TROISIÈME
INSTRUCTION
LE
RÈGNE DE JÉSUS-CHRIST.
«
Pilate lui dit: Tu es donc Roi? Jésus
répondit: Tu l’as dit; je suis Roi!» Jo.
XIII, 37.
Plan
Remarque. (Par naissance, création,
rédemption.
Jésus
est notre Roi: (Proclamé Roi par Prophètes, Lui-même, Eglise. (Il veut régner sur nous tous. (Aux démons.
Jésus fait la guerre: (Au monde.
(À notre sensualité.
(L’empressement. Jésus veut à son
service: (La magnanimité. (La générosité. Parabole de S. Ignace.
REMARQUE
Voici une note caractéristique de Jésus qu’il vaut mieux prendre tout de suite
en sérieuse considération avant d’aller plus loin dans l’étude de Jésus. Quand même il n’est pas né encore, cette note
va nous aider à prendre une meilleure attitude mentale pour nous préparer à
mieux le recevoir. C’est notre Roi et
Maître souverain que nous allons étudier dans cette retraite. Il a donc le droit de s’imposer à notre
attention et nous avons le devoir de nous soumettre à son influence et à son
empire. Il nous touche donc de bien
près: ce n’est pas un étranger à notre personne ou à notre vie: c’est Celui qui
ordonne tout après nous avoir donné la vie et par conséquent qui est
extrêmement intime à tout ce qui nous concerne au plus profond de notre être.
S’il
vient nous inviter charitablement à le suivre ce n’est pas parce qu’il ne
pourrait pas s’imposer, mais il veut nous honorer en nous laissant libres de le
choisir pour que nous ayons du mérite et lui de la gloire. Mais, si nous ignorons son invitation
pressante à sa miséricorde, nous ne pourrons pas éviter les rigueurs de sa
justice divine en l’autre monde.
Dans
les mystères de sa vie humble, il cache en général la majesté de sa royauté
pour ne pas effrayer les hommes afin qu’ils s’approchent de lui avec confiance,
mais il est important pour notre mentalité de nous rappeler qu’il est notre Roi
quand même. La conséquence est qu’il n’y
a rien d’insignifiant dans sa vie: tous les détails comportent quelques bonnes
leçons pour nous tous. Comme les gens du
monde surveillent les moindres gestes et les moindres paroles d’un roi de la
terre pour en faire des sujets de conversation et des points d’imitation,
ainsi, à plus forte raison, en Jésus.
Celui
qui a ordonné tous les détails de la vie de Jésus est le même qui a ordonné le
cours des astres et qui contrôle tout ce qui existe et qui agit dans
l’univers. Tout est donc bien important
de ce que l’Ecriture nous raconte de la vie de Jésus en ce monde. Cette pensée est de nature à nous aider
beaucoup dans nos considérations au sujet de Jésus qui est non seulement notre
Roi, mais celui du ciel. Entrons donc
tout de suite avec un esprit de soumission entière et absolue à sa divine
volonté en tout ce qu’il nous présente à reproduire de sa vie humaine et
divine. Que l’on pense ce que l’on
voudra naturellement, il faudra réformer nos jugements sur le sien et soumettre
notre volonté à la sienne en tout. Il ne
faut pas aborder l’étude de Jésus avec le sentiment orgueilleux qu’on lui rend
service de s’occuper de lui, comme si on traitait avec une personne égale à
soi. C’est s’exposer à tout
manquer. Il faut un sentiment d’humble
soumission à notre Maître absolu et Roi universel du ciel et de la terre. La faveur et l’honneur sont tout à fait pour nous
du fait que Jésus daigne venir nous trouver sur la terre pour nous découvrir un
peu dans la foi les merveilles de la vie divine à laquelle il nous invite
amoureusement, mais à laquelle il tient si bien qu’il punira en enfer ceux qui
auront refusé son invitation. Mieux vaut
pour nous de garder dans l’esprit et le cœur cette idée de la souveraineté de
Jésus avec une soumission libre mais totale quand même. Puisqu’il nous invite au ciel où il sera
sûrement notre Roi et Maître absolu, nous devons l’aborder tout de suite en
cette vie avec cette conviction bien arrêtée dans la foi et par la grâce, mais
comme au ciel quand même. «Que votre
volonté soit faite sur la terre comme au ciel» s’applique à tous les hommes dans
tous les stages différents de leur vie et de l’éternité.
