurités révoltent, qui critiquent et raillent les lois, les pratiques de l’Eglise les plus sacrées.

Des libelles impies passés de main en main à la faveur des ténèbres ont corrompu tous les cœurs et séduit tous les esprits.

Le chrétien fidèle redoute la compagnie des autres chrétiens, parce qu’armées des anecdotes scandaleuses, des réflexions libertines, des décisions téméraires d’un savant accrédité, on raille, on combat, on nie même les dogmes de la religion dans un cercle, à une table; toutes les vérités de la foi semblent n’être plus aujourd’hui que des problèmes dans la bouche des enfants du siècle : Diminuatae sunt veritates a filiis hominum : (Psal. XI.)

Or il n’est pas douteux que cet esprit d’irréligion si accrédité, est aujourd’hui la cause de ce déchet déplorable de la pénitence du carême, qui nous afflige : qu’on y fasse attention, il a augmenté à mesure que l’incrédulité a fait des progrès.

Remontons aux premiers siècles de l’Eglise, ces temps où la foi était si vive, si soumise. Nous y verrons la pénitence du carême pratiquée avec une rigueur qui nous étonne, et dont nous nous croyons incapables.

Les jeûnes et les abstinences de la quarantaine étaient regardés comme des préceptes dont on ne pouvait pas se dispenser sans s’exposer à la damnation, sans manquer au respect dû à une institution apostolique, à une loi sacrée de l’Eglise, parce que les fidèles étaient animés de cette foi qui ne sait pas disputer, mais se soumettre et mourir même pour la doctrine du Sauveur. Ils étaient tous dans ce saint temps, sans distinction, des pénitents sincères.

Pendant douze cents ans, la pénitence du carême a été observée avec cette sévérité que nous nous contentons d’admirer. Pourquoi? Parce que la foi était plus vive, plus soumise; parce qu’on ne s’érigeait pas audacieusement en censeurs des lois de l’Eglise, qu’on ne lui disputait pas son autorité.
Ensuite se sont introduits les adoucissements dans les grands jeûnes, que la tendresse de l’Eglise a tolérés; mais les chrétiens, en profitant de ces adoucissements, pratiquaient avec respect le jeûne et l’abstinence, il fallait encore une infirmité réelle pour se dispenser du jeûne ou de l’abstinence, et l’on peut dire que ce mépris scandaleux de la pénitence du carême n’a fait ces progrès étonnants qui nous affligent, que dans notre siècle où l’on se pique tant d’esprit et de lumières.

Il n’y a pas longtemps que les infracteurs de la loi du carême ne se cachent plus, qu’ils s’applaudissent hautement, et tournent en ridicule ceux qui ne les imitent pas. D’année en année, le nombre des pénitents diminue : le carême n’est presque plus rien aujourd’hui : je n’en suis pas étonné, ce déchet de la pénitence est une suite du déchet de la foi.

Comment respectera-t-on la loi de l’Eglise? On a répandu sur ses conciles, sur ses décisions les plus solennelles, sur les écrits de ses saints docteurs, des nuages, des obscurités. L’incrédule audacieux défigure, flétrit ses plus beaux siècles par ses sacrilèges subtilités et ses spécieuses objections. Il est écouté, applaudi; on respecte ses découvertes, ses lumières; on lui sait gré de faire tomber le bandeau importun de la foi, et de faire triompher la raison qui était obligée de se taire.

Ah ! il n'est pas étonnant que des hommes de doutes, d'incertitudes, méprisent l'autorité de l'Eglise, lui prêtent des vues de politique, d’intérêt, et se fassent une gloire de leur désobéissance. Ses ennemis ne seront jamais des hommes de foi et de piété.

Nous voyons donc avec douleur, ô mon Dieu! dans ces jours, l'irréligion et la licence des mœurs triompher. L'une est une suite de l'autre : ce déchet de la piété et de la soumission est le fruit de l'erreur accréditée. Rendez, ô mon Dieu! la paix à votre Eglise. Quand elle n'aura plus d'enfants rebelles, elle n'aura plus dans son sein d'infracteurs audacieux de ses préceptes. La pénitence solennelle du carême sera observée comme dans les siècles précédents, où l'on disputait moins, mais où l'on vivait mieux.

CHAPITRE XLV.
     .
Les motifs qui doivent consoler les chrétiens affligés du déchet de la sainte pénitence du carême.

Je le sais, ô chrétiens fidèles et soumis à la sainte pénitence du carême! une douleur amère afflige votre cœur dans ce saint temps. Cette foule d'enfants rebelles qui désobéissent à l'Eglise, qui insultent à son deuil, vous attriste : vous êtes dans la désolation en voyant ce contraste qui étonne nos ennemis. Dans le sein même de l'Eglise, un spectacle de piété, de larmes, de pénitences; un spectacle de plaisirs, de délices, de licences. Notre zèle s'excite, s'alarme comme celui des Moise, des Phinées, des Matathias, à la vue de ces infracteurs de la loi : votre zèle est louable ; mais contentez-vous de prier, de gémir dans la retraite, ou au pied des saints autels : fuyez le commerce de ces chrétiens désobéissants.

C'est dans le saint temps de carême, que l’âme fidèle pourrait dire avec le saint roi d'Israël: Je m'éloigne du monde pendant la sainte quarantaine, je me retire à l'écart ; je me ferai une solitude dans ma maison, je n'en sortirai que pour aller prier et gémir dans le saint temple, et répandre mon Aine affligée devant le Dieu des consolations : Elongavi fugiens, et mansi in solitudine. (Psal. LIV.) Pourquoi? Parce que je vois régner partout, dans ce saint temps, l'iniquité et la contradiction : Quoniam vidi iniquitatem et contradictionem in civitate. (Ibid.)

Je vois dans une ville chrétienne des hommes 'qui se font gloire des péchés qu'ils commettent; qui accréditent par leurs exemples la désobéissance aux plus saintes lois ; je vois une contradiction dans ceux qui professent la même foi, qui m'ébranlerait si l’Evangile ne m'apprenait pas que le nombre des élus est petit.

Des chrétiens fidèles jeûnent, se mortifient; les offices sont plus longs, les exhortations plus fréquentes : on s'efforce de toucher le Seigneur par sa douleur et ses gémissements, et tous les autres chrétiens se délicatent, s'engraissent, se livrent aux plaisirs, vont aux spectacles, et désavouent publiquement la nécessité de cette pénitence : Vidi iniquitatem et contradictionem incivitate. Ah! je ne porterai pas nies yeux sur ce monde d'infracteurs; je le fuirai pour me consoler avec le troupeau fidèle qui obéit à l’Eglise.

La première réflexion qui doit vous rassurer et vous consoler, âmes fidèles, dans ce déchet déplorable de la sainte pénitence du carême, c'est l'esprit de l'Eglise qui est -toujours le même. Elle a combattu clans tous les siècles et la doctrine des hérétiques et le relâchement de ses enfants sur la pénitence du carême. Les décisions de ses derniers conciles, comme celles des premiers ; les mandements des évêques d'aujourd'hui, comme ceux des premiers siècles; les exhortations des pasteurs, les discours des prédicateurs, vous annoncent la pénitence du carême, comme on l'annonçait autrefois. Si la misère, la rigueur des saisons, la représentation des magistrats l'a déterminée à user d'indulgence, ce n'est qu'en gémissant, et en vous rappelant l'ancienne sévérité du carême de nos premiers frères, qu'elle vous l'accorde.

Ce déchet de la pénitence du carême qui vous afflige est donc non-seulement désavoué, mais encore condamné par l'Eglise. Quelle consolation pour vous, âmes fidèles, d'entrer, autant que vous en êtes capables, dans l'esprit de l’Eglise!

Quoique vous ne pratiquiez point les rigueurs des premiers chrétiens, vous avez toujours la consolation d'imiter leur respect pour la loi de l'Eglise. Vos jeûnes ne sont pas aussi longs, vos repas aussi frugals, vos privations aussi parfaites : mais, en observant la sainte pénitence du carême, avec les seuls adoucissements que l'Eglise permet; en ajoutant le jeûne spirituel au jeûne corporel ; en priant, en gémissant avec l'Eglise pendant la sainte quarantaine, vous entrez dans son esprit, vous ne vous séparez pas des saints pénitents, comme les mondains qui violent toute la pénitence du carême.

Oui, mon Dieu, ce qui me console dans l'amertume de mon cœur, c'est que cette pénitence du carême, combattue par les hérétiques, méprisée et abandonnée par les mondains, a été pratiquée par des enfants de l'Eglise, fervents et soumis dans tous les siècles ; c'est qu'elle a toujours été annoncée solennellement dans le même temps ; c'est que les plus grands Saints, ceux que vous avez distingués par le don des miracles et de prophétie, les plus illustres docteurs, les empereurs et les puissants du siècle, ont eu une profonde vénération pour la loi de votre Epouse ; aucun ne croyait s'en dispenser : vous vous réservez, Seigneur, dans tous les états, des âmes fidèles que le monde ne séduit pas, et qui condamnent par leur obéissance la coupable révolte des mondains.

Dans ce siècle même, tout corrompu qu'il est, dans ces jours de révolte et d'incrédulité, je vois, ô mon Dieu par votre miséricorde, de saints pénitents ; j'en vois dans tous les états et dans toutes les conditions : je vois ceux qui vous sont fidèles faire des efforts pour pratiquer les jeûnes et les abstinences selon l'esprit de votre Eglise : il y en a mémé plusieurs qui pratiquent les grands jeûnes, et dont on est obligé de modérer les rigueurs qu'ils voudraient s'imposer dans ce saint temps. Je vois aussi avec plaisir, ô mon Dieu ! la pénitence du carême respectée et observée à la cour. Les ennemis du jeûne et de l'abstinence sont obligés d'y tenir un autre langage que celui qu'ils tiennent dans le cercle des libertins et des incrédules. L'exemple d'un grand roi et d'une grande reine les confond. Ils y sont témoins d'une soumission parfaite à la loi du jeûne et de l'abstinence, et jamais d'aucune transgression.

C'est cette fidélité de ceux qui vous craignent, qui me console, Seigneur, dans le déchet étonnant de la pénitence du carême.

