TRENTE-QUATRIÈME
INSTRUCTION
MARIE,
NOTRE MÈRE.
«Jésus, ayant vu sa Mère
et auprès d’elle le disciple qu’il aimait, dit à sa Mère: «Femme voilà votre
fils!». Ensuite, il dit au disciple: «Voilà votre Mère!», et depuis cette
heure, ce disciple la prit comme sa Mère». X. 1926.
Léon XIII, dans
Adjutorium populi, 5 sept. 1895, écrit: «Ce qui met nettement en lumière le
mystère de l’immense charité du Christ envers nous, c’est qu’il a voulu dans sa
mort laisser sa propre Mère à Jean, son disciple, par ce testament à jamais
mémorable: «Voici votre fils». Or, en la personne de Jean suivant le perpétuel
sentiment de l’Eglise, le Christ a désigné le genre humain tout entier, mais
plus spécialement ceux qui lui sont unis par la foi.
Si Dieu dit à Abraham,
après son sacrifice: parce que tu as fait cela je multiplierai ta postérité
comme les sables de la mer et les étoiles du ciel, pouvait-il donner moins à
Marie qui lui sacrifie volontiers son Fils unique? Evidemment non! Il donne à
Marie tous ceux qu’il donne à Jésus.
D’après les Pères de
l’Eglise, l’union du Verbe avec la nature humaine est une espèce de mariage qui
exige le consentement libre de l’épouse. Or, la nature humaine que Jésus assume
n’est pas une personne, elle ne peut donc pas consentir par elle-même. Comme le
Verbe va prendre cette nature humaine dans le sein de Marie, c’est elle qui
parle au nom de l’humanité. Elle est donc bien la mère de tous ceux qui vont
naître spirituellement de cette union ou de ce mariage. Il s’agit là des «hommes
nouveaux» dont parle Saint Paul aux Gal. 4-5: «Dieu a envoyé son Fils unique,
né de la femme, pour que nous reçussions l’adoption des enfants». Nous sommes
donc les membres du corps mystique de J.C., et Marie est notre Mère comme elle
l’est de Jésus: de nous spirituellement, de lui naturellement.
L’ordre surnaturel a
commencé pour nous seulement au consentement de Marie dans l’Annonciation. Tous
les décrets éternels pour le rachat de l’humanité étaient comme en suspens aux
lèvres de Marie. Son fiat ressemble au fiat de la création: tout un monde et un
monde surnaturel s’ouvre avec le consentement de Marie à l’Incarnation. Nous
étions là en puissance et au temps marqué par Dieu, nous avons commencé notre
existence dans le surnaturel grâce à ce mot de Marie comme condition. Si elle a
conçu Jésus, son premier né, dans son sein, elle nous a tous conçus dans sa foi
et son amour quand elle accepta d’être la Mère du Sauveur… de tout le Sauveur
et donc des membres mystiques que nous sommes. Nous sommes issus du mariage du
Verbe avec la nature humaine dont Marie a exprimé le consentement libre. Elle
est donc notre Mère. •1844 Jésus ne vient pas pour lui-même mais pour tout le
genre humain, il est le Sauveur de tous les hommes et c’est comme tel que
l’ange propose à Marie de devenir la Mère, et donc de tous ses membres
mystiques. Tous les rachetés sont donc compris dans le fiat de Marie à l’ange
Gabriel. Si Marie est la mère de la tête tu corps mystique, elle doit l’être
aussi des membres. Marie est donc bien notre Mère dans l’ordre surnaturel.
S’il est vrai que Dieu a
créé l’ordre naturel pour faire connaître l’ordre surnaturel, nous pouvons
appliquer à Marie à fortiori les bonnes qualités que l’on trouve dans nos mères
naturelles.
Le premier est un amour
ardent et indéfectible que les mères ont pour leurs enfants. Qu’un enfant
abandonne sa mère, s’en éloigne pour longtemps, lui soit un déshonneur, la
fasse souffrir beaucoup, elle ne cesse jamais d’aimer son enfant. Plus il la
fait souffrir et plus elle semble l’aimer. Si on essaie de déblatérer contre
son enfant prodigue, elle le défend comme la prunelle de ses yeux. Elle trouve
des circonstances atténuantes pour l’excuser, pour diminuer au moins ses torts.