Si
nous prenons bien cette conviction dès le début, nous ne serons pas exposés à
faire un choix de ce que nous devons imiter en lui selon nos caprices ou notre
sensibilité. Ce n’est pas à nous de
décider ce que nous devons prendre de sa vie; mais c’est à lui de le
faire. Or, tout ce que les Evangiles
nous enseignent de lui est pour nous et c’est sa volonté expresse que nous
pratiquions absolument tout ce que nous pouvons avec sa grâce. Nous devons prendre tout ce qui contrarie la
nature comme ce qui lui est agréable, comme sa folie de la croix et le mépris
des créatures. Notre Roi le veut! Que cela fasse notre affaire ou non, cela ne
doit pas entrer en ligne de compte, mais uniquement sa volonté; voilà
tout! C’est l’attitude mentale que tous
doivent prendre pour leur vie: soumission totale et joyeuse à tout ce que Jésus
nous présente pour nous diviniser.
JÉSUS
EST NOTRE ROI
N’oublions
pas que nous étudions cette vérité pour la faire passer dans le coeur et de là
dans la vie. Car elle est vite acceptée
dans l’esprit; on voit tout de suite que Jésus est notre Roi et l’on serait
exposé à vouloir passer tout de suite à autre chose. Mais quel abîme entre la tête et le cœur,
entre l’esprit et la volonté, entre savoir et vivre! Or pour qu’une vérité descende dans le cœur,
cela prend du temps et de la patience avec la grâce de Dieu. Travaillons en vue de vivre cette vérité et
nous allons trouver de quoi travailler pendant cette méditation!
Remarquons
que cette idée vient tout de suite après la gloire de Dieu dans le Notre
Père. «Que votre règne arrive» vient
après: «Que votre Nom soit sanctifié.» On voit tout de suite son importance
dans le plan divin. Pour avoir sa gloire
des hommes, la première chose que Dieu veut c’est qu’ils le reconnaissent comme
leur Souverain Maître et Roi immortel.
Il n’y a pas de doute que ce qui va nous frapper en entrant au ciel,
sera la Majesté infinie de Dieu venant du fait qu’il est Créateur et Maître
absolu de toutes choses et des anges et des hommes. Eh bien, nous devons commencer tout de suite
à le reconnaître et cela encore une fois d’une façon concrète dans tous les
détails de la vie quotidienne. C’est
pour obtenir ce résultat qu’il nous faut examiner ses titres à la royauté dans
le détail, avec les principales conséquences pour nous. Comme il ne suffit pas de savoir que telle
viande est du jambon, mais qu’il faut que je le mange, le mastique et le digère
pour qu’il augmente ma vie, ainsi il faut surtout ruminer, digérer et assimiler
cette vérité pour qu’elle soit un aliment de vie en nous. Donc surveillons surtout le but de cette
méditation sur la royauté de Jésus: la vivre dans notre vie!
1)
Par naissance, par création et par rédemption.
Dans le psaume 2e: «Tu es mon Fils; je t’ai engendré aujourd’hui. Demande et je te donnerai les nations en
héritage et pour domaine les extrémités de la terre.» Jo. 10-30: «Tout ce que mon Père a est à moi et
tout ce qui est à moi est à mon Père.
Mon Père et moi nous sommes une seule chose.» Or, Dieu est sûrement Roi
et comme Jésus est le Fils de Dieu c’est en tant que Fils qu’il est Roi et donc
par naissance. Par création. Quel titre peut mieux fonder l’autorité et la
possession que la création? Parmi les
hommes chacun réclame comme sien tout ce qu’il produit, comme l’inventeur d’une
machine, le constructeur d’une maison, etc.
Or, ils ne font que disposer la matière, qu’ils n’ont pas créée, tandis
que Dieu crée même la matière. Donc tout
l’univers lui appartient à ce titre. Or
c’est par son Verbe que le Père a créé le monde. De plus les œuvres de la Trinité à
l’extérieur appartiennent aux trois Personnes.
Donc Jésus est Roi en tant que créateur.
Par rédemption. Quoique Jésus soit
notre Roi, le péché mortel nous ferme le ciel de sorte que nous étions perdus
pour Jésus et Jésus pour nous. Eh bien,
le Verbe s’est fait homme pour pouvoir souffrir et ainsi expier nos péchés afin
de satisfaire le Père et pour qu’il ouvre le ciel aux hommes. Alors c’est Jésus qui nous a donc rachetés
par son Sang. C’est l’argument de
St. Pierre pour engager les chrétiens à
la perfection. I Pet. 1-18: «Sachant que vous avez été affranchis
de la vaine manière de vivre que vous teniez de vos pères, non par des choses
périssables, de l’argent ou de l’or, mais par un sang précieux, celui de
l’Agneau sans défaut et sans tache, le Sang du Christ.» Chacun de ces titres
suffit amplement pour convaincre l’esprit que c’est bien vrai que Jésus est
notre Roi, mais le cœur prend beaucoup plus de temps pour l’accepter. C’est ici que nous voyons la nécessité de la
prière pour obtenir la grâce de pratiquer ce dont l’esprit est parfaitement
convaincu. Sans la grâce nous
continuerons de nous croire nous-mêmes les rois de tout, au moins dans le concret. Nous agissons comme des rois: si quelqu’un
s’oppose à notre volonté, comme on est indigné, comme on le met à sa
place! Toutes les plaintes viennent à
peu près de ce que nous sommes révoltés de ce que les autres ne nous sont pas
mieux soumis. Chacun voudrait que tout
le monde fut à ses pieds! Nous devons
donc prier humblement pour que Dieu nous accorde la grâce de reconnaître la
royauté de Jésus dans le concret de la vie, que nous le laissions mener son
monde et nous-mêmes, comme il l’entend, puisqu’il est le Roi suprême de tout et
de tous. L’amour seul pourra nous
conduire là. Prions souvent le St-Esprit
pour obtenir cette grâce.
