lundi 6 mai 2019
dimanche 5 mai 2019
samedi 4 mai 2019
dimanche 28 avril 2019
Abbé Joseph Collins - R.I.P. (prière)
L'abbé Joseph Collins est décédé le 27 avril 2019 à 11h54.

O Seigneur Dieu, en qui et par qui ce qui meurt ici-bas retrouve la vie, par qui
nos corps ne périssent point, mais sont transfigurés, nous vous supplions de
pardonner à l’âme de votre serviteur tout ce qu’elle a pu faire de contraire à
votre volonté sainte; et daignez, Seigneur, la faire porter par les mains de
vos élus dans le sein des Patriarches, où il n’y a plus de soupirs, plus de
tristesse, plus de douleurs, où les âmes sont éternellement dans la joie. Et au
jour terrible du jugement, faites-la entrer avec tous vos Saints dans le
partage de cette éternelle gloire que l’œil n’a point vue, que l’oreille n’a
point entendue, que le cœur humain ne connait pas et que vous avez préparée, ô
mon Dieu, à tous ceux qui vous aiment !
Requiem
aeternam dona ei, Domine
Et lux perpetua luceat ei.
Requiescat in pace
Amen
Pour plus d'informations et photos : https://novusordowatch.org/2019/04/father-joseph-collins-rip/
dimanche 21 avril 2019
Cardinal Pie - Pâques - Jésus-Christ est roi

X Supplément - XV
Homélie sur le psaume II
pour le jour de Pâques 24 avril 1859
Ego autem constitutus sum rex ab eo super Sion
montem sanctum ejus, prædicans præceptum ejus.
Dominus dixit ad
me : Fitius meus es tu, ego hodie genui te.
Postula a me, et
dabo tibi gentes hæreditatem tuam,
et possessionem
tuam terminos terræ.
Pour moi, j’ai été oint et constitué
roi par lui sur Sion, sa montagne sainte, avec l’ordre d’y publier son décret.
Le Seigneur m’a dit : Vous êtes mon fils, je vous ai engendré aujourd’hui.
Demandez-moi, et je vous donnerai les nations pour votre héritage, et votre
possession s’étendra jusqu’aux limites de la terre.
Ps. II-6, 7, 8
Mes très chers frères,
En vain les nations ont frémi, en vain
les peuples ont formé de tragiques complots, en vain les rois de la terre et
les princes se sont ligués contre le Seigneur et contre son Christ, le Christ n’en
est point ému ; et voici le secret de sa force et de sa sécurité : « Quant à
moi, dit-il, j’ai été oint et sacré par les mains mêmes de Dieu ; j’ai été constitué
par lui, j’ai été institué Roi sur la montagne de Sion».
M. F., Jésus-Christ est roi : c’est
un point incontestable de la doctrine chrétienne. Ce point, il est
utile, il est nécessaire de le rappeler en ce siècle. On veut bien de
Jésus-Christ rédempteur, de Jésus-Christ sauveur, de Jésus-Christ prêtre, c’est-à-dire
sacrificateur et sanctificateur. Mais de Jésus-Christ roi, on s’en épouvante,
on soupçonne quelque empiètement, quelque usurpation de puissance, quelque
confusion d’attribution et de compétence [1].
Jésus est Roi, dit saint Hilaire : je
ne sais pas qui pourrait lui contester ce titre après que le larron le lui a
reconnu sur la croix : Et nescio Christum regem esse ambigere ut tritum,
latrone hoc ipso in crucis passione confitente. Il n’est pas une page des
prophètes, pas une des évangélistes et des apôtres qui n’impute à Jésus-Christ
ses qualités et ses attributions de roi. Jésus est encore au berceau, et déjà
les Mages cherchent le roi des Juifs : Ubi est qui natus est Rex
Judæorum [2]. Jésus
est à la veille de mourir ; Pilate lui demande : « Vous êtes donc Roi ? : Rex
ergo es tu [3] ? »
Vous l’avez dit, répond Jésus. Et cette réponse est faite avec un tel accent d’autorité
que Pilate, nonobstant toutes les représentations des Juifs, consacre la
royauté de Jésus par une écriture publique et une affiche solennelle. « Écrivez,
ô Pilate, s’écrie notre grand Bossuet, écrivez les paroles que Dieu vous dicte,
dont vous n’entendez pas le mystère. Vous dites bien : Quod scripsi, scripsi.