Au fond, il a bon cœur, il a été victime des événements, il se convertira bien
un jour, etc.! Une mère aime son enfant indépendamment de ses vertus ou de ses
vices.
Si l’amour naturel est si
fort que doit être l’amour surnaturel de la Sainte Vierge pour ses enfants,
frères de Jésus! Elle sait combien Jésus a souffert pour nous racheter, combien
il nous a payés! Son amour pour nous est donc en proportion de ce prix que
Jésus a payé pour nous.
Jamais une âme n’a été
aussi unie à Jésus que Marie, jamais aucune créature n’a été plus intimement
une seule chose avec Jésus que Marie. Donc personne ne nous a jamais aimés plus
que Marie, puisqu’elle est si semblable au Cœur de Jésus. Elle ne voudrait pas
plus perdre une âme que Jésus ne le veut. Elle fait donc tout ce qu’elle peut
pour nous sauver tous… à condition évidemment que nous le voulions nous-mêmes!
Son zèle pour notre bonheur éternel est puisé au foyer si ardent du Sacré-Cœur
de Jésus. Comme Jésus au ciel interpelle son Père en notre faveur, il est
certain que Marie fait de même.
Sur la terre, on sait
qu’elle a passé sa vie à prier. Elle le fait encore au ciel comme on peut le
voir par ses apparitions où elle se présente toujours dans l’attitude de la
prière. Là est sa force: dans la prière. Elle l’a puisée dans sa participation
à la Passion et à la mort de J.-C. Qui pourra jamais mesurer l’ardeur de Marie
pour notre salut? Si Saint Paul peut dire que ce n’est plus lui qui vit, mais
J.-C. en lui, combien plus Marie peut-elle le dire! Elle était sûrement tout
abîmée en Jésus. Elle voulait donc ce que Jésus voulait: notre salut à tous.
Voilà pourquoi on trouve en Marie toutes les tendresses pour nous quoique d’une
façon finie, car en Jésus elles sont infinies.
Si nous nous arrêtions
sérieusement à ces considérations que nous venons de faire, nous aurions une
confiance extraordinaire en la Sainte Vierge, notre Mère. Nous irions à elle
beaucoup plus souvent et avec beaucoup plus de confiance; nous serions plus
attentifs aux prières que nous lui adressons. La manière de dire notre chapelet
ou rosaire peut donner une idée de notre amour pour Marie, ou de notre
confiance en elle! Que de distractions en lui parlant! N’oublions pas que la
pensée et l’amour vont ensemble! On pense à ce qu’on aime et on aime ce à quoi
on pense. Donc, si on ne pense guère à Marie en disant son chapelet, c’est un
signe évident que l’amour n’est pas fort ni ardent. Soignons-le plus!
L’amour est un art
surtout dans le surnaturel où nous n’avons pas la nature pour nous aider. C’est
une affaire de beaucoup de réflexion, de volonté et de prière. Cet amour
surnaturel de Marie ne nous viendra pas spontanément: ordinairement il faudra
le travailler comme dans toutes les choses surnaturelles pour les mériter. Dieu
n’a pas coutume de donner ses dons précieux sans que nous les désirions
sincèrement. Il faut donc demander constamment cet amour de Marie que Dieu veut
voir en nous tous. Il va être la source de tant de bienfaits et de bonheur que
Dieu exige un grand désir pour le donner. Il faut donc prier beaucoup pour avoir
ce don.
MARIE, MÉDIATRICE DE
TOUTE GRÂCE
D’abord, disons que Marie
n’est pas médiatrice comme certains auteurs aiment à le dire. A quoi bon se
servir de cette expression qui demande tant d’explication, que finalement on
vient à dire qu’elle n’est pas du tout corédemptrice. Tout le mérite du
sacrifice qui rachète le monde ne vient que de J.-C. «Le salut n’est en aucun
autre», dit Saint Pierre. Marie donc n’a mérité en aucun sens le salut du genre
humain.
Il y a une différence
essentielle entre les mérites de Jésus et ceux de Marie. Quoiqu’elle fût élevée
à l’incomparable hauteur de Mère de Dieu, elle reste simple créature, tandis
que le Verbe de Dieu, quoiqu’il se soit abaissé jusqu’à l’homme, reste divin:
ses actes sont divins et ont un mérite infini comme appartenant à Dieu, tandis
que les actes de Marie restent humains seulement et ont un mérite fini quoique
très grand.