Après avoir médité ces motifs de consolation, il, faut implorer le secours du ciel pour ne pas être ébranlé ou séduit par les coupables exemples que donnent les ennemis de la pénitence du carême. Il faut imiter la foi et la fidélité de Noé, ce fidèle serviteur de Dieu.


Pendant que des hommes corrompus se livraient aux plaisirs des sens, qu'ils buvaient et mangeaient, peu en peine de fléchir le Seigneur irrité de leurs crimes, par une sincère pénitence, le juste Noé s'appliquait à mériter grâce devant Dieu par sa foi, son obéissance et son travail. Pendant ce déluge d'iniquités dont notre siècle ne rougit point ; pendant que les mondains se livrent aux plaisirs, et se moquent de ceux qui jeûnent et se mortifient, respectez la loi de l’Eglise, cette arche précieuse; pratiquez la pénitence qu'elle vous impose, et vous vous sauverez.

jeudi 18 février 2016

Père Onésime Lacouture - 2-12 - La fuite en Égypte


ONZIÈME INSTRUCTION
LA FUITE EN ÉGYPTE.

«Un ange du Seigneur apparut à Joseph dans son sommeil et lui dit: “Lève-toi, prends l’enfant et sa mère et fuit en Egypte et reste là jusqu’à ce que je te dise de revenir, car Hérode cherchera l’enfant pour le faire mourir.”» Mt.  2-13.

Plan Remarque.  (Leur obéissance.  La fuite en Egypte:
(Leur sacrifice.  (Jésus leur suffit.  (Leur isolement.  Séjour en Egypte: (Leur pauvreté.  (Vicissitude de la vie.  Le massacre des Innocents.

REMARQUE  Voici un mystère de l’enfance de Jésus où le St.  Esprit nous donne très peu de détails: il indique le fait seul.  Comment méditer sur si peu de matière?  L’esprit est vite à sec!  C’est vrai.  C’est justement pour cette raison que Dieu nous a donné si peu de détails: il veut comme fermer la porte à l’esprit pour que nous ouvrions celle du cœur.  Jésus est amour et il ne se révèle qu’à l’amour.  Il s’en va dans la solitude inconnue précisément pour se faire rechercher par ceux qui l’aiment plus que tout au monde.  Si on le suit dans cet inconnu, c’est donc que nous le préférons à ce que nous laissons en arrière: voilà ce qu’il veut.

Moins il y a d’espèces sensibles dans un mystère et plus il contient d’amour divin ordinairement.  L’amour fuit le monde, recherche la solitude pour être tout à son amant.  Les curieux d’idées et de détails et donc qui recherchent du nouveau simplement pour amuser l’esprit se trouvent exclus par cette façon d’agir de l’amour.  Les souffrances de l’exil sont trop précieuses pour que Dieu les révèle au premier venu: il les réserve pour ceux qui seront exilés comme lui.  Toutes les peines qu’on éprouve alors rappellent ce que la sainte Famille a dû éprouver en Egypte; ce n’est donc que par l’expérience qu’on peut pénétrer dans ces épreuves du Cœur de Jésus.  Mais avant de mériter l’exil, il faut méditer quand même sur l’exil de Jésus.  La bonne volonté que l’on met à essayer d’approfondir les souffrances de l’exil attire les lumières pour mieux vivre de façon à se l’attirer avec les lumières pour l’apprécier devant Dieu.  Jésus en son exil comme en son éternité sera consolé de l’amour que nous lui manifestons en méditant sur sa première persécution.  Enfin, cet amour, ce ne sont pas les idées qui comptent, mais les sentiments du cœur.  Approchons-nous de la sainte Famille s’en allant en exil et suivons-la avec amour: Nous sommes en compagnie des trois plus saints personnages de la terre, dont l’un est notre Dieu et notre rédempteur.  Faisons comme ces mères actuellement qui voient partir leur fils pour la guerre lointaine où ils courront tant de dangers; elles ne savent pas où ils sont, mais quand même leur cœur est avec eux sur les champs de bataille.  Eh bien, que nos cœurs soient aussi avec Jésus dans cette Egypte inconnue, mais sûrement pleine de misères pour la sainte Famille… et alors Jésus nous ouvrira son coeur.  Ne manquons pas de prier la Ste Vierge de nous obtenir la grâce de pratiquer les leçons de sagesse divine que Jésus voulait nous donner dans cette première épreuve de la part des hommes.  Et comme St.  Joseph a reçu la mission spéciale de protéger Jésus et Marie, prions-le qu’il protège encore Jésus en nous lorsque le monde voudra nous le ravir par ses ensorcellements et ses pièges diaboliques ou que nos passions voudront le chasser de notre âme.  Les grands dévots à St.  Joseph sont unanimes à proclamer le grand secours qu’il leur apporte dans la vie spirituelle.

La fuite : La joie et la gloire de la visite des Mages s’éteignent dans l’angoisse d’une fuite précipitée au milieu de la nuit.  C’est une loi du monde divin de ne se donner qu’aux dépens de l’humain.  Le divin est la récolte de l’humain que l’on sacrifie ou que l’on sème.  Tout pas fait vers le ciel exige des ruines de quelque chose de naturel.  L’un vit aux dépens de l’autre.  Si Dieu nous donne quelque lumière spéciale ou quelque consolation surnaturelle, nous pouvons être sûrs qu’il va les faire payer par des sacrifices de même importance ou dans la même proportion.  N’oublions pas que c’est notre propre vie que nous méditons dans celle de Jésus: nous appartenons au même corps mystique et ce que Dieu fait pour la tête il le fait pour tout le corps.  C’est cette manifestation publique de Jésus qui lui a attiré cette première persécution; il en sera de même pour nous.  Dès que nous montrerons dans le concret quelque chose de la vie divine de Jésus, le monde poussé par les démons sautera sur nous pour nous persécuter d’une façon ou d’une autre.  Qu’une fille méprise la mode pour l’amour de Dieu, qu’elle essaie de s’habiller modestement, la tempête va s’élever autour d’elle!  Elles le savent bien… C’est pour cela que la plupart sont esclaves de la mode même quand elle est absurde, immodeste et nuisible à la santé.  C’est pour ne pas être critiqués que tant de jeunes gens prennent toutes sortes de mauvaises habitudes pour faire comme les autres.  Pourquoi tant de prêtres et de religieux ne se compromettent-ils pas une bonne fois pour la sainteté?  Ils ont une peur bleue du respect humain, de faire rire d’eux et de se faire persécuter.  En restant humains dans leurs actions, le monde les approuve parce qu’ils appartiennent alors au monde, mais ils s’éloignent de Jésus dans la même mesure qu’ils veulent plaire au monde.  Leur obéissance est la plus parfaite au monde.  Dieu montre qu’il veut être obéi par ces mots brefs et impératifs: «Lève-toi et prends l’enfant, va-t-en en Egypte, reste-là!» Aussi leur obéissance est prompte.  Ils se lèvent tout de suite et partent au milieu de la nuit.  Ils n’ont pas le temps d’apporter grand bagage, d’ailleurs ils n’en ont pas!  Ils partent à pied pour un pays inconnu pour eux et encore assez loin.  Ils obéissent aveuglément; ils ne demandent aucune explication, ne font aucune représentation; ils ne discutent pas entre eux pour voir s’il est opportun de partir ou non; ils ne prennent pas le temps de peser les pertes ou les inconvénients de l’exil.  Dieu le veut!  cela leur suffit et ils partent!  Ils pratiquent l’obéissance de jugement.  Ils auraient pu suggérer à Dieu cinquante façons plus faciles de sauver l’enfant Jésus de ses assassins sans fuir en Egypte!  Il aurait été si facile de le rendre invisible quand les persécuteurs viendraient pour le prendre ou de diriger les assassins ailleurs, etc.  Mais non, Dieu prend le moyen le plus dur pour eux et le plus contraire au bon sens humain.  Nous voyons les trois plus parfaits personnages au monde dans leur façon d’obéir à Dieu; voilà donc nos modèles que le St.  Esprit nous donne dans le concret de la vie.  Voilà comment il veut que nous obéissions à nos supérieurs quels qu’ils soient.  C’est encore Dieu qui nous commande par eux de la même façon!  Que de fois aussi nous recevons des ordres sur le ton impératif:

Faites cela, je vous défends telles choses, laissez-moi la paix.  Je ne veux plus entendre parler de cette affaire, etc.  Quels seront nos sentiments à l’avenir?  Serons-nous surpris de recevoir le même traitement que notre Maître?  Il faut rester calme sous le coup de ces impératifs mordants.  Si quelqu’un vous demande quelle sorte de réception le supérieur vous a faite, vous répondrez: «comme l’ange de Dieu à St.  Joseph, il m’a dit: Allez-vous-en!  et je suis sorti de chez lui comme la Ste Vierge de sa maison!  avec la volonté divine dans les bras, mon trésor, ma vie et mon tout, que puis-je désirer de plus»?