2)
Il est Proclamé Roi par les Prophètes, par Lui-même et l’Eglise. Par les prophètes, d’abord vaguement, puis de
plus en plus clairement et explicitement.
Jacob. Gen. 49-10: «Le sceptre ne sortira pas de Juda ni
le chef de sa descendance jusqu’à ce que vienne Celui qui doit être envoyé et les
peuples lui obéiront.» Nathan. 2 Rois
7-16: «À David: Ta maison et ton règne seront perpétuellement stables en ta
présence; ton trône sera debout éternellement».
Or, cela ne se vérifie que dans sa descendance, le Messie, que David
peut être dit Régner éternellement.
Isaïe, 9 - 7: «Il s’assiéra sur le trône de David. Il affermira son règne et l’établira
éternellement dans le jugement et dans la justice.» Daniel, 7 - 13: «Je vis
s’avancer sur les nues le fils de l’homme.
Il arriva jusqu’à l’Ancien des jours, qui lui donna la souveraineté, la
gloire et l’empire. Tous les peuples,
toutes les nations et toutes les langues doivent le servir; son pouvoir est un
pouvoir éternel, qui ne s’éclipsera jamais et son règne ne sera jamais
détruit.» Ps. 71: «Il dominera d’une mer
à l’autre. Tous les rois se
prosterneront devant lui, toutes les nations le serviront.» L’Ange Gabriel:
«…le Seigneur lui donnera le trône de David son père… et son règne n’aura point
de fin…»
C’est
donc bien comme roi que le Messie vient au monde. C’est tellement clair que les Juifs n’ont
pris que celui-là, mais dans le seul sens d’un roi temporel. Pourtant Jésus leur dit que son royaume n’est
pas de ce monde, ce qui est évidemment le sens des prophètes puisqu’ils disent
qu’il régnera éternellement; ce ne peut pas être dans ce monde qui finira
sûrement.
Lui-même
se proclame roi. Jo. 18-56.
Jésus dit à Pilate: «Mon royaume n’est pas de ce monde; si mon royaume
était de ce monde, mes serviteurs auraient combattu pour m’empêcher de tomber
entre les mains des Juifs; mais mon royaume n’est pas d’ici. Pilate lui dit: «Tu es donc roi?» Jésus
répondit: Tu le dis: Je suis roi!» À la dernière Cène L. 22-29: «Je vous prépare le royaume comme mon
Père me l’a préparé afin que vous mangiez et que vous buviez à ma table dans
Mon Royaume»! Le jour de son ascension
il dit: «Toute puissance m’a été donnée sur la terre et dans le ciel»! Jésus affirme donc clairement qu’il est
roi. S’il ne l’est pas, Dieu était tenu
de l’empêcher de se poser comme tel. Au
contraire, Dieu corrobore ces dires par des miracles: c’est donc que c’est
vrai. L’Eglise enfin le proclame. Or, c’est le St. Esprit qui la guide. Tim.
1-16: «Au Roi des siècles, immortel, invisible, seul Dieu honneur et
gloire dans les siècles des siècles.» Héb.
1-3: «Mais au Fils il dit: Votre trône, ô Dieu, sera un trône éternel;
le sceptre de votre empire est un sceptre d’équité.» Apoc. 1: «Que la grâce et la paix soient avec vous
de la part de JésusChrist, qui est le prince des rois de la terre. À lui l’empire et la gloire dans les siècles
des siècles.» Apoc. l9-11: «Puis je vis
le ciel ouvert et il parut un cheval blanc; celui qui le montait s’appelle:
Fidèle et Véritable… il avait sur la tête plusieurs diadèmes… son nom est le
Verbe de Dieu… c’est lui qui gouverne les nations avec un sceptre de fer… sur
son vêtement et sur sa cuisse il portait écrit ce nom: Roi des rois et Seigneur
des seigneurs…» J Au bréviaire l’Eglise fait dire souvent à ses prêtres: venez,
adorons le Roi des martyrs, le Roi des vierges, des confesseurs, etc. Enfin, Pie XI établit une fête spéciale de
première classe pour toute l’Eglise en l’honneur du Christ-Roi. C’est le couronnement de tout ce qui avait
été dit dans l’Ancien Testament et dans le Nouveau sur le Christ-Roi. Allons-nous rester indifférents à toutes ces
voix qui proclament que Jésus est notre Roi suprême en ce monde et en
l’autre? Réfléchissons sérieusement sur
tous ces témoignages qui viennent du ciel, après tout par la révélation que
Dieu nous en a fait. Défions nous des
distractions justement dans cette méditation de cette royauté dont dépend toute
notre vie éternelle. Ne perdons rien de
ces idées: notre bonheur est là!
