VINGT-NEUVIÈME
INSTRUCTION
LA COMMUNION.
« Celui qui mange ma
chair et boit mon sang a la vie éternelle et je le ressusciterai au dernier
jour; car ma chair est vraiment nourriture et mon sang est vraiment breuvage.
Celui qui mange ma chair et boit mon sang, demeure en moi et je demeure en lui. »
Jean 6-55.
Après avoir médité sur la
présence réelle de J.-C. dans l’Eucharistie, nous allons méditer maintenant sur
la sainte communion ou la manducation de l’Eucharistie qui se trouve à être la
fin principale de la messe. Le prêtre consacre pour faire communier les
fidèles, pour leur faire manger la chair et boire le sang de J.-C. Il ne s’agit
plus seulement de l’adorer et de l’admirer, mais de le manger afin de nous unir
à lui aussi intimement qu’il est possible en ce monde.
Comme c’est le plus grand
et le plus saint moyen de nous unir à J.-C., il vaut la peine que nous lui
consacrions une méditation spéciale, afin de le mieux connaître et d’en tirer
plus de profit spirituel. Comme c’est le commencement de notre union avec Dieu
comme au ciel, il faut nous y préparer comme pour entrer au ciel. C’est donc
une préparation de toute la vie et pas seulement juste avant de communier.
Voilà pourquoi nous allons considérer notre double préparation: éloignée et
prochaine.
PRÉPARATION
PRÉPARATION ÉLOIGNÉE
Elle est aussi importante
que la préparation prochaine, car pour Dieu le temps n’est rien: ce qu’il
regarde est tout ce que nous faisons en vue de nous préparer à le recevoir soit
dans la communion, soit au ciel. Ces deux unions devraient être constamment dans
l’intention des catholiques. Du matin au soir et du commencement de la vie
jusqu’à la fin, nous devrions tous travailler pour nous rendre plus dignes de
nous unir à notre Dieu de ces deux façons. Nous sommes sur la terre uniquement
pour nous préparer à participer à la vie divine par J.-C. dans la vision
béatifique. Celle du ciel sera la récompense de celle de la terre.
L’ÉTAT DE GRÂCE est une
condition absolument nécessaire à tout mérite céleste. Il faut être enfant de
Dieu pour mériter une récompense divine. Les catholiques devraient tout faire
pour s’assurer qu’ils sont en état de grâce. Voici quelques remarques à ce
sujet.
Ceux qui n’ont pas
d’attaches même aux choses permises ont de grandes chances de l’être. Car même
s’il leur arrive de commettre un péché mortel, quand ils s’en confessent, ils
peuvent plus facilement avoir une contrition souveraine qui exige qu’on préfère
Dieu à toutes ses créatures. Comme ils n’ont pas d’attache particulière, ils
peuvent préférer Dieu à ses créatures.
Pour les autres qui
pèchent par affection pour un plaisir surtout s’ils retombent assez souvent,
comment auront-ils une contrition souveraine qui exige la préférence de Dieu
sur toutes les créatures. Comme ils sont attachés à telle créature, ce n’est pas
facile de briser cette attache. Evidemment, tout est possible avec la grâce de
Dieu, mais combien peu luttent contre l’amour qu’ils ont pour une chose ou une
personne! Aussi l’on voit ces pauvres gens retomber constamment dans les mêmes
péchés malgré leurs nombreuses confessions. C’est donc qu’ils n’ont pas les
conditions d’une contrition souveraine: ils gardent une affection même
volontaire pour l’objet de leur passion.
Voilà des gens qui
reçoivent les sacrements et qui peuvent bien ne pas être en état de grâce. Ils
communient sans les effets ordinaires de la communion; ils ne progressent pas
du tout avec leurs communions même assez fréquentes. Leurs communions ne sont
pas sacrilèges parce qu’ils ignorent leur état, mais les effets sont nuls. Avis
donc à ceux qui pèchent mortellement souvent! Ils sont bien exposés à faire des
confessions nulles par manque de contrition souveraine. N’oublions pas qu’elle
est exigée dans la contrition imparfaite comme dans la contrition parfaite. Là
n’est pas la différence, mais seulement dans le motif. Si je regrette mon péché
par amour pour Dieu, ma contrition est parfaite: si je le regrette pour le tort
que j’en reçois, ma contrition est imparfaite. Mais, dans les deux contritions,
elle doit être souveraine, ce qui veut dire que je dois préférer Dieu à toutes
les créatures au monde, surtout à l’objet de ma passion. Voilà pourquoi il
n’est pas aussi facile qu’on le pense d’avoir une contrition qui donne la grâce
sanctifiante.