Que vos ordres soient irrévocables parce qu’ils sont en exécution d’un arrêt
immuable du Tout Puissant. Que la royauté de Jésus soit écrite en la langue
hébraïque qui est la langue du peuple de Dieu, en la langue grecque qui est la
langue des philosophes et des doctes, et en la langue romaine qui est la langue
de l’empire et du monde, la langue des conquérants et des politiques. Approchez
maintenant, ô Juifs, héritiers des promesses, et vous, ô Grecs, inventeurs des
arts, et vous, Romains, maîtres de la terre ; venez lire cet admirable écriteau
; et tous, tant que vous êtes, fléchissez le genou devant votre Roi » [4].
Que dis-je, mes Frères ? C’est à nous tous, c’est à l’univers entier que s’adresse
cette proclamation solennelle.
Et si l’inscription de Pilate nous
déplaît à lire parce qu’elle a été tracée par une main indigne, entendons l’arrêt
divin que Jésus lui-même promulgue : « Pour moi, j’ai été établi par lui roi
sur sa sainte montagne de Sion, et j’exposerai, je publierai son décret. Le
Seigneur m’a dit : Vous êtes mon fils, je vous ai engendré aujourd’hui.
Demandez-moi, et je vous donnerai toutes les nations en héritage ».
Mes Frères, Jésus-Christ, en tant que
Dieu, était roi de toute éternité, et par conséquent en entrant en ce monde, il
apportait avec lui déjà sa royauté. Mais Jésus-Christ, en tant qu’homme, a
conquis sa royauté à la sueur de son front, au prix de tout son sang. « Le
Christ, dit saint Paul, est mort et il est ressuscité, à cette fin d’acquérir
l’empire sur les morts et sur les vivants : In hoc Christus mortuus est et
resurrexit ut mortuorum et vivorum dominetur » [5].
Aussi le même apôtre fonde-t-il à la
fois sur le texte de notre psaume le mystère de la résurrection et le titre de
l’investiture royale du Christ. « Le Seigneur a ressuscité Jésus ainsi qu’il
est écrit au psaume second : Vous êtes mon Fils, je vous ai engendré
aujourd’hui. Oui, éternellement, je vous ai engendré de mon propre sein ; dans
la plénitude du temps, je vous ai engendré du sein de la Vierge votre mère ;
aujourd’hui je vous ai engendré en vous retirant du sépulcre : Ressuscitans
Jesum sicut est in Psalmo secundo scriptum : Filius meus es tu, ego hodie genui
te » [6].
Oui, dit le Seigneur à son Christ, c’est
là encore une nouvelle naissance que vous tenez de moi-même. Premier-né d’entre
les vivants, j’ai voulu que vous fussiez aussi le premier-né d’entre les morts,
afin que vous teniez partout la première place : Primogenitus ex mortuis, ut
sit in omnibus ipse primatum tenens [7].
Vous êtes donc mon Fils. Vous l’êtes à tous les titres, puisque je vous ai
triplement enfanté de mon sein, du sein de la Vierge et du sein de la tombe.
Or, à tous ces titres, je veux que vous partagiez ma souveraineté, je veux que
vous y participiez désormais comme homme, de même que y avez éternellement participé
comme Dieu. « Demandez-moi : Postula a me, et je vous donnerai les
nations en héritage, et j’étendrai votre possession jusqu’aux extrémités de la
terre ».
