mardi 31 juillet 2018

Père Onésime Lacouture - 3-20 - Le discours après la Cène partie II



DIX-NEUVIÈME INSTRUCTION
LE DISCOURS DE JÉSUS APRÈS LA CÈNE.
(DEUXIÈME PARTIE)

« JE SUIS LA VIGNE ET MON PÈRE EST LE VIGNERON… ET VOUS ÊTES LES BRANCHES».

« MON PÈRE EST LE VIGNERON ».

« MON PÈRE RETRANCHERA TOUTES LES BRANCHES QUI NE PORTENT PAS DE FRUIT EN MOI ».

« MON PÈRE ÉMONDERA CELLE QUI PORTE DES FRUITS AFIN QU’ELLE DONNE PLUS ».
« JE SUIS LA VIGNE ET VOUS ÊTES LES BRANCHES. CELUI QUI DEMEURE EN MOI ET EN QUI JE DEMEURE, PORTE BEAUCOUP DE FRUIT; CAR VOUS NE POUVEZ RIEN FAIRE SANS MOI ».

« SANS MOI, VOUS NE POUVEZ RIEN FAIRE ».

« SI QUELQU’UN NE DEMEURE PAS EN MOI, IL SERA JETÉ DEHORS COMME UN SARMENT INUTILE, IL SÉCHERA ET ON LE RAMASSERA POUR LE JETER AU FEU ET LE BRÛLER ».

« COMME MON PÈRE M’A AIMÉ, JE VOUS AI AUSSI AIMÉ. DEMEUREZ DANS MON AMOUR ». 

« MON COMMANDEMENT EST QUE VOUS VOUS AIMIEZ LES UNS LES AUTRES COMME JE VOUS AI AIMÉS. PERSONNE NE PEUT AVOIR UN PLUS GRAND AMOUR QUE DE DONNER SA VIE POUR SES AMIS ».

« VOUS ÊTES MES AMIS SI VOUS FAITES LES CHOSES QUE JE VOUS COMMANDE ».

« JE SUIS LA VIGNE ET MON PÈRE EST LE VIGNERON… ET VOUS ÊTES LES BRANCHES».

Remarquons comment Jésus a toujours pris des exemples concrets dans la nature pour illustrer sa doctrine divine. Car Dieu a créé ce monde pour faire connaître l’autre; les prêtres devraient toujours imiter J.-C. et expliquer leur doctrine avec des exemples pris dans la nature. C’est respecter le plan divin qui veut que nos idées nous viennent par les sens et donc par les choses visibles et tangibles de ce monde. Mais on a beau le dire et insister, combien peu de prêtres vont changer leur tactique de philosophes spéculatifs. Aussi les fidèles s’ennuient et trouvent les sermons toujours trop longs, justement parce que les sens et l’imagination n’ont rien à faire et donc ne donnent rien à l’intelligence. Personne ne devrait enseigner une vérité sans l’illustrer par quelque chose de concret dans le monde. Jésus a trouvé des exemples pour toute sa doctrine; que les prêtres l’imitent donc sur ce point important! Est-ce qu’on ne dit pas en philosophie que rien n’entre dans l’esprit sans passer par les sens? Alors donnons donc toujours quelque chose aux sens pour expliquer une vérité.

La vigne est formée de son cep et de ses branches. La même vie circule dans les deux. Eh bien! Dans l’ordre surnaturel, Jésus est comme un cep et nous sommes les branches; c’est dire que la même vie divine circule en Jésus et en nous quand nous sommes en état de grâce.

Or, en J.-C., c’est la vie de la Trinité qui le fait vivre; donc la vie du Père, la sagesse du Fils et l’amour du Saint-Esprit. Or, la vie du Père pour nous, c’est la grâce sanctifiante. Combien de nigauds restent là et s’en contentent! Est-ce que Jésus s’est contenté de la seule vie divine? Pas du tout. Il avait la sagesse du Verbe et l’amour du Saint-Esprit. Eh bien! Nous tous aussi devons reproduire les activités (3) des trois personnes divines.

Donc nous devons penser comme notre Cep, juger comme lui, estimer les choses comme lui. Puis nous devons aimer comme lui Dieu par le Saint-Esprit. Qu’on nous laisse donc la paix avec la seule grâce sanctifiante: elle n’est que le tiers de Dieu pour ainsi dire. Il faut en plus agir avec la sagesse du Fils et l’amour du Saint-Esprit.

Dans la vigne si une branche ne reçoit qu’une partie de la vie du cep, elle se dessèche vite. Eh bien! Le chrétien en qui ne coule qu’une partie de la vie divine va vite se séparer du Père. S’il n’en pense pas, s’il n’en juge pas comme Jésus, il ne gardera pas longtemps la vie du Père ou la grâce sanctifiante. Ceux qui ne sont pas conduits par l’Esprit de Dieu ne sont pas ses enfants! Ils vont vite cesser de l’être!

« MON PÈRE EST LE VIGNERON ».

C’est lui qui plante sa vigne. C’est lui qui lui donne ses branches. Il nous a choisis par pure bonté et librement. Quelle ne devrait pas être notre reconnaissance pour cette élection divine sans aucun mérite de notre part! Rendons donc notre vocation certaine par nos bonnes œuvres, comme nous dit Saint Pierre. Car les branches peuvent tomber de la vigne! Prions pour que cela ne nous arrive pas!

Personne ne sera enté sur J.-C. si Dieu ne l’appelle pas. La foi qui nous est nécessaire pour appartenir à Jésus est un pur don de Dieu absolument gratuit. Jésus le dit bien à Pierre quand il professa ouvertement que Jésus était le Fils de Dieu vivant. Jésus lui dit que ce n’était pas la chair ni le sang qui le lui avait révélé, mais son Père qui est dans le ciel. Cela est vrai pour tout surnaturel.

Apprécions cette vie surnaturelle: Jésus a été crucifié pour nous la mériter! Faisons donc les sacrifices nécessaires pour ne jamais commettre de péché mortel qui la tue. Mieux que cela, évitons comme le démon tout ce qui nous conduit au péché. Or la plus grande cause objective des péchés en nous est dans les motifs naturels. C’est par là que le démon nous prend: ce sont les filets de Satan.

« MON PÈRE RETRANCHERA TOUTES LES BRANCHES QUI NE PORTENT PAS DE FRUIT EN MOI ».

Porter des fruits en Jésus, c’est évidemment porter des fruits surnaturels de sainteté. Par conséquent, ceux qui ont la grâce sanctifiante… et qui n’agissent pas en enfants de Dieu, mais comme des païens, avec des affections naturelles et des motifs naturels, tomberont dans le péché et ainsi seront retranchés de l’union avec Jésus dans la même proportion.

Comment le Père nous retranche-t-il? Voici la façon ordinaire. Un catholique qui agit avec des motifs naturels ne reçoit pas de divin pour ces motifs. S’il agit de la sorte très souvent, il est comme un homme qui se prive de nourriture longtemps, il finit par mourir. De même dans l’ordre spirituel, si on agit de manière à ne pas recevoir la grâce pendant longtemps, on finit par succomber de faiblesse et là c’est le péché véniel d’abord, puis le péché mortel.

Jésus ailleurs enseigne cette même doctrine quand il dit que la maison bâtie sur le sable tombera dans les tempêtes. Le sable est le naturel des motifs et le roc est le surnaturel des motifs. Donc la « branche » qui vit de naturel intentionnel finit par se dessécher et tombe. Faisons donc la guerre à tous les motifs naturels qui vont finir par nous séparer de J.-C.

« MON PÈRE ÉMONDERA CELLE QUI PORTE DES FRUITS AFIN QU’ELLE DONNE PLUS ».
Est-ce qu’un vigneron ne coupe pas de bonnes branches quand il prévoit qu’elles ne porteront pas de fruit et parce qu’elles vivent aux dépens des bonnes? Dieu fera de même. Il taillera dans toute cette bonne activité des motifs naturels parce qu’il prévoit qu’elle ne produira rien pour le ciel et parce que son activité naturelle vit aux dépens de l’autre.

