VINGT-CINQUIÈME INSTRUCTION
LE BON PASTEUR.
«Je
suis le bon Pasteur: le bon Pasteur donne sa vie pour ses brebis.» Jo. 10-11
Plan
La vie du berger. Par son exemple. Il nous nourrit. Par sa doctrine. Par sa grâce.
Contre les démons. Jésus est
pasteur: Il nous défend. Contre le
monde. Contre nous-mêmes. Il nous aime.
Le
mercenaire: Se nourrit. Se défend. S’aime lui-même. Le vrai pasteur imite Jésus.
LA
VIE DU BERGER. Jésus venait d’avoir une
des plus fortes discussions avec les Juifs au sujet de la guérison de
l’aveugle-né. Celui-ci les condamne par
son témoignage en disant: «Jamais on a ouï dire que personne ait ouvert les
yeux à un aveugle-né; si cet homme n’était pas Dieu il ne pourrait rien faire
de semblable.» Alors Jésus montre la mauvaise volonté des Juifs qui n’écoutent
pas la parole de Jésus parce qu’ils ne sont pas de Dieu et il leur donne la
parabole du Bon Pasteur. La vie du
berger avec ses brebis est le meilleur échantillon de la vie du prêtre qui a
charge d’âmes. Un troupeau de moutons
est incapable de se protéger contre ses ennemis et si un va d’un coté tous les
autres suivent aveuglément. Les brebis
n’entendent que la voix de leur propre berger et ne suivent que lui. C’est très intéressant de voir les bergers à
Jérusalem ramener leurs troupeaux en ville vers le coucher du soleil. Ils se rencontrent, se croisent, se mélangent
dans les bazars ou dans les carrefours de la ville, mais les moutons finissent
toujours par retrouver leur propre berger en distinguant sa voix de celle des
autres. On a beau essayer d’imiter la
voix du berger, pas un mouton n’y fait attention. Quelle parfaite confiance en leur
berger! Quelle union avec lui! Quel abandon absolu au berger!
Le
berger connaît toutes ses brebis parfaitement, si une retarde à paraître avec
les autres, il reste là sur place et l’appelle tant qu’elle ne revient pas;
j’en ai vu passer en sens inverse des troupeaux sans s’occuper d’eux, mais
suivant de loin la voix du berger qui l’appelait. C’est une vie isolée du monde; les pâturages
ne sont pas dans les villes, mais dans la campagne, loin des habitations. En visitant la Palestine, on en voit partout
dans les solitudes mêmes les plus affreuses.
Je n’oublierai jamais le désert autour de Corozaïn, tout couvert de
cailloux de toutes les grosseurs au monde; on ne peut pas mettre le pied sur de
la terre, mais sur des roches. Il y a
cependant un peu d’herbe autour des cailloux.
Eh bien, il y avait des troupeaux de moutons avec leurs bergers. J’ai failli en mourir de cette course à
Corozaïn, dans une journée… et eux passent leur vie dans ces déserts maudits
par Jésus!… Leur vie est très pénible; ils sont obligés de subir les
intempéries des saisons. Le soleil est
brûlant et dès qu’il se cache on gèle.
C’est que la Palestine est très élevée et l’air raréfié de sorte qu’il
ne se réchauffe pas au soleil et ne garde pas sa chaleur. Peu importe la température ou le temps, il
faut que les moutons mangent. Alors les
bergers sont obligés de les conduire au pâturage quand même. C’est l’unique souci des bergers; leurs
propres fatigues n’entrent pas en ligne de compte, ni leurs ennuis, ni leur
isolement. Ils sont tout au service de
leurs brebis et se sacrifient pour elles.
C’est une merveilleuse vie s’ils ont la foi; ils sont loin des folies du
monde et de ses vains bruits; ils peuvent contempler à la journée le beau ciel
bleu de Palestine et les lointains horizons qui leur parlent de l’immensité de
Dieu. Aucune attache ne peut retenir
leur esprit à la terre, car ils sont bien pauvres et ne peuvent apporter grand
chose dans le désert. Ils n’ont rien
pour les distraire de leur union avec Dieu, étant toujours seuls; ils ont
l’avantage de pouvoir écouter la voix de Dieu au fond du cœur s’ils veulent
s’en donner la peine. On sait que
plusieurs se sont sanctifiés en gardant les moutons, comme le Curé d’Ars,
Bernadette, Jeanne d’Arc, et une foule d’autres. Tout est favorable à entretenir l’union de
l’âme avec Dieu. C’est une vie de
pauvreté nécessairement. Ils n’ont rien
avec eux dans la solitude et le soir ils sont tellement fatigués qu’ils se
couchent de bonne heure et par conséquent ils ne peuvent prendre part aux
amusements ordinaires des gens des villes ou même des villages. Isolement, privations et souffrances résument
la vie du berger. Voilà l’échantillon
que Dieu nous donne de la vie des chrétiens qui vivent vraiment la vie de Jésus.
jésus
est pasteur
Jésus
a toujours affectionné la vie des bergers.