3)
Il veut régner sur nous tous: sur les individus et sur les groupes. Puisqu’il nous apporte la vie du ciel, il
veut faire pour nous ce qu’il fera au ciel.
Or, là-haut, il est certain qu’il nous dominera absolument et dans tous
les détails de notre éternité. Voilà
exactement ce qu’il veut faire en ce monde.
Il ne suffit pas de le considérer comme Maître le dimanche, pour aller à
la messe et ensuite l’oublier le reste de la semaine, pour faire nos quatre
volontés en tout. Un chrétien est tenu
de consulter son Roi et de se soumettre à lui en absolument tout où il
manifeste sa volonté d’une façon ou d’une autre. Pour mieux comprendre ce champ d’obéissance à
notre Roi céleste, descendons dans quelques détails de notre activité
humaine. Nous allons nous arrêter aux
trois principaux centres d’activité en nous: l’intelligence, la volonté et la
vie ou l’activité physique.
L’intelligence doit commencer par se soumettre entièrement à la révélation
de Jésus qu’il nous apporte et à sa doctrine.
Là est le point important d’une vie.
Combien ne prennent qu’une partie de sa doctrine, puis, comme
conséquence, ne font qu’une partie de sa volonté et leur vie dérape souvent
dans le péché plus ou moins sérieux.
Comme leur conduite cadre avec leurs idées imparfaites, ils s’éloignent
de Jésus notablement et sans scrupule puisque leur jugement faux approuve leurs
actes.
Par
exemple, combien de prêtres et de religieux n’ont pas voulu de la doctrine du
mépris des créatures ni de la folie de la croix qui enseigne le renoncement à
soi-même; ils n’ont pris que celle d’éviter le péché. Alors ils s’en donnent à cœur joie dans tous
les sports et dans toutes les bagatelles, qui ne sont pas défendues
directement. Ils n’ont plus de goût pour
les choses de Dieu, ils font leur ministère au diable et donnent le meilleur de
leur temps aux choses profanes comme de vrais laïques. Ils devraient savoir que leur tête est croche
puisque leur cœur en la suivant s’éloigne des choses de Dieu et se donne au
monde de plus en plus; tout le contraire de ce que Jésus enseigne. Mais leur amour est trop dans les choses
créées pour avoir le courage d’étudier à nouveau la doctrine de Jésus. Un bien grand miracle de la grâce quand ces
«païens» reviennent à la foi. Pour
éviter ces écarts dangereux chaque chrétien doit prendre absolument toute la
doctrine de Jésus. Quand il arrive, par
exemple, pour la première fois à la doctrine du mépris des créatures, qu’il la
prenne, quand même elle lui répugne.
Qu’il se dise: Mon Roi le veut.
Eh bien, je vais m’y mettre et essayer à l’avenir de regarder toutes
choses comme du fumier et donc j’en prendrai le moins possible. Adieu donc les joutes de toutes sortes que
j’aimais tant! Adieu les cigarettes et
les liqueurs qui faisaient mes délices!
Adieu les jugements du monde si contraires à ceux de Jésus. Je me range du côté de Jésus quand bien même
mon cœur se briserait de douleur! C’est
mon Maître qui le veut… et il l’aura!
Les
pieds suivent la tête, comme on dit. La
volonté veut ce que l’intelligence lui montre.
Par conséquent, quelqu’un qui ne marche pas selon Jésus montre qu’il ne
comprend pas Jésus. Il n’a pris que
quelques bribes de sa doctrine qui lui font faire quelques bonnes actions, mais
sa conduite boite selon les lacunes de son esprit. Tous ceux donc qui veulent améliorer le monde
doivent surtout s’efforcer de faire accepter toute la doctrine de Jésus sans
exception. Tout ce qui est le plus
efficace pour sanctifier une vie est ordinairement laissé de côté, comme le
mépris du monde et la folie de la croix que St.
Paul appelle: la force de Dieu et la sagesse de Dieu. C’est justement là que Dieu agit plus
puissamment et qu’il donne le goût des choses surnaturelles. Comme peu de prêtres les donnent, nos gens
s’éloignent de Dieu de plus en plus.