Cependant Marie, par la
volonté divine, est la dispensatrice des mérites de son divin Fils. On en a un
exemple dans plusieurs bonnes familles: c’est le père qui va gagner 1’argent et
qui achète des vivres, mais c’est la mère qui les distribue aux enfants C’est
là le rôle de Marie dans la grande famille de Dieu. Pie IX le dit formellement
dans «Ubi primum», 8 déc. 1864: «Vous savez bien, vénérables Frères, que toute
notre confiance repose sur la très Sainte Vierge, car Dieu a mis en elle la
plénitude de tout bien. Sachons-le donc, tout ce qu’il y a en nous d’espérance,
tout ce qu’il y a de grâce et de salut, émane d’elle. Telle est la volonté de
Celui qui a voulu que nous ayons tout par Marie».
Léon XII, dans «Fidentes
Piumque», écrit: «Par son admirable consentement donné pour tout le genre
humain, Marie a procuré aux hommes le Sauveur, et, pour cette cause, elle est
très digne et très acceptée médiatrice auprès du Médiateur».
Ce pouvoir de Marie n’est
qu’un pouvoir de prière et d’intercession, mais il est très puissant à cause de
tous les titres de gloire qu’a Marie auprès de Dieu, et que nous venons de
signaler. Sa médiation ne diffère pas essentiellement de celle des saints, mais
elle est incomparablement plus efficace à cause de la suréminente sainteté de
Marie.
On a de beaux exemples de
l’efficacité des paroles de Marie. La première grâce que Jésus ait donné aux
hommes d’une façon apparente est la sanctification de Jean-Baptiste lorsque les
deux n’étaient pas nés. Elisabeth dit à Marie: «Dès que votre voix a frappé mon
oreille, lorsque vous m’avez saluée, mon enfant a tressailli de joie dans mon
sein». Ce n’est pas Marie qui a donné cette grâce, mais c’est à l’occasion de
sa parole que Dieu a donné la grâce à Jean-Baptiste. Elle a donc contribué
d’une certaine façon à obtenir cette grâce pour Jean-Baptiste.
Le premier miracle de
Jésus a été obtenu par Marie. Il lui a suffi d’avertir Jésus que les gens de la
noce à Cana n’avaient plus de vin. Jésus prend la peine de lui dire que son
temps n’est pas encore venu, mais Marie n’en fait pas de cas et dit aux
serviteurs: «Faites ce qu’il vous dira!»… et Jésus s’exécute et fait son
premier miracle en changeant l’eau en vin. Jésus se dérange donc pour sa Mère
et fait ce qu’il n’aurait pas fait sans son intercession. C’est elle qui
l’emporte sur Jésus!
C’est encore à cause de
Marie que Jésus à l’âge de douze ans dans le Temple, et donc officiellement et
devant les docteurs de la loi lance son programme de vie: «Est-ce que je ne
dois pas être tout aux choses de mon Père?». C’est à Marie que Jésus donne
l’orientation de toute sa vie comme pour nous montrer que c’est avec Marie que
chacun de nous doit diriger toute son activité vers les choses de Dieu.
Après l’Ascension de
Jésus, c’est encore Marie qui préside l’assemblée des disciples au Cénacle,
c’est elle qui leur enseigne à prier par son exemple et qui encourage les
disciples à le faire. Comme le Verbe a attendu le consentement de Marie pour
s’incarner, ainsi le Saint-Esprit attend les prières de Marie pour descendre
sur les disciples et commencer l’Eglise. Ce que le Saint-Esprit fait là
ouvertement et comme en grand, il le fera toujours pour chacun de nous: il
viendra en nous si Marie est en prière pour nous! Et nous avec elle! Chacun de
nous est l’Eglise en formation. Or, Saint Paul dit que nous devons former Jésus
en nous-mêmes. Or, il faut encore le Saint-Esprit et Marie pour former Jésus en
nous comme en elle-même dans l’Incarnation du Verbe.
Les Pères aiment à
comparer Marie avec l’Eglise. Qu’il suffise de citer ici Saint Césaire. P. L.