Il s’est fait annoncer par les prophètes comme le futur berger de son
peuple. Jer. 23-3: «Et moi je rassemblerai le reste de mes
brebis de tous les pays d’où je les aurai chassées et je les rassemblerai dans
leurs pâturages; elles croîtront et se multiplieront. Et je susciterai sur elle des pasteurs qui
les paîtront; elles n’auront plus ni craintes ni terreur et il n’en manquera
plus.» Eze. 34-12: «Comme un pasteur
passe en revue son troupeau au jour où il se trouve au milieu de son troupeau
épars, ainsi je passerai mes brebis en revue et je les retirerai de tous les
lieux où elles ont été dispersées. Je
sauverai mes brebis. Je leur susciterai
un seul pasteur et il les fera paître, mon serviteur David; c’est lui qui les
paîtra et c’est lui qui sera pour elles un pasteur.» On sait que Jésus a passé
son titre de pasteur avec sa fonction à l’Eglise dans la personne de Pierre
quand il lui donna les clefs du paradis en lui disant: pais mes agneaux, pais
mes brebis. A son tour Pierre et les
Papes ses successeurs ont transmis leurs pouvoirs aux Evêques et aux prêtres. Dans les premiers siècles de l’Eglise cette
idée du Pasteur était très en vogue parmi les chrétiens et les Pères de
L’Eglise s’en servent souvent. Cette
idée du bon Pasteur devrait être étudiée par tous les prêtres du monde, car
elle contient un splendide résumé de leurs devoirs et de leurs fonctions envers
les fidèles qui sont comme de vrais moutons.
Ils suivent leurs prêtres aveuglément, aussi s’ils sont païens de
mentalité, les paroissiens le seront aussi; s’ils sont des sports, les
paroissiens le seront aussi; s’ils ne les voient jamais faire de visites au
T.S.S., ils n’en feront pas non plus, s’ils ne les entendent jamais parler des
choses de Dieu, mais des bagatelles de la terre, ils les imiteront; ce sont
moutons! Les prêtres devraient le savoir
et se conduire en conséquence. Puisque
Jésus tient tant à son titre de pasteur, c’est donc qu’il contient l’essence de
sa vie et de sa doctrine, il vaut donc la peine d’être étudié à ce point de
vue. Un bon pasteur nourrit, défend et
aime ses brebis. Voyons ces trois
qualités dans Jésus avec la volonté de l’imiter en ces trois points. Jésus nous nourrit. Le principal but qu’a un berger, c’est de
trouver des pâturages abondants pour son troupeau; c’est sa principale
préoccupation comme la vie du troupeau est essentielle. Quand même ces pâturages sont loin ou
difficiles d’accès, il se donne la peine de les trouver et d’y conduire son
troupeau. C’est un échantillon de ce que
Jésus fait pour nous. D’abord on sait
qu’il est venu pour nous donner la vie surnaturelle de la grâce afin de nous
rendre semblables à Lui. C’est cette vie
qu’il veut entretenir en nous de trois façons par ses exemples, par sa
doctrine, par sa grâce. Par ses
exemples. Comme cette grâce est une vie,
elle se nourrit par l’exercice ou par la pratique et donc des actes de cette
vie. Eh bien, il nous montre par toutes
ses actions comment exercer cette vie.
Ce qu’il dit au lavement des pieds: Je vous ai donné l’exemple afin que
vous fassiez ce que vous m’avez vu faire, s’applique à toute sa vie, en autant
que nous pouvons l’imiter avec le secours de sa grâce.
Les
premiers chrétiens étudiaient la vie de Jésus.
Les ermites allaient dans le désert pour ne pas être dérangés par les
affaires du monde et ils se livraient uniquement à l’étude de la Bible pour
mieux connaître et mieux imiter la vie de Jésus. De la crèche à la croix ils trouvaient toutes
sortes de vertus à imiter, comme sa pauvreté, son humilité, sa bonté, son
esprit de prière, etc. En faisant entrer
ces actions de Jésus dans leur propre vie, ils se trouvaient à reproduire la
vie de Jésus; leur vie se développait selon celle de Jésus. L’exemple sera toujours la meilleure forme de
prédication. L’homme doué de sensibilité
est affecté beaucoup par ce qu’il voit, qu’il entend et qu’il touche; c’est là
surtout qu’il est «mouton». Les prêtres,
les supérieurs de religieux et les évêques devraient savoir qu’ils sont le
point de mire des inférieurs qui vont les imiter en tout.