Leur sacrifice est très grand.  Qu’on demande aux réfugiés de la guerre combien c’est pénible de quitter son chez-soi à l’improviste pour s’en aller dans l’inconnu et parmi des étrangers, se refaire une autre vie et un autre gagne pain.  Que chacun examine comment il prend les quelques privations que Dieu ménage à tout le monde dans la vie de famille.  Par exemple, combien se choquent s’il manque une fourchette à leur couvert, si le café n’est pas assez chaud, si la maison est froide, si le lit est dur, etc.  Que de plaintes chez la masse des chrétiens en une seule journée!  Comme les prêtres et les religieux ont aussi besoin de ces leçons!  Comme on est susceptible à la moindre privation, au moindre manque d’égard, à la moindre contrariété!  On se demande si ces gens n’ont jamais médité la vie de Jésus sérieusement.  Plusieurs le font mais le font mal.  Ils s’arrêtent trop au beau côté de la vie, au côté poétique, je dirais.  Pendant notre grande retraite on nous exposait les tableaux des maîtres sur les différents mystères de la vie de Jésus.  Eh bien, on est exposé à voir justement que cette beauté que l’artiste avait en vue.  Ainsi je vois encore la peinture de la Fuite en Egypte.  On voit la sainte Famille cheminant dans un magnifique crépuscule à travers les sables de l’Egypte pendant que la lune se lève juste au-dessus des pyramides; c’est splendide!  et l’on se prend à désirer s’en aller un jour loin de sa patrie par un beau clair de lune avec quelques pyramides à l’horizon!  De sa chambre bien meublée et bien chauffée on se voit couchant à la belle étoile dans quelque plaine solitaire loin de son pays!  Quelle illusion!  et ce soir-là on disputera parce qu’on n’a pas deux ou trois oreillers, ou qu’il manque un drap de lit, ou qu’on a oublié de changer nos serviettes, etc.  On a médité dans la lune… et l’on est encore dans la lune.  La vie spirituelle n’est que dans l’imagination, mais de la vie païenne bien dans le concret!… On a ici un tableau vivant de l’amour de Dieu et du mépris des créatures.  Plus on aime Dieu et plus on méprise les créatures.  Eh bien!  personne au monde aimera Dieu plus que la sainte Famille; il fallait donc qu’elle montra son absolu mépris des créatures en les abandonnant toutes pour sauver Jésus.  Et l’amour de Dieu et l’amour des créatures sont contraires; les hommes qui ne vivent que pour les créatures veulent tuer Jésus qui est l’amour divin.  Alors pour montrer cette opposition radicale, la Ste Vierge et St Joseph sont obligés de fuir les créatures pour sauver leur Créateur.  Comme Jésus nous montre clairement et en acte qu’on ne peut pas aimer Dieu et le monde; qu’il faut mépriser l’un pour l’autre.  L’amour que Marie et Joseph ont pour Jésus les oblige à abandonner tout ce qu’ils ont!  Voilà la préférence que Dieu veut que nous ayons pour lui: il veut que nous méprisions absolument tout au monde pour l’amour de Dieu.  «Si quelqu’un ne renonce pas à tout ce qu’il possède, il ne peut être mon disciple»; Ce n’est pas une parole dite en l’air!  Jésus y tient!  C’est une question d’amour de Dieu.  Des disciples de Jésus devraient s’attendre à ce que Dieu va leur demander des sacrifices de toutes sortes en proportion qu’il veut les faire avancer dans l’amour de Dieu.  Qu’on pense donc plus à ce qu’on gagne qu’à ce qu’on perd.  On perd des échantillons et l’on gagne du divin!  Comme les sacrifices seraient plus faciles si nous voyions le côté divin dans tout sacrifice.  On voit dans quelle erreur sont ces chrétiens qui veulent sauver leur âme et leurs biens terrestres dans leur cœur.  Ils ne peuvent pas aimer les deux ensembles; ils doivent donc arracher de leur cœur tout amour du créé afin de n’aimer que Dieu comme ils le feront au ciel.  S’ils gardent l’amour des créatures, les créatures tueront leur Jésus dans leur cœur aussi sûrement qu’Hérode aurait tué Jésus s’il l’avait trouvé.  «Si quelqu’un aime le monde la charité du Père n’est pas en lui.» La vie des chrétiens devrait être une fuite en Egypte continuelle!  Ils doivent se détourner des affections pour les créatures en fuyant dans la solitude s du cœur pour y garder leur amour à Dieu.

Jésus leur suffit.  Ce qu’on a dit de leur sacrifice est pour nos idées humaines, car pour la Ste Vierge et St.  Joseph il n’y avait aucun sacrifice de fait: du moment qu’ils emportaient Jésus, le reste n’était absolument rien pour eux tant leur amour était grand pour Jésus.  Leur coeur n’était pas du tout dans les biens périssables de ce monde, mais uniquement en Dieu.  Or, ils emportaient leur Dieu avec eux: cela leur suffisait amplement.  Ils sont les plus heureux du monde en fuyant en exil.  Celui en qui le Père éternel met ses complaisances doit suffire à n’importe quel mortel!  Celui en qui sont tous les trésors de la sagesse et de la science de Dieu doit être capable de rendre les hommes heureux!  «Celui qui me suit ne marche pas dans les ténèbres,» dira Jésus.  Il prouvera cette parole souvent dans ceux qui sont persécutés et exilés.  Après les premiers mouvements pénibles de la nature, la lumière divine vient éclairer l’âme sur les splendeurs du monde surnaturel: elle oublie vite les chagrins des premiers jours d’épreuve.  Le fait d’avoir été jugé digne d’avoir part aux persécutions de Jésus et à son exil console plus que tout ce qu’on a perdu.  Il n’y a que l’expérience pour faire goûter de bonheur profond de souffrir pour l’amour de Jésus… ce qui n’est plus une souffrance du tout, mais un véritable bonheur… Dieu aime à nous obliger de quitter notre pays afin de nous détacher des affections de toutes sortes que nous entretenons sans nous en rendre compte.  On dit ordinairement qu’un déménagement vaut un feu.  De fait nous jetons une foule de choses qui encombrent la maison et qui occupent l’esprit.  Nous sommes des pèlerins et nous n’avons pas de demeure permanente ici-bas, mais seulement au ciel.  Dieu veut nous faire pratiquer cette vérité en nous exilant, en nous faisant voyager souvent.  A force de se faire dépouiller, on finit par comprendre la vanité des biens terrestres et l’on se tourne du côté des biens célestes et de Dieu dans la même mesure que l’on s’éloigne des choses créées.  C’est une grâce à demander souvent que nous trouvions notre bonheur uniquement en Jésus.  leur séjour en Egypte.  Comme Dieu avait formé son peuple en Egypte et qu’il était la figure de Jésus, il envoie Jésus en Egypte soit pour la figure soit pour la réalité.  En même temps il montrait que Jésus descendait bien du peuple persécuté en Egypte.

Leur isolement, comme leur sacrifice, n’était rien pour eux, qui ne vivaient qu’en Dieu.  Mais pour nous qui aimons tant les créatures, il est bon de nous arrêter à cette solitude terrible pour notre nature humaine, qui cherche son bonheur dans les choses visibles.  Comme ils sont pauvres et nouveaux venus dans le pays, on comprend que les visiteurs soient rares.  Si des voisins sont venus pour parler des vanités du monde ou contre le prochain, ils n’ont pas dû trouver la sainte Famille intéressante!  Ils ont dû vite passer pour des gens étranges et peu sociables de sorte qu’on n’est pas revenu souvent.  Mais pour des chrétiens ordinaires, l’isolement est très pénible, parce que le coeur est tellement dans les créatures, que de s’en voir privé est très pénible à la nature.  Or c’est une des premières épreuves quand on se donne à Dieu pour tout de bon.  Dès qu’on s’est compromis, carrément pour la sainteté ou pour la recherche de la sainteté, le vide se fait autour de soi pour bien des raisons.  Si on veut être tout à Dieu, il faut bien se retirer des plaisirs de la terre pour se donner tout entier aux choses de Dieu.  Or la masse des hommes est toute à ces plaisirs et très peu ou pas du tout aux choses de Dieu; on s’en va donc en sens inverse avec la foule… qu’on délaisse et qui nous délaisse; les amours sont contraires, alors pour être à Dieu, il faut s’éloigner du monde.  Ceux qui aimaient à jouir à nos dépens se retirent les uns après les autres et en peu de temps c’est le désert.  C’est alors que les démons viennent en grand nombre pour nous tenter de toutes façons afin de nous faire retourner aux plaisirs du monde.  Que de choses ne sont pas défendues!  Il faut toujours bien quelques distractions!  Autrement tu vas perdre la tête!  Tu veux attirer l’attention du monde sur toi: c’est de l’orgueil!  L’humilité s’efface, fais comme les autres pour ne pas t’attirer des louanges.  Tu veux passer pour un saint, mais les gens disent en arrière que tu dois être fatigué pour agir d’une façon si étrange.  Fais attention, la folie religieuse est incurable Finalement tous nous abandonnent comme des entêtés incorrigibles.  Quand on pense qu’on n’aurait qu’à faire comme les autres et nous serions considérés tout de suite et nous pourrions jouir des plaisirs permis comme eux.  Un tel est aussi bon que toi et il prend bien des distractions; il va aux vues parfois, à une partie, puis il fume un bon cigare et prend son petit coup; aussi vois comme il est tranquille et jamais persécuté!  Fais donc comme lui!  Aussi très peu persistent dans leurs bonnes résolutions.  Adroitement, ils aiguillent leur vie un peu plus selon le bon sens.  Ils se jettent à l’humilité pour ne pas se faire remarquer en faisant comme les autres… et dans la même mesure Dieu s’éloigne avec ses dons et ses lumières.  Mais ceux qui persévèrent à ne vouloir que Dieu, finissent par recevoir des lumières qui les consolent grandement dans leur exil.  Dieu leur ouvre des horizons sur son plan divin pour le salut du monde et ils commencent alors d’être heureux dans leur isolement et plus ils en reçoivent et moins ils regrettent le monde avec ses vanités.  C’est ce bonheur avec Dieu qui a fait peupler les solitudes de l’Egypte par tant d’ermites et de moines qui fuyaient l’ensorcellement des créatures pour mieux connaître et servir Dieu dans le silence et les déserts de ces pays.