67-1048.
Comparons ces deux Mères…
D’un côté le Saint-Esprit couvrant Marie de son ombre, la féconde par sa
merveilleuse entrée; de l’autre, le même Saint-Esprit dans la fontaine bénie du
baptême donne à l’Eglise la vertu de produire perpétuellement de nombreux
fruits. Marie enfante son Fils sans péché, et l’Eglise dans ceux qu’elle
engendre, détruit le péché. De Marie est né ce qui était au commencement; de
l’Eglise renaît ce qui avait péri au commencement. Celle-là a enfanté un seul
Fils pour une multitude d’autres et celle-ci, des peuples entiers. L’une, nous
le savons, demeurant vierge n’a été mère qu’une fois; l’autre, vierge comme
elle, enfante toujours par son époux vierge. L’Eglise continue donc l’œuvre de
Marie mais mystiquement. Saint Paul parle souvent de la formation de Jésus en
nous tous. C’est le Jésus de Marie qui continue donc de naître en ses membres
mystiques. Marie doit donc présider à cette formation de son Jésus en nous qui
se continue. Elle est donc bien notre Mère.
L’Eglise a mis enfin sa
sanction sur la Maternité divine de Marie en instituant une fête spéciale sous
ce titre le 11 octobre que nous célébrons aujourd’hui même! par le Pape Benoît
XV. Ceux donc qui languissent dans le chemin de la vertu devraient examiner leur
amour et leur dévotion envers Marie. Qu’ils reviennent à Marie et Jésus
reviendra à eux! Ce n’est pas une question d’amour naturel ou sensible pour
cette femme que nous n’avons jamais vue, mais de foi. Marie est dispensatrice
de toutes les grâces, c’est de foi! Qu’on accorde sa vie pratique avec cette
vérité divine et nous ferons vite des progrès dans la vertu!
OBSCURITÉ DE MARIE
Avant d’aller plus loin,
il est bon de résoudre une objection qui se présente à l’esprit naturellement:
si Jésus tient tant à ce que nous honorions sa Mère, pourquoi n’a-t-il pas
commencé par le faire lui-même? Jésus semble l’avoir mise systématiquement de
côté pendant sa vie publique. Il a loué Pierre, Jean-Baptiste et la Cananéenne
mais jamais un mot de louange à l’adresse de sa Mère.
Une fois quand on lui dit
que sa mère l’attend à la porte, il répond que sa mère ce sont ceux qui croient
en lui, et il ne s’occupe pas d’elle. Une autre fois, il a manqué une belle
chance de la louer quand une femme du peuple crie: «Bienheureux le sein qui t’a
porté!». Jésus détourne cette louange encore en faveur de ceux qui croient en
lui. Dans les scènes glorieuses de la vie de Jésus, comme au Thabor et dans son
entrée triomphale en Jérusalem, on ne fait aucune mention de Marie. Mais, dans
les scènes pénibles et honteuses, comme durant sa Passion et au pied de la
croix, on la signale à l’attention du public. Pourquoi Dieu l’a-t-il voulu
ainsi? Il nous est bien permis de chercher les raisons puisque Dieu demandera à
chacun de nous quelque chose de semblable en proportion qu’il veut nous
sanctifier.
LA GLOIRE DE DIEU LE
DEMANDE.
Jésus est venu pour réparer l’offense d’Adam à son Père: il doit le
glorifier, et s’effacer devant lui comme Adam aurait dû faire. Jésus dit qu’il
ne cherche pas sa propre gloire, mais celle de son Père qui l’a envoyé. Sa mère
devait donc subir le même sort que Jésus: elle devait rester dans l’ombre. Si
Jésus s’est fait esclave pour la gloire de son Père, il fallait bien que la
Mère de cet esclave soit humiliée aussi. Jésus considéré comme le rebut du
peuple, comment sa Mère pourrait-elle être à l’honneur?