Ils
ont beau cacher leurs attaches ou leurs défauts, ils sont toujours découverts
avec le temps… et les inférieurs feront comme eux. D’abord c’est un scandale pour eux, puis
avant longtemps, le démon aidant, ils se trouvent des raisons pour les
imiter. Même si leurs sermons donnent la
vraie doctrine, les fidèles et les inférieurs suivent surtout les exemples. Qu’un prêtre fumeur aille donc essayer de
dire aux gens de ne pas avoir cette attache et donner la doctrine des Saints
sur les attaches, tout est absolument perdu dès qu’ils le verront fumer son
cigare. «Lui fume bien!» fera le tour de
la paroisse bien vite. Les prêtres le
savent bien, aussi ils n’iront jamais conseiller aux autres des choses qu’ils
ne pratiquent pas euxmêmes. Jamais un
fumeur ne donnera la doctrine de Jésus sur les attaches. Voilà pourquoi tous les fumeurs préfèrent la
philosophie de la religion où il n’est jamais question ni de la mentalité ni
des attaches aux créatures permises. Il
en est ainsi pour tous ceux qui ont des attaches quelconques. Voilà pourquoi tant de prêtres expliquent les
choses «in se» ou «en soi» comme de vrais païens qu’ils sont dans la
mentalité. Cette philosophie n’attaque
jamais «l’amour» des choses créées permises ni «l’amour» de soi-même, les deux
pires ennemis de l’amour de Dieu dans l’âme.
Comme Jésus a vécu sa doctrine, que les évêques et les prêtres vivent
aussi le christianisme dans toute leur vie.
En dehors des offices de l’Eglise où la gloire de Dieu peut permettre du
luxe, qu’ils vivent le mépris des choses créées dans leurs maisons, leurs
voyages, dans leurs habits et dans leurs conversations. Nous devons prêcher une religion austère,
contraire à l’amour des créatures, alors montrons-le dans notre façon de
vivre. Quelle belle prédication si les
Curés avaient des presbytères pauvres comme les parloirs des Carmélites, des
Trappistes et des plus pauvres religieux!
Pourquoi
tiennent-ils tant à imiter le luxe du monde au lieu d’imiter la pauvreté de
Jésus? Est-ce que c’est le monde qu’ils
doivent prêcher ou Jésus? Alors qu’ils
vivent comme celui qu’ils doivent reproduire dans leur propre vie et dans la
doctrine. Les convenances avec Jésus
sont aussi obligatoires que les convenances avec le monde que tout chrétien
doit mépriser comme du fumier! Tandis
que Dieu nous commande d’aimer Jésus de toutes nos forces; alors les
convenances de notre amour pour Jésus sont autrement importantes que les
convenances avec le monde que nous devons haïr.
Mais est-ce que la façon de vivre de beaucoup d’ecclésiastiques
n’indique pas le contraire; qu’ils sont amants du monde à la folie et qu’ils
sont indifférents pour Dieu? Si leur
coeur est avec Jésus, qu’ils le montrent en l’imitant dans son mépris concret
pour les échantillons et dans le renoncement à soi-même et donc par l’humilité
pratique.
Qu’ils
vivent aussi sa charité pour le monde en étant patients avec les gens souvent
ignorants, ennuyeux et importuns. Or
comme les prêtres sont souvent impatients!
Comme ils ne sont pas capables de supporter les contrariétés! Chacun doit porter sa croix tous les jours,
dit Jésus. Eh bien, les prêtres aussi
donc! Voilà une doctrine qu’on aimerait
à leur voir vivre dans le concret, afin que les fidèles apprennent la patience
des prêtres. Comme ils sont rares ceux
qui peuvent donner cet exemple aux fidèles!
c’est normal pour nous d’être importunés, d’être méprisés, d’être
contrariés. Est-ce que Jésus ne l’a pas
été habituellement? St-Pierre ne dit-il
pas que lorsqu’on insultait Jésus, qu’on le maltraitait, il ne répondait pas
par des injures, mais il s’abandonnait à celui qui le jugeait injustement. Eh bien, quand verrons-nous des prêtres, des
religieux et des évêques capables de supporter des affronts en imitant la
patience de Jésus? Ils ont toujours
comme prétexte qu’il faut sauver leur dignité.