Jésus-Christ a demandé et son Père lui
a donné. « Toute puissance m’a été donnée au ciel et sur la terre, allez donc,
et enseignez toutes les nations » [8].
Vous l’entendez, M. F., Jésus-Christ ne dit pas tous les hommes, tous les
individus, mais toutes les nations. Il ne dit pas seulement : baptisez les enfants,
catéchisez les adultes, mariez les époux, administrez les sacrements, enterrez
les morts. Sans doute la mission qu’il leur donne comprend tout cela, mais
elle comprend plus que cela ; elle a un caractère public, un caractère social.
Et comme Dieu envoyait les anciens prophètes vers les chefs, vers les peuples
pour leur annoncer ses préceptes, pour leur dire leurs vérités : Clama et
annuntia populo meo scelera eorum : Va, et dis à ce peuple ses crimes
» [9] ;
ainsi le Christ envoie ses apôtres et son sacerdoce vers les nations, vers les empires,
vers les rois et les puissants, afin qu’ils enseignent sa loi, qu’ils
rappellent sa doctrine à tous : Euntes ergo docete omnes gentes [10].
Jésus-Christ a été constitué Roi des
rois. Oui, M. F., et c’est la véritable gloire, la véritable noblesse des rois,
depuis la prédication de l’Evangile, depuis la conversion des Césars, d’être
désormais les lieutenants de Jésus-Christ sur la terre. Est-ce que par hasard
les rois seraient moins grands depuis que la croix brille au sommet de leurs
diadèmes ? Est-ce que le trône serait moins illustre, moins assuré, depuis que
ta royauté est une émanation, une participation de la royauté de Jésus-Christ ?
Jésus-Christ a été constitué roi, et c’est aussi la véritable dignité, la véritable
liberté, la véritable émancipation des nations modernes d’avoir le droit d’être
régies chrétiennement. Est-ce que par hasard les nations seraient déchues ?
est-ce que leur sort serait moins noble, moins heureux, depuis que les sceptres
auxquels elles obéissent sont tenus de se soumettre au sceptre de Jésus ?
Répétons-le donc, mes Frères : Le
christianisme n’a pas tout son développement, tout son épanouissement, là où il
ne revêt pas le caractère social. C’est ce que Bossuet a exprimé en ces termes.
« Le Christ ne règne pas si son Église n’est pas la maîtresse, si les peuples
cessent de rendre à Jésus-Christ à sa doctrine, à sa loi, un hommage
national ». Quand le christianisme d’un pays se réduit aux simples
proportions de la vie domestique, quand le christianisme n’est plus l’âme de la
vie publique, de la puissance publique, des institutions publiques, alors
Jésus-Christ traite ce pays comme il y est traité lui-même. Il continue sa
grâce et ses bienfaits aux individus qui le servent, mais il abandonne les
institutions, les pouvoirs qui ne le servent pas ; et les institutions, les
pouvoirs, les rois, les races deviennent mobiles comme le sable du désert,
caducs comme ces feuilles d’automne que chaque souffle du vent emporte.
« Demande-moi et je te donnerai toutes
les nations en « héritage ». Le Christ ressuscité a demandé toutes les nations
à son Père, et il fait acte de royauté sur terre. Mais, M. F., une nation a été
particulièrement demandée par le Christ à son Père, et lui a été particulièrement
donnée : cette nation, c’est la nôtre, nation très chrétienne, nation toujours
orthodoxe, née dans l’orthodoxie, Fille aînée de l’Église. Ah ! M. F., il est bien
des côtés par lesquels la France peut se flatter de justifier toujours sa
vocation première. Elle est restée l’instrument de Dieu, même dans ses plus
mauvais jours, et les exploits de Dieu se sont accomplis par ses mains.