Si Jean-Baptiste doit
diminuer pour que Jésus croisse devant le peuple, il en est de même pour sa
Mère. Quand Jésus était encore caché dans son enfance, c’est sa Mère qui
recevait les louanges des Mages et des bergers. Mais, dès que la gloire de
Jésus monte, elle s’éclipse comme la lune devant le soleil. Le Saint-Esprit
continue de la couvrir de son ombre parce que c’est surtout durant la Passion
et la mort de Jésus qu’elle doit enfanter des fils à Dieu. Si Jésus devait
prendre le chemin du grain de blé pour ressusciter dans la gloire, Marie devait
suivre ce plan de la sagesse divine: elle devait semer sa gloire pour en
récolter plus. Aussi, quand le Soleil sera disparu avec l’Ascension de Jésus,
la «lune» reprendra sa clarté: la gloire de Marie montera jusqu’à la fin des
temps.
UNE LEÇON PRATIQUE POUR
NOUS TOUS.
Nous sommes portés à
regarder les humiliations de Jésus comme spéciales à lui seul. Pourtant que de
fois il nous avertit que nous subirons le même sort que lui, que nous serons
persécutés comme lui, que nous serons humiliés comme lui et qu’il nous faudra
prendre le chemin du grain de blé avec lui, afin de ressusciter glorieux dans
la vie surnaturelle dans la foi en ce monde et dans la gloire en l’autre.
Mais il n’attend pas à la
mort pour nous jeter dans l’obscurité. Que de fois nous serons abandonnés des
autres, même de nos meilleurs amis: Dieu fera le vide autour de nous, afin que
nous soyons seuls avec lui, que nous apprenions à le contempler, le méditer et
l’aimer. II ne faut pas alors en vouloir à nos amis qui nous délaissent: c’est
Dieu qui nous isole pour nous avoir tout à lui.
Comme il est difficile de
se convaincre que la terre est le lieu des sacrifices et des humiliations pour
mériter la gloire et le bonheur du ciel! Plus on sème de l’humain et plus on
récoltera du divin! Il faut mourir au monde et à soi pour que Jésus vienne
vivre en nous. Est-ce que Jésus et toute son œuvre n’étaient pas morts le soir
du vendredi saint? Eh bien! Nous devons tous passer par cet anéantissement
total pour arriver à notre résurrection dans la grâce et ensuite dans la gloire
du ciel.
Il nous faut donc
glorifier Dieu d’abord en le mettant avant nous, il faut nous effacer devant
lui pour lui laisser toute la gloire de notre vie. En proportion que nous
l’aurons glorifié, il nous glorifiera après notre mort comme Jésus le dit de
lui-même: «Je vous ai glorifié sur la terre, j’ai accompli l’œuvre que vous
m’aviez donné de faire. Eh bien! Maintenant, glorifiez-moi de la gloire que
j’avais avec vous avant que le monde fût».
Voilà donc pourquoi Marie
a été laissée dans l’ombre pendant que Jésus vivait sur la terre.
Jésus dit qu’il est venu
pour ceux qui se portent mal, pour les pécheurs. C’est donc un bon témoignage
en faveur de la sainteté de Marie que Jésus ne s’occupe pas d’elle! Les prêtres
devraient imiter J.-C. et rechercher la compagnie des malades et des pécheurs
quand même que la compagnie des bons est plus agréable, mais la visite des
pécheurs est plus utile pour la gloire de Dieu.
Toute créature est portée
à l’orgueil: des milliers d’anges parfaits y ont succombé. Or, jamais personne
au monde ne devait monter plus haut que Marie; c’est pourquoi Jésus ne veut pas
que cela arrive à sa Mère, il la tient dans les humiliations et dans
l’humilité.
C’est bien renversant de
voir que Dieu a donné peu de lumières intellectuelles à Marie dans les choses
de Dieu. Les autres aiment à nous dire qu’elle comprenait les Ecritures et
sondait le fond des projets divins au sujet de la Rédemption. Je le défie de
nous donner un seul autre exemple de cette vue d’ensemble sur le plan divin que
ce qu’elle dit dans son cantique inspiré, le Magnificat. Partout ailleurs,
l’Ecriture fait remarquer qu’elle ne comprenait pas!
Quand Jésus dit à sa Mère
dans le Temple: «Ne saviez-vous pas que je devais être tout aux choses de mon
Père?». L’Evangile ajoute qu’elle ne comprit pas ces paroles… qui nous sautent
aux yeux, il me semble!