Mais est-ce que Jésus n’avait pas autant de dignité à sauver que n’importe
quel évêque ou prêtre? Chacun se cache
derrière sa dignité pour repousser les humiliations de la vie; ce n’est pas
ainsi que Jésus a agi. Il nous donne
l’exemple de toutes les vertus pénibles à pratiquer et contre nature; nous tous
nous devons l’imiter en cela. Supposons
qu’un prêtre est rudoyé ou insulté, qu’il se taise, qu’il remercie son
insulteur et qu’il lui fasse du bien.
Cette douceur dans un prêtre fera plus pour faire connaître Jésus que
plusieurs de ses sermons auraient pu faire… Les gens diront: c’est un
saint! Alors ils écouteront ce saint
quand il leur parlera de Jésus. Jésus
n’allait pas aux amusements; que tout chrétien et à plus forte raison tout
prêtre et tout religieux s’abstienne d’y aller.
Et quand il va dans une maison, que tout le monde sache que c’est
toujours pour une raison de ministère, jamais pour banqueter, pour fumer de
gros cigares et boire de bonnes liqueurs avec les riches. Ces sorties pour jouir ne se rencontrent pas
dans la vie de Jésus et ne devraient pas se rencontrer dans la vie d’un
chrétien, encore moins dans celle d’un prêtre ou d’un religieux. N’oubliez pas que vos «moutons» vous
surveillent et feront comme vous!
Jésus
nous nourrit aussi de sa doctrine.
«L’homme ne vit pas seulement de pain, comme dit Jésus à Satan au
désert, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu.» Ce qu’est le pain
pour le corps, la parole de Dieu, reçue avec foi, l’est pour l’âme. C’est la foi en cette parole qui alimente
notre vie divine. La parole et par suite
la prédication est d’une importance capitale dans notre religion, c’est elle
qui tient ensemble les fidèles comme la voix du berger tient ensemble les
brebis. Mais il faut qu’elle soit la
parole de Jésus et donc la doctrine intégrale de Jésus, pas simplement ce qui
va avec le naturel en l’homme, ou ce qui est agréable à la nature, mais aussi
le mépris du monde et la folie de la croix avec le renoncement à soi-même. Voilà ce qui est la sagesse de Dieu et la
force de Dieu, comme dit St-Paul, Or, c’est justement la partie que les prêtres
en général laissent de côté. Comme Jésus
prêchait tout ce que son Père lui avait commandé de prêcher, ainsi, les prêtres
doivent prêcher tout ce que Jésus leur a commandé de prêcher. Or quand il envoie ses Apôtres, à son
Ascension, il dit bien clairement: «Allez, enseignez aux nations tout ce que je
vous ai appris.» Ce n’est donc pas aux prêtres de faire un choix selon le
naturel ou selon le goût du public, mais ils sont tenus de donner absolument
toute la doctrine de Jésus telle qu’il la donnait lui-même. Trop de prêtres tendent l’oreille à l’opinion
du peuple pour lui donner ce qu’il veut; ils ont peur de le contrarier pour ne
pas être critiqués ni persécutés. Aussi
comme ils sont habiles pour aiguiller la prédication sur la simple philosophie
de la religion. Leurs explications des
«in se» ne dérange pas un démon en enfer ni un fidèle sur la terre… et ils ont
la paix comme le monde la donne, mais non comme Jésus la donne. C’est la raison fondamentale de la platitude
de la plupart des sermons. Ces
prédicateurs débitent ce qu’ils savent de la religion simplement pour se
débarrasser de leur sermon qu’ils sont bien obligés de donner. Mais rien ne vient de leur coeur, même quand
ils font gronder leur tonnerre sans éclair pour mieux couvrir le vide de leur
doctrine. On comprend qu’ils aient
conscience d’ennuyer les gens et qu’ils le sont eux-mêmes. Aussi ils abrègent leurs sermons. Mais là n’est pas le remède: ce n’est pas la
quantité qui embête ordinairement, c’est la qualité. Cinq minutes «d’in se» est aussi indigeste
qu’une pincée de brin-de-scie pour nous.