Tous ceux qui la perdent
facilement pour des bagatelles, comme pour un morceau de viande le vendredi,
pour quelques heures de sommeil le dimanche qui manquent la messe, ou qui
s’enivrent pour quelques verres de liqueur, etc. Puisqu’ils estiment Dieu si
peu, comment dans leur contrition peuvent-ils être sûrs de préférer le bon Dieu
à toutes les créatures du monde? Tous ces gens risquent leur salut éternel. Ces
gens ne font pas de préparation éloignée pour communier avec fruit… et comme il
y en a!
LE DÉTACHEMENT.
Selon le premier commandement,
Dieu veut absolument tout notre amour pour que nous entrions au ciel. Il faut
donc le même détachement pour communier avec fruit. Jésus ne veut pas plus que
nous aimions les créatures quand nous le recevons dans la communion que
lorsqu’il nous recevra au ciel. Dieu partout ne peut tolérer que nous ayons un
amour pour ses rivales à notre affection. Tout amour qu’on donne aux créatures
est autant d’enlevé pour notre amour de Dieu, soit dans la communion, soit au
ciel. Jésus vient en nous pour nous éclairer sur les choses divines Or, les
bons auteurs disent que ceux qui ont des attaches n’auront pas l’intelligence
des choses de Dieu.
Celui donc qui
volontairement garde ses attaches se condamne à ne rien comprendre dans les
choses de Dieu, comment peut-il être agréable à Jésus quand il le reçoit dans
la communion? Hélas, ces pauvres catholiques sont bien nombreux avec la
doctrine que nos prêtres philosophes donnent partout: qu’il n’y à pas
d’inconvénients d’avoir des attaches aux choses permises. Eux-mêmes en
cultivent sans scrupule; ils ne peuvent donc pas les attaquer chez les autres.
Mais, tous les saints et les meilleurs auteurs ascétiques soutiennent qu’une
seule attache aveugle l’esprit sur les choses divines et met comme un mur
infranchissable entre Dieu et l’âme. Voilà l’explication du peu de fruit que la
communion produit chez nos catholiques. Ils viennent communier avec le cœur
rempli de plaisirs de la terre chacun selon sa passion. Aussi, comme ils
donnent peu de temps à leur action de grâce et comme elle est mal faite, même
pour les quelques minutes qu’ils donnent! Ces gens qui ne sont pas intéressés à
Jésus qu’ils reçoivent dans la communion risquent leur bonheur éternel,
puisqu’ils ont si peu d’amour pour lui. Ils seront jugés sur le premier
commandement qu’ils n’observent pas ou trop peu.
Une autre cause
d’aveuglement pour les fidèles est que nos philosophes parlent trop des effets
de la communion in se et pas assez des effets in nobis ou en nous. Ils
n’insistent pas assez sur les dispositions subjectives du communiant. Car les
fruits de la communion dépendent surtout de ces dispositions intérieures. Comme
la digestion ne dépend pas seulement des mets que l’on mange, mais des
dispositions de l’estomac, ainsi, les fruits spirituels de la communion
dépendent en grande partie des dispositions du cœur. La quantité d’amour qu’il
donne aux créatures empêche dans la même proportion l’amour de Dieu d’entrer
dans l’âme. Il ne s’agit pas non plus ici d’une spiritualité particulière pour
une élite, mais pour tout chrétien sans aucune exception. Elle concerne le
salut et donc s’adresse à tout catholique.
Remarquons qu’au point de
vue de l’amour de Dieu, il ne faut pas faire de différence entre les choses
permises et les choses défendues. Les deux exercent leur ensorcellement sur le
cœur humain et tout amour qu’on leur donne est autant de pris sur l’amour que
nous devons à Dieu seul.
On voit tout de suite la
folie de ces catholiques qui communient souvent comme pour compenser les
plaisirs qu’ils prennent dans le monde. Ils veulent aimer le monde et veulent
contenter Dieu en même temps. Que dirait-on d’un homme marié qui fait des
présents ou des amours à sa femme pour qu’elle lui pardonne ses familiarités
avec une autre? C’est absurde et jamais l’amour ne peut être satisfait par un
amour contraire.
Ce serait différent si un
homme va souvent communier pour obtenir la grâce de se détacher de ses
affections mondaines et qu’il est décidé de rompre le plus tôt possible.