Toutefois, hélas ! par combien de côtés aussi notre infortunée patrie n’a-t-elle
pas été infidèle à sa mission ! Combien de sujets de craindre que si elle
persévérait dans ses oppositions à Jésus-Christ, dans son divorce avec
Jésus-Christ, dans le déisme et le naturalisme des modernes principes de son
droit public, combien de sujets de craindre que sa mission ne lui soit enlevée
et transportée à une autre nation qui produirait plus de fruits !
Il n’en sera pas ainsi, Seigneur. Le
cours de vos miséricordes ne s’arrêtera point. Après avoir rouvert à cette
nation les temples que l’impiété avait fermés, après lui avoir rendu la foi
privée et domestique que des sophistes impies avaient ébranlée, vous
poursuivrez votre œuvre, et la seconde moitié de ce siècle, déjà si féconde et
si chargée de grandes choses, ne s’achèvera point que notre France n’ait repris
la première place entre toutes les nations qui forment votre héritage, ô
Seigneur, la place qui convient à la Fille aînée de l’Église. Ainsi soit-il.
[1] V. T. III-511
[2] Matth. II-2
[3] Joann. XVIII-37
[4] 1er discours pour la Circoncision. Édit. Lebel T. XI p. 467
[5] Rom. XIV-9
[6] Act. XIII-33
[7] Colos. I-18
[8] Matth. XXVIII-18
[9] Is. LVIII-1
[10] Matth. XXVIII-19 ; V. T. III-512-514
mardi 16 avril 2019
Demande de prière pour l'abbé Collins
Suite à un récent courriel de l'abbé Ahern, nous vous demandons de bien vouloir prier pour l'abbé Joseph Collins qui a un cancer.
Voici le courriel datant du 13 avril dernier de l'abbé Ahern au sujet de l'abbé Collins :
Voici le courriel datant du 13 avril dernier de l'abbé Ahern au sujet de l'abbé Collins :
There have been requests for
an update on Father Collins, and his illness. As things have progressed, there
have been plans made, then modified. There have also been many many promises of
prayer and wonderful expressions of encouragement and sympathy. Our Lord has
granted Father more than 66 years in this life, nearly 39 in the holy
priesthood.
Last week, a stent was
inserted to relieve some of the pressure on the liver, and to restore some
digestion of food. Otherwise, the diagnosis of advanced and advancing cancer
was confirmed.
The conclusion from the
physician was that chemotherapy was the only treatment option, and that this
was likely to do more harm than good.
With the help of some dear
friends, Father Collins is trying a focused nutritional approach at home in his
rectory. Otherwise, he is making ready for his last hour. He is weak and often
fatigued, but not in severe pain, able to get around to a limited degree, and
to converse with those around him. Please be reassured that his material needs
are quite adequately provided for.
Father's spirits are good. He
is profoundly grateful for the prayers, kind messages, and assistance of so
many people. Even more, “God is good,” as he says, who has given his servant
forewarning to prepare for death. No longer able to offer Mass, Father Collins
is able to continue his prayers, and to receive Holy Communion.
It may be of benefit to recall
that with most cancer one is morally free to pursue one or another treatment,
several treatments, or none at all.
Shortly after it became
evident that he had a serious illness, Father Collins received the sacrament of
Extreme Unction. There is a compact sick call Ritual called Vademecum ad
Infirmos, for the use of priests in the United States. It has a beautiful and
consoling prayer that can be prayed with the sick person after the
administration of Extreme Unction:
O my dearest Jesus, now my
body is anointed with holy oil, and my soul is strengthened against all
temptations of the wicked enemy, and consoled in my sufferings. I thank Thee
from the bottom of my heart for Thy great goodness and mercy.
I will now dismiss all worldly
cares, and resign myself entirely to Thy mercy. If it be for my salvation, I
hope soon to recover, and if not, I will rejoice, my sweetest Jesus, to attain
eternal rest with Thee; for one day with Thee in Heaven is better than a
thousand here on earth. Grant that I may never lose the grace of this holy
Sacrament. Amen.