Jésus n’a jamais donné un seul «in se», mais il était toujours concret
et pratique; c’était de la vie vécue qu’il leur donnait. Il ne dit pas «Bienheureuse la pauvreté», en
parlant dans l’abstrait, mais «bienheureux les pauvres.» Il ne parle pas de la
filiation divine, il dit que nous sommes les enfants de Dieu. Il se sert constamment de la petite vie
insignifiante et journalière des gens qui l’entourent pour illustrer sa doctrine
céleste. De même les prêtres devraient
être plus concrets; qu’ils sortent donc de leur stratosphère de l’abstrait qui
embête tout le monde et qui ne fait aucun bien.
Pour cela il faudrait donner sa propre vie ou prêcher selon ce qu’on a
dans le coeur et malheureusement ils sont bien rares ceux qui vivent dans
l’amour la vie de Jésus; voilà pourquoi il y a tant «d’acteurs» dans la chaire
de nos églises, mais peu d’apôtres, peu de prêtres qui sont capables de donner
la vie de Jésus telle qu’ils la vivent eux-mêmes. Il n’y a aucun artifice d’éloquence qui peut
remplacer le don de Dieu et les gens ne s’y trompent pas. Dès qu’un prêtre ne donne pas le Jésus qu’il
vit, ils n’écoutent plus sa parole, pas plus que des «moutons» n’écoutent la
voix d’un berger étranger. Avis à ceux
qui se plaignent que les fidèles n’écoutent pas bien leurs sermons; c’est
qu’ils ne prêchent pas la parole du Maître, mais qu’ils font de la philosophie
abstraite et insipide pour le coeur des fidèles.
Dès
que l’on prêche le Jésus que l’on vit dans le coeur, on goûte un grand plaisir
à le prêcher et l’on prend toutes les occasions possibles pour le faire. Ainsi Jésus prêchait du matin au soir, dans
les synagogues, dans les maisons privées, sur le bord du lac, dans les champs,
et partout où la foule se trouvait. Il
avait à coeur de faire connaître son Père et le royaume de Dieu. Il voulait sauver le plus d’âmes possibles;
c’était là l’aiguillon qui le faisait marcher.
Que Dieu nous donne des prêtres de cette trempe surnaturelle. Jésus nous nourrit aussi par sa grâce, qui
est une participation créée à sa propre vie divine et par laquelle nous
devenons les véritables enfants de Dieu.
C’est surtout par l’Eucharistie qu’il nous donne sa grâce comme
nourriture. «Celui qui mange ma chair et
boit mon sang a la vie éternelle en lui…» Et encore: «Je suis le pain descendu
du ciel, si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement, et le pain que
je lui donnerai c’est ma chair pour le salut du monde…» Et il ajoute: «Celui
qui ne mange pas de ce pain n’aura pas la vie éternelle. «Les bergers se contentent de trouver des
pâturages pour leurs brebis, mais Jésus le bon Pasteur se donne à manger à ses
brebis! On ne peut pas faire plus pour
elles. Jésus se donne encore dans toutes
les grâces actuelles qu’il nous offre au jour le jour. En résumé Jésus nous nourrit par ses
exemples, par sa doctrine et par sa grâce.
Il se donne donc lui-même avec ses dons.
Tout pour son troupeau! Combien
de prêtres pourraient se rendre ce témoignage que toute leur vie est aux
fidèles exclusivement?
Jésus
nous défend. Contre nos ennemis qui sont
les démons, le monde et nous-mêmes.
Contre les démons.
D’abord
Jésus par ses mérites a brisé l’empire que les démons exerçaient sur le monde
de sorte que ceux qui s’appuient sur Jésus peuvent les vaincre avec sa
grâce. Mais comme les démons continuent
de nous tenter, toute notre vie, là encore Jésus par sa grâce vient à notre
secours si nous le prions avec foi et amour.
St-Paul avait cette doctrine dans l’esprit quand il écrit aux Ephésiens,
6: «Au reste, mes frères, fortifiez-vous dans le Seigneur et dans sa vertu
toute-puissante. Revêtez-vous de
l’armure de Dieu afin de pouvoir résister aux embûches du diable. Car nous n’avons pas à lutter contre la chair
et le sang, mais contre les princes, contre les puissances, contre les
dominateurs de ce monde de ténèbres contre les esprits mauvais répandus dans
l’air. C’est pourquoi, prenez l’armure
de Dieu afin de pouvoir résister au jour mauvais et après avoir tout surmonté,
rester debout.»