Quelle ignorance de ces
prêtres et missionnaires qui prêchent bien sur la nécessité de communier
souvent, mais qui ne prêchent pas contre nos deux amours naturels, qui
permettent toutes les attaches aux choses permises et qui en ont eux-mêmes.
Combien vont même écourter leur sermon pour assister à une joute de leur choix!
Ou qui n’encouragent pas les confessions qui pourraient leur faire perdre la
chance d’aller à une partie
L’AMOUR DE DIEU
correspond au point précédent: les deux vont ensemble: mon amour de Dieu augmente
en proportion que je me détache des créatures. Par exemple, quand j’achète une
maison, il faut que je préfère la maison à mon argent et plus je la paie chère
et plus je l’aime. Eh bien, comme les plaisirs de ce monde sont la monnaie pour
acheter Dieu, plus je les sacrifie et plus j’aime Dieu.
C’est là un entraînement
de toute la vie. Tous les prêtres, tous les parents et tous ceux qui sont
chargés de former les autres, devraient leur inculquer cette doctrine pour
acquérir l’amour de Dieu aux dépens des plaisirs de la terre. C’est faux de
laisser entendre qu’on peut jouir des plaisirs du monde et accroître notre
amour pour Dieu. Personne ne peut faire mentir la parole de Jésus bien claire:
«On ne peut pas aimer le monde et Dieu: c’est l’un ou l’autre!». Saint Paul
enseigne cette doctrine quand il dit: «Pour l’amour de J.-C., je me suis privé
de toutes choses, les regardant comme du fumier!». Tous les saints ont senti le
besoin de se dépouiller des jouissances de la terre pour s’assurer celles du
ciel. L’Imitation résume bien cette idée quand elle dit dès son premier
chapitre: «C’est par le mépris des choses de la terre qu’on parvient au royaume
de Dieu».
Je sais bien que nos
prêtres philosophes ne prêchent plus cette doctrine austère que tous les saints
ont pratiquée, mais c’est à cause de leur fausse idée de l’amour de Dieu. Avec
leur religion des «in se» qui permet l’amour des bonnes choses en même temps
que l’amour de Dieu, ils vont regarder comme exagéré ce que nous disons ici.
Mais ce sont eux qui sont dans l’erreur. Ils se contentent de l’amour naturel
de Dieu que nous pourrions avoir si nous étions sur le chemin des Limbes dans
l’ordre naturel. Dans ce cas, il est vrai que nous pouvons aimer les deux:
Dieu et les créatures.
C’était justement le cas du jeune homme riche à qui Jésus dit: Il te manque
encore une chose après qu’il eût dit qu’il observait bien les commandements de
la loi naturelle». Il n’observait pas le premier commandement d’aimer Dieu de
tout son cœur, puisqu’il aimait ses richesses… comme tous les prêtres
philosophes font et enseignent! Jésus leur dit comme à leur patron, ce jeune
païen: «Il vous manque encore une chose, l’amour surnaturel de Dieu», qui est
l’amour qu’on acquiert en sacrifiant notre amour pour les créatures.
Quel changement nous
verrions dans la vie des communiants si les prêtres leur enseignaient à acheter
leur amour de Jésus par le sacrifice des plaisirs de la terre! Que de prêtres
ignorent cette doctrine de l’amour surnaturel de Dieu! Ils essaient de faire
communier souvent les mondains, mais ils n’obtiennent pas de bons résultats. Ou
bien ces gens ne communient pas ou même s’ils communient, ils ne changent pas
de vie: ils sont tout aux choses de la terre comme de vrais païens sur le
chemin des limbes.
Les prêtres ont beau
organiser toutes sortes de concours pour faire communier les gens, on ne voit
pas grand changement dans leurs affections pour les créatures. Leur cœur en est
plein comme on peut le voir par leurs conversations toutes des bagatelles du
monde et pas du tout des choses de Dieu. Quand est-ce que les prêtres vont
distinguer l’amour naturel de Dieu d’avec l’amour surnaturel? Le premier ne
donne pas le ciel. Parce qu’il n’est qu’une admiration intellectuelle de l’être
suprême comme les païens peuvent avoir. Le jeune homme riche n’avait que cet
amour, il n’a pas pratiqué le premier commandement. Aussi, Jésus lui dit: «Il
te manque encore une chose pour entrer au ciel!». Débarrasse-toi de ton amour
pour les créatures et alors tu aimeras Dieu comme il le faut.