Quelques exemples… autrement on ne prend pas la doctrine! Voici un mari qui « adore » sa femme pour ses belles qualités naturelles. Ce n’est pas péché, mais cet amour naturel devant Dieu ne vaut rien. Alors Dieu va enlever ces bonnes qualités réellement ou apparemment pour le mari. Dieu ne veut pas qu’il cesse d’aimer son épouse, mais qu’il cesse de l’aimer pour ses qualités naturelles. Il va être obligé de dire: naturellement je n’aime pas ma femme, mais uniquement pour Dieu; pour vous, mon Dieu, je vais l’aimer de mon mieux! S’il avait désavoué ses motifs naturels dès le début, Dieu lui aurait laissé ses bonnes qualités.

On peut dire que la plupart des épreuves sont pour détruire les affections naturelles avec leurs motifs naturels. Dieu se sert d’autres païens pour détruire le païen en nous. Un ambitieux rencontrera d’autres ambitieux, qui lui feront de l’opposition; un orgueilleux recevra des coups d’autres orgueilleux. Dès que des gens se plaignent des défauts des autres, on peut être pas mal sûr qu’ils les ont eux-mêmes.

Avis aux parents qui aiment trop naturellement leurs enfants; Dieu les rendra malcommodes et même méchants pour détruire dans les parents cette affection toute naturelle qui déplaît à Dieu. Qu’ils essaient de se dépouiller de cette affection naturelle pour ne les aimer que pour Dieu et en Dieu et alors Dieu ne sera plus jaloux et il laissera les enfants toujours beaux et bons. Que tous surveillent donc leurs affections naturelles partout et toujours, autrement vous paierez pour!…
Plus que cela Dieu veut tellement sa gloire qu’il émonde même les bonnes branches qui portent du fruit, afin qu’elles en portent plus.

Les vignerons taillent leurs bonnes vignes justement pour qu’elles produisent plus de raisins.

Si nos philosophes donnaient un peu de spiritualité dans les séminaires, les jeunes prêtres sauraient tout de suite pourquoi tant de curés les limitent et les arrêtent dans le ministère surtout dans les débuts. Ils arrivent pleins de zèle et d’ardeur pour travailler beaucoup. Voici que le curé s’oppose à peu près à toutes leurs initiatives. S’ils avaient la foi, ils sauraient que Dieu entre justement dans leurs idées et parce qu’il veut qu’ils produisent beaucoup de bien, il commence par les émonder pour qu’ils portent plus de fruit. Ils devraient se jeter à plus de prière, faire des heures d’adoration tous les jours, continuer leurs études d’Ecriture sainte et commencer à écrire des instructions pour le peuple. Se remplir de surnaturel, n’est pas du temps perdu pour celui qui a la foi!

Mais que font ces jeunes prêtres? Ils boudent leur curé, ils se blasent et se jettent à toutes sortes de niaiseries pour tuer le temps sans aucun avantage pour leur ministère plus tard.

Dieu voulait les émonder et ils ne se sont pas laissés faire. Alors ils perdent leur récolte de mérite. Ils ennuieront leurs fidèles quand ils seront curés et ne laisseront pas plus leurs vicaires travailler pour cinquante motifs naturels comme ils vivent habituellement dans le naturel.

Que tous les fidèles cessent donc de déblatérer contre les « émondeurs ». C’est Dieu qui le fait en personne, peu importe son instrument. Il le prend autour de la victime et les plus saints lui serviront comme les païens. A quoi bon se plaindre des ciseaux? C’est le Père éternel qui s’en sert comme il veut. Que de temps précieux perdu dans la direction à cause de cette ignorance! On plaide avec la direction pour revoir les consolations perdues, ou se plaindre des douleurs de l’émondage d’un supérieur, ou d’une supérieure. On est découragé parce que Dieu met des bâtons dans les roues, parce que les supérieurs restreignent notre activité. C’est aussi imbécile que si la vigne se plaignait d’être émondée! Tout chrétien devrait connaître cette parole de l’Evangile et s’y soumettre comme un homme! Comme un chrétien! C’est pour nous faire produire plus de fruit! Où est le mal? Pourquoi regimber contre l’émondage? Que d’aveugles!

Dieu agit de la sorte dans tous les degrés de la vie spirituelle. Jusqu’à la fin de la vie et même dans les sommets avancés de la sainteté, on garde toujours un fond d’activité naturelle intentionnelle que Dieu ne peut supporter. C’est comme une gangrène insupportable pour lui! C’est pourquoi à mesure que nous avançons dans la vertu, Dieu nous purifie de plus en plus de ce paganisme latent et caché jusque dans les profondeurs du cœur. Nous ne pourrions jamais les découvrir par nous-mêmes; alors Dieu nous envoie des épreuves plus ou moins terribles pour nous purifier de cette gangrène naturelle. Si nous étions plus fidèles à lutter contre tous nos motifs naturels, nous nous épargnerions beaucoup d’épreuves.

« JE SUIS LA VIGNE ET VOUS ÊTES LES BRANCHES. CELUI QUI DEMEURE EN MOI ET EN QUI JE DEMEURE, PORTE BEAUCOUP DE FRUIT; CAR VOUS NE POUVEZ RIEN FAIRE SANS MOI ».

Il répète qu’il est la vigne pour nous montrer encore que tous nos fruits de vertu viennent uniquement de Dieu comme cause; notre part d’activité n’est qu’une condition pour qu’il agisse en nous. Ainsi la récolte vient uniquement de Dieu, mais si le cultivateur n’avait pas fait de semailles, Dieu ne lui aurait rien donné: les semailles sont la condition pour que Dieu donne une récolte. Car sans Dieu il n’y aurait pas de récolte, même si les semailles étaient faites.

Ceux qui veulent faire beaucoup de bien devraient donc commencer par améliorer leur union avec Jésus. Il faut se remplir de Dieu d’abord avant de vouloir le donner au monde. Personne ne donne ce qu’il n’a pas. Le prêtre qui passe des heures devant le S.S. est plus pratique que celui qui perd son temps dans toutes sortes d’organisations extérieures pour amuser le monde. Celui qui étudie l’ascétisme et la mystique pour mieux savoir comment se sanctifier est encore plus pratique que celui qui lit les journaux, les revues, court les cinémas et les sports pour faire de l’apostolat à la mode, qui n’en est pas du tout. Jésus dit que notre victoire sur le monde viendra de notre foi et donc de ce que la foi nous montre. Il n’a pas dit: des organisations pour amuser le peuple. En proportion que les prêtres sont païens, ils font des organisations pour amuser le peuple.

Le Saint-Esprit a dit aux Apôtres de cesser de perdre leur temps à distribuer des aumônes aux pauvres, mais de choisir des laïques pour cela. C’est alors qu’ils ont institué les diacres pour ces distributions d’aumônes. Et qu’est-ce qu’il leur dit de faire? Etre tout à la prière pour se remplir de divin et ensuite le déverser aux fidèles par la prédication. Voilà donc la vie des prêtres bien indiquée dès le début du christianisme par le Saint-Esprit lui-même: se remplir de divin et ensuite le donner aux fidèles par la prédication! Le reste doit être laissé aux laïques: comme faire les quêtes dans les églises, ce n’est pas le rôle du prêtre et ceux qui l’imposent aux vicaires seront punis par Dieu. Pas plus de compter les quêtes.

Les curés ont remarqué que la quête est meilleure quand ce sont les prêtres qui la font. Eh bien! Justement cela montre quel païen de curé ils ont! Ils n’attaquent donc jamais les motifs naturels. Quelle belle chance de le faire à l’occasion des quêtes! Si lui-même en appelait aux motifs surnaturels partout et toujours, les gens seraient assez surnaturels pour donner à l’église peu importe le collecteur. Comme ces curés n’ont pas l’intelligence des choses de Dieu… à cause de leurs attaches de toutes sortes: tabac, cinéma, etc…

Tous les prêtres devraient savoir qu’il n’y a aucun bien surnaturel à attendre de tout ce qu’ils font pour des motifs naturels comme ces organisations pour amuser le peuple. Jésus dit que notre victoire sur le monde viendra de notre foi et donc de ce que la foi donne, donc du surnaturel en tout et partout. Que les prêtres se sanctifient d’abord, puis sanctifient leurs ouailles et ensuite peu importe qui fait des quêtes, les fidèles ne donneront que pour le bon Dieu.