This is what Father Collins is
striving to do, and this should be our prayer for him now, and for ourselves
when the time comes. How fitting to have all this come in Passiontide when we
unite ourselves to our Savior's death in order to have the hope of eternal
life.
Yours in the Sorrowful and
Immaculate Heart of Mary,
-
Father Ahern
dimanche 14 avril 2019
Cardinal Pie - Dimanche des Rameaux
X Supplément - XLVII
Homélie pour la bénédiction
et la procession des Rameaux le 24
mars 1877
Plurima autem
turba...
cædebant ramos
de arboribus et sternebant in via.
Turbæ autem quæ
præcedebant et quæ sequebantur clamabant :
Hosanna filio
David !
Benedictus qui
venit in nomine Domini, hosanna in altissimis.
Une foule nombreuse coupait des
branches d’arbres
et en jonchait la route par où devait
passer Jésus.
Et les multitudes qui précédaient
ou qui suivaient le Sauveur criaient :
Hosanna au fils de David ! Béni
soit celui qui vient au nom du Seigneur. Hosanna au plus haut des cieux.
Nous commençons aujourd’hui, M. F.,
cette semaine que l’Église appelle la grande semaine ; non pas, dit saint Jean
Chrysostome, que les jours en soient plus longs et plus nombreux, mais à cause
qu’ils sont pleins des plus grandes choses que Dieu ait jamais opérées. En
effet, M F., on n’y songe pas sérieusement : quels autres faits historiques
comparables à ceux dont l’Église va nous rappeler la mémoire ! Aujourd’hui
l’entrée triomphale de l’Homme-Dieu dans Jérusalem ; dans trois jours, le
mystérieux souper dans le cénacle eucharistique ; puis la souffrance, la mort
de ce Dieu, crucifié par les hommes ; enfin la résurrection de ce Dieu sauveur :
quels événements que ceux-là ! et qu’il faudrait être négligent pour n’y
prendre aucun intérêt ! Combien sont abaissés vers la terre, absorbés, perdus
dans la matière, ceux qui n’ont aucune attention pour les anniversaires qui
rappellent d’aussi hautes et d’aussi saintes pensées !
Je vous le dirai un autre jour, M. F.,
car la longueur de la solennité ne me permet aujourd’hui que quelques paroles.
Il existe dans l’Église catholique, une admirable économie d’après laquelle les
grands faits sur lesquels repose la religion tout entière sont en quelque sorte
perpétués au milieu de nous. Oui, dans le temple catholique, les faits
principaux de la religion ne sont pas seulement lus, récités ; ils sont
reproduits, renouvelés chaque année par une représentation vivante et
solennelle. Et il y a en cela une connaissance profonde de notre nature, de la
nature de l’homme, non pas seulement de l’ignorant, mais du savant lui-même,
chez lequel les impressions sont toujours moins vives quand elles sont dues à l’ouïe
que quand les objets ont été placés sous les yeux, organes plus sûrs et plus
fidèles.
Aujourd’hui donc, et pendant toute
cette semaine, les dernières pages de l’Évangile, depuis l’entrée triomphante
du Christ à Jérusalem jusqu’à sa sortie plus triomphante encore du sépulcre,
vont se dérouler sous nos yeux par de touchantes cérémonies. Ah ! M. F.,
combien ces spectacles de l’Église ont autrefois instruit, touché nos pères !
Que ces vastes nefs sont tristes, lorsque ces augustes solennités s’accomplissent
comme dans la solitude. De si beaux spectacles et si peu de spectateurs ! Ah !
nous vous en prions, venez, venez vous joindre à nous dans les derniers jours
de cette semaine. Venez pénétrer vos âmes de ces grands mystères, les seules
choses véritablement dignes d’occuper nos esprits et nos cœurs.