PRÉPARATION PROCHAINE
Quand Jésus est sur le
point de venir en mon âme avec la Sainte Trinité et toute la cour céleste pour
s’installer en moi, que dois-je faire pour qu’il soit content de sa réception
et que j’en reçoive un grand profit spirituel? Nous allons nous borner à
quelques actes parmi tous ceux qu’on pourrait faire.
LA FOI est de la plus
haute importance. Car, c’est si difficile de croire que Dieu est dans ce
morceau de pain que nos yeux voient, que notre palais goûte et que nous mangeons
comme du pain ordinaire. C’est facile de dire des lèvres: «Mon Dieu, je crois
que c’est J.-C. que je vais recevoir!». Combien ne le disent que des lèvres!
Regardez-les agir après leur communion, ils sont distraits, ils surveillent les
autres, ils n’ont rien à dire ou à demander à J.-C. Ils marmottent des formules
apprises par cœur, mais qui ne viennent pas du cœur. Tous savent que Jésus
demeure dans les saintes espèces autour d’une demi-heure, mais comme ils sont
rares ceux qui lui tiennent compagnie pendant ce temps. Chacun s’en va vite à
ses affaires et sort de l’église au plus vite pour converser avec les autres
des choses du monde. Quelle triste foi ces gens ont pour agir avec une
insouciance pareille envers Jésus réellement présent dans leur âme! Leur amour
de Jésus ne vaut pas plus que leur foi. Ces gens seront bien loin de Jésus dans
l’éternité, même s’ils sont sauvés. Il y a plusieurs demeures dans la maison de
mon Père! On peut être en face du soleil et le voir à peine à travers d’épais
nuages. Ces gens pourront bien être en face du Soleil de Justice au ciel et le
voir à peine à cause de leurs nuages épais d’indifférence qu’ils ont eus sur la
terre… et qui les suivent dans l’éternité.
Quand on croit vraiment
et sérieusement que l’on vient de recevoir J.-C. et qu’il va demeurer autour
d’une demi-heure réellement présent en nous, nous ne perdons pas de temps à
surveiller ce qui se passe autour de nous, mais nous nous recueillons autour de
Jésus pour agir exactement comme si nous le voyions des yeux du corps. Nous
nous prosternons dans des actes d’adoration, de louange et de remerciements que
nous prolongeons le plus possible. Que de grâces nous avons à lui demander!
Surtout quand nous savons qu’il vient en nous pour nous enrichir surnaturellement
et nous rendre semblables à lui. Puis, il y a le pardon de toutes nos offenses
à obtenir et les grâces pour ne plus jamais l’offenser. Tout cela ne se fait
pas en une minute! Nous en avons facilement pour une demi-heure à nous
entretenir avec notre Divin Sauveur. C’est là qu’il faut nous initier à la vie
du ciel au sein de la Trinité. Elle vient avec Jésus et même reste avec nous
après que la sainte Humanité est disparue, de sorte que nous devrions continuer
notre action de grâces toute la journée!
Evidemment, c’est un art
que d’apprendre à converser avec Jésus et qui s’apprend par la répétition des
actes. Exerçons-nous donc après chaque communion! Cela prend du temps; eh bien,
donnons-lui du temps! Qu’avons-nous de plus important que de bien recevoir
Jésus quand il daigne venir habiter en nous. N’allons donc jamais abréger notre
action de grâces pour des choses du monde. Si nous donnons au Maître du monde
ce qu’il veut, il nous donnera bien tout ce que nous voulons de lui. Nous avons
tout à gagner en restant le plus longtemps possible avec J.-C., source de tous
les biens naturels et surnaturels.
Pendant que nous avons
l’Auteur de la foi, c’est le temps de lui en demander. Disons-lui comme
l’aveugle: «Faites que je vois, mon Dieu!». C’est un don qui nous dépasse
absolument, par conséquent il faut le demander ardemment et constamment. Mais,
pour recevoir une augmentation de foi, il faut agir selon le degré de foi que
nous avons déjà. Si nous ne nous en servons pas, pourquoi Dieu nous en donnerait-il
plus? Par exemple, nous avons assez de foi pour savoir que c’est J.-C. présent
dans l’Hostie consacrée: eh bien! faisons quelque chose selon cette
connaissance; par exemple, allons le visiter quand même nous n’en avons pas le
goût. S’il nous voit faire quelque chose selon la foi, il nous en donnera
sûrement plus. Et plus nous en aurons et plus nous entrerons dans son monde.