Que de prêtres, de religieux et de laïques pourraient faire une heure d adoration tous les jours devant le S.S., s’ils voulaient. Ils puiseraient là des flots de vie divine qu’ils pourraient ensuite répandre sur leur entourage et même sur une foule d’inconnus. Est-ce que les contemplatifs ne convertissent pas un grand nombre d’âmes qu’ils ne connaissent pas? Que personne ne dise qu’il n’a pas le temps pour cette heure d’adoration! Combien on en perd dans cinquante niaiseries à cœur de jour! D’ailleurs, le bon Dieu se venge et il leur envoie des fatigues ou des maladies ou des contrariétés qui leur font perdre plus de temps que leur heure par jour. Qu’on l’essaie pendant un an! On s’apercevra qu’on a fait plus d’ouvrage que jamais! Que d’exemples chez les saints qui ont fait énormément plus d’ouvrage que n’importe qui de nos organisateurs de moyens et de motifs naturels pour occuper le monde.

« SANS MOI, VOUS NE POUVEZ RIEN FAIRE ».

Il ne dit pas: peu; il dit rien. Puisque nous sommes dans son monde divin qui nous dépasse infiniment, il est évident que sans lui nous ne pouvons rien. Que pourrait faire un ver de terre en philosophie? Eh bien! Le surnaturel nous dépasse encore plus. Le signe qu’on est convaincu de son impuissance réside dans l’usage de la prière que nous faisons.

Ces prêtres ou laïques qui font peu de prière montrent que ce sont des païens qui vivent dans le monde naturel où ils se croient capables de tout faire. Le bon Dieu ne bénit jamais ces naturels. Aussi on les entend disputer contre leurs fidèles qui ne sont pas fervents, qui pêchent beaucoup, etc… S’ils avaient des pasteurs surnaturels, ils auraient des chances de les suivre! Sont dans ce groupe ces prêtres qui ne font pas de méditation, pas d’action de grâce, pas de visite au S.S., qui n’étudient pas l’ascétisme et la mystique, etc. Ils ne sont pas aux choses de Dieu et ils ne sont pas capables de montrer à leurs gens comment se diviniser, puisqu’ils ne le sont pas eux-mêmes.

La sainteté de l’apôtre est la source des fruits qu’il fait, nous dit Jésus; donc que chacun travaille pour devenir le plus saint possible, avec la grâce de Dieu. Pour cela, il faut étudier ces matières, lire les meilleurs auteurs sur l’ascétisme et sur la mystique et surtout prier pour avoir la grâce de vivre cette science divine.

« SI QUELQU’UN NE DEMEURE PAS EN MOI, IL SERA JETÉ DEHORS COMME UN SARMENT INUTILE, IL SÉCHERA ET ON LE RAMASSERA POUR LE JETER AU FEU ET LE BRÛLER ».

Donc celui qui n’aura pas la grâce sanctifiante à l’heure de la mort, sera jeté au feu de l’enfer. Mais comme nous pouvons mourir à n’importe quel moment, nous devons tout faire pour toujours être en état de grâce. Or, nous l’avons dit souvent, les microbes qui rongent notre vie surnaturelle sont les motifs humains que nous fournissent nos affections humaines et naturelles. Jésus nous dit carrément que tout ce naturel libre de notre activité est le sable qui fera crouler notre maison spirituelle. Que chacun donc fasse la guerre à tous ses motifs naturels qui le conduiront au péché mortel tôt ou tard. Or ce n’est pas toujours aussi facile qu’on le pense d’entrer en grâce avec Dieu. Dieu envoie des tentations justement pour savoir le degré de notre amour pour lui. Si on préfère la créature dans cet examen, qui nous assure que la préférence de Dieu après la tentation vaut quelque chose devant lui? Après qu’on s’est contenté, c’est facile de dire à Dieu que maintenant on l’aime plus que ce plaisir qu’on vient de prendre, mais qui peut affirmer que cela est l’amour qui donne le ciel?

« SI VOUS DEMEUREZ EN MOI ET QUE MES PAROLES DEMEURENT EN VOUS, VOUS DEMANDEREZ TOUT CE QUE VOUS VOUDREZ ET IL VOUS SERA ACCORDÉ ».

Dieu dit qu’il fera la volonté de ceux qui font la sienne. « Demeurez » en moi, veut dire non seulement être en état de grâce, mais vivre comme Jésus, avoir ses pensées, parler comme lui et agir comme lui en être divin; c’est avoir le cœur débordant d’amour de Dieu. C’est donc la même mesure que nous vivons comme lui qu’il exaucera nos prières. Il ne suffit pas de faire les fervents seulement quand on prie, puis ensuite être tout au monde comme tant de chrétiens. « Demeurer » veut dire toujours être là avec Jésus comme son ami intime.

Par exemple que de dévotes communient tous les jours et ensuite passent la journée à disputer contre leur entourage; elles ne seront pas exaucées facilement. Il faut voir Jésus dans les personnes comme dans l’hostie consacrée, quoique pas de la même manière. Si on a de l’amour pour l’hostie, on doit en avoir aussi pour les personnes. Suivons donc la foi partout et toujours! Pas seulement dans l’église. Aimons Dieu partout où il se montre et tel qu’il se montre. Jésus n’était pas beau à voir tout couvert de crachats et de sang durant sa passion, mais c’était Dieu quand même! Pour exercer notre foi, il se présente sous les espèces du pain dans l’Eucharistie et sous les espèces de toutes sortes de personnes dans le monde; respectons-le partout!

Quand on a des faveurs à solliciter d’un homme, est-ce qu’on l’insulte avant? Qu’on le méprise? Eh bien! Si on veut des faveurs de Dieu, faisons-lui plaisir partout et toujours puisque nous avons besoin de lui partout et toujours. N’allons jamais enfreindre une seule de ses lois et de ses bons plaisirs et alors nos prières auront des chances d’être exaucées. Jésus dit: « Si mes paroles demeurent en vous ». Or, ses paroles sont dans les Ecritures et elles ne comprennent pas seulement les commandements de la loi naturelle! Elles comprennent aussi le mépris des créatures et la folie de la croix ou le renoncement à soi-même avec toutes ses conséquences pratiques pour la vie. Quand on aime, on aime toutes les paroles et toutes les volontés de la personne aimée. Qu’on applique le même principe à Jésus!…

« COMME MON PÈRE M’A AIMÉ, JE VOUS AI AUSSI AIMÉ. DEMEUREZ DANS MON AMOUR ».

Dans ce « comme », il n’y a pas que le fait d’aimer, mais aussi la manière et le degré. Il nous a aimés de toute éternité et d’un amour infini. Son Père a voulu dans son Fils incarné une créature qui lui donnerait une gloire infinie et un amour infini à cause de son union dans la personne du Verbe. Le Père a voulu donner un bonheur infini et éternel à cette même créature.

Eh bien! Jésus nous aime de la même façon: il veut faire de nous des enfants de Dieu qui lui donneraient une gloire et un amour multipliés dans chaque catholique qui se laisserait diviniser par Jésus. C’est l’amour que son Père a eu pour lui que Jésus nous donne en se donnant à nous. Il a mis toutes ses complaisances en Jésus, nous aussi nous devons mettre toutes nos complaisances en Jésus. Nous devons chercher notre bonheur uniquement en lui et dans les choses qui l’intéressent. N’oublions pas que c’est un amour surnaturel qu’il nous a donné et donc c’est un amour surnaturel que nous devons lui donner. Or l’amour surnaturel s’acquiert par le sacrifice de l’amour naturel pour les créatures. En proportion qu’on aime Dieu de l’amour qu’il a eu pour nous, on se sépare des créatures pour donner tout son cœur à Dieu seul.