La
volonté aussi doit se soumettre à Jésus qui n’est pas seulement Révélateur,
mais aussi Législateur; c’est le même devoir de se soumettre à ses lois que de
croire à sa doctrine. Jésus donne cette
obéissance comme signe de notre amour pour Dieu essentiel au salut. «Si vous gardez mes commandements, vous
demeurerez dans mon amour, comme moi-même j’ai gardé les commandements de mon
Père et je demeure dans son amour.» Jo.
15-8.
Comme
ils sont rares ceux qui obéissent en tout à Jésus. Plusieurs le font dans les grands événements
de la vie et quand il l’exige sous peine de damnation; mais ils ne s’occupent
plus de lui dans les détails de la vie; ils disputent contre les personnes et
les choses qui les contrarient. Pourtant
Jésus dit qu’on doit porter sa croix tous les jours, de s’endurer les uns les
autres en portant chacun les fardeaux des autres; en traitant le prochain comme
soi-même; en méprisant les plaisirs de la terre, les permis comme les autres,
comme Jésus nous montre par son exemple qu’il veut que nous le suivions,
etc. Que d’occasions de se renoncer
quand on veut obéir à la doctrine totale de Jésus! La vie devient un véritable martyre comme
celle de Jésus a été. Nous voulons vivre
naturellement et il veut que nous vivions surnaturellement. Nous voulons vivre comme du monde et il que
nous vivions comme des dieux ou des enfants de Dieu, comme si nous étions déjà
dans le ciel. Quelle lutte pour ceux qui
veulent faire la volonté de Dieu, de Jésus!
Il veut que nous travaillions uniquement pour Dieu, et comme nous
travaillons pour nous-mêmes sans nous occuper de Dieu! Ordinairement ceux qui s’impatientent, qui se
mettent en colère et qui disputent, le font parce qu’ils ne veulent pas se
soumettre aux épreuves que Dieu veut dans toute vie. Mettons l’activité de ces deux facultés dans
le concret de la vie et l’on voit que l’on agit comme on pense et comme on
aime. Alors ce qu’on vient de dire de
ces deux facultés s’applique à nos actions et donc à notre vie. Quand on est soumis à Jésus en tout, on le
montre par un certain calme dans l’attitude mentale et même dans la manière
d’agir, même dans la démarche et dans tout l’extérieur de la conduite. Les nerfs peuvent bien s’exciter; ils ne
dépendent pas toujours de la volonté; mais au moins dans l’intérieur de l’âme
on reste tranquille habituellement, même quand tout va mal autour de soi. Dieu est dans la tempête comme dans le temps
serein; il est dans les ténèbres comme dans la lumière, enfin dans les épreuves
comme dans les faveurs. Un chrétien doit
montrer ainsi sa foi au Christ dans tout l’ensemble de sa vie. S’il vit uni à Jésus de cette façon, le monde
autour de lui croira en Jésus et se donnera à lui. Mais il y a de sérieux obstacles au règne de
Jésus dans les âmes, qu’il est bon de repasser pour mieux les combattre avec
lui. jésus fait la guerre
1)
Aux démons qui veulent le détruire dans les âmes. Jésus Lui-même en St. Jean, 8-37: «Vous voulez me faire mourir
parce que ma parole ne prend pas en vous… vous faites les œuvres de votre
père. Il a été homicide dès le
commencement.» Quand Jésus s’en va à sa passion, il dit: «Voici l’heure des
ténèbres et de Satan!» On sait aussi comment les démons l’ont tenté au désert.
Eh
bien, nous savons comment Jésus a brisé l’empire de Satan, par sa passion et
par sa mort sur la croix, en plus il nous enseigne comment faire la guerre à
Satan en sa compagnie. C’est par la
mortification et la prière. C’est en
détruisant notre vieil homme que nous vaincrons les démons.
Ce
n’est que parce que Jésus a vaincu Satan que nous pouvons le faire et donc
uniquement en union avec lui et par lui.
Plus nous vivrons de sa vie et plus nous serons forts contre les
attaques des démons. Ce sont nos pires ennemis
et très puissants contre nous; jamais nous ne pourrions les vaincre sans le
secours de Jésus. C’est donc en mourant
à soi-même comme Jésus que nous vaincrons les démons. Ils peuvent tout, par notre vieil homme;
c’est leur meilleur complice pour nous perdre.
2)
Au monde, même bon «en soi». Il nous
perd en nous amusant, en accaparant notre attention et notre amour. Les démons aidant, le monde nous jette ses
milliers de plaisirs pour nous occuper.