Marie et Joseph sont dans
l’admiration des paroles que Siméon prononce au sujet de Jésus, évidemment dans
le sens qu’ils ne les comprenaient pas. L’Evangile ajoute que Marie gardait
dans son cœur… pas dans son esprit… ce qu’elle entendait dire de Jésus.
Cela prouve que ce n’est
pas la compréhension intellectuelle du plan divin ou de l’Ecriture qui compte
devant Dieu, mais l’amour. Dieu n’a jamais dit: «Donne-moi ton esprit ou ta
tête, mais ton cœur, ou ton amour!». Voilà ce que Dieu veut et ce qui met tout
le monde sur le même pied devant Dieu. Une pauvre femme ignorante peut devenir
aussi parfaite que n’importe quel grand docteur, du moment que tout son cœur
cherche Dieu et se complaît uniquement en Dieu. Quand même elle ne comprend
rien dans les choses de Dieu, si elle tend vers Dieu de tout son cœur, elle
sera très haut dans le ciel.
Nous devrions tous
prendre Marie comme notre modèle dans la vie spirituelle. Nous jeter dans
l’amour, tête la première, et rechercher uniquement l’amour de Dieu. Trop de
catholiques se servent trop de leur tête et pas assez de leur cœur. Ils veulent
tout comprendre, tout analyser, tout émietter pour l’accepter. Ce n’est pas la
science des choses de Dieu qu’il regarde, mais l’amour que l’on a pour lui. Or,
l’amour ne dépend pas du tout de la science. Il faut si peu de science pour
savoir que Dieu est notre Créateur, notre Rédempteur et qu’il est infini en
perfection. Cela suffit amplement pour le préférer à tous ses échantillons!
Pour le vouloir pour toute l’éternité!
Est-ce que les petits
enfants attendent d’avoir une grande science pour aimer leurs parents? Leur
amour est comme aveugle: ils les aiment bien longtemps avant de comprendre la
raison de leur conduite envers eux. Eh bien! Est-ce que Jésus ne dit pas que
nous devons devenir de petits enfants pour entrer dans le royaume de Dieu?
Voilà un point où nous devons les imiter: l’amour! L’amour aveugle!
Ceux qui veulent
comprendre Dieu avant de l’aimer se perdent des années de temps dans leurs
savantes spéculations et finissent par avouer qu’ils ne comprennent pas
grand-chose de Dieu. Pourquoi ne donne-t-il pas plus de grâce aux hommes?
Pourquoi tant de mal dans le monde? Pourquoi si peu de bons? Dieu fait exprès
pour aveugler, afin que nous cessions de raisonner pour commencer à aimer!
C’est tout ce que la Sainte Vierge a fait et elle dépasse toutes les pures
créatures en perfections devant Dieu! Ce devrait nous ouvrir les yeux sur ce
que nous devrions faire nous-mêmes.
Si les bonnes âmes
prenaient cette recette, elles auraient moins besoin d’un directeur pour tout
leur analyser l’état de leur âme, et si les directeurs connaissaient cette
idée, ils orienteraient leurs conseils plutôt vers l’amour que vers la science
spirituelle. Que de perte de temps et d’écritures ou de conversations plus
souvent inutiles et même qui engendrent un certain orgueil secret de si bien
spéculer dans les choses de l’âme. Une once de soumission à Dieu dans tout ce
qui arrive à l’âme vaut tout un traité de science spirituelle. Un acte du cœur
vaut plus qu’un acte de l’esprit dans les choses de Dieu. Demandons la grâce
d’imiter la Sainte Vierge sur ce point important pour le mérite de l’âme.
DÉVOTION ENVERS MARIE
Qu’on ne s’attende pas à
sentir de l’attrait pour la Sainte Vierge, pas plus que pour Dieu: Ils nous
dépassent tous les deux, Ils ne sont pas de ce monde et nous ne les avons
jamais vus. Ce n’est que par la foi que nous pouvons arriver à aimer et à
honorer Marie. Comme il faut adorer Dieu en esprit et en vérité, de même il
faut prendre ce que la foi nous en dit et agir envers elle en conséquence, et
cela ne se fait pas du jour au lendemain! Il faut réfléchir beaucoup sur ce que
la foi enseigne d’elle et prier encore plus pour avoir la grâce de lui être
dévots, car cela n’est pas naturel pour nous.
