VINGT-DEUXIÈME
INSTRUCTION
CONTEMPLATION
POUR OBTENIR L’AMOUR DIVIN.
« Que rendrai-je au
Seigneur pour tous les biens qu’il m’a faits? »
Comme toute cette
troisième série de méditations concerne l’amour de Dieu, qu’on ne soit pas
surpris qu’on revienne à cette idée constamment. Nous voulons en faire notre
vie, notre bonheur: il faut qu’il pénètre absolument toutes les fibres de notre
être et tous les brins de notre activité consciente. Son champ est immense: il
est dans toute la création, et naturelle et surnaturelle; il est à notre portée
partout. Mais nous sommes si bornés, si fermés aux choses divines que nous
devons faire des efforts pour nous appliquer à le découvrir à travers la
création où Dieu l’a semé abondamment. C’est le but de cette méditation. Nous
voulons prendre tous les moyens possibles pour obtenir cette dilection de Dieu
que Jésus nous recommande tant dans son discours après la Cène.
Quand même les différents
points seraient vrais pour l’ordre naturel et qu’un païen pourrait arriver à un
grand amour naturel de Dieu en les méditant, il est évident que nous ne voulons
pas nous contenter de cet amour naturel de Dieu. Il est incapable de nous
donner le ciel, alors nous ne nous y arrêterons pas, mais nous passerons tout
de suite aux considérations qui sont capables de nous donner l’amour
surnaturel.
Pour arriver à cet amour
surnaturel de Dieu, il nous faut suivre la foi, seule lumière divine qui peut
nous donner une connaissance surnaturelle de Dieu et un amour correspondant.
Pour cela, il faut nous adapter au mode surnaturel d’agir dans les choses de la
foi. Il ne faut pas compter sur notre façon ordinaire de comprendre les choses
du monde.
Si on m’annonçait un don
de cent mille dollars, cette nouvelle ne produirait rien dans mes sens, mais
mon intelligence me montrerait les grands avantages de toutes sortes de
recevoir une si grosse somme d’argent. Je tiendrais à cet argent quand même je
ne l’ai pas encore.
Faisons quelque chose de
semblable pour le monde surnaturel, Quand j’apprends que par mon baptême je
deviens enfant de Dieu et hériter du ciel, mes sens ne trouvent rien là pour
eux. Mais mon intelligence éclairée par ma foi me montre des biens éternels et
divins qui vont faire mon bonheur au ciel. Alors quand même la nature n’a rien
pour le moment, je tiens à ces biens célestes justement pour les jouissances
immenses qu’ils vont me procurer dans l’éternité. Et déjà je me réjouis en
espérance d’une jouissance solide et réelle d’une certaine façon.
Cette méditation doit
produire dans la volonté une détermination ferme à chercher Dieu dans toutes
les choses créées, afin de nous unir à son activité divine tout de suite sur la
terre dans la foi comme au ciel plus tard dans la gloire. Puisque nous
participerons au ciel à l’activité de la Trinité, il faut trouver moyen de le
faire tout de suite dans la foi. Eh bien! Comment se manifeste Dieu ou la
Trinité pour nous? Evidemment par toutes les créatures dans les deux ordres
naturel et surnaturel. Eh bien! Dans cette contemplation, nous voulons
découvrir ce divin, afin de nous y unir le plus étroitement possible, afin
d’aimer Dieu davantage.
Parce que les choses
créées dont nous jouissons ou qui nous sont données en particulier nous touchent
davantage, essayons de nous arrêter surtout aux bienfaits de Dieu que nous
avons reçus ou qui nous sont offerts.
BIENFAITS DE DIEU
Commençons par le monde
naturel et matériel et que cette énumération ne soit pas seulement pour
l’esprit mais surtout pour le cœur. Quand une mariée étale ses présents de
noces et les énumère aux visiteurs, elle le fait d’une manière à manifester son
amour pour ses donateurs. Eh bien! Faisons quelque chose de semblable pour nos
cadeaux de «noces» que Dieu nous a faits. Lui aussi nous épouse dans son
immense amour et il nous fait des cadeaux incomparables dans tous les ordres de
la création.
D’abord, jetons un coup
d’œil sur notre demeure merveilleuse au sein de l’univers. Il a pris des
millions d’années pour élaborer la terre, afin de la rendre habitable pour
nous. Examinons-la en dehors du péché avant qu’elle produise des ronces et des
épines pour le châtiment de l’homme pécheur. Tout était uniquement pour le
bonheur de l’homme que Dieu a créé immortel pour jouir du palais superbe qu’il
lui avait bâti. Si un roi me bâtissait le plus beau palais du monde, est-ce que
je ne serais pas porté à l’aimer?