Ce faisant nous n’avons plus de temps pour les choses de salut et nous
les négligeons graduellement jusqu’à oublier tellement Dieu que notre salut est
pratiquement impossible. Le monde est
d’autant plus dangereux qu’il a exactement la mentalité de tout homme venant en
ce monde: la mentalité naturelle. Nous
trouvons là un ami qui pense naturellement comme nous. C’est pour cela que le respect humain a tant
d’emprise sur les hommes… qui sont humains comme lui. Le monde organise constamment toutes sortes
de plaisirs qui contentent la nature et sa sensualité. Or, nous devons agir non plus comme des
hommes, mais comme des enfants de Dieu.
On voit tout de suite comme l’esprit du monde est absolument contraire à
celui de Jésus. Voilà pourquoi Jésus a
dû vaincre aussi ce monde par ses souffrances.
Il a expié pour cet esprit païen avec tous les péchés qu’il fait
commettre.
Eh bien, nous aussi nous
devons lutter contre cet esprit du monde par les mêmes armes que Jésus: sa
doctrine, avec les trois vertus théologales.
En d’autres termes, c’est en nous élevant au-dessus de ce monde en
vivant selon ce que la foi nous montre que nous vaincrons le monde au lieu
d’être vaincus par lui.
3)
À notre sensualité: voici l’ennemi intérieur qui fait constamment obstacle à
l’action de Jésus dans notre âme.
St. Paul aux Rom. 8-5: «Car ceux qui vivent selon la chair ont
le goût des choses de la chair et ceux qui vivent selon l’esprit ont le
sentiment des choses de l’esprit. Car la
prudence de la chair donne la mort, mais la prudence de l’esprit donne la vie
et la paix. Parce que la sagesse de la
chair est ennemie de Dieu, car elle n’est point soumise à la loi de Dieu et
elle ne peut l’être. Ceux donc qui
vivent selon la chair ne peuvent plaire à Dieu.» On voit que lorsque Jésus a éloigné
les démons de nous, il reste encore un terrible ennemi en nous contre
Jésus. Cette sensualité nous pousse à
jouir des choses créées et nous éloigne d’autant de Dieu. Voilà les terribles ennemis que Jésus doit vaincre
en nous et au dehors afin de pouvoir régner sur nous comme il le veut. Mais il ne le fera pas sans nous; nous devons
coopérer avec lui en agissant dans le même sens que sa grâce par la
mortification et le renoncement à soi-même.
Ces trois ennemis se tiennent dans le concret parce que tous les trois
nous poussent aux créatures pour chercher notre bonheur en elles au lieu de le
chercher uniquement en Dieu comme Jésus le veut. La tactique de nos ennemis, est de faire
oublier ces trois ennemis. Que de
prêtres ne parlent plus des démons ni de leur action dans le monde; ils parlent
seulement du mauvais monde et de la mauvaise sensualité. Mais même le bon monde et la bonne
sensualité, tous les deux, accaparent le cœur de l’homme quand même et
l’éloignent d’autant de Dieu. Pour
éviter ces illusions suivons Jésus dans sa vie et dans sa doctrine.
JÉSUS
VEUT À SON SERVICE
1) L’Empressement, parce qu’il veut un
service d’amour et l’amour ne connaît pas d’hésitation. C’est évidemment comme signe d’amour que
Jésus exige cet empressement. Il nous a
donné plusieurs exemples de l’empressement qu’Il veut. Quand il choisit ses apôtres, il veut qu’ils
laissent là tout de suite leurs filets pour le suivre, Jésus répond: «Suis-moi
et laisse les morts ensevelir leurs morts.» Mt.
8-21. Pourtant, quelle bonne
excuse ce scribe apportait! Tous les
hommes considèrent ce devoir comme sacré, mais Jésus n’en veut pas. Ailleurs il dit: Celui qui met la main à la
charrue et qui regarde en arrière est indigne du royaume de Dieu.»
2) La Magnanimité consiste à s’oublier
soi-même pour ne penser qu’aux intérêts de celui qu’on aime. Par exemple, un évêque demande à un prêtre de
prendre une paroisse fort négligée avec des gens ignorants et mal disposés: le
mesquin pense tout de suite aux inconvénients pour lui-même, le magnanime pense
tout de suite aux intérêts de Jésus.
Puisqu’elle est dans un si grand besoin de prêtre, une raison de plus
pour moi d’y aller. J’offrirai mes
sacrifices pour la conversion de ce peuple et Jésus sera content de mon
travail… et de mes peines. J’y
vais! Voyez comme une mère est capable
d’endurer de grandes fatigues pour un enfant malade; comme elle va vite à son
chevet quand il la demande. L’amour est
tout cela! Ainsi celui qui aime vraiment
Jésus ne comptera jamais ses pas, ses travaux et ses nuits blanches pour
l’amour des âmes et l’amour de Jésus.