De nos jours la plupart des chrétiens font la course aux plaisirs terrestres pour chercher le bonheur.  C’est bien clair qu’ils ne le trouvent pas puisqu’ils courent après tout le temps.  Le bonheur est dans le repos d’une chose possédée.  Ce n’est certainement pas le cas de ces énervés en quête de plaisirs.  Celui qui a goûté aux douceurs de l’isolement avec Dieu seul est parfaitement heureux dans son isolement; il ne cherche plus rien en ce monde, il trouve en lui tout ce qui peut rendre l’homme heureux en ce monde et en l’autre: son Dieu!  Que de délices intérieurs inondent l’âme quand son regard se porte sur les régions sereines du ciel où la Trinité l’attend avec un bonheur éternel.  Les touches secrètes de la grâce font tressaillir l’âme d’un bonheur qui la dédommage vite de tout ce qu’elle a quitté pour l’amour de Dieu.  L’exil est une immense grâce de Dieu parce qu’il prépare bien l’âme pour recevoir les communications de Dieu.  Il la débarrasse de la plupart des obstacles aux communications divines.  Que de saints ont été préparés à jouer un grand rôle pour la sanctification des hommes dans la solitude de l’exil!  Dieu donne des échantillons d’exil dans l’ennui que tout homme éprouve parfois.  Plusieurs font toutes sortes de sottises pour se distraire, pour sortir de cet ennui.  S’ils connaissaient les voies de Dieu, ils béniraient Dieu de s’ennuyer.  C’est qu’ils ont perdu quelque créature qui occupait leur coeur.  Dieu la leur enlève pour qu’ils aient une petite ouverture dans leur coeur.  Mais ils la ferment tout de suite en se jetant à quelque autre affection.  Que chacun, à l’avenir, tourne donc son coeur du côté de Dieu quand il s’ennuiera; qu’il prie pour que Dieu vienne remplir ce vide qu’il a fait exprès pour cela.  A l’occasion de la mort d’un être chéri, tout chrétien devrait demander à Dieu de venir prendre la place dans son coeur.  Il en éprouverait une grande consolation et Dieu lui donnerait des lumières qui le rendraient encore plus heureux.  L’ennui est très précieux; il nous avertit que le coeur est privé de quelque amour humain et que Dieu demande se remplir ce vide.  Tous les prêtres devraient avertir les fidèles sur les avantages de l’ennui!  Il en faudra pour que Dieu vienne remplir le coeur; c’est une condition pour que l’amour divin vienne en nous.  C’est donc un grand bien.  Or, la plupart, pour ne pas dire tous les chrétiens, le regardent comme un mal insupportable.  On voit dans la vie des prophètes que le St-Esprit s’est emparé d’eux quand ils étaient dans quelque solitude, sur le bord de quelque fleuve, comme Ezéchiel sur le fleuve Chobar ou Daniel sur les bords du Tigre.  Que de saints ont affectionné la solitude des bois et les charmes de la nature loin des hommes et c’est pendant qu’ils étaient là que Dieu s’est manifesté à eux d’une façon spéciale et les a attirés à lui pour tout de bon.

Leur pauvreté entre dans le plan divin comme leur isolement, c’est pratiquement la même idée.  La pauvreté les prive des biens du monde et donc de l’ensorcellement des créatures; c’est un grand bien pour l’âme qui est ordinairement détachée des biens de la terre quand elle n’en a pas ou très peu.  On ne peut pas imaginer plus grande pauvreté que celle de la Sainte Famille en exil quand elle était déjà la plus pauvre au monde dans son pays!  Jésus n’a pas attendu trente ans pour pratiquer ce qu’il dit au scribe qui veut le suivre, qu’il n’a pas une pierre pour reposer sa tête!  C’est encore une fameuse condition pour aimer Dieu qui ne peut tolérer d’affection pour les créatures dans ceux qu’il se choisit pour amis.  La tradition rapporte que la sainte Famille vécut à Matarieh, un tout petit village semblable à une foule d’autres de ce pays extrêmement pauvre; les gens vivent dans des petites cabanes de terre sans meubles, couchent à terre, s’assoient à terre et mangent à terre.  C’est juste un abri contre le soleil et la pluie.  Ils font quelques sous par jour, juste assez pour ne pas mourir de faim.  Il n’y a pas un pauvre au monde qui ne puisse dire en toute vérité:

Jésus était encore plus pauvre que moi!  Son plan exige qu’il soit pauvre puisqu’il vient apporter l’amour de Dieu qui est contraire à l’amour des créatures.  Quand on en possède c’est bien difficile de ne pas s’attacher.  Voilà pourquoi Jésus insiste tant sur les bénédictions de la pauvreté.  Elle empêche le coeur de se passionner pour les créatures et le laisse libre de se tourner vers Dieu.  C’est la faute des hommes si les pauvres ne sont pas des amis de Dieu.  Vicissitudes de la vie.  Il faut que Jésus pratique cette vérité qu’il prêchera plus tard, à savoir que nous n’avons pas de demeure permanente ici-bas, mais que nous cheminons vers notre patrie céleste, la seule qui demeure éternellement et pour laquelle nous devons vivre sur terre.  Voilà pourquoi Dieu aime à faire déménager les gens.  Parfois des nations entières sont amenées captives dans d’autres pays, d’autres fois ce sont des familles qu’il oblige à immigrer ou émigrer.  Dans les deux dernières guerres mondiales que de gens ont perdu leur demeure et tous leurs biens!  L’idée de Dieu est de leur faire tourner leur coeur vers le ciel et vers lui.  Les seuls biens que personne ne peut nous ravir, ce sont ceuxlà.  Cette idée est souvent enseignée dans l’Ecriture.  Jer.  35-7: «Vous ne bâtirez pas de maisons, vous habiterez sous des tentes dans la suite de vos jours, afin que vous viviez longtemps sur la terre où vous êtes comme des étrangers.» Heb.  11: «C’est dans la foi que ces patriarches sont tous morts, sans avoir reçu l’effet des promesses; mais ils ont vu et salué de loin, confessant qu’ils étaient étrangers et voyageurs sur la terre.» 2 Cor., 5-6: «Sachant que aussi longtemps que nous habitons ce corps, nous voyageons loin du Seigneur.» l Cor.  7-29: «Le temps est court… il faut que ceux qui usent de ce monde soient comme n’en usant pas, de ce monde passe.» Voilà pourquoi l’exil est un si grand bienfait; il fait vivre d’une façon pratique la vocation de tout Chrétien en ce monde: qu’il est sur terre uniquement pour gagner le ciel et qu’il doit organiser toute sa vie en conséquence.  C’est pourquoi Dieu nous fait passer par tant de vicissitudes afin de nous détacher de ce monde et nous en montrer la vanité afin que nous finissions par le mépriser pour ne chercher que le seul bonheur qui demeure éternellement: celui du ciel.  Un autre bon effet des changements de la vie est qu’on se fie plus à sa Providence.  Ainsi la sainte Famille ne savait pas si elle devait se bâtir une maison, si elle devait faire des semailles, si elle devait se fixer là: elle était comme l’oiseau sur la branche.  Eh bien!  Dieu veut que nous nous abandonnions à lui pour le lendemain.  Jésus le prêchera d’une façon très forte dans le sermon sur la montagne: c’est commencer à vivre tout de suite comme dans le ciel où Dieu pourvoira à tous nos besoins, sans que nous ayons à nous en occuper.  Des chrétiens devraient toujours penser alors non pas à ce qu’ils perdent, mais à ce qu’ils gagnent au ciel… le massacre des innocents.  Voilà encore un effet désastreux de la visite des Mages: elle finit par le sang et la mort de ces pauvres innocents qu’Hérode fait tuer dans l’espérance de faire mourir Jésus parmi eux.  Jér.  31-15, avait prédit ce fait: «Une voix a été entendue dans Rama: des plaintes et des cris lamentables, Rachel pleurant ses enfants et elle a refusé d’être consolée parce qu’ils ne sont plus».  Quand Hérode vit qu’il s’était fait jouer par les Mages avertis par un ange, il crut qu’il tuerait Jésus en faisant tuer tous les enfants de la région de deux ans en descendant.  Il faut rechercher l’explication de ce fait dans la nécessité pour toute la nature humaine d’expier le crime d’Adam.  Il faut du sang pour effacer le péché et Dieu peut demander à ces enfants même à leur insu de donner leur sang et leur vie pour participer à la rédemption faite par Jésus.  Il a tout ce qu’il faut dans son ciel pour les dédommager d’avoir à donner leur vie pour le péché d’un autre.  Jésus apporte la croix non seulement pour lui-même, mais pour tous ses membres du corps mystique.  Que de bonnes personnes ont dû souffrir beaucoup, évidemment pour les péchés des autres, c’est normal dans le plan divin.  La Ste Vierge n’avait aucun péché à expier et pourtant elle a souffert un véritable martyre en union avec les souffrances de son divin Fils.  C’est un grand honneur que Dieu nous fait de nous associer ainsi aux souffrances rédemptrices de Jésus.  «Nous régnerons avec lui pourvu que nous souffrions avec lui», dit St.  Paul.  L’Eglise considère ces enfants comme les premiers martyrs pour l’amour de Jésus, sinon selon leur intention, au moins de fait.  Cette façon de faire de Dieu montre qu’il ne demande pas seulement le sacrifice des choses défendues, mais même ce qui est bon «en soi» et permis.


Tous ces terribles sacrifices que Dieu exige devraient nous montrer combien épouvantable est la malice du péché, puisque Dieu le poursuit même chez les innocents.  Cela montre aussi que nous sommes solidaires avec Jésus dans l’expiation comme nous étions avec Adam dans le péché.  La conclusion de toute cette doctrine est que Jésus vient nous enseigner à massacrer notre païen!  L’homme naturel doit être transformé complètement en homme surnaturel.  Or il ne le fera pas de lui-même, il faut donc que Dieu use de violence en se servant des créatures pour le persécuter et pour le faire cesser d’agir en homme, afin qu’il agisse comme un Dieu.  Voilà pourquoi quand Jésus entre dans un coeur ou qu’il veut y entrer, tout de suite, c’est la guerre, les contrariétés, les épreuves de toutes sortes, c’est le glaive, les divisions dans la famille, la persécution et l’exil souvent jusqu’à la mort.  C’est ce qu’il a apporté à la sainte Famille, ses meilleurs amis les plus saints personnages au monde.  Que ne fera-t-il pas à des pécheurs qui ne veulent pas se laisser diviniser?  C’est normal pour tout chrétien d’être persécuté!  C’est le signe qu’on commence à appartenir à Jésus et qu’il vient en l’âme.  Plus ça va mal et plus ça va bien!  Plus le païen est massacré et plus Jésus entre dans l’âme; où est le mal?  Quel inconvénient?  Il n’y en a que pour le païen!  Prions donc la sainte Famille de nous obtenir la grâce d’être courageux dans les épreuves et de ne voir que le divin qui prend la place de l’humain qui périt.  Soyons reconnaissants envers Dieu de vouloir bien nous traiter comme son Fils en qui il a mis toutes ses complaisances.  Demandons à la Ste Vierge de nous aider par sa puissante intercession à nous laisser diviniser par les vicissitudes de la vie.   