C’est
donc bien
certain que les démons sont
continuellement à nous tendre des embûches pour nous faire tomber dans le péché
après nous avoir aveuglés sur la doctrine et sur le plan de Dieu. D’ordinaire ils laissent tranquilles les
prêtres philosophes et les fidèles à mentalité païenne, dans ce sens qu’ils ne
les font pas persécuter, mais ils les poussent au péché quand même. Mais quand on veut vivre Jésus-Christ et le
donner au monde, alors ils suscitent des persécutions pour faire cesser cette
prédication qui ruine leur emprise sur les hommes. «Tous ceux qui veulent vivre pieusement dans
le Christ souffriront persécution.» Il ne faut pas en avoir peur; nous serons
avec notre Maître qui a bien été crucifié pour l’amour de nous. Jésus nous enseigne le jeûne comme le
meilleur moyen de résister au démon.
Joint à la prière, il est très efficace contre les démons. Voilà pourquoi les premiers chrétiens
jeûnaient tant et priaient beaucoup à l’exemple de Jésus. Aussi ils vivaient purs de tout péché et
étaient capables d’aller au martyre pour leur foi. Jésus nous enseigne comment éviter la
stratégie du démon par la mortification de nos deux amours naturels pour les
créatures et pour nous-mêmes. Mais
surtout en nous donnant la vie divine et avec les moyens pour nous sanctifier
nous avons là tout ce qu! il nous faut
pour résister aux démons.
Les
prêtres devraient tenir compte de l’action des démons contre les chrétiens;
plusieurs n’y attachent aucune importance comme si les démons n’existaient
pas. On comprend que les philosophes
aient cette mentalité puisque leur philosophie ne fait aucun tort aux démons,
mais ils s’en vont avec leurs fidèles à la dérive sur le courant d’un grand
paganisme mental qui suffit pour tenir les masses loin de Dieu. St-Paul appelle les démons les princes de ce
monde, les puissances, les principautés.
Ephé. 6; c’est donc qu’ils agissent
comme s’ils étaient les maîtres du monde naturel. Jésus les appelle les dieux de ce
siècle. Voilà pourquoi ils essaient de
tenir les hommes dans le naturel de vie et des motifs, car là ils en font ce
qu’ils veulent. tandis que lorsqu’un
homme monte dans le surnaturel pour sa vie et ses motifs, il échappe au
contrôle du démon. Voilà pourquoi le
démon fait du tapage seulement quand on veut sortir du monde naturel pour se
diviniser soit dans l’âme par la grâce sanctifiante soit dans la mentalité par
les motifs surnaturels. On voit pourquoi
maintenant les philosophes ne sont jamais molestés par les démons; ils sont païens
de mentalité et ils y restent avec leur philosophie de sorte qu’ils se trouvent
à être contre lui, comme dit Jésus: «Celui qui n’est pas avec moi est contre
moi.» Contre le monde. Jésus, par ses
exemples, sa doctrine et sa grâce, nous préserve de sa contagion païenne. Celui qui suit ces trois choses évite
l’esprit du monde et ses pièges, comme les premiers chrétiens faisaient. On peut reconnaître les esclaves du monde par
le respect humain. Ceux qui ont une peur
bleue de lui déplaire le reconnaissent évidemment comme leur prince, comme leur
dieu. C’est la très grande majorité des
chrétiens. Combien se livrent à toutes
sortes d’attaches pour faire comme les autres.
Prenons l’exemple du tabac. On
commence à fumer pour faire son homme, pour faire comme les autres. On fait ainsi pour toutes les attaches au
monde. Ces gens ne se demandent jamais
ce que Dieu pense de telle jouissance ou de telle attache, mais toujours ce qu’on
va dire autour d’eux; ils scrutent l’horizon et écoutent l’opinion du monde
pour agir en conséquence. Eh bien, Jésus
par sa vie et son enseignement nous délivre de cet esclavage. Il nous ramène sous notre véritable maître:
Dieu. Ceux qui le suivent ont toujours
les yeux fixés sur lui pour voir ce qu’il veut, et ils agissent selon sa
volonté. Il est leur maître comme il
doit l’être de tous les hommes et ils vivent uniquement pour lui comme tout
chrétien doit faire. Voilà donc ce que
nous devons faire à l’avenir: être tout à Jésus, notre unique Maître et
souverain Seigneur du ciel et de la terre.