Comme Jésus nous a aimés jusqu’à donner sa vie pour l’amour de nous, ainsi nous devons aimer tellement Jésus que nous soyons prêts à donner notre vie pour lui. Combien le font? Ce ne sont pas ceux qui pêchent dans les tentations qui aiment Jésus. Ils lui préfèrent un échantillon passager, un plaisir d’un instant au bonheur éternel avec Jésus. Ils ne l’aiment donc pas. Si on est prêt à donner sa vie pour l’amour de Dieu, on devrait être capable de lui donner n’importe quel plaisir qui se présente à tout instant de la vie. Le Père éternel nous a donné non seulement le droit au ciel, mais aussi le roi du ciel, donc tout ce qu’il avait de meilleur. Eh bien! Si nous voulons aimer Dieu comme il nous a aimés, donnons-lui aussi tout ce que nous avons de meilleur: notre vie humaine, notre bonheur naturel et tout notre amour pour les créatures!… Alors nous aimerons Jésus un peu comme il nous a aimés!

Pour nous, il manifeste son amour en donnant sa vie pour nous; si donc nous voulons l’aimer comme il nous a aimés, nous devrions donner notre vie pour le prochain. Ce n’est pas probable que Dieu nous donne l’occasion d’être crucifiés pour le prochain, mais que de petits sacrifices il nous demande au jour le jour pour la conversion du monde. Chaque fois qu’on lui offre une peine, une douleur, une souffrance en union avec Jésus, c’est notre part du crucifiement de Jésus qui va au salut du prochain. C’est souffrir ce que Saint Paul dit qui manque à la passion du Christ. Que chaque chrétien se lève tous les jours avec l’idée bien arrêtée qu’il doit faire sa part pour le salut du monde en endurant les petites croix que Dieu va mettre sur son chemin aujourd’hui. Cela donne un but merveilleux à la vie! Le chrétien se sanctifie lui-même, afin d’avoir plus d’accès aux trésors célestes de grâce pour aider à sauver le monde avec la grâce de Dieu.

Ceux-là seuls qui ont ce zèle de sauver leurs frères ont l’amour que Jésus a eu pour nous. Seuls ils ont la vie que Jésus a menée sur la terre, la vie d’un sauveur pour ses frères. Comme ils sont rares! Que Dieu les multiplie davantage pour sa plus grande gloire et le salut du monde!

« MON COMMANDEMENT EST QUE VOUS VOUS AIMIEZ LES UNS LES AUTRES COMME JE VOUS AI AIMÉS. PERSONNE NE PEUT AVOIR UN PLUS GRAND AMOUR QUE DE DONNER SA VIE POUR SES AMIS ».

Il répète encore comment nous devons nous aimer: comme il nous a aimés en donnant notre vie pour le prochain. Il l’insinue ici, mais Saint Jean le dit carrément: que nous devons nous aimer jusqu’à donner notre vie pour le prochain comme Jésus a fait pour nous. Ceux donc qui veulent bien aimer le prochain à condition qu’il ne leur en coûte rien n’ont pas l’amour que Jésus a eu pour nous. Pensons-y sérieusement. Ce n’est pas une ressemblance de luxe, mais absolument nécessaire pour le salut. Ce n’est pas facile de mettre le doigt sur tel acte, mais une raison de plus d’en faire une vie de sacrifice pour sauver le prochain comme la vie de Jésus a été un long sacrifice pour nous sauver.

Dieu nous a aimés lorsque nous étions ses ennemis et en état de péché; eh bien! nous aussi nous devons aimer tous les hommes sans exception et malgré leurs défauts et leurs vices. Ce n’est pas si difficile qu’on ne le pense si on monte dans l’ordre surnaturel. Là la foi nous dit que Jésus l’aime et qu’il est un membre du corps mystique de Jésus, qu’il faut l’aimer sous peine de damnation! Comme ces considérations facilitent l’amour des ennemis! J’aime bien mon bras, mais s’il était question de me l’amputer sous peine de mort, je sacrifierais volontiers ce bras que j’aime tant. Mais j’aime ma vie encore plus. Je n’aime pas un tel, mais je n’aime pas non plus l’enfer! Entre les deux je préfère aimer cet homme que d’être damné éternellement…

« VOUS ÊTES MES AMIS SI VOUS FAITES LES CHOSES QUE JE VOUS COMMANDE ».

Que de fois Jésus répète que l’amour est dans les œuvres! Il ne suffit pas de savoir cette vérité, de l’accepter de tête, comme font tant de philosophes et ceux qui les suivent. Il ne suffit pas non plus d’observer le premier commandement qui mobilise absolument tout notre amour pour Dieu seul. Or, pour lui montrer cet amour, il faut retirer absolument tout notre amour des créatures et de soi. Ce point seul fait pratiquer une bonne partie de l’Evangile ordinairement négligée par nos philosophes: l’évangile du renoncement à soi et le mépris des créatures, ce que les prêtres prêchent rarement!

Remarquons que ces recommandations de Jésus à l’heure de sa mort roulent surtout sur l’amour de Dieu d’une façon concrète et pratique. Nos philosophes n’ont rien saisi ici. Ils en font une question de justice et de péché. Ils se contentent de faire éviter le péché et tout finit là. C’est absolument insuffisant; c’est de l’amour positif que Dieu veut. Jésus ne s’est pas contenté d’effacer nos péchés, il nous a donné en plus sa vie divine et son bonheur divin. Eh bien! Cet amour céleste doit commencer dans la foi sur terre pour se continuer là-haut. La beauté de Jésus ne consiste pas seulement dans l’absence de péché mortel, mais dans ses perfections divines que nous devons tous essayer de reproduire autant que possible avec la grâce de Dieu. Il exige un amour absolument divin et surnaturel de Dieu et du prochain, après qu’on s’est débarrassé de ses péchés. Qu’on ne croie donc plus que la grâce sanctifiante est l’absence de péché mortel, comme certains enfants du catéchisme disent sottement.

Père Onésime Lacouture - 3-19 - Le discours après la Cène partie I



DIX-HUITIÈME INSTRUCTION
LE DISCOURS DE JÉSUS APRÈS LA CÈNE.
(PREMIÈRE PARTIE).

 «  CELUI QUI M’AIME GARDE MES COMMANDEMENTS  »

Comme nous venons de méditer sur le sacrifice total de notre personnalité naturelle ou de notre moi païen en renonçant complètement à nos deux amours qui constituent notre moi païen, tout chrétien qui prend cette vérité au sérieux éprouvera quelque chose de l’agonie de Jésus avant sa mort. C’est pourquoi il est très utile pour nous de méditer les paroles que Jésus donna à ses disciples avant d’aller à son sacrifice suprême.

Il laissa déborder son cœur et donna les avis qu’il jugea les plus utiles et nécessaires pour ses disciples dans leur grande épreuve qui s’en vient pour eux. Notre vie doit être un crucifiement prolongé et nous avons besoin de la doctrine et des encouragements que Jésus donna à ses disciples avant de les quitter pour tout de bon.

Comment mettre de l’ordre dans ce débordement d’amour de Jésus pour nous? Nous allons simplement essayer de le suivre dans ce discours suprême de notre divin Sauveur et nous nous arrêterons à réfléchir sur ce que Jésus voudra bien nous suggérer à l’occasion de ses paroles précieuses qu’il nous laisse avant de mourir. Puisse la Sainte Vierge, qui les gardait dans son cœur, nous aider à les garder dans le nôtre pour le plus grand bien de nos âmes et la gloire de Dieu!

Comme c’est un discours surtout qui regarde la vie intime avec la Trinité et la persévérance dans cette union divine, j’ai cru qu’il irait bien plutôt ici que dans la vie de Jésus; il regarde spécialement la vie intérieure avec le Saint-Esprit.