Par exemple la foi nous
enseigne qu’elle est la plus parfaite pure créature que Dieu ait créée et donc
qu’il l’aime plus que toutes les autres ensemble. Or, comme nous devons faire
une seule chose avec J.-C., nous devons aimer Marie plus que tout au monde. Il
n’y a aucun danger d’excéder dans notre amour de la Mère de Dieu.
Puisque Dieu s’est donné
à nous par Marie, donnons-nous à Dieu aussi par Marie. Rien ne peut donner plus
de consolation à Marie que de nous voir décider de nous donner tout à Dieu par
ses mains pour ainsi dire. En proportion que nous vivons la vie de Jésus
intérieurement, nous aimerons Marie comme lui l’aime. Puisqu’il eut vivre en
nous, il veut donc que nous prenions sa façon de faire en tout autant que
possible avec sa grâce.
Parce qu’elle est la Mère
de Dieu, nous devons avoir une grande confiance dans sa bonté de Mère. Si le
Père use de justice contre nous, pécheurs, notre Mère ne connaît que la
miséricorde divine pour ainsi dire. Son cœur plein d’amour de Dieu et de nous
ne suit que son amour et de la sorte elle obtient tout ce qu’elle veut de Dieu.
Son cœur immaculé est le refuge des pécheurs. Jamais elle n’abandonnera un
pécheur qui a recours à elle. Elle sait de quelle triste nature nous sommes
faits et combien nous sommes exposés à toutes sortes d’ennemis de notre salut.
Voilà pourquoi elle a tant de pitié pour nous.
Sur la terre est-ce que
nous ne recherchons pas l’amitié des puissants, afin d’obtenir par eux des
faveurs des gouvernants? Eh bien! Il n’y a personne de plus puissant que Marie
auprès de J.-C., son Fils. Nous avons donc tout à gagner à s’insinuer dans ses
bonnes grâces, à cultiver son amitié par tout ce que nous savons lui être
agréable.
En dehors de Dieu,
personne ne nous a plus aimés que Marie. Car personne n’a jamais plus aimé
Jésus que Marie. Or, à cause de la doctrine du corps mystique, Marie aime les
membres mystiques de Jésus comme elle a aimé Jésus et pour les mêmes motifs.
Alors, tant d’amour pour nous doit être payé par le plus d’amour possible de
notre part. L’amour de Jésus ne se sépare pas de l’amour de sa sainte Mère.
ACTE DE CONSÉCRATION
TOTALE À MARIE
Voici un acte de dévotion
très parfait, enseigné par Saint Grignon de Montfort et approuvé par l’Eglise.
Il consiste à se donner à Marie en qualité d’esclave volontaire et par pur
amour pour elle. On se donne à Marie pour toujours et totalement, sa personne,
son activité, pour le temps et pour l’éternité.
On lui donne son corps
avec ses sens pour ne s’en servir que selon le bon plaisir de Marie et pour sa
gloire, acceptant d’avance toutes les dispositions de la Providence par rapport
à la santé, la maladie et la mort.
Tous ses biens de
fortune, pour n’en user que pour le bien des âmes et la gloire de Dieu en union
avec Marie.
Son âme avec toutes ses
facultés pour ne les employer que selon le bon vouloir de Marie pour le bien
des âmes et la gloire de Dieu. Tous ses biens extérieurs, et intérieurs, ses
biens spirituels comme ses mérites et ses bonnes œuvres. Nous nous abandonnons
à elle comme un petit enfant dans les bras de sa mère pour qu’elle fasse de
nous ce qu’elle voudra selon le bon plaisir de Dieu.
Cet acte est d’une très
grande excellence; il contient un acte d’abandon très parfait en la Sainte Vierge;
un acte d’humilité en redonnant à Dieu par Marie tout le bien qu’il nous a
fait; un acte d’amour confiant, puisque l’on se livre de tout cœur à Marie.
Le mérite de cet acte est
très grand, puisque nous donnons à Dieu par Marie tout ce qu’il nous a donné et
de la manière la plus parfaite en lui retournant ses dons par le même chemin
qu’il nous les a faits, par Marie. Tout catholique devrait faire cet acte de
consécration à Marie. Il ne peut rien perdre et gagne tout! Ayons confiance en
la Mère de Jésus qui est aussi la nôtre!
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