Aujourd’hui, M. F., avec quelle joie
je vous ai vus accourir pour célébrer avec moi cette mémorable solennité des
Palmes, des Rameaux ! Voyez comme procède l’Eglise catholique. Ce n’est point
une simple lecture, un froid récitatif de ce qui s’est accompli en pareil jour
à Jérusalem ; ce n’est pas même simplement un discours ayant pour objet de
développer ce souvenir. Non : des palmes ont été cueillies ; elles sont auprès
de l’autel. L’Église a mis sur mes lèvres de magnifiques accents pour appeler
sur ces rameaux la bénédiction céleste. Puis vous êtes venus les recevoir de ma
main, et tous nous nous mettons en marche, et nous allons chanter à Jésus l’antique
hosanna : « Hosanna au fils de David ! Béni soit celui qui vient au nom du
Seigneur. Hosanna au plus haut des cieux ! » Comme toute cette marche
vivante, animée, donne plus de sens aux paroles du texte sacré qui seront
chantées ! Comme tout cela est plein d’onction et de grâce !
Mais entrons plus avant dans l’esprit
de cette cérémonie. M. F., vous et moi, nous avons en ce moment des palmes à la
main ; et à qui donc allons-nous les offrir ? Quel est ce Roi auquel nous allons
faire cortège ? Le Roi, mais c’est un nom qu’on ne prononce plus impunément
dans notre patrie. Ah ! Seigneur Jésus, louange à vous, Roi dont la gloire est
éternelle ! Les trônes de la terre se sont écroulés, et les yeux les plus
fidèles n’ont pas d’autre tribut à payer que le tribut des larmes. Votre trône
est éternel. Nous allons tous le chanter : Gloire, louange, honneur soit à vous,
Roi, Christ, Rédempteur, vous à qui le jeune âge offrait un pieux hosanna !
Vous êtes le Roi du monde. Le peuple
hébreu, il y a dix-huit siècles, allait au-devant de vous avec des palmes ;
nous voici devant vous avec des palmes encore. Ce qui se fit à Jérusalem il y a
deux mille ans, la ville de Poitiers le fait aujourd’hui. Ce que les enfants
chantaient, nous le répétons tous. S’il s’agissait de parer de notre présence,
d’animer par nos acclamations le triomphe d’un homme, d’un homme si grand qu’il
fût ; nous vivons dans un siècle qui est fier, et la fierté nous arrêterait
peut-être. Mais, ô Jésus, ô Roi du ciel, quand il s’agit de vous, la honte n’est
pas possible : nous sentons que nous nous honorons, que nous nous grandissons
nous-mêmes en abaissant nos rameaux sous vos pas. Ce que nous faisons aujourd’hui,
nous le faisons d’accord avec tous les siècles.
Entendez, disait autrefois le grand
saint Hilaire à son peuple rassemblé autour de lui, entendez bien une parole de
l’évangéliste que vous avez peu remarquée : Turba autem qua præcedebant et
quæ sequebantur : les foules qui précédaient et qui suivaient Jésus se
dépouillaient de leurs vêtements pour en faire un tapis sous ses pieds, coupaient
des branches d’arbres pour en joncher le chemin. Qu’est-ce à dire, les foules
qui précédaient, les foules qui suivaient ?
Les foules qui précédaient, c’est-à-dire,
toute la série des patriarches et des prophètes, des juges, des rois, tous les
justes de la Loi. Voyez tout ce cortège de quatre mille ans qui précède Jésus :
Adam, Noé, Abraham, Moïse, Samuel, David, Isaïe, Esdras, les Macchabées, que
sais-je ? Voyez toutes ces foules de croyants qui détachent de leurs prophéties
des rameaux, qui quittent leurs vêtements royaux ou pontificaux pour préparer
le passage du Triomphateur. Voyez-les, sur cette route de quarante siècles, se
pressant et se succédant, tenant chacun en leurs mains une palme triomphale et
chantant hosanna au Roi des siècles qui s’avance. Telle est la foule ou plutôt
telles sont les foules qui précédaient Jésus : voilà son cortège par devant : Turbam
autem quæ præcedebant.