«  QUE VOTRE COEUR NE SE TROUBLE POINT!  »

Les disciples sentent que le moment critique est venu dans la vie de Jésus et par suite dans la leur aussi et ils sont tristes et ont peur. Jésus veut les encourager devant la grande épreuve de leur vie. Le Pasteur va être frappé et les brebis dispersées! Peu de paroles de Jésus sont plus utiles pour les hommes que celles-ci. Nous devons tous mourir à nous-mêmes, comme nous l’avons montré plusieurs fois. Or tout être a l’instinct de sa préservation et il tremble devant sa destruction. Voilà pourquoi tout chrétien a peur de se renoncer pour entrer dans la vie surnaturelle comme Dieu le veut pour lui. Jésus le savait bien quand il dit que celui qui veut le suivre, doit se renoncer… et il ajouta… porter sa croix tous les jours! Or c’est sur la croix que notre païen doit être crucifié. Voilà pourquoi tous ceux qui veulent suivre Jésus commenceront par avoir peur… s’ils sont sérieux en voulant le suivre.
Moïse, Abraham et les prophètes ont tous eu peur à l’approche du divin. Tous les saints ont eu leur agonie quand ils se sont décidés pour tout de bon d’être tout à J.-C. Les démons aidant, il se fait une lutte terrible dans l’âme entre le naturel et le surnaturel, le païen veut vivre et le divin exige sa mort! Saint Paul a eu tellement peur des sacrifices de sa vie d’Apôtre qu’il était tenté de tout abandonner. Mais la peur de l’enfer encore plus grande l’a retenu dans le devoir. Par pitié pour lui, Dieu intervint par une vision et lui dit: « Sois sans peur, mais parle et ne te tais point; car je suis avec toi et personne ne mettra la main sur toi pour te faire de mal; j’ai un peuple nombreux dans cette ville ». Paul demeura un an et six mois à Corinthe y enseignant la parole de Dieu. Actes 18.

Il est certain que les démons nous font peur dès que nous voulons faire quelque chose pour le bien de nos âmes et pour la gloire de Dieu. Combien de chrétiens communieraient tous les jours, mais ils ont peur de ce que les gens vont dire. Une fille aimerait à s’habiller modestement, mais elle a tellement peur de se faire critiquer qu’elle est capable de suivre les modes scabreuses comme une vraie païenne. Un prêtre voudrait bien prêcher le renoncement et la folie de la croix, mais il a peur de ses confrères qui vont sûrement le blâmer de bouleverser les consciences avec cette doctrine austère! Combien de catholiques ont peur de prendre la voie de la sainteté; ils ont peur des critiques et des persécutions, et avec raison! Comme les démons sont habiles à exploiter cette peur!

Qu’on me permette un exemple personnel. Quand j’étais aumônier en Europe durant la première grande guerre, je me rappelle que la première fois que je voulus entrer dans les casernes pour empêcher les soldats de blasphémer et de tenir des conversations indécentes, j’ai éprouvé une si grande douleur que j’ai failli perdre connaissance; j’ai dû m’accoter sur un arbre pour ne pas tomber de défaillance. J’ai bien vu que ce n’était pas naturel, alors je me suis dit: «  Mort ou en vie, j’entre! ». Et la peur me laissa à la porte. Si j’étais entré là pour leur conter des histoires ou pour jouer aux cartes, je n’aurais certainement pas éprouvé cette frayeur; mais j’étais décidé de leur parler du plan de Dieu et leur expliquer le pourquoi des épreuves dans la vie… et le démon ne voulait pas.

Voilà pourquoi Jésus a voulu éprouver cette peur dans son agonie, afin de nous mériter la grâce d’endurer nos épreuves et faire la volonté quand même de Dieu.

Que ceux qui n’éprouvent jamais ces frayeurs dans l’apostolat examinent bien leurs motifs; s’ils veulent simplement badiner avec les gens, parler de sports et des vanités de la terre, les démons les laissent bien tranquilles. Mais s’ils veulent donner Dieu, ils rencontreront les démons sur leur chemin! C’est quand on veut donner le divin réel et en acte pour le faire vivre tout de suite que les démons suscitent les obstacles. Si on veut simplement en parler comme d’une science, pas un démon ne se dérange! Preuve que cela ne vaut rien devant Dieu, ni devant les démons.

Il est bon de parler de cette peur à tous les catholiques, parce que chacun croit qu’il est le seul à avoir la frousse et il s’excuse en disant qu’il est autrement que les autres et qu’il a une bonne raison de ne rien faire pour Dieu ou trop peu. Ils concluent qu’ils ne sont pas faits pour une haute perfection et ils restent en arrière. Mais s’ils savaient que tous ceux qui veulent s’approcher de Dieu ont cette peur, ils fonceraient quand même malgré cette peur.

Cette peur vient de ce qu’on regarde trop le côté humain et temporel et donc naturel. On pense trop à ce qu’on peut perdre. Jésus nous indique le remède en invitant à voir le côté de la foi.

«  VOUS CROYEZ EN DIEU, CROYEZ AUSSI EN MOI »

Il va insister sur les trois vertus théologales pour nous fortifier contre la peur des sacrifices. Il commence par la foi en lui comme au Père. Il affirme qu’il est la même chose que son Père, que son Père est en lui et lui en son Père. La preuve est dans les miracles qu’il a faits au nom de Dieu et en son propre nom.

« Si vous m’aviez connu, vous auriez aussi connu le Père ». Philippe lui dit: « Seigneur, montrez-nous votre Père et il nous suffit ». Jésus lui répondit: « Il y a si longtemps que je suis avec vous et vous ne me connaissez pas? Philippe, celui qui me voit, voit aussi mon Père. Comment-dites-vous: « Montrez-nous votre Père? ».

« Ne voyez-vous pas que je suis en mon Père et mon Père en moi? Ce que je vous dis, je ne vous le dis pas de moi-même, mais mon Père, qui est en moi, fait lui-même les œuvres. Ne croyez-vous pas que je suis en mon Père et que mon Père est en moi? Croyez-le au moins à cause des œuvres! ». Donc Jésus et le Père sont le même Dieu. Jésus veut les convaincre qu’il est Dieu comme le Père, parce que dans quelques heures il va s’abandonner aux hommes pour être crucifié comme le dernier des hommes. Ils vont voir l’anéantissement de Jésus et de toute son œuvre! Quelle foi il leur faudra pour croire quand même en la divinité de Jésus!

C’est dans l’épreuve que nous avons tous besoin d’une foi profonde pour croire quand même à la bonté et à la puissance de Dieu. Comme cette foi est rare! On voit la plupart des chrétiens se plaindre, comme si Dieu les avait abandonnés. Tous ceux qui s’impatientent ou se découragent, montrent une foi bien faible en Dieu. Ils regardent comme un malheur ce que Dieu regarde comme de grandes faveurs. Ils ne pensent donc pas comme Dieu! Ils n’ont donc pas confiance en sa bonté. Ils le regardent comme une espèce de tyran qui les torture plus ou moins injustement.

Ici il ne s’agit pas seulement de croire qu’il est Dieu, mais aussi d’avoir confiance en lui, assez au moins pour accepter comme une faveur de souffrir avec lui quand notre tour sera venu. Tout ce que Dieu nous veut, vient de sa bonté infinie; ce doit être pour notre bien éternel, quand même il faut souffrir un peu en acte pour mériter notre couronne éternelle.

Défions-nous d’une foi tout de tête ou spéculative, qui consiste à savoir ce que croire veut dire et on ne va pas plus loin! A la première épreuve, on dispute comme de vrais païens! C’est donc que de fait on ne croit pas à la bonté de Dieu ni à sa sagesse, puisque l’on regarde comme un mal ce qu’il nous envoie. C’est facile de dire: « Je crois en J.-C. qui est mort autrefois à Jérusalem, mais il faut croire en lui maintenant! tel qu’il est au milieu de nous et comme il agit pour nous ».

Prenons un exemple de la triste foi que tant de chrétiens ont. Jésus est dans l’Eucharistie exactement comme il était au milieu de ses Apôtres avec son corps, son âme, son sang et sa divinité. Combien le croient réellement? Ce n’est qu’une idée vague dans la tête. Combien peu vont l’adorer, le visiter, le recevoir dans la sainte communion! Même parmi les prêtres, quelle insouciance pour Jésus au tabernacle! Quelle froideur! Ces gens n’ont pas plus de foi dans les contrariétés. Comme ces prêtres et ces laïques sont impatients, susceptibles, avides de louanges et furieux contre ceux qui les blâment tant soit peu! Ils n’ont donc jamais de vrais contacts avec J.-C. en personne: autrement leur païen serait plus affaibli, plus humble, plus dompté!