Contre
nous-mêmes, c’est-à-dire contre nos tendances naturelles qui nous attirent aux
créatures. En nous protégeant contre les
démons et contre le monde, il supprime ce qui alimente nos tendances naturelles
et ainsi les mortifie. Il nous protège
contre de mauvaises rencontres où nous l’offenserions sûrement, il nous donne
de bons conseils par les prêtres, nos parents et nos amis, par des inspirations
de sa grâce et par une foule de moyens qui seraient trop long d’énumérer et que
l’on connaît bien. Les prêtres devraient
essayer de faire de même pour les âmes qui leur sont confiées; qu’ils
réfléchissent souvent comment leur venir en aide et comment les protéger de la
contagion du monde, des pièges du démon et de leur amourpropre. Pour cela on voit que les prêtres doivent
étudier la vie ascétique et mystique et connaître les voies de Dieu et des
démons pour suivre les premières et éviter les secondes. Jamais des fumeurs, des sports, des joueurs
de cartes, des coureurs de grands chemins, des amateurs de bonne chère se
livreront à ces études et encore moins à ces pratiques. On voit pourquoi nos chrétiens sont si païens
de mentalité. Jésus nous aime. Si Dieu s’est donné tout entier au salut des
hommes c’est qu’il les aimait profondément, il les a créés, il les a rachetés
et il veut les sanctifier pour les avoir avec lui au ciel. Voilà le ressort qui le fait agir dans toute
sa vie terrestre. Pour nous, prêtres,
comment arriver à aimer les hommes que Dieu met sur notre chemin de la même
façon? Eh bien, ce n’est qu’en passant
par Jésus-Christ. A mesure qu’il sera
formé en nous, nous prendrons ses idées et son amour. C’est en devenant une seule chose avec lui
par la sainteté de vie, en pratiquant tout ce que nous savons être utile pour
cette fin. Remarquons, que Dieu nous a
aimés lorsque nous étions pécheurs et qu’il s’est livré pour nous
racheter. Eh bien, que les prêtres
essaient donc d’aimer leurs pécheurs de l’amour de Jésus pour nous et qu’ils se
donnent corps et âme pour leur salut.
Enfin cet amour de Jésus pour nous est trop évident pour que nous nous y
arrêtions plus longtemps. le
mercenaire. Il s’occupe de son troupeau
surtout pour ses propres intérêts à lui; il fait tout le contraire du bon
pasteur; il se nourrit lui-même, il se défend et il s’aime luimême. Il prend le plus possible du troupeau et lui
donne le moins possible. Il leur donne
un semblant de doctrine mais vide de toute substance pour l’âme. Ezéchiel écrit un chapitre contre les
mercenaires que tout prêtre devrait méditer parfois. «Ainsi parle Yahweh: “Malheur aux pasteurs
d’Israël qui n’ont fait que se paître eux-mêmes”. N’est-ce pas le troupeau que les pasteurs
devaient paître? Vous mangiez la
graisse, vous vous revêtiez de la laine, vous tuiez ce qui était gras, vous ne
paissiez pas le troupeau. Vous n’avez
pas fortifié les brebis débiles, vous n’avez pas soigné celles qui étaient
malades, vous n’avez pas pansé celles qui étaient blessées, vous n’avez pas
ramené celles qui s’étaient égarées, vous n’avez pas cherché celles qui étaient
perdues, mais vous avez dominé sur elles avec violence et cruauté et elles se
sont dispersées faute de pasteurs et elles sont devenues la proie des bêtes de
tous les champs. Voici que je viens aux
pasteurs, je redemanderai à leurs mains mes brebis et je ne leur laisserai plus
de troupeau à paître et les pasteurs ne se paîtront plus eux-mêmes.» c. 34.
Comme
ces paroles s’appliquent à une foule immense de prêtres qui le sont pour vivre
richement! On les reconnaît en les
entendant comparer les paroisses entre elles.
Quand le font-ils au point de vue de la sainteté? C’est ordinairement selon les revenus. On estime les paroisses en fonction des
piastres, pas des âmes à donner à Jésus!
Que ces prêtres méditent le 34e chapitre d’Ezéchiel très souvent! On les reconnaît au luxe de leurs presbytères
et à leur table somptueuse, aux satisfactions de toutes sortes qu’ils se
donnent par-dessus le marché! C’est
inutile d’énumérer les abus de toutes sortes qu’on peut voir; c’est trop triste
et humiliant pour notre religion. Que
ceux qui vivent comme le «bon» riche de l’Evangile craignent son sort en enfer,
simplement pour avoir mis son bonheur dans les jouissances permises de ce monde
comme la masse des prêtres font et les religieux de même. Ce qui étonne c’est le manque de scrupule
dans ces viveurs des choses permises.