Eh bien! Puisque Dieu
nous a donné la terre pour demeure avec tout ce qu’elle contient pour le
bonheur des hommes, nous devrions donner un bon coup de volonté pour aimer Dieu
à cause de ce don précieux. N’attendons pas d’attrait sensible pour cet amour:
le bienfaiteur nous reste invisible malgré ses dons visibles. Il faut donc
mobiliser ce que notre foi nous dit de lui pour nous aider à l’aimer comme s’il
était visible! C’est donc un amour de volonté que l’on doit exciter en nous. Disons
nous sincèrement: il faut que j’aime Dieu pour cette belle demeure qu’il m’a
construite par amour pour moi. Arrêtons-nous un peu pour goûter cette bonté
immense de Dieu envers nous. Mais pour remonter au Bienfaiteur, il faut
commencer par admirer la demeure elle-même. Combien peu d’hommes prennent le
temps de considérer l’ensemble de ce beau monde que Dieu a créé pour eux! C’est
le temps de le faire actuellement! •1209 Qui s’arrête à ce beau soleil, source
de tant de confort pour l’homme qu’il éclaire, qu’il réchauffe et aide aux
récoltes de toutes sortes pour faire vivre les hommes. Puis, la nuit, Dieu a
semé dans l’espace des millions d’étoiles pour agrémenter les ténèbres de la
nuit.
Quelle immensité dans le
firmament, afin de nous faire penser à l’immensité divine qui, non seulement
dépasse toutes les bornes, créées, mais qui est infinie comme l’essence divine.
Imaginons des astres des
millions de fois plus gros que notre soleil et cependant à peine visibles avec
les plus forts télescopes au monde. Ils sont donc à des trillions de trillions
de milles de la terre et nous sommes sûrs qu’il y en a encore d’autres par
millions qui sont absolument invisibles, même avec ces plus forts télescopes du
monde.
Je sais que l’esprit
humain est à peine touché par ces constatations de la science humaine et reste
parfaitement à sec! Mais, c’est là que le chrétien doit ajouter la foi pour
remonter jusqu’à Dieu et se dire: c’est pour mon bonheur surnaturel au ciel que
Dieu me fait connaître ces merveilles de la création. C’est pour que je me
dise: ce n’est qu’un échantillon de ce que Dieu fera pour moi dans son monde
divin dans l’éternité. Quand même une femme ne pourrait rien faire avec un
petit échantillon de beau drap qu’un voyageur lui montre, il suffit pour lui
faire désirer toute la pièce qui lui servirait bien pour faire une robe.
Faisons de même pour
l’échantillon du ciel éternel que Dieu a mis dans notre ciel stellaire et
essayons de concevoir de l’amour pour Dieu qui nous prépare une demeure divine
incomparablement plus belle que notre demeure terrestre. Faisons un acte positif
d’amour de Dieu pour son amour pour nous sur ce point, peu importe qu’on
ressente ou non cet amour dans les sentiments. Là est notre mérite à faire ces
actes d’amour par la volonté seule. C’est alors qu’on agit avec la foi pure.
Disons-lui: «Mon Dieu, je
veux vous aimer sans limite comme le bonheur sans limite que vous me préparez
au ciel et pour l’amour infini que vous avez eu pour moi». Répétons cet acte
plusieurs fois dans toute sa sécheresse pour les sentiments! Dieu veut des
adorateurs en esprit et en vérité, dit Jésus à la Samaritaine. Eh bien!
Exerçons-nous à ces actes de l’esprit pur et de la volonté pure selon la foi.
Si nous considérons le
monde microscopique, les merveilles nous écrasent autant que les merveilles du
monde télescopique En effet, les savants constatent que toutes les merveilles
du monde télescopique se retrouvent dans une molécule et même dans un atome
formé comme notre monde stellaire! C’est ce monde qui transforme notre
nourriture en notre chair et qui entretient notre vie. Le premier monde nous
éblouit par sa grandeur et sa splendeur, et l’autre nous écrase par sa
petitesse et sa sagesse en nous faisant vivre notre vie naturelle. Que d’amour
pour nous dans ces deux mondes merveilleux! Donnons-lui en donc en retour!
Faisons encore là des actes positifs d’amour de Dieu. Disons-lui: pour toutes
ces merveilles créées pour moi, je veux vous aimer de toutes mes forces et je
vous demande votre grâce pour le faire comme vous le méritez.