Enfin tous ceux qui regimbent contre les croix que la Providence leur offre ont besoin de la même foi que Jésus voulait pour ses disciples. Si c’est Dieu qui nous les envoie, il doit savoir ce qu’il fait! Ce doit être pour notre bien éternel! Ce doit être pour effacer nos péchés, pas encore expiés! C’est pour tout cela que Jésus est venu mourir sur la croix et c’est encore pour la même raison que Jésus se présente encore à chacun de nous avec sa ou ses croix. Si nous avions la moindre foi, nous les accepterions comme Jésus accepte la sienne et, s’il le faut, nous irions mourir comme lui pour satisfaire la justice divine.

Eh bien! Fermons-nous donc dans les épreuves! Ou plutôt, remercions donc Dieu de nous associer aux souffrances de J.-C. pour nous associer à ses joies célestes dans l’autre monde. Comme je dis souvent: allons-nous prendre cinquante ans pour accepter cette doctrine qui saute aux yeux de n’importe qui avec une tête sur les épaules! C’est un Dieu qui nous envoie les croix… Ce n’est pas le diable! Jésus dit: « Est-ce que je ne dois pas boire le calice que mon Père me présente? ». Eh bien! Chaque croix est une goutte du calice de Jésus que le Père nous présente. Acceptons-la en union avec Jésus! Et que ce soit réglé pour toujours. Pour aujourd’hui, pour demain et toute la vie!… avec la grâce de Dieu que nous devons demander tous les jours. Tous les chancelants dans la vertu, tous les tièdes dans la vie spirituelle, tous ceux qui pèchent dans les tentations, sont des gens qui n’ont jamais raisonné ou médité sur ce qu’est la foi. Pour plusieurs, c’est comme s’il suffisait de donner son nom à l’Eglise catholique, comme à une association quelconque, et ensuite à faire sa vie comme si rien n’était.
La foi exige une nouvelle vie! Il s’agit d’organiser sa vie uniquement et totalement selon les vérités révélées dans l’Ecriture… et les vivre dans la pratique de la vie. Par exemple, la foi nous enseigne qu’il faut aimer son prochain comme soi-même… et comme Dieu! Tellement que tout ce qu’on fait au prochain, on le fait à Dieu.

Où sont les catholiques qui pratiquent cette foi? Dieu le veut! Qu’on le fasse donc! Peu importe les répugnances de la nature, il faut que Dieu l’emporte sur notre païen! Donc avoir la foi, c’est traiter toute personne exactement comme si c’était J.-C. en personne. « Tout ce que vous faites au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous le faites ». Ce ne peut pas être plus clair, ni plus catégorique. Commençons! C’est sous peine de damnation! Saint-Jean dit: « Si quelqu’un n’aime pas son frère qu’il voit, comment peut-il aimer Dieu qu’il ne voit pas? ». Quand Saül persécutait les chrétiens, Jésus l’apostrophe du haut du ciel et lui dit: « Saül, Saül, pourquoi me persécutes-tu? ». C’était J. -C. déjà rendu au ciel que Saül persécutait dans les chrétiens. Eh bien! Ceux et celles qui disputent, qui se mettent en colère contre le prochain, le font contre Dieu! Quelle sottise! Traiter J.-C. comme on traiterait le démon et on espère aller au ciel? Imbéciles que nous sommes!

Eh bien! On voit la nécessité de croire en J.-C. si nous croyons en Dieu. Croire, c’est vivre selon les paroles de J.-C. Eh bien! Commençons pour tout de bon à les vivre dans le concret de la vie quotidienne. Que pas un seul ne murmure contre quoi que ce soit qui vient de Dieu. Prenons notre croix ou nos croix de tous les jours comme Jésus a pris la sienne pour l’amour de son Père et de notre bonheur éternel.

Ensuite Jésus passe à l’espérance comme motif contre la peur. « Il y a beaucoup de demeures dans la maison de mon Père. Si cela n’était, je vous l’aurais dit; car je vais vous préparer une place. Et après que je m’en serai allé et que je vous aurai préparé une place, je reviendrai et je vous retirerai à moi, afin que où je suis vous aussi vous soyez ».

Il montre que la foi en Dieu n’est pas vaine, que sa récompense est au ciel avec Dieu et J.-C. Si Dieu nous a préparé un monde matériel pour le corps et que nous y trouvons notre bonheur ici-bas, combien plus belle doit être la demeure de l’âme immortelle et créée à l’image de Dieu? Pourquoi craindre alors de perdre les choses matérielles de ce monde si nous devons hériter du palais éternel de Dieu au ciel? Ici-bas, c’est la demeure des simples créatures; là-haut, c’est la demeure de la Sainte Trinité et éternelle comme elle.

Remarquons que c’est Jésus qui nous prépare une place; car sans lui le ciel était à tout jamais fermé à cause du péché d’Adam. Il s’en va comme pour négocier avec le Père éternel ses mérites infinis contre nos péchés innombrables. Il va lui offrir sa vie et ses souffrances pour payer notre dette à la justice divine. Alors le Père consent à nous recevoir au ciel à condition que nous soyons une seule chose avec J.-C.

Les Apôtres vont voir le plus grand fiasco jamais arrivé à un groupe d’hommes. Tout leur idéal, leurs ambitions et tous leurs projets vont sombrer en un seul jour et leur Maître qu’ils ont suivi et qu’ils ont cru Dieu va mourir misérablement, va être enterré comme n’importe quel homme… et ils pensaient qu’il était Dieu! Quelle déception!

C’est pourquoi Jésus leur dit que tout ne finit pas ici-bas; il s’en va dans un autre monde leur préparer un lieu éternel où ils seront avec lui pour toujours. Pour eux à ce moment, comme ils n’avaient pas encore reçu le Saint-Esprit, ils n’y comprennent rien évidemment. Mais Jésus le leur dit pour ceux qui viendront après la réalisation de la promesse et donc pour nous actuellement.

Jésus en appelle donc à leur foi à la divinité de sa personne; il en appelle à leur espérance en ce bonheur du ciel; il en appelle à leur amour dans son union éternelle avec lui au ciel. Il reviendra les chercher et ils seront avec lui dans son ciel. Voilà donc les trois vertus théologales présentées comme motifs de consolation dans les épreuves de la vie, surtout les séparations causées par la mort. Que chacun les prenne pour lui-même dans ses épreuves quotidiennes et ses contrariétés. C’est facile à dire, mais comme il faut de la volonté et de la foi pour les appliquer à l’occasion!

Voici une remarque importante: il s’agit de conserver ces trois vertus théologales comme pour la fin de la vie. Il faut en vivre tout de suite. Cela veut dire que je dois retirer de ce monde tout mon amour pour le faire converger uniquement sur l’objet de ces vertus. Par exemple, la foi nous parle uniquement de l’autre monde, du monde divin, des perfections divines, des œuvres de Dieu pour notre bonheur éternel, de ce bonheur divin qui dépasse toute compréhension, avec les moyens pour y arriver. Eh bien! Si je veux vivre ma foi, je dois me perdre dans ce monde invisible de l’au-delà pour y faire toute ma vie actuelle et quotidienne!

C’est ce qui explique la vie intérieure de Jésus et de Marie. Ils s’occupaient uniquement de ce que la foi leur montrait, et non de ce que leurs yeux voyaient en ce monde. Ils ne pouvaient pas s’empêcher de le voir, mais ils n’y mettaient pas du tout leur cœur, ils voyaient donc sans voir, ils entendaient parler sans s’y arrêter, comme les gens du monde font souvent au sujet des choses divines. Ils les entendent sans les comprendre, sans s’en occuper, comme s’ils n’existaient pas, comme des sourds.
Quand allons-nous commencer à vivre dans l’autre monde et surtout de l’autre monde. La Sainte Vierge gardait dans son cœur tout ce qu’elle entendait dire de Jésus. C’est ce que nous devrions faire à l’année, à la journée! Ce qui semble difficile à l’homme, est facile par la grâce de Dieu qu’il faut demander souvent.