Evidemment ils n’ont que leur philosophie pour se conduire et elle
permet tout excepté le péché. Il me
semble que les bons prêtres, même formés à la philosophie devraient ouvrir les
yeux quand ils voient les excès de tant de confrères, qui n’ont que leur doctrine
philosophique. Qu’ils sortent donc de
cette religion abstraite, de leurs diaboliques «in se», qui est du pur
paganisme. Que tout prêtre prenne pour
lui ses paroles de StPierre: «J’exhorte les pasteurs à paître leur troupeau non
dans un intérêt sordide, mais par dévouement.» I P. 5-1 Jésus a prêché contre les deux amours
naturels que nous avons tous par nature; que les prêtres fassent de même et ils
auront la note juste en tout et le St-Esprit coopérera avec eux pour le salut
des âmes. C’est l’amour des créatures et
l’amour de soi qui empêchent l’amour de Dieu dans nos coeurs. Ce n’est pas seulement le péché dans tel
acte, mais ces deux amours naturels. Le
monde en est plein, il est clair, et où sont les prêtres qui peuvent les
attaquer systématiquement? Pas un
philosophe de la théologie ne peut le faire.
Eh bien, c’est en étudiant la vie de Jésus qu’on vient à se saturer de
son esprit pour le prêcher au monde. Il
était plein de l’amour de Dieu et voulait le donner au monde; c’est pourquoi il
a tant prêché contre ces deux amours païens que nous avons tous et que si peu
de prêtres peuvent et savent comment attaquer.
Les prêtres qui ont les paroisses des riches et des grands sont en grand
danger de se perdre parce qu’ils ont une peur bleue de déplaire à ces grands
mondains. Comme on surveille les sermons
dans ces paroisses fashionables pour ne pas troubler ces riches païens! Pensez-vous qu’on laisserait prêcher la folie
de la croix et le mépris du monde à la paroisse de Hollywood? Jamais de la vie! Pas un mot non plus de l’enfer ni des
rigueurs de la justice divine. Ce n’est
que la miséricorde et ses étoiles filantes, en bloc, n’ont qu’à se laisser
faire pour arriver au ciel! Allez donc
parler contre l’empêchement de famille à la haute société! On se ferait bâillonner vite. On prêche de jolis beaux petits sermons
parfumés à l’eau de rose avec des nuages d’encens aux «braves chrétiens» qui
sont là et qui font un si grand honneur à Dieu de condescendre à venir l’adorer
dans son Eglise. Il faut dire à
l’honneur des fidèles de ce genre qu’ils ne sont pas à blâmer, mais bien les
prêtres qui renient Jésus pour satisfaire ce monde, qui ont plus souci de
plaire aux hommes que de plaire à Jésus.
Car ces gens sont contents qu’on leur prêche toute la vérité évangélique
dans toute son austérité et Jésus-Christ crucifié. Souvent ils sont scandalisés de voir les
prêtres s’abaisser à eux au lieu de les monter à Jésus-Christ tel qu’il est sur
la croix.
Le
vrai pasteur imite Jésus Que le bon pasteur fasse tout ce que Dieu reproche aux
pasteurs d’Israël de ne pas avoir fait, comme de ne pas aller chercher les
pécheurs, de ne pas aller visiter les malades, de ne pas soulager les faibles,
de ne pas instruire les ignorants, etc.
Comme Jésus cultivait les pécheurs, les pauvres et les infirmes, ainsi
les prêtres doivent porter secours à tous ceux qui en ont besoin dans n’importe
quel ordre et autant qu’il le peut.
Comme une foule de prêtres expédient vite leurs visites aux malades; à
peine une parole banale et vite ils s’en vont et reviennent quand on va les
chercher. Mais comme ces mêmes prêtres
ont du temps pour cinquante niaiseries frivoles, causeront des heures de temps
avec des confrères en fumant, ou assisteront à des parties pendant des heures,
etc. Il faut qu’ils soient tout aux
choses de Dieu et alors ils trouveront bien le temps de s’occuper de leurs
fidèles par eux-mêmes et par leurs vicaires.
Si leur paroisse est trop grande ils demanderont à l’évêque de la
diviser, se souciant peu de la diminution des revenus. Comme le bon pasteur donne sa vie pour ses
brebis, que les bons prêtres au moins donnent leur temps, le meilleur de leur
activité, leurs aises et toutes les lumières que Dieu leur donne pour le salut
du monde. Qu’ils soient heureux de se fatiguer
dans ce travail divin, de donner leur santé et tout leur cœur. Quand ils mourront ils seront contents de
trouver place à côté de leur modèle divin le bon Pasteur notre Seigneur
Jésus-Christ! Demandons au St-Esprit ses
dons pour être dociles aux inspirations divines pour nous faire ressembler au
bon Pasteur!
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