jeudi 11 février 2016

« Ô Timothée, garde le dépôt » - Homélie du Cardinal Pie

- Mais à quelle condition peut-on conserver la plénitude, la totalité du dépôt ? Saint Paul n’hésite point à le dire c’est à condition d’éviter les profanes nouveautés de paroles et les affirmations hostiles d’une science frauduleusement parée de ce nom : Devitans profanas vocum novitates et oppositiones falsi nominis scientiae.
Entendez cette maxime, ô vous, chrétiens téméraires, qui adoptez si promptement les idées et le language de votre temps, vous qui parlez de concilier la foi, de concilier l’Eglise, avec l’esprit moderne, avec le droit nouveau. Et vous qui acceptez avec tant de confiance les visées les plus hasardeuses de ce que notre siècle appelle si orgueilleusement la science, voyez à quel point vous vous éloignez du programme tracé par le grand apôtre : Devitans profanas vocum novitates, et oppositiones falsi nominis scientiae. Mais, prenez garde. Avec ces témérités, on ne tarde pas à être con­duit plus loin qu'on ne pense. En se plaçant sur cette pente des nouveautés profanes, en obéissant à ces courants de la prétendue science, plusieurs sont déchus de la foi : Quam quidam promittentes, circa fidem exciderunt. N'avez-vous pas été souvent attristés, effrayés, mes vénérables Frères, en entendant le langage de certains hommes, qui se croient encore enfants de l'Église, qui se persuadent n'être point sortis du giron de leur mère, n'avoir pas abandonné la croyance de leur baptême, que dis-je ? d'hommes qui accomplissent même plusieurs des pratiques chrétiennes, et qui fréquentent la table sainte ? Entendez leurs dires, recueillez leurs questions, leurs doutes, leurs affirmations, leurs hésitations, leurs dénégations, et répondez si ces esclaves de la nouveauté, si ces dupes de la philosophie opposante et de la science séparée, à l'heure où ils se croient encore debout, ne sont pas déjà à terre, en un mot, si ce ne sont pas des déserteurs de la foi et des trans­fuges de l'Église : circa fidem exciderunt ? Les croyez-vous encore enfants, les croyez-vous membres de l'Église, ceux qui, s'enveloppant de paroles aussi vagues que celles d'as­pirations modernes, de forces du progrès et de la civilisation, affirment hautement l'existence d'une « conscience laïque », d'une conscience séculière et politique, opposée à « la conscience de l'Église », contre laquelle ils s'attribuent le droit et le devoir de réagir pour la corriger et la redresser ? Ah ! que de passagers, que de pilotes même qui, se croyant encore dans la barque, et se jouant avec les nouveautés profanes et la science menteuse de leur temps, ont déjà sombré et sont dans l'abîme : quam quidam promittentes, circa fidem exciderunt

XXV novembre MDCCCLXIV


mardi 9 février 2016

L'importance des observances du carême. (Sermon de Saint Augustin)

Puisque l'Eglise est éclipsée, certains catholiques qui prétendent suivre les lois de l'Eglise, suivent plus exactement la secte conciliaire qui n'est en aucun cas la Sainte Eglise et croient que dorénavant, les jours de jeûne et d'abstinence équivaut à seulement deux jours, c'est-à-dire, le mercredi des Cendres et le Vendredi saint. Il n'en est rien! Il serait important de tuer le païen en nous et de faire la volonté de Dieu et de sa Sainte Eglise. Nous rappelons donc à tous que pendant le carême, le mercredi des Cendres, chaque vendredi et samedi ainsi que les Quatre-Temps sont des jours de jeûne et d'abstinence. Pour les autres jours, jeûne seul (excepté le dimanche où l'on ne fait jamais, jeûne.)

Saint Augustin - Sermon CCV

1er pour le carême.

Il faut, dans le temps du carême, prendre la croix pour châtier son corps. Le chrétien doit continuellement être attaché à la croix.
—1. Nous entrons aujourd'hui dans le temps des observances du carême, que l'année nous ramène dans son cours. Or, c'est un devoir pour nous, dans ce temps, de vous adresser, comme chaque année, nos exhortations, afin que la parole de Dieu, dont nous sommes les ministres, nourrisse votre cœur, pendant que vous pratiquerez le jeûne corporel, et que l'homme extérieur, ainsi fortifié par la nourriture qui lui est propre , puisse entreprendre et supporter avec plus de force la mortification de l'homme extérieur. Il est digne, en effet, de notre piété, puisque nous approchons du temps où nous célébrons la passion et le crucifiement de Notre-Seigneur, que nous nous fassions nous-mêmes une croix pour y crucifier toutes les voluptés charnelles, selon la recommandation de l'Apôtre : « Ceux qui appartiennent à Jésus-Christ ont crucifié leur chair avec ses passions et ses convoitises. » (Gal., V, 24.) Le chrétien doit continuellement être attaché à cette croix durant toute cette vie, qui s'écoule au milieu des tentations. Ce n'est point pour nous le temps, pendant cette vie, d'arracher les clous dont le Roi-Prophète dit dans un psaume : « Pénétrez mes chairs des clous de votre crainte. » (Ps. CXVIII, 120.) Les chairs sont les convoitises charnelles ; les clous, les préceptes de la justice ; la crainte du Seigneur perce nos chairs de ses clous, en nous crucifiant comme une victime agréable à Dieu. C'est ce qui fait dire encore à l'Apôtre : « Je vous conjure, par la miséricorde de Dieu, de lui offrir vos corps comme une hostie vivante et agréable à ses yeux. » (Rom., XII, 1.) C'est dans cette croix que le serviteur de Dieu, loin d'en rougir, met toute sa gloire, en disant « A Dieu ne plaise que je me glorifie en autre chose qu'en la croix de Notre-Seigneur Jésus-Christ, par qui le monde est crucifié pour moi, et par qui je suis crucifié pour le monde! » (Gal., VI, 14.) Or, nous devons rester attachés à cette croix, non pas seulement quarante jours, mais toute notre vie, quo représente ce nombre mystérieux de quarante jours, soit parce que l'homme, avant de commencer à vivre, est quarante jours à se former dans le sein maternel; soit parce que les quatre Evangiles s'harmonisent avec les dix préceptes de la loi, et que quatre fois .dix produisent le nombre quarante, ce qui nous prouve la nécessité, pendant cette vie, de l'Ancien comme du Nouveau Testament ; soit enfin pour toute autre raison plus vraisemblable, que découvrira facilement un esprit plus exercé et plus fécond. Aussi Moïse, Elie, et le Seigneur lui-même ont- ils jeûné quarante jours, pour nous apprendre , par l'exemple de Moïse , d'Elie et de Jésus-Christ, c'est-à-dire par la Loi, par les prophètes et par l'Evangile, que tout notre devoir est de ne point nous conformer ni nous attacher à ce monde, mais que nous devons crucifier le vieil homme, en ne passant point notre vie dans les festins et dans la débauche, dans les impudicités et dans les dissolutions, dans les querelles et les jalousies, mais en nous revêtant de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et en ne cherchant point à contenter les désirs de la chair. (Rom., XIII, 13, 14.) Voilà, chrétien, quelle doit être toute votre vie ; si vous ne voulez point vous enfoncer dans le bourbier de cette terre, ne descendez jamais de cette croix. Or, si tel est votre devoir tous les jours de votre vie, combien plus pendant ce temps du carême, qui non-seulement est une partie de la vie, mais qui la représente tout entière ?

Il faut se livrer avec plus de ferveur, pendant le carême, aux œuvres de piété.
— 2. En tout autre temps, vous ne devez point laisser vos cœurs s'appesantir par l'excès du manger ou du boire (Luc, XXI, 34), mais, dans ce temps, vous devez ajouter la pratique du jeûne. Dans tout autre temps vous devez éviter les adultères, les, fornications et tous les plaisirs corrupteurs que la loi de Dieu interdit, mais, pendant ces jours, vous devez vous abstenir même de vos épouses. Ce que vous vous retranchez par le jeûne, ajoutez-le à vos bonnes œuvres en faisant l'aumône. Consacrez à la prière le temps que vous passiez à vous acquitter de vos devoirs d'époux. Au lieu de l'énerver dans les affections de la chair, prosternez votre corps dans des supplications qui le purifient. Etendez, pour prier, ces mains qui s'entrelaçaient dans des embrassements charnels. Quant à vous, qui jeûnez dans les autres temps, ajoutez pendant ces jours à ce que vous faisiez déjà. Vous ne cessez de crucifier votre corps par la pratique d'une continence perpétuelle; unissez-vous à Dieu pendant ces jours par une application plus fréquente et plus forte à la prière. N'ayez tous qu'un cœur et qu'une âme ; soyez tous d'une fidélité inviolable, soupirez tous, dans cette terre d'exil, après la seule et véritable patrie; qu'elle soit l'objet de vos désirs et de votre amour le plus ardent. Que nul de vous ne porte, envie au don de Dieu, qu'il n'a point et qu'il voit dans un autre; que nul de vous ne le tourne en dérision. Quand il s'agit de biens spirituels, regardez comme étant à vous ce que vous aimez dans votre frère, et que votre frère considère comme lui étant propre ce qu'il aime en vous. Que personne, sous prétexte d'abstinence, ne s'applique changer plutôt qu'à retrancher ses jouissances, à chercher des mets exquis, parce qu'il ne fait point usage de viandes; ou des boissons rares à la place du vin dont il se prive; tandis qu'en apparence on semblerait mortifier la chair, on favoriserait tout simplement la volupté. Sans doute, tous les aliments sont purs pour ceux qui sont purs, mais la vie molle et sensuelle ne peut être pure pour personne.

Il faut s'abstenir surtout de toute querelle.