L’HUMILITÉ est un des
principaux effets de la foi. Plus nous voyons Dieu même dans la foi, plus on se
sent petit, nul devant Dieu. Tout ceux qui sont pleins d’eux-mêmes et donc
pleins d’orgueil n’ont pas de foi ou très peu: c’est le cas de ceux qui
communient rarement. Ils ne sentent pas le besoin d’une vie surnaturelle plus
intense: ils sont donc satisfaits de leur vie naturelle de païens. Car,
lorsqu’on se connaît bien dans la lumière divine de la foi, on sait qu’on ne
vaut rien par soi-même et l’on fait tout pour s’unir davantage à Dieu, surtout
par la communion.
Comme on estime la
lumière d’une bougie durant la nuit et qu’on la méprise quand le soleil se
lève, ainsi on estime la lumière de sa raison naturelle dans la nuit du
paganisme, mais quand le soleil de Justice ou Jésus se lève dans l’âme, on
méprise sa misérable lumière païenne de la raison.
Jésus est le Dieu de
vérité et il veut la vérité en nous. Eh bien! La vérité est que de nous-mêmes
nous sommes rien: toutes nos petites perfections ne sont que des reflets des
perfections divines; Dieu ne fait que nous les prêter. Nous sommes dans le même
cas que la lumière de la lune. Quand même elle paraît venir d’elle-même, nous
savons que c’est la lumière du soleil qui se réfléchit sur sa face opaque. Elle
n’a aucune lumière par elle-même.
Eh bien! Nous devons nous
présenter à Jésus dans la communion dans toute notre vérité, donc l’esprit et
le coeur vides de toute estime de nous-mêmes, convaincus de notre néant
foncier. Ce que nous avons de bon, nous vient directement de Dieu et il faut
l’avouer en recevant J.-C. dans la sainte Communion. Nous sommes orgueilleux
parce que nous ne réfléchissons pas sur notre origine, ni sur notre absolue
incapacité de faire quoi que ce soit sans Dieu. Eh bien! Quand on va recevoir
notre Créateur dans notre âme, c’est le temps de faire la vérité dans nos
idées. La vérité nous rendra humbles et nous fera attribuer à Dieu tout ce que
nous avons et tout ce que nous sommes.
Combien de ces
orgueilleux pensent faire un grand honneur à Jésus en le recevant dans la
communion. Quel renversement des rôles! C’est tout le contraire. Ils agissent
comme s’ils recevaient un simple humain dans leur beau salon! Ces gens ne
reçoivent pas ou très peu de grâces de leurs communions. Le fait que la plupart
des chrétiens n’éprouvent pas ce sentiment profond de leur abjection devant la
majesté infinie de J.-C. montre que leur foi est bien superficielle. Ils ont
trop d’estime pour eux-mêmes pour en avoir beaucoup de J.-C. Ces gens n’ont pas
l’humilité voulue pour recevoir de grandes grâces de leurs communions.
En plus de notre néant
par nature, combien ont de nombreux et de gros péchés à expier encore. Ils les
ont confessés, mais combien peu font pénitence! Alors, ils ont encore une
immense dette à payer: cela devrait les rendre plus humbles. En tout cas, c’est
en proportion qu’on se vide le cœur de ses péchés et de son amour-propre ou de
son orgueil qu’on recevra abondamment les grâces de J.-C. dans la sainte
communion.
LE DÉSIR est essentiel
pour recevoir les dons de Dieu. Ils sont si grands et si précieux que Dieu ne
les donne qu’à ceux qui les apprécient et donc qui les désirent. Il a dit qu’il
ne faut pas jeter des perles aux pourceaux! Eh bien! Il ne jettera pas ses dons
divins à ceux qui ne les estiment pas déjà assez au moins pour les vouloir. Il
nous le dit sur tous les tons: «Demandez et vous recevrez!». Entendons-le nous
dire comme à la Samaritaine: «Si tu savais le don de Dieu et quel est Celui qui
te dit: donne-moi à boire, tu lui aurais demandé et il t’aurait donné de l’eau
qui jaillit jusque dans la vie éternelle». Eh bien! Dans la communion, nous
avons la source infinie de cette eau divine qu’est la grâce; alors demandons
ardemment tous les plus grands dons divins et nous en recevrons beaucoup selon
notre foi et notre confiance.
Que devons-nous demander?