Et quæ sequebantur, et les foules qui le
suivaient. Ah ! il ne s’agit plus seulement de ces enfants, de ces habitants
de Jérusalem qui payaient leur tribut de louanges au Christ qui allait
souffrir. Non, ce sont tous les chrétiens chantant hosanna au Christ, qui règne
dans les cieux : Hi tibi piissimo... nos tibi regnanti. Les foules qui
suivaient, M. F., aux jours d’Hilaire, c’étaient déjà quatre siècles de martyrs,
de docteurs, de chrétiens de toute condition, de tous pays. Mais depuis l’homélie
de mon saint prédécesseur, ce cortège s’est bien allongé et j’aurais beaucoup à
faire pour compléter l’énumération des foules qui ont suivi Jésus en lui
chantant hosanna. Les foules qui ont suivi Jésus en lui répétant ce chant de
gloire, c’est depuis Hilaire, c’est Augustin, c’est Jérôme, c’est tout ce grand
siècle dont il a été l’un des coryphées, qui l’a suivi et dont l’Église sera
toujours si fière ; c’est Ambroise, c’est Basile, c’est Chrysostome, puis ce
sont des peuples barbares devenus chrétiens.
Qu’est-ce que l’histoire de la France,
sinon un hosanna de quatorze siècles ! Citez-moi quelqu’un, quelque chose de
grand, dans notre pays, qui n’ait pas abaissé sa palme devant Jésus-Christ. Jésus-Christ,
c’est la pierre angulaire de notre pays, la récapitulation de notre pays, le
sommaire de notre histoire. Non, rien n’est plus vivant dans notre
histoire nationale que le nom de Jésus : Jésus-Christ, disait l’héroïne d’Orléans,
qui est roi de France et du monde entier. Oui, Jésus ç’a toujours été parmi
nous la première majesté, majesté toujours debout. Ce n’est plus être Français
que de ne pas être chrétien ; et selon la parole de saint Ambroise, qui ne
s’applique pas moins à notre pays qu’à la nation sainte : Sed ipsi se amore
patriæ, qui Christo invident, abdicaverunt. Jésus-Christ, c’est tout notre
avenir. Dites-moi ce qui reste debout parmi nous : Jésus-Christ. Tout le reste
s’est affaissé, a disparu ; Jésus-Christ n’a fait que grandir. Et si vous
voulez que j’écrive en trois mots l’histoire des cinquante dernières années de
ce siècle, si vous voulez que je vous dise à qui est réservée la victoire, la
royauté, l’empire, je vais l’écrire, et d’une main ferme, sur ce frontispice du
temple : Christus vincit, regnat, imperat : à Jésus-Christ, la victoire,
la royauté, l’empire ; à lui les palmes, à lui l’hosanna, à lui et à lui
seul !
Mon Frère, ah ! que cette
victoire, que cette royauté, que cet empire de Jésus-Christ s’exerce partout
sur vous, sur votre intelligence, sur votre cœur. Ecce rex tuus venit tibi
mansuetus [1] : C’est un roi qui vient vers vous
plein de douceur. De grâce, ne cherchez pas d’autre maître que lui. Si vous ne
voulez pas de ce roi plein de mansuétude, vous aurez d’autres maîtres pleins de
colère. N’apportez plus, pour votre part, n’apportez plus d’obstacle au règne
de Jésus-Christ. Ne mettez ni vos vêtements, ni vos rameaux sous ses pieds, à
la bonne heure ; mais déposez vos cœurs entre ses mains. Dites aujourd’hui
cette parole : Rex meus et Deus meus [2]. Jésus-Christ, vous êtes mon Roi et
mon Dieu. Ainsi soit-il.
[1] Matth. XXI-5
[2] Ps. XLIII-5
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