— 3. Par-dessus tout, mes frères, abstenez-vous de toute querelle, de toute discorde; souvenez-vous de ce reproche que le prophète adresse hautement à certains hommes de son temps : « Vous suivez votre propre volonté dans les jours de jeûne, vous tourmentez, vous frappez impitoyablement ceux qui sont sous votre domination, et l'air retentit de vos cris, » etc. (Isa., LVIII, 3.) Après avoir énuméré ces désordres, le prophète ajoute : « Ce n'est pas là le jeûne de mon choix, dit le Seigneur; » si vous voulez crier, aimez à faire entendre ce cri dont parle le Roi-Prophète, lorsqu'il dit : « J'ai crié vers le Seigneur. » (Ps. CXLI, 2.) Ce n'est point là un cri de dissension, mais un cri de charité; ce n'est point le cri (le la chair, c'est le cri du cœur. Tel n'est point le cri dont le prophète Isaïe dit ailleurs : « J'ai attendu qu'Israël fit des actions justes, et je ne vois qu'iniquité ; qu'il pratiquât la justice, et je n'entends que (Inscris.» (Isa., V, 7.) « Remettez, et il vous sera remis ; donnez, et il vous sera donné. » (Luc, VI, 37, 38.) Voilà les deux ailes sur lesquelles la prière s'envole vers Dieu : le pardon des offenses, et l'aumône faite à l'indigent.

samedi 6 février 2016

Père Onésime Lacouture - 2-11 - Les rois mages


DIXIÈME INSTRUCTION
LES MAGES.

«Où est le Roi des Juifs qui est né?  Car nous avons vu son étoile en Orient et nous sommes venus l’adorer.» Mt.2.

Plan Remarque.  (Sa grandeur.  Leur vocation: (Sa gratuité.  (Leur fidélité à la suivre.  (Parfaite.  Leur foi est:

(Eprouvée.  (Récompensée.  (Laisse les prêtres indifférents.  Leur visite: (Trouble le peuple.  (Excite la colère d’Hérode.  (Généreuse.  Leur offrande est: (Symbolique.  (Liturgique.  

REMARQUE Il est tellement difficile pour l’esprit humain d’accepter l’humanité de Jésus que la divine Providence a multiplié les mystères de la sainte Enfance pour nous convaincre qu’il est vraiment homme comme nous.  Les avantages de cette conviction sont immenses pour la vie spirituelle.  C’est dans l’humanité que se reflète la divinité de Jésus; nous devons toujours avoir ce miroir de la divinité dans l’esprit pour progresser dans la divinité de Jésus.  Les saints ont toujours affectionné l’enfance de Jésus parce qu’elle est pleine de leçons pratiques pour la sainteté.  Jésus n’a-t-il pas dit: «A moins que vous ne deveniez de petits enfants, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux.» Les enfants ont plusieurs vertus appréciées dans le ciel, moins l’orgueil et une foule de défauts qui éloignent les hommes de Dieu.  De nos jours Dieu a pris la peine de nous remettre devant l’esprit l’estime qu’il fait des vertus de l’enfance en faisant canoniser Ste Thérèse de l’Enfant Jésus qui a puisé les principes de sa sainteté dans les mystères de l’enfance de Jésus.  Les hommes ont toujours eu peur de Dieu: sa majesté et sa puissance les faisaient trembler à son seul Nom.  Eh bien, il se fait petit enfant précisément pour que tous les hommes s’approchent plus de lui, si doux et si humble de cœur.  C’est là qu’il commence à prêcher par l’exemple sa doctrine divine qu’il enseignera de bouche plus tard.  Ce n’est pas pour rien que le St.  Esprit nous a laissé tant de détails sur l’enfance de Jésus.  Chaque mystère contient de sublimes leçons de sainteté que nous devons recevoir avec la plus vive reconnaissance et pratiquer le plus fidèlement possible avec sa grâce.

Jésus venait de s’offrir à son Père pour le salut du monde quand il commence son ministère en appelant à lui des païens d’une région lointaine.

 L’arrivée à Jérusalem de ces étrangers conduits par une étoile qui leur apparaît en Orient et les amène jusqu’à Jésus, a tellement frappé les premiers chrétiens que la fête de l’Epiphanie a pris une importance remarquable dans la liturgie chrétienne.  Ce mystère étale en tableaux vivants la théologie de la foi telle qu’elle agit dans les âmes.  On peut dire la même chose de la grâce.  Le St-Esprit nous décrit là sa façon de faire pour faire passer les hommes des ténèbres du paganisme à la lumière de la foi.  Ce qu’il fait pour les Mages il le fera pour nous tous en proportion que nous coopérons avec lui.  C’est donc notre propre vie spirituelle que nous étudions dans cet épisode merveilleux de l’Enfance de Jésus.  Mais, en nous, la foi ne sera plus sensible pour ainsi dire comme nous la voyons dans les Mages.  Une raison de plus de bien comprendre sa façon d’agir dans ce mystère.  Leur vocation à la foi.  Elle est la même que la nôtre.  Nous ne l’apprécions pas suffisamment parce que nous nous y arrêtons trop peu.  Prenons l’occasion de cette méditation pour nous faire une grande idée de notre vocation à la foi en examinant dans le détail les caractères de la vocation des Mages.  Sa Grandeur: On juge de la grandeur d’une entreprise par la fin qu’elle se propose, par les moyens qu’elle emploie et par ses résultats.  Examinons la vocation des Mages en fonction de ces trois idées.  Or les Mages sont appelés à venir adorer le Messie et ils sont les premiers païens à le faire.  Que peut-il y avoir de plus grand que d’adorer le Roi des rois et le Sauveur du monde?  C’est faire ce que nous sommes appelés à faire éternellement au ciel.  Rien de plus beau ni de plus grand sur terre.  Les moyens employés par Dieu sont miraculeux et donc divins.  Cette étoile étrange qui apparaît tout près de la terre et qui les conduit jusqu’à Jésus n’est pas un phénomène naturel; il fallait l’intervention spéciale de Dieu, de même que pour cette inspiration intérieure qui les sollicite à aller adorer le Roi des Juifs et qui ne leur laisse pas de paix tant qu’ils ne se mettent pas en route, vient sûrement de Dieu.  De plus il leur fallait des grâces bien puissantes pour les déterminer à partir malgré les reproches de leurs parents et les moqueries du peuple qui devait les trouver fous de suivre une étoile.  Peut-être avaient-ils lu la prophétie de Balaam, Mm.  l4-17: «Un astre sort de Jacob, un sceptre s’élève d’Israël.» Quoique l’on ne trouve pas de prophétie expresse pour les Mages, l’Eglise leur applique cette prophétie du psaume 71: «Devant lui se prosterneront les habitants du désert… les rois de Tharsis et des îles paieront le tribut, les rois de Saba et de Méroé offriront des présents.» Le résultat a été qu’ils ont trouvé Jésus et qu’ils l’ont reconnu pour le Messie et le Sauveur du monde.  Ils lui ont offert des présents symboliques des caractères qu’ils reconnurent en lui comme nous le verrons plus loin.  Eh bien, 19 siècles de christianisme et de foi bien prouvée sont passés, qu’est-ce que les chrétiens pensent de leur vocation à la foi?  Quelle insouciance à son sujet!  Comme nous en profitons peu, comme nous l’étudions peu, comme nous la pratiquons encore moins!  Jésus est à nos portes dans nos églises et dans les chapelles et combien se dérangent deux minutes pour aller saluer leur Dieu du Tabernacle!  Même les prêtres, comme ils vont rarement adorer Jésus où il est aussi présent qu’aux Mages quoique invisible aux sens.  Cela montre que nous apprécions bien peu notre vocation à la vision béatifique, puisque notre foi sur terre est le germe de la lumière éternelle du ciel.  Si notre foi n’agit pas, elle se meurt vite et nous risquons notre salut éternel.  Réveillons-nous sur la grandeur de notre vocation à la foi ici-bas et à la vision béatifique là-haut.

Sa gratuité devrait susciter en nous de vifs sentiments de reconnaissance.  Comme Dieu a choisi les Mages de préférence à tant d’autres païens ainsi Dieu nous a choisis plutôt que des milliers d’autres qui auraient apprécié peut-être plus que nous leur vocation à la foi.  L’étoile brillait pour tous sans doute, mais les Mages sont les seuls à comprendre sa signification.  C’est un pur don de Dieu qu’ils reçoivent, comme aussi notre foi.

Combien d’hommes ont entendu la même prédication de l’Evangile et quelle différence dans son acceptation.  Comme l’étoile venait uniquement de Dieu ainsi sa signification ne venait que de Dieu.  Il en est de même pour nous; non seulement les vérités prêchées viennent de Dieu, mais notre acceptation de ces vérités vient aussi de la grâce de Dieu.  Pas plus que les Mages nous ne pouvons mériter ces manifestations divines dans l’âme.  Tout ce que nous pouvons faire est de nous disposer à les recevoir, ce que nous devons faire avec soin.  On peut juger de l’estime qu’un chrétien fait de sa vocation surnaturelle par sa détermination à éviter tout péché mortel qui la fait perdre ou la rend inutile.  Comme ils sont rares ceux-là!  Combien perdent la grâce sanctifiante pour un rien, pour rester couché un peu plus longtemps le dimanche, pour une bouteille de liqueur enivrante, pour un plaisir charnel d’un instant, pour quelques piastres volées au voisin, etc.  Surtout ceux qui restent tant soit peu dans l’état de péché mortel sans se soucier de recouvrer la grâce montrent bien qu’ils n’ont aucune estime pour elle.  Que ces gens n’espèrent pas être sauvés tant qu’ils sont dans cet état d’esprit par rapport à la grâce.
Leur fidélité à la suivre montre leur sincérité à croire.  Car ceux qui ne comprenaient rien à cette étoile ont dû les blâmer et se moquer d’eux.  Rien ne les arrête: ils laissent tout pour suivre leur inspiration divine.  Ils ne se contentent pas de savoir ce qu’ils doivent faire, ils le font de fait.  Ils donnent la leçon à ces chrétiens qui connaissent leur religion, mais qui ne la pratiquent pas ou mal.
Comme ils sont convaincus de la divinité de leur inspiration, ils ne sont pas influencés par le respect humain.  Ceux qui le sont, comme tant de chrétiens, montrent bien qu’ils estiment plus les jugements des hommes que ceux de Dieu.  Comme ce respect humain est fort en général!  Cela montre que la plupart des chrétiens sont faibles dans la foi.  Celui qui n’ose pas se compromettre devant l’opinion publique pour l’amour de sa religion peut sérieusement douter de son salut.  Il n’a pas encore choisi carrément Jésus de préférence au monde auquel il veut plaire aux dépens de ses devoirs envers J.C.  Comme ils sont nombreux!  Un serviteur tient les yeux sur son maître: tant qu’un chrétien surveille le monde de peur de lui déplaire, il montre bien qu’il regarde le monde comme son maître et donc il n’appartient pas à Jésus.  Quand Jésus est devenu notre roi et maître, nous ne faisons plus de cas de notre ancien maître, le monde, n’espérant rien de lui, nous ne travaillons plus pour lui du tout.  A quel groupe appartenez-vous?  Leur foi…