Tout ce que nous apporterons avec nous au Ciel! Donc, rien de terrestre ni de
temporel. Ce serait insensé de lui demander des échantillons quand il offre la
source infinie de ces échantillons. Demandons ce que nous voudrons pour Dieu
quand nous serons avec lui au ciel. Ce sera sûrement ce qu’il nous fait
demander dans les premières demandes du Notre Père. Que son nom soit béni, que
son règne arrive et que sa volonté soit faite sur la terre comme au ciel. Quand
nous le verrons dans toute sa majesté, comme nous souhaiterons de le voir
honoré de tout le monde. Demandons ces grâces tout de suite.
Demandons-lui une plus
grande participation à sa vie divine, à la sagesse du Verbe et à l’amour du
Saint-Esprit, puisque nous nous en allons participer à cette vie de la Trinité
au ciel en union avec J.-C. Demandons des choses surnaturelles pour nous et
pour les autres. Que notre prière soit catholique, c’est-à-dire pour tous nos
frères en J.-C.: ces prières sont plus profitables que des prières égoïstes
pour ainsi dire. Puisque nous devons aimer notre prochain comme nous-mêmes,
demandons pour lui tout ce que nous demandons pour nous-mêmes.
Demandons de tout notre
cœur et pas des lèvres seulement. Choisissons des grâces dont nous comprenons
l’importance et demandons-les avec grand cœur. Demandons la sainteté dans toute
la force du mot et avec toutes ses conséquences pour notre vie pratique,
quelque pénibles qu’elles soient pour la nature. Demandons-lui d’avoir pitié du
monde qui va si mal, qui se tient si loin de Dieu et de l’Eglise, prions pour
les prêtres si lancés dans les choses du monde et si païens de mentalité.
Prions pour les communautés de toutes sortes, afin qu’elles soient tout aux
choses de Dieu comme leur vocation l’exige. Enfin pour la conversion des païens
et des pécheurs de tout le monde.
Que de fois Dieu a
manifesté aux saints qu’il donnerait plus de grâce pour améliorer le monde si
les bons catholiques le lui demandaient plus souvent et avec plus de cœur!
Faisons-le donc une bonne fois! Ayons à cœur tout ce que le Sacré-Cœur voulait
en faveur des hommes et demandons tout cela par l’intercession de la Sainte
Vierge.
LA COMMUNION NOUS DONNE…
L’HUMANITÉ DE JÉSUS qui
n’est présente sur la terre que dans l’Eucharistie et nous la recevons que par
la communion. Or, nous avons un besoin extrême d’elle pour nous sanctifier.
C’est elle qui a souffert pour nos péchés, c’est elle qui a mérité le ciel pour
tous les hommes et c’est elle que nous devons imiter dans notre propre vie
terrestre. Il est bon de savoir que dans la communion il y a quelqu’un de
semblable à nous qui peut sympathiser avec nos misères comme les ayant subies
comme nous, que cet Homme est notre voie pour nous conduire au Père éternel.
En proportion que nous
sommes bien disposés par le mépris des choses de la terre et l’amour des choses
de Dieu, toute sa sainte Humanité essaie de nous rendre semblables à elle. Son
imagination s’unit à la nôtre pour nous représenter les choses surnaturelles et
rêver au bonheur avec Dieu. Sa mémoire met en notre mémoire les bienfaits de
Dieu reçus dans le passé et nos méfaits pour nous les faire regretter. Son
intelligence nous prête ses divines lumières pour nous mieux faire comprendre
le monde divin et la doctrine de Jésus. Elle nous éclaire le monde de la foi nous
fait comprendre la vanité des choses de la terre et la beauté des choses
divines. Enfin, sa volonté tout embrasée de Pieu nous communique quelque chose
de son ardeur pour la Trinité en J.-C. et fortifie notre inconstance, nos
hésitations dans la pratique du bien. On sait qu’on a un appui merveilleux en
Jésus pour nous sanctifier. Les efforts coûteront moins et les tentations
seront moins difficiles à vaincre en nous appuyant sur Jésus.
Dès que l’on veut tant
soit peu, on n’est pas longtemps uni physiquement et substantiellement avec
J.-C. sans en retirer un immense avantage dans toute notre activité libre…
encore une fois en proportion qu’on enlève les obstacles à l’action du
Saint-Esprit comme nous devons les connaître à présent.