On va dire que ce monde est encore bien loin! Mais non! Par la foi, l’espérance et l’amour, ce monde nous est rendu substantiel d’après une idée de Saint Paul qui la foi est la substance des choses que nous devons espérer. Ces vertus nous donnent droit aux choses du ciel et donc nous en sommes les propriétaires; nous pouvons et nous devons donc nous en occuper tout de suite. Dieu nous donnera selon la perfection de ces vertus que nous pratiquons actuellement. Nous pouvons donc dire que nous les avons déjà.

Evidemment, cette vie intérieure nous dépasse comme Dieu nous dépasse, mais rien ne nous dépasse avec la grâce de Dieu! Demandons-la souvent dans nos prières et Dieu finira par nous exaucer et alors ce sera une nouvelle vie dans un nouveau monde tout divin qui fera notre mérite et notre bonheur. C’est cette vie recherchée par tous les saints et si peu connue de nos catholiques!

Car nos philosophes du clergé n’y comprennent pas grand-chose parce qu’ils cultivent des attaches qui leur ferment le monde des choses de Dieu. Et comme ils permettent aux fidèles d’avoir aussi des attaches de toutes sortes, eux aussi n’y comprennent rien. Ils perdent la plupart de cette vie d’amour de Dieu qui fait le bonheur de cette vie. Le Saint-Esprit ne se révèle pas à eux, car ils mettent leur amour dans les échantillons qui ne sont que du fumier devant l’amour de Dieu. Ces gens prient bien peu. Car lorsqu’on trouve sa satisfaction dans les choses de la terre, comment aspirer aux choses de Dieu? On est satisfait, on est gavé des jouissances de ce monde, on ne désire pas les autres. Que chacun examine l’objet de ses prières; ceux qui aiment ce monde demandent des choses temporelles; ceux qui aiment le ciel demandent des choses du ciel. Lesquelles demandez-vous? « Cherchez d’abord le royaume de Dieu et sa justice et le reste vous viendra pour surcroît ». Suivons ce conseil de Jésus!

Si les catholiques vivaient ces trois vertus théologales, ils parleraient volontiers des choses spirituelles, ils seraient bien aisés d’en entendre parler. Est-ce le cas? Combien rares sont ceux qui parlent des choses de Dieu! La bouche des chrétiens est remplie des choses de la terre en général; c’est donc que leur cœur est là aussi.

Eh bien! Il nous faut changer notre façon de vivre tout de suite! Cessons de parler et surtout de nous occuper des bagatelles de la terre et puisque nous sommes des habitants du ciel au moins en espérance, parlons-en continuellement selon la charité que nous devons avoir pour notre prochain. Faisons-le avec délicatesse, mais faisons-le! ou taisons-nous sur les vanités des païens!

« Vous savez où je vais et vous en savez la voie ». Thomas lui dit: « Seigneur, nous ne savons pas où vous allez et comment pouvons-nous en savoir la voie? ». Jésus lui dit:

«  JE SUIS LA VOIE, LA VÉRITÉ ET LA VIE, PERSONNE NE VIENT AU PÈRE QUE PAR MOI. »

Quelles paroles pleines de conséquences pratiques pour nous dans la vie spirituelle! Elles nous indiquent notre part de travail pour nous sanctifier. Jésus ne nous sauvera pas sans notre coopération insinuée par ces paroles. Jésus seul a expié nos péchés. Jésus seul a satisfait à la justice divine et donc Jésus seul a droit d’entrer au ciel. Alors comment pouvons-nous espérer y aller? Voici, il nous faut devenir tellement semblables à Jésus que lorsque nous arriverons dans l’éternité, le Père éternel puisse reconnaître J.-C. en chacun de nous. Si nous faisons une seule chose avec Jésus, comme lui avec son Père, il nous acceptera au ciel.

La vie est donnée pour accomplir ce travail d’imitation ou de reproduction de J.-C. C’est ce que Jésus indique par les paroles que nous étudions actuellement.

JE SUIS LA VOIE, en ce sens que par ses mérites, il nous met sur la voie du ciel. Evidemment, elle est très importante, mais c’est là la part de Jésus et nous ne pouvons rien faire là.

Mais maintenant que Jésus nous met sur le chemin du ciel, l’important pour nous est d’avancer sur ce chemin que Jésus a suivi durant sa vie mortelle. Saint Jean dit que nous devons marcher comme Jésus si nous l’aimons. Or quand Jésus lui-même nous dit de le suivre, il dit que c’est en portant notre croix tous les jours, comme lui l’a portée. Or nous savons maintenant ce que veut dire: la croix de Jésus. C’est tout ce qui contrarie nos deux amours naturels, tout ce qui contrarie notre païen et donc tout ce qui fait souffrir d’une façon ou d’une autre.
Si Jésus s’est fait homme, c’est surtout pour nous apprendre à vivre comme Dieu: c’est donc le divin de sa vie qu’il veut nous voir reproduire dans notre vie. Eh bien! Qu’est-ce qui n’est pas humain en nous? Pour suivre Jésus, il faut renoncer à nous-mêmes et donc à l’humain libre en nous, afin de nous diviniser. Comme les anciens disaient: on avance dans le chemin de la vertu quand on se renonce.

Ce que Jésus résume en disant: « Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il se renonce lui-même, qu’il prenne sa croix tous les jours et qu’il me suive! ». Voilà ce que veut dire: Je suis la voie!

JE SUIS LA VÉRITÉ. On dit qu’une chose est vraie quand il y a équation parfaite entre la chose et la parole qui l’annonce. Eh bien! Comme Jésus est la parfaite image de son Père, qu’il en est le resplendissement substantiel, égal en tout à son Père, il est donc la vérité essentielle et éternelle.

Si donc nous voulons être avec lui au ciel, il nous faut participer à cette vérité divine et essentielle et donc être semblable à Jésus aussi parfaitement que possible avec la grâce de Dieu. Nous devons donc penser comme lui, parler comme lui et agir comme lui en tout. Il juge de tout en fonction de l’éternité; faisons donc de même au lieu de tout juger en fonction du monde et du temps.

Par exemple, quand Jésus nous enseigne par Saint Paul que tous les plaisirs du monde par rapport à l’amour de Dieu ne sont que du fumier, tout chrétien doit adhérer à ce jugement de Jésus et agir en conséquence avec ces plaisirs. Celui qui les recherche avidement ne les juge donc pas comme Jésus; il sort de la vérité divine, il cesse de ressembler à Jésus sur ce point.

De même celui qui ne traite pas son prochain comme Jésus en personne ne demeure pas dans la vérité, puisque Jésus veut qu’on le traite comme lui-même. Faire la vérité dans sa vie, c’est donc la faire accorder avec les actes et les paroles de Jésus. Voilà pourquoi Jésus a dit que tout homme vit par la parole qui sort de la bouche de Dieu. Lisons donc les Ecritures pour découvrir les pensées et les jugements de Dieu, afin de les faire nôtres, peu importe ce que pense notre païen. Forçons-le à penser comme Jésus et il finira par agir comme Jésus. Or c’est en méditant constamment les Ecritures que nous découvrirons la vérité éternelle!

JE SUIS LA VIE. Il est la vie divine, la vie surnaturelle, étant Dieu. Cette vie qu’il nous apporte et qu’il nous a méritée par son sacrifice sur la croix. Notre degré de bonheur au ciel correspondra au degré de cette vie divine que nous aurons à la mort. C’est celle des trois personnes divines: la vie du Père, la sagesse du Fils et l’amour du Saint-Esprit. Jésus les vit parfaitement; donc tout chrétien qui veut être avec Jésus au ciel doit commencer par imiter ces trois vies trinitaires. C’est le seul moyen de faire la vérité avec Jésus. Si je vis ma vie naturelle et lui sa vie divine, il n’y a pas de vérité en moi, ni par conséquent de vie divine non plus dans la même proportion.

Comment pouvons-nous mériter un accroissement de cette vie divine en nous? Notre rôle consiste surtout à éloigner les obstacles et à prier. C’est là une étude importante pour tout catholique. Comme très peu de prêtres sont capables d’instruire le peuple sur ces questions de sainteté, qu’il recherche les meilleurs auteurs spirituels qui traitent de spiritualité et qu’il les lise assidûment et il finira par comprendre comment agir pour se sanctifier.