La foi est la porte d’entrée dans le monde surnaturel: ce n’est pas la raison, qui est une lumière purement naturelle.  Pour que ma lampe électrique sur ma table éclaire, il faut la connecter avec une source d’électricité.  Eh bien, pour être éclairé divinement, il faut mettre mes facultés en connection avec une source de lumière divine, ce qui est celle de Dieu, manifestée aux hommes par la foi.  Tout homme qui veut connaître le monde de Dieu doit se servir de la lumière de Dieu, qui est la foi.  Un chrétien doit donc prendre dans la révélation et dans l’enseignement de l’Eglise ce qu’il doit croire pour être sauvé.  Or combien voudraient se servir surtout de leur bon sens humain pour servir Dieu.  Tant qu’on suit son bon sens, on nage dans le naturel et pas du tout dans le monde de Dieu.  Etudions donc la foi des Mages qui sont de parfaits modèles de gens de foi.  Leur foi est parfaite

DANS TOUS SES ÉLÉMENTS ESSENTIELS.

La foi comme la grâce prévient, dirige, soutient, éprouve et couronne.  On trouve tout cela dans la foi des Mages, en suivant le récit de l’Evangile.  C’est l’étoile qui les prévient: elle est apparue quand ils ne s’y attendaient pas du tout et ils n’on rien fait pour la mériter.  Elle est donc l’œuvre unique de Dieu.

Il en est de même pour nous: tout ce que nous faisons selon la foi est un pur don de Dieu.  Notre part n’est que d’accepter librement l’offre de Dieu et là encore il y a de la grâce de Dieu!  C’est de nature à nous rendre bien humbles dans le monde surnaturel.  Nous n’avons rien là que nous n’avons reçu de Dieu et par suite toute la gloire du bien en nous appartient à Dieu seul.  Un chrétien ne devrait donc jamais s’enorgueillir du bien qu’il a ou qu’il fait, ni être jaloux du bien que les autres ont ou font.  Sont-ils nombreux ces chrétiens?  L’étoile les dirige comme par la main: Ils n’ont qu’à la suivre pour être sûrs d’arriver au Roi des Juifs.  C’est ce que Dieu fait pour nous par la foi.  Si nous la suivions fidèlement, elle nous conduirait sûrement au ciel.  Mais comme il y en a peu qui se laissent conduire par cette lumière divine!  Combien consultent surtout leur petit bon sens humain et celui des autres?  Tous ceux qui sont flottants dans la pratique de la religion, qui sont inconstants, qui font comme leur entourage, sont des païens de mentalité.  Ceux qui vont communier seulement dans les grands concours, qui vont à l’église quand beaucoup de gens y vont, qui sont bons chez eux et méchants à l’étranger, qui auscultent l’opinion publique pour faire des actes de religion, ces gens ne suivent pas la foi ou si peu qu’ils risquent leur salut.  Un chrétien doit toujours se demander: Qu’est-ce que Dieu veut pour moi dans ce cas-ci?  dans ce doute, qu’est-ce qui ferait plaisir à Jésus?  en commençant une entreprise, est-elle pour la gloire de Dieu?  est-elle selon sa volonté?  Enfin quand on se laisse diriger par la foi on a toujours un œil sur Dieu pour voir ce qu’il veut.  Ainsi on est tout aux choses de Dieu parce que la foi ne nous conduit que là.  St-Paul dit que ce sont ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu qui sont les enfants de Dieu (Rom.  8-14) Or il faut être enfant de Dieu pour être sauvé!  Suivons donc notre étoile spirituelle, la foi! 

L’étoile les soutient, en se tenant toujours devant eux.  S’ils étaient tentés de rebrousser chemin, l’étoile continuait sa route de sorte qu’ils étaient encouragés à la suivre jusqu’au bout.  Sans doute l’inspiration intérieure était toujours là aussi pour les éclairer dans l’âme sur la naissance du Roi des Juifs.  Et nous avons non pas une étoile, mais le Soleil de justice en personne pour nous diriger et nous soutenir dans le chemin de la vertu nous avons ses propres paroles et ses exemples avec sa grâce et comme nous lambinons en route!  Comme beaucoup même n’avancent plus et reculent souvent!  Jésus ne nous manque pas, c’est nous qui manquons à Jésus; nous ne coopérons pas avec lui.  C’est que le cœur est trop pris par les choses sensibles du monde, on n’a pas le temps ni la volonté de s’occuper des choses du monde de la foi trop au-dessus de la vie des sens qu’on estime tant.  Quel dommage que nous ne sachions pas mieux que tout ce que nous faisons en dehors de la foi est perdu pour l’éternité… Leur foi est éprouvée.  Après les avoir guidés longtemps, voici que l’étoile disparaît quand ils arrivent à Jérusalem.  Voici quelques raisons qu’on peut donner de ce fait.

1)         Dieu ne multiplie pas les miracles inutilement.  Il avait déjà révélé aux Juifs le lieu de la naissance du Messie par le prophète Michée: «Et toi, Bethléem Ephrata, quoique tu sois petite entre les milliers de Juda, c’est de toi que sortira Celui qui doit être Dominateur en Israël et dont l’origine est dès les temps anciens, dès les jours de l’éternité.»

2)         Pour donner aux Mages la chance de se servir de leur propre activité et les honorer ainsi dans leur raison, et pour voir s’ils continueraient leurs recherches sans l’étoile.

3)         Pour attirer l’attention des Juifs sur la naissance du Messie, qui leur était rappelée d’une façon si étrange.

4)         Pour montrer aux païens que le salut doit venir des Juifs.  Le fait que pas un des prêtres juifs ne se dérange pour aller avec eux voir le Roi des Juifs, a dû être un rude coup pour leur foi.  Voilà que des gens qui avaient été choisis spécialement par Dieu pour surveiller la venue du Messie, ne se donnent pas la peine d’aller avec eux, c’est donc qu’ils se sont fait jouer par leur étoile!  C’est une illusion!  Ils se sont emballés pour rien!

Nous aurons tous cette même épreuve dans la vie spirituelle.  Un fervent sera scandalisé de voir l’insouciance de ceux qu’il croyait des modèles ou qui devraient être des conducteurs en religion.  Comme des prêtres, des religieux.  Lui est tout feu et flamme et il ne rencontre qu’insouciance et tiédeur chez ceux qui devraient donner l’exemple de la ferveur au service de Dieu.  Que les bonnes âmes ne se découragent pas quand elles perdent un bon directeur: ce que Dieu leur a donné par lui, il est capable de le leur donner par un autre.  Celles qui s’attristent montrent qu’elles sont encore pleines d’humain… et que leur fameux directeur n’était pas si bon s’il les a laissé s’attacher à lui de la sorte.  Si elles avaient vu Dieu seulement en lui comme il aurait dû le leur enseigner, elles remarqueraient à peine qu’il est parti!  C’est encore Dieu qui va les conduire par un autre instrument aveugle dans ses mains.  Une bonne leçon pour nous est celle-ci: quand la foi parle clairement, suivons-la fidèlement; puis quand elle se cache et n’indique rien, alors suivons notre raison et Dieu est satisfait et nous bénit.  Que de gens s’énervent quand ils ne savent pas que faire devant Dieu.  C’est si simple!  Dieu ne vous dit rien?  Eh bien, cela veut dire: fais ce que tu voudras et j’en serai content; Défions-nous de ceux qui viennent après coup nous dire que nous aurions dû faire telle chose ou telle chose.  qu’on leur réponde: J’ai fait ce que je croyais bon, je ne regrette rien, peu importe le fiasco qui s’en est suivi!  Dieu soit béni dans ce fiasco!  Je n’ai aucun remords de conscience!  Quand le soleil est au-dessus de l’horizon, on suit sa lumière; quand il se couche on allume son fanal!  Eh bien, quand la foi se couche, on allume son petit fanal: la raison!

Récompensée, parce qu’ils persévèrent dans leur recherche du Messie, Dieu les récompense par l’apparition de l’étoile au sortir de Jérusalem et cette fois elle les conduit jusqu’à la maison où se trouve la sainte Famille.  Quel bonheur de le trouver enfin!  Leur étoile venait donc bien de Dieu et les conduisit à Dieu!  Leur persévérance est récompensée en voyant le Roi des Juifs.