Ce que Dieu a fait pour
notre vie animale est autrement merveilleux. Quelle sagesse dans nos sens pour
venir en contact avec les créatures extérieures et prendre en elles ce qui est
nécessaire à notre vie propre et à son exercice. Quel fameux système de nerfs
pour transmettre au cerveau toutes les impressions sensibles et qu’à son tour
il réagisse pour le bien-être de tout l’organisme humain, en passant par
l’imagination, l’intelligence et la volonté. Par cet organisme, il pourvoit aux
nécessités de notre vie humaine et animale et nous protège contre les choses
qui pourraient lui nuire.
Quand nous arrivons au
monde intellectuel, on voit qu’il dépasse incomparablement toutes les
merveilles du monde matériel et animal. C’est par nos facultés spirituelles que
nous sommes créés à l’image de Dieu qui est esprit comme notre âme. Une seule
âme vaut tout le monde visible. C’est par elle que l’homme découvre les lois
qui régissent le monde matériel, afin de pouvoir mieux s’en servir pour son
utilité générale, pour développer les sciences qui lui permettent de tirer
profit de tout ce que Dieu a mis dans la nature. C’est par ces facultés
spirituelles que l’homme peut même étudier Dieu pour le connaître et mieux le
servir.
Arrêtons là cette
énumération des bienfaits de Dieu dans l’ordre naturel, pour faire une
constatation: comme elle nous laisse à sec! Froids. Encore une fois, il ne faut
pas s’en étonner. Justement parce que nous sommes dans le monde naturel, nous
restons froids par rapport à l’amour de Dieu. Ce dernier monde est un tout autre
monde que le monde naturel. Pour éprouver les sentiments de l’amour divin, il
nous faut monter dans le monde divin. Si on monte là seulement par l’esprit de
la volonté, nous restons encore dans le monde naturel de notre activité
naturelle.
Mais, pour monter dans le
monde de l’amour surnaturel de Dieu, il nous faut encore suivre la foi. Or,
elle est absolument obscure pour l’esprit humain. Elle n’est lumineuse pour lui
qu’à condition qu’il consente à ne pas juger selon sa propre lumière Si j’étais
perdu dans une forêt et qu’un guide se présente à moi; je bénéficierais de son
jugement que si je mets le mien de côté. Je me suis perdu en suivant le mien:
j’en sortirai si je renonce au mien et prends celui de mon guide. C’est
exactement notre cas avec la foi. Pour suivre ses lumières dans son monde
surnaturel, il faut que nous fermions notre esprit pour les suivre. Voilà ce
qui explique cette sécheresse pour notre esprit devant cette énumération des
bienfaits de Dieu dans l’ordre naturel.
Donc, pour être touché de
l’amour de Dieu envers nous, il nous faut monter dans le monde surnaturel de
Dieu d’où il a agi en notre faveur. Or, ce n’est que par la grâce de Dieu que
nous pouvons monter dans le monde de l’amour divin. Il faut donc la demander a
Dieu dans la prière fervente et humble. Nous faisons notre énumération
partielle des bienfaits de Dieu simplement pour nous inciter à concevoir de
l’amour surnaturel de Dieu. Mais pour le concevoir, il nous faut le
Saint-Esprit comme il fallait cet Esprit à Marie pour qu’elle conçût J.-C.
Alors, la consolation ou la ferveur de l’amour divin ne peut pas venir de cette
seule énumération, mais uniquement de la prière. Voilà où il nous faut faire
porter notre effort dans cette contemplation comme dans toutes les autres.
J’insiste sur ce point
parce que tant de chrétiens ne sont pas capables de faire une méditation de ce
genre parce qu’ils la trouvent sèche pour l’esprit. Bien oui, elle l’est comme
l’esprit lui-même qui est bien sec dans le monde de l’amour. Il fait la même
fonction que les yeux qui regardent une jolie personne: ils restent secs, mais
c’est le coeur qui s’émeut, car c’est lui qui est le siège de l’amour au moins
selon la façon de voir des humains et cela suffit pour notre exemple.
Quand l’amour de Dieu
entrera dans le coeur, on trouvera du bonheur à énumérer ses bienfaits, comme
un avare est heureux de compter ses piastres parce qu’il a mis son amour dans
l’argent, ainsi le chrétien sera heureux d’énumérer les bienfaits de Dieu quand
il aura mis son amour en Dieu et vice versa, cette énumération augmentera son
amour de Dieu.
DIEU PRÉSENT DANS SES
DONS
Voici une idée de nature
à nous donner plus d’amour pour Dieu: notre Bienfaiteur est présent dans ses
dons, évidemment de différentes manières, mais il y est quand même. Dans les
choses matérielles, il est là par son essence: c’est lui qui unit toutes ces
molécules