3) La Générosité est le débordement d’un cœur
plein d’amour, ou comme le rayonnement du feu intérieur. Comme elle est le fruit de l’amour, elle est
aimée de tout le monde. Eh bien, Jésus
nous a donné tout ce qu’il avait et même sa propre personne et il se donne
encore. Eh bien, comme nous devons faire
une seule chose avec lui, nous aussi nous devons être généreux envers lui. Si on fait réflexion que tout ce que nous lui
donnons vient de lui et qu’il nous donne plus en retour, ce ne devrait pas être
difficile d’être généreux au service de Jésus.
C’est lui-même qui a dit qu’il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir. Dieu a fait les hommes ordinairement
généreux. On constate que les peuples
pauvres sont très généreux dans leur pauvreté.
Ils n’ont pas encore été contaminés par l’avarice qui vient de l’amour
des biens terrestres. À mesure qu’ils
deviennent riches, leur amour pour ces biens grandit au lieu de diminuer. Il est certain qu’en général les riches sont
moins généreux que les pauvres. On voit
là que l’amour des échantillons est contraire à l’amour de Dieu. Ces trois qualités sont très rares en général
parce que l’amour véritable de Jésus est très rare. Combien même dans le clergé et chez les
religieux recherchent leurs propres intérêts dans le service du bon Dieu: alors
chacun mesure ses pas à ce critère. On
veut bien faire tel ministère à condition qu’on en retire tout de suite quelque
profit temporel. On estime une œuvre,
une paroisse ou un poste selon les revenus qui y sont attachés. Aussi on ne voit pas grand empressement à
accepter une paroisse pauvre ou un poste difficile. C’est l’esprit de foi et l’amour de N.S. qui font défaut dans ces cas
ordinairement. Nous voyons par tout cela
comme nous sommes loin encore de l’amour de Jésus! Il n’a rien compté pour nous et nous comptons
tout pour lui. Nous avons peur de nous
sacrifier tant soit peu et lui a tout sacrifié jusqu’à sa vie pour l’amour de
nous.
PARABOLE
DE S. IGNACE. Cet exemple d’un roi temporel déplaît à
plusieurs aux idées républicaines ou démocratiques. Mais qu’on aime les rois ou non, cela ne
devrait rien enlever à la force probante de la parabole. Faut-il aimer à être boulanger pour tirer
profit de la parabole du levain dans la pâte?
Ou être cultivateur pour comprendre celle du trésor caché dans la
terre? ou aimer la culture de la vigne
pour tirer profit de la parabole de la vigne?
Puisque Jésus est vraiment Roi dans toute la force du mot, quel meilleur
exemple peut-on donner? Tous les rois
n’ont pas été méchants. Celui de la
parabole a toutes les perfections au monde, pourquoi ne pas l’aider? Est-ce qu’on ne voit pas des milliers de
soldats s’enrôler volontairement pour se battre pour leur roi souvent très
méchant, dans des guerres douteusement justes, très cruels dans leurs manières
de faire la guerre et avec des avantages temporels très douteux et en tout cas
bien éphémères. Or, S. Ignace enlève tout ce qui pourrait nous
choquer dans son roi; il est choisi par Dieu, il a toutes les qualités
possibles et il fait la plus sainte guerre au monde: il veut convertir tous les
infidèles à la foi et cela par des moyens absolument inoffensifs et légitimes. Il ne demandera rien à ses serviteurs qu’il
ne fera pas lui-même; ils seront traités comme lui pour le vêtement et la
nourriture, pour le logement et les travaux.
Ils sont sûrs de la victoire et ils auront tous part au butin, selon
leurs efforts personnels.
Que
doit être la réponse de tout homme de cœur à un roi si parfait et dans une
expédition si avantageuse? Pour S. Ignace elle ne fait pas de doute pour tout
homme de cœur C’est une acceptation joyeuse et cordiale. Pour ceux qui veulent se montrer plus
généreux, non seulement ils s’offriront eux-mêmes, mais aussi tout ce qu’ils
ont, leurs biens avec leurs talents.
Mais
la réalité dépasse toute cette chose imaginée.
Il s’agit du Roi des rois, notre Dieu et notre Sauveur, qui nous invite
à aller guerroyer contre nos pires ennemis: le monde, le démon et la chair, et
cela pour sauver notre âme, sans quoi elle prévariquera et se perdra. C’est donc notre avantage éternel de suivre
Jésus dans cette lutte contre nos propres ennemis. Dieu nous a bien livré son propre Fils unique
pour nous sauver de nos ennemis et nous ne voudrions pas lui livrer nos pauvres
échantillons? Jésus les a considérés
comme du fumier: et nous voudrions être avec lui en les regardant comme du
dessert? Il faut la même mentalité pour
être avec Jésus.
Comment
peut-on se signaler au service de Jésus?
N’allons pas y mettre le même sens que pour les choses humaines. Dans ces dernières on se signale en faisant
des coups épatants et glorieux que les gens applaudissent. Ici se signaler, c’est s’offrir à Jésus avec
tout ce que nous estimons le plus au monde, comme notre jugement, notre
volonté, notre réputation et nos plaisirs.