Leur foi reçoit encore un dur coup quand ils trouvent en Jésus tant de pauvreté!  Le Roi du ciel et de la terre dans une maison si abjecte!  Jamais ils n’avaient vu un tel dénuement!… Quel dommage que tous nos chrétiens ne connaissent pas mieux toutes ces leçons pratiques de la foi que nous donnent les Mages!  Nous devrions tous avoir les yeux sur Dieu comme les Mages les avaient sur leur étoile, pas pour rester stationnaires, mais pour avancer constamment vers Jésus.  Quand allons-nous apprendre comment vivre de foi?  Ce n’est pas vivre de bon sens humain, mais de lumière divine telle que manifestée dans l’Ecriture, c’est organiser notre vie selon l’enseignement de Jésus et non pas selon celui des hommes.  Ceux qui vivent de foi ont de ces expressions dans la bouche: Dieu le veut.  Cela fait plaisir à Dieu.  Dieu ne veut pas.  Les païens disent: ça n’a pas de bon sens.  C’est ridicule.  Je n’aime pas cela.  Ils sont le centre de tout, tandis que pour un catholique qui vit de foi, c’est Dieu seul qui est le centre de tout pour lui.  Ne prenons pas cinquante ans pour comprendre que pour vivre de foi il faut se mettre au-dessus de la raison et des sens.  Dieu les contredit exprès pour que nous les mettions de côté afin de suivre sa lumière divine.  C’est quand ce n’est pas naturel ou humain que c’est divin!… leur visite Laisse les prêtres indifférents.  Ils ont été choisis par Dieu uniquement pour préparer et pour surveiller la venue du Messie: C’est leur seule raison d’être.  D’après les prophètes les temps semblent accomplis pour sa venue; ils devraient être sur le qui-vive pour saisir le moindre signe du Messie.  Quand des étrangers respectables se présentent à Jérusalem, conduits là par une étoile miraculeuse, ce devait suffire pour les intéresser; on croirait qu’ils seraient accourus avec les Mages pour aller voir et adorer leur Roi attendu depuis des siècles par tout le peuple juif.  Mais pas du tout; ils ne se dérangent pas; cette nouvelle du Messie ne les intéresse pas!  La fascination des choses terrestres a obscurci l’intelligence des choses célestes; leur cœur est tout à la terre de sorte qu’ils ne comprennent rien aux choses divines; ils ne les estiment pas du tout.  Jésus enseignera qu’on ne peut pas aimer le monde et Dieu; c’est l’un ou l’autre, pas les deux à la fois.  Comme ils aiment le monde, ils n’aiment pas le Messie et ils le persécuteront toute sa vie et le tueront un jour.  Nous aussi nous avons été choisis par Dieu pour être tout aux choses de Dieu afin de donner au peuple de notre surabondance de vie surnaturelle.  Eh bien, combien remplissent leur mission divine même convenablement?  combien s’ingénient par l’étude des choses saintes et par la prière de se remplir si bien le cœur du divin qu’ils puissent ensuite intéresser le monde par leur prédication?  Les prêtres écourtent leurs sermons sous prétexte que le peuple n’aime pas les longs sermons.  Pourtant Jésus dit que les brebis entendent volontiers la voix du Maître.  Quand le peuple n’écoute pas un prêtre c’est souvent parce qu’il ne transmet pas la voix de Jésus parfaitement, qu’il ne donne pas la doctrine de Jésus et il ne parle pas du cœur, de ce qu’il vit, de ce qu’il aime.

Le peuple suivait les saints des heures de temps parce qu’ils prêchaient du cœur et de ce qui faisait leur propre vie.  C’est donc inutile de blâmer le peuple de ne pas aimer les sermons, ce sont les sermons qui ne sont pas de substance divine.  Le St-Esprit ne passe pas par la philosophie de tête même quand c’est un sujet de religion.  Il veut le cœur et si le prédicateur parle selon ce qu’il vit il est intéressant pour n’importe qui.  Que les prêtres soient toute la semaine aux choses de Dieu et pas du tout à celles du monde et les fidèles les écouteront bien le dimanche dans leurs sermons.  Pour cela il faut prêcher ce qu’on vit!… Trouble le peuple.  «Toute Jérusalem est troublée» et pour une nouvelle qu’elle attend depuis sa fondation!  Les livres sacrés qu’ils gardent comme la prunelle de leurs yeux annoncent que la venue du Messie est proche et voici que des hommes sérieux disent qu’il est né et qu’une étoile miraculeuse les a conduits jusqu’à Jérusalem pour venir l’adorer… et tout le peuple est bouleversé en entendant dire qu’il est né!  Ils sont furieux et tout de suite ils menacent de le tuer, s’ils le trouvent.  C’est curieux comme le peuple est volage et se laisse mener à toutes sortes d’excès, évidemment les prêtres avaient leur part dans ce trouble du peuple.  Il y en aura toujours pour l’exciter dans différentes factions.  On voit au cours de l’histoire de l’Eglise comme le peuple est facilement influencé.  Dans les Actes on voit un jour le peuple qui veut adorer Paul et Barnabé et le lendemain ils les ruent de coups et laissent Paul pour mort.  Cela recommence dans les autres villes où il va prêcher.  Il en est ainsi pour un prédicateur qui prêche Jésus-Christ comme une vie à vivre tout de suite.  Les autres prêtres se diviseront avec le peuple pour ou contre et surtout contre.  Personne ne sait bien pourquoi on attaque ce prédicateur, mais le voisin a dit telle chose, un autre en dit plus et finalement toutes les calomnies sont inventées contre lui.  Les démons ont sûrement leur part dans ces tempêtes soulevées contre les vrais disciples de Jésus.  Les pharisiens et les prêtres Juifs parlaient parfois de la venue du Roi des Juifs ou du Messie, mais comme ils n’avaient pas l’intention de le donner au monde comme une vie à vivre dans le concret et qu’ils le prenaient au point de vue naturel et temporel, les démons ne les ont jamais persécutés; au contraire ils les secondaient dans leur mentalité purement païenne au sujet de Jésus à venir.  Mais dès que les Mages en parlent comme déjà arrivé et qu’ils vont l’adorer tout l’enfer est sur pied pour le combattre.  Voilà pourquoi tant de prêtres ne sont jamais et ne seront jamais persécutés; ils ne font que parler de Jésus et ils l’ont tellement naturalisé dans leur esprit qu’ils ne font aucun tort aux démons et souvent si peu d’âmes, que les démons ne les dérangent pas.  C’est quand les hommes veulent s’unir à Jésus qu’ils opèrent leur salut et donc échappent aux démons.  Dans le concret c’est quand ils agissent pour des motifs surnaturels que dans la même proportion ils échappent aux démons: tout de suite on le voit par la guerre que les démons leur suscitent.

Exemple: deux frères étaient ivrognes: l’un est obligé de cesser de boire parce qu’il fait de la haute pression et que les médecins lui disent qu’il va en mourir s’il boit.  Ses amis le plaignent, le regardent comme un martyr.  Son frère fait une retraite fermée et cesse de boire pour l’amour de Dieu.  Ses amis lui font la guerre, le traitent de fou et l’injurient tellement qu’il est obligé de les quitter pour tout de bon.  Un fumeur abandonne de fumer parce que sa vue en souffre; tout le monde l’approuve.  Un autre abandonne parce que cela nuit à la lumière divine de la foi: tout le monde le traite de fou, etc.  On voit donc que les démons enragent seulement quand on va produire l’union avec Jésus ou une plus grande union par notre prédication ou par nos motifs, qu’ils soulèvent une tempête contre nous. On peut voir par là combien rares sont les prédicateurs de Jésus et les bons chrétiens qui avancent dans l’union avec Jésus.  Combien sont persécutés!  Cela devrait faire trembler un grand nombre et de prêtres et de fidèles… Excite la colère d’Hérode.  Ces bons Mages ont parlé du Roi des Juifs et Hérode l’est déjà!  Il voit tout de suite un rival en cet enfant et il veut le tuer tout de suite.  Jésus dira plus tard que ce sont les démons qui veulent le tuer par les Juifs, instruments des démons.  Jo.  8-45: «Vous cherchez à me faire mourir… vous faites les œuvres de votre père… Le père dont vous êtes issus est le diable.» Ce sont donc les démons qui suscitent encore ces persécutions contre tout prêtre qui donne Jésus réellement ou contre tout fidèle qui veut vivre saintement en Jésus.  Par conséquent ceux qui ne sont pas critiqués, soit prêtres soit fidèles, ne donnent donc pas Jésus au monde; ils se contentent d’en parler ou font semblant de lui appartenir. 

Comme ils risquent leur salut avec ce camouflage de religion!  Que les persécutés sachent que Dieu veille sur eux et qu’il les protégera contre leurs ennemis jusqu’au jour où il voudra les immoler pour la gloire de son Nom.  Ainsi il protège l’Enfant Jésus jusqu’au jour où Dieu veut son sacrifice pour le salut du monde, Dieu leur donnera la grâce pour qu’ils acceptent volontiers le sacrifice de leur vie pour coopérer à la rédemption du monde avec Jésus.  Leur offrande Est Généreuse.

Ils donnent ce qu’ils ont de meilleur dans leur pays: de l’or, de l’encens et de la myrrhe.  C’est qu’ils croient à la royauté de cet enfant qui vient de naître.  Il faut des dons précieux pour un roi et surtout pour le Roi du ciel.  Ils sont les premiers à croire en la divinité de cet enfant et ils agissent en conséquence.  Eh bien, quand allons-nous agir selon notre foi que nous devrions avoir après 19 siècles de christianisme et de toutes sortes de bonnes preuves?  Habituons-nous à être généreux envers Jésus.  Donnons-lui des actes parfaits, soyons consciencieux dans tout ce que nous faisons pour Dieu.  Par exemple que nos prières soient ferventes et dirigées sur les biens éternels et sur Dieu lui-même.  Quand nous assistons à la messe, donnons-lui une messe complète, parfaite!  par l’attention à ce mystère, par notre union avec Jésus qui s’offre à son Père, une messe complète, pas écourtée par les deux bouts!  Que l’on fasse son travail quel qu’il soit consciencieusement puisque nous devons travailler pour Dieu.  Qu’on ne gâche jamais son travail: un chrétien doit toujours travailler en présence de Dieu et pour Dieu: donc le faire parfaitement de toute façon.  Cet esprit de foi est très rare chez nos chrétiens.  Si on engage un homme il faut le surveiller pour qu’il fasse son devoir.  Cela ne devrait pas être nécessaire pour un chrétien.  Dieu est toujours là qui le surveille et il n’accepte pas des présents gâchés.


Symbolique.  Il est évident que le St-Esprit les a inspirés dans leur offrande.  Chaque chose devait représenter une note caractéristique de Jésus.  D’après les Pères de l’Eglise l’or représente sa royauté, l’encens sa divinité et la myrrhe son humanité.  On emploie de la myrrhe pour embaumer les corps.  On peut aussi trouver d’autres applications comme par exemple, l’or représente nos bonnes œuvres, l’encens, la prière, et la myrrhe, la mortification.  Liturgique.  Les Mages nous donnent de bonnes leçons de liturgie que nous devrions imiter.  «Ils entrent», ils ne restent pas sur le perron ou dans le portique de l’église.  «Ils se prosternent» pour adorer Jésus.  Les chrétiens devraient rester plus longtemps à genoux devant Dieu.  «Ils lui offrent des présents.» C’est comme l’offrande de notre messe.  Que les fidèles soient généreux aux quêtes qui servent pour toutes sortes de bonnes œuvres!