Cette union physique est
aussi transformante. Nos pensées se conforment aux siennes avec le temps, nos
convictions imitent les siennes et nos jugements se forment sur les siens. Peu
à peu on devient semblable à lui dans toutes ses facultés humaines et
divinisées par leur union avec le Verbe. Comme Jésus gardait ses plaies après
sa résurrection, il doit les garder aussi dans sa présence réelle en l’Hostie
consacrée. Elles vont nous pousser à nous mortifier selon chacune pour effacer
et expier les péchés que nos membres auraient commis. Prenons un peu de temps
pour les examiner et comme pour les toucher à l’exemple des Apôtres, mais pour
lui rendre une bonne partie de l’amour qu’il nous a donné en souffrant pour
nous avoir avec lui au ciel. C’est par la communion que nous cessons de vivre
pour nous-mêmes et que c’est Jésus qui vit en nous. Il se substitue
graduellement selon la perfection de nos dispositions à toute notre activité
personnelle pour diriger et imprégner toute notre vie de son divin.
Essayons de cultiver
cette union intime avec l’humanité de Jésus dans nos communions, parce que
c’est par la perfection de cette union que nous arriverons à l’autre union
spirituelle et constante avec la divinité après que son Humanité est partie. Ce
n’est donc pas du temps perdu que de travailler à nous assimiler la Sainte
Humanité le mieux possible. Efforçons-nous avec la grâce de Dieu de nous rendre
semblables au patron que Jésus nous présente dans la communion. Evidemment,
c’est l’amour qui va nous pousser à cette imitation et à cette participation
intime à l’activité sainte de l’Humanité de J.-C. L’amour rend les amants
semblables: mettons-en donc le plus possible dans nos communions!
LA TRINITÉ.
Comme l’Humanité de Jésus
est unie inséparablement au Verbe, elle l’est donc à la Trinité aussi, car là
où est le Verbe les deux autres Personnes y sont aussi, selon cette belle
parole de Jésus: «Afin qu’ils soient tous une seule chose, comme Vous, mon
Père, vous êtes en moi et moi en vous et qu’ils soient de même une seule chose
en nous, afin que le monde croit que vous m’avez envoyé». Puisque nous allons
participer au ciel à la vie de la Trinité, nous devons donc commencer à le
faire sur la terre dans la foi. Eh bien! Jamais on ne peut être plus uni à la
Trinité que par la présence réelle de J.-C. dans la communion.
Cette union physique
devrait nous conduire à une union spirituelle dans la mesure que nous y mettons
de bonnes dispositions, comme l’amour de Dieu, l’humilité et la confiance en
Dieu. Tout le ciel vient donc avec Jésus dans la Communion! C’est donc un ciel
anticipé au fond de notre âme. C’est à nous à en profiter! Pour cela, il faut
concentrer toute notre attention sur la Sainte Trinité en nous pour l’adorer,
la louer, l’aimer et lui demander toutes les grâces nécessaires pour devenir
plus dignes d’elle.
Le grand obstacle à
l’union intime à la vie de la Trinité, n’est pas le péché car tout le monde
sait qu’il empêche cette union. Mais, c’est cette bonté naturelle sur laquelle
tant de chrétiens comptent pour s’unir à Dieu… et qui ne vaut rien du tout pour
notre union surnaturelle avec Dieu, la seule qu’il veut de nous. C’est là
l’ivraie semée par nos philosophes dans leurs prédications. Jamais ils
n’attaquent cette bonté naturelle comme nulle pour le ciel: ils disent même
qu’elle est méritoire devant Dieu, ce qui est absolument faux. Dès qu’on compte
sur cette bonté naturelle, on devient paresseux pour chercher la bonté
surnaturelle. On la regarde comme du luxe en perfection. Voilà une des raisons
de la tiédeur de tant de catholiques: ils sont contents d’eux-mêmes dès qu’ils
sont sortis du péché… et ils restent là! Ces gens n’ont pas grand-chose à
demander à J.-C. dans la communion, puisqu’ils ont ce qu’ils veulent: le
naturel. Mais, si tous savaient que leur bonté naturelle ne vaut rien devant
Dieu, ils s’efforceraient plus d’acquérir la bonté surnaturelle qui est
autrement exigeante que l’autre. Cette dernière ne vit que de motifs absolument
surnaturels en toutes choses, soit explicites, soit implicites.
LEUR VIE INTIME.
La Trinité ne vient pas
en nous simplement comme un ornement: c’est une vie divine que les Trois
Personnes continuent de vivre d’abord en elles-mêmes comme au ciel et ensuite
en nous en proportion que nous le méritons et que nous le voulons avec la grâce
de Dieu. Il nous a créés justement pour cette participation à sa vie trinitaire
d’abord dans la foi en ce monde et ensuite dans la gloire au ciel. Nous avons
tout ce qu’il faut en nous pour recevoir l’activité particulière attribuée à
chaque Personne.