Il n’y a pas que les péchés qui empêchent la grâce de venir dans l’âme, il y a les attaches même aux bonnes choses. Où est le prêtre qui attaque les bonnes attaches aux plaisirs? Il se ferait dénoncer tout de suite par ses confrères philosophes et serait vite réduit au silence par ses supérieurs. Aussi les fidèles ignorent le mal que font les attaches même aux bonnes choses permises en soi. Une attache met un mur infranchissable entre l’âme et Dieu, dit Saint Jean de la Croix, Docteur de l’Eglise. Comment alors progresser dans la sainteté quand on met pareil obstacle à la grâce?

Voici une comparaison. Supposons que je demande à une mère ce que fait son fils. Elle me répond: « Sa vie, lui, c’est la chasse! ». Je comprends tout de suite ce qu’il fait. Il pense à la chasse continuellement, il en parle le plus possible et il y va tant qu’il peut. C’est son bonheur en ce monde!
Eh bien! Tous les catholiques devraient faire de même pour leur vie divine. Supposons que je demande à un vicaire ce que fait son curé. Combien me répondraient: « Mon Curé est tout aux choses de Dieu! ». Cela voudrait dire qu’il y pense constamment, qu’il en parle à tout le monde et que son bonheur est de s’occuper des choses spirituelles. Combien de Curés pourraient en dire autant de leurs vicaires? Combien d’enfants pourraient le dire de leurs parents ou de parents de leurs enfants? Pourtant ce devrait être général parmi les catholiques.

Malheureusement c’est tout le contraire: la plupart sont tout aux choses du monde comme de vrais païens. Leur vie est donc pour le monde et le monde est leur vie; ce n’est pas Jésus qui est leur vie et leur bonheur, comme il devrait l’être si ces gens veulent être avec Jésus au ciel. Entendez les conversations de nos catholiques: elles sont toutes des plaisirs de toutes sortes; chacun raconte ce qu’il a fait pour s’amuser et il parle de ses projets de jouir davantage prochainement. La bouche est pleine des vanités de la terre, ces gens ne vivent donc pas de la vie de Jésus, la vie de la Trinité qu’il nous a apportée.

Si on veut se débarrasser d’un catholique, d’un prêtre ou d’un religieux, qu’on lui parle de religion et l’on verra bientôt qu’il va se trouver une excuse pour s’en aller et ne plus revenir. Dès qu’on veut être aux choses de Dieu, on reste complètement isolé de tous les autres qui fuient… la peste! Ils n’ont donc pas l’amour de Dieu dans le cœur, puisqu’ils ne veulent pas en parler! Je ne voudrais pas être à leur place à l’heure de la mort! Cet amour de Dieu n’est pas une question de plus grande perfection, mais de salut. Il faut aimer Dieu plus que tout au monde pour aller au ciel; c’est le premier commandement que tous sont tenus d’observer.

L’amour est une fin qui entraîne toute l’activité de l’homme. Si donc nous aimons Dieu d’un amour surnaturel comme il est nécessaire pour arriver au ciel, J.-C. sera tout pour nous. Nous le suivrons pas à pas dans ses exemples et dans sa vie concrète pour que les autres voient Jésus en nous; nous vivrons sa doctrine dans nos facultés spirituelles et elle nous guidera dans toute notre vie; et enfin nous vivrons une vie toute divine partout et toujours surtout dans nos motifs absolument surnaturels.

Pour obtenir cette grâce, il faut être un lecteur assidu des Saintes Ecritures et les méditer à cœur de jour. Tout ce que Dieu veut que nous pratiquions est là; si nous ne voulons pas nous donner la peine de prendre ce qu’il nous a déjà donné, comment espérer qu’il va nous faire une nouvelle révélation des choses divines? Dieu ne fait rien inutilement. Tout est là; allons le chercher, les laïques comme les prêtres devraient lire à l’année l’Ecriture Sainte.

Malheureusement la mentalité de nos gens à l’exemple de la plupart des prêtres est saturée des échantillons. Alors les perfections divines et les œuvres divines ne les intéressent pas beaucoup ou pas du tout. Le cinéma, la radio et les parties de toutes sortes absorbent l’attention de nos gens. Jamais les prêtres philosophes ne pourront réagir contre cette tendance naturelle, puisque leur religion et leur théologie approuve tout ce qui n’est pas péché. Alors c’est la débandade générale chez les chrétiens et une course folle aux plaisirs de toutes sortes. Où est la différence entre les villes catholiques et les villes païennes? Qui peut distinguer un catholique d’un païen ou d’un protestant simplement à le voir agir? A l’entendre parler? Pratiquement personne! Il faut lui demander à quelle église il va ou quelle est sa religion…

«  CELUI QUI M’AIME GARDE MES COMMANDEMENTS  »

Jésus répète cette parole quatre fois: c’est donc qu’il y tient. Il veut que notre amour se manifeste par des œuvres. Une admiration de tête comme la plupart ont, ne le satisfait pas. Il veut un amour pratique qui vit ce qu’il croit. Si je crois que Jésus est Dieu, je dois accomplir ses volontés partout, je dois lui obéir en tout, pas seulement dans les choses agréables, mais dans tout ce qui contredit la nature!

Que de prêtres prennent des Ecritures ce qui leur va et laissent de côté ce qui les mortifie; ils ont donc bien peu de foi en la divinité de Jésus, puisqu’ils refusent plusieurs de ses paroles! Par exemple, combien peu pratiquent et prêchent le mépris des créatures et la folie de la croix! Ils ne disent pas qu’ils les rejettent, mais en fait ils ne s’en servent pas pour leur vie ni pour leur prédication. Pour avoir ce front, il faut manquer énormément de foi en la divinité de J.-C. Quand on croit qu’il est Dieu, on fait tout ce qu’il demande. Voilà ce qu’il dit ici lui-même: « Si quelqu’un m’aime, il gardera mes commandements ». Or, pour l’aimer, il faut que l’on croie qu’il est Dieu.

Si on a cet amour pratique, Jésus nous promet le Saint-Esprit qui demeurera éternellement avec nous et qui nous éclairera dans la vérité. Il nous promet que lui-même viendra en nous et se manifestera à nous évidemment comme Dieu et nous fera comprendre sa doctrine céleste pour nous faire voir dans la foi les choses divines que nous verrons un jour dans la gloire.

Plus loin, il promet que le Père viendra en celui qui garde ses commandements et qu’il l’aimera. Enfin, « nous viendrons en lui! ». C’est donc toute la Trinité qui viendra en celui qui fait la volonté de Dieu et elle y demeurera toujours!

Quelles belles promesses pour ceux qui observent les commandements de Dieu! Mais qu’on n’oublie pas le premier commandement comme on a coutume de faire. Que de prêtres et de fidèles, quand ils parlent des commandements, pensent aux commandements de la loi naturelle, comme le jeune homme riche! Alors ils peuvent aimer leurs richesses ou les créatures et Dieu en même temps. Mais c’est du paganisme tout pur! Pour aller au ciel, il faut observer avec les autres le premier commandement qui mobilise absolument toute notre capacité d’aimer pour Dieu seul… et donc ne tolère pas un seul brin d’amour pour les créatures pour elles-mêmes. C’est à cette condition que nous pouvons espérer que la Sainte Trinité demeurera en nous pour toujours.

« ET QUELQUE CHOSE QUE VOUS DEMANDEREZ À MON PÈRE EN MON NOM, JE LE FERAI, AFIN QUE LE PÈRE SOIT GLORIFIÉ PAR LE FILS ».

C’est dire qu’il fera la volonté de ceux qui font la sienne. Si nous voulons que nos prières soient acceptées de Dieu, commençons par lui obéir en tout pour lui montrer notre amour et alors en retour il nous accordera ce que nous lui demandons par amour pour lui. Il faut que ce soit pour sa gloire et donc que ce soit des choses surnaturelles et pour le bien de notre âme. Que chacun examine donc quelle sorte de prière il fait à Dieu et quelle sorte d’amour il lui donne avant tout.