C’est donc subir un échec honteux c’est d’être humilié devant beaucoup
de monde, c’est perdre ses biens et descendre dans l’échelle sociale et passer
pour rien après avoir été considéré beaucoup, c’est être calomnié, bafoué,
abandonné de nos amis, etc. Voilà ce que
c’est que de se signaler au service de Jésus et de le glorifier! Il ne faut pas s’attendre à de l’enthousiasme
dans cette guerre contre le monde et surtout contre soi-même! c’est tout ce qu’il y a de plus pénible au
monde et de plus humiliant. On voit
pourquoi Jésus n’aura toujours qu’un petit nombre de dévoués serviteurs qui lui
sacrifieront tout ce qu’ils ont avec leur propre personne. Il ne s’agit pas de faire cette méditation en
théorie, mais en vue de la pratique concrète dans la vie. Elle n’est pas pour les religieux seulement,
mais pour tout chrétien au monde: chacun doit porter sa croix pour suivre
Jésus, et pas seulement savoir qu’il faut le faire. Or, la croix, c’est tout ce qui révolte la
nature humaine, non seulement dans le corps, mais dans l’âme et dans ses
facultés spirituelles, comme sont les contrariétés, les calomnies et les
humiliations.
Une
remarque importante. Parce que S. Ignace fait appel à la générosité des
retraitants, plusieurs pensent qu’il s’agit de chose tout à fait libre et
seulement de conseil et qu’il s’adresse à des religieux. Ce serait une illusion. La seule chose libre est le dépouillement
effectif de ses biens pour se détacher.
Cela est un moyen où se rencontrent les conseils. Mais dans le fait de suivre Jésus le plus
possible par le renoncement de coeur à tout au monde, c’est une nécessité
absolue pour tout chrétien au monde, laïque comme religieux. Ce dernier n’a fait que vouer ce qu’il était
déjà tenu de faire comme chrétien; son voeu urge davantage son obligation de se
renoncer pour suivre Jésus. Trop de
religieux aiment à laisser croire au peuple qu’ils sont les seuls à avoir le
monopole de la perfection. Ce n’est pas
vrai! C’est de l’orgueil païen! La perfection religieuse n’est que dans les
moyens; ce n’est pas vrai qu’elle soit dans la fin. Celle-ci est la même pour les laïques comme
pour les religieux.
Voilà
ce qu’on devrait dire aux fidèles.
Donc
faire la guerre à sa sensualité, au monde, n’est pas une matière libre ou de
simple perfection de conseil; elle est absolument pour tous les fidèles au
monde. Les prêtres et les religieux ont
une grande responsabilité de laisser le monde croire que le travail de la
perfection est pour eux seuls ou à peu près.
C’est à eux à éclairer les peuples sur cette question si
importante. Jésus n’a pas dit: Si un
prêtre ou un religieux veut me suivre, mais il dit: si quelqu’un veut, donc
n’importe qui au monde. Disons-le donc
une bonne fois aux fidèles. Jésus le
veut; qu’on lui obéisse; il est notre Roi.
Prions bien la Ste Vierge pour qu’elle nous obtienne la grâce d’être
aussi parfaitement soumis à Jésus que nous le serons au ciel. C’est possible avec sa grâce qu’il nous fait
demander tous les jours: «Que votre volonté soit faite sur la terre comme au
ciel.» Il est grand temps de nous y mettre pour tout de bon et dans le concret
de tous les détails de notre vie.
Cessons de critiquer, de nous plaindre et de murmurer contre ce qui
vient de notre Roi suprême Jésus. On a
un bon exemple de soumission à Dieu dans la vie de St. Ignace d’Antioche, qui écrit aux Romains, 75:
«Je ne prends plus de plaisir à la nourriture corruptible ni aux joies de cette
vie; ce que je veux c’est le pain de Dieu, qui est la chair de Jésus-Christ, né
de la race de David, et je veux pour breuvage son sang qui est l’amour
incorruptible.» Aux Ephésiens il écrit: «Rien n’échappe au Seigneur, mais nos secrets
mêmes sont dans sa main. Faisons donc
toutes nos actions en pensant qu’il habite en nous afin que nous soyons son
temple et que lui soit en nous notre Dieu.
C’est bien ce qu’il est et qu’il apparaîtra à nos yeux par le juste
amour que nous aurons pour lui.» En voilà un qui vivait tout pour Jésus. Nous pourrons dire que nous vivons pour lui
quand toutes nos actions seront faites pour lui et en lui. Hâtons-nous de vivre soumis parfaitement à
notre Roi céleste, si nous voulons jouir de lui au ciel après cette vie.
Aucun commentaire:
Publier un commentaire