Insistons ardemment pour
recevoir une augmentation de la vie du Père, ce qui se fait par la grâce
sanctifiante. C’est la base de toute notre transformation en être divin: c’est
la vie que nous voulons tous. Comme nous apprécions une bonne santé et une vie
vigoureuse. Eh bien! Il nous faut cette sorte de vie surnaturelle, afin de
faire beaucoup pour la gloire de Dieu et le salut des âmes. Il nous faut une
vie divine débordante pour lutter contre nos ennemis: les démons, le monde et
nos passions. Une vie pauvre et languissante ne pourra jamais triompher de ces
puissants ennemis de notre salut. Demandons donc une vie intense du Père.
Demandons au Fils une
plus grande participation à sa sagesse divine. Nous voulons avoir sa mentalité,
pour apprécier, pour estimer et pour juger toutes choses exactement comme il le
fait lui-même. Nous voulons mépriser les créatures comme lui et être tout aux
choses de Dieu comme il dit qu’on doit être tout à Dieu. Un disciple de Jésus
doit aimer la pauvreté comme son Maître l’a aimée et pratiquée. Son cœur doit
être plein uniquement des choses divines. Voilà la sagesse divine que tout
chrétien doit désirer de tout son cœur et la demander constamment.
Enfin, il faut demander
l’amour de Dieu qui est une participation à la vie du Saint-Esprit. Avec la
Vie, la Sagesse et l’Amour divin, nous commençons à mener la vie du ciel dans
la foi seulement, mais quand même en toute réalité. C’est comme le germe de la
vie éternelle. Un catholique doit s’efforcer de vivre ces trois vies ou trois
activités divines de plus en plus s’il veut progresser en sainteté. Les trois
sont les trois foyers de notre vie surnaturelle: ce sont ces vies qui
alimenteront toute notre activité intentionnelle et libre où se trouve notre
mérite devant Dieu.
Mais celui qui veut vivre
ces trois activités doit retirer le plus possible toute son activité des choses
du monde. Car la vie des sens est entièrement opposée à la vie de foi, surtout
ici où il s’agit d’amour de Dieu. On ne peut pas l’aimer et aimer le monde en
même temps. Par conséquent, ceux qui cherchent leurs distractions et leur
bonheur dans les amusements de ce monde n’auront jamais le bonheur qu’ils
trouveraient dans la participation de ces trois activités selon la foi. On
n’entend pas ces gens parler des choses de Dieu: c’est donc qu’elles ne sont
pas dans leur coeur. Il faut en vider le cœur pour recevoir cette précieuse
participation à la vie trinitaire.
LE COMMUNIANT DOIT
RAYONNER JÉSUS
C’est une conséquence du
point précédent: celui qui vit de Jésus le manifeste nécessairement. Est-ce que
celui qui vit de musique ne le montre pas partout? Est-ce que celui qui vit du
monde ne le montre pas partout? Toute son activité en est imprégnée. Eh bien!
Celui qui est plein de Jésus et qui est tout aux choses de Jésus le montre
aussi dans toute sa conduite. Rien autre chose ne l’intéresse. Il parle donc
habituellement des choses de Dieu, il garde le silence sur les choses du monde,
il les fuit comme la peste et il est à tous les exercices religieux qui se font
dans sa paroisse, il s’intéresse aux choses de la religion et il en parle
facilement. Il pense comme Jésus, il parle comme Jésus et il agit comme Jésus.
Il le glorifie donc, il le fait connaître, en un mot, il le rayonne partout et
toujours.
Celui qui communie
souvent, aime sûrement J.-C. et l’amour de tout homme se manifeste dans ses
paroles et dans sa conduite. Cela ne s’applique point à ceux qui communient
souvent par routine ou pour faire comme les autres, comme on voit dans les couvents
et les collèges où la communion quotidienne est en usage. Mais, cela est vrai
pour ceux qui communient par esprit de foi et pour l’amour de Dieu. Ceux-là
rayonnent Jésus facilement.
Que tous se surveillent
sur ce point, afin de le rayonner davantage. Dès qu’on l’aime tant soit peu, on
veut le faire aimer par les autres: il faut donc se comporter pour qu’ils le
reconnaissent à notre manière d’agir. Que Dieu accorde cette grâce à tous les
catholiques avec la communion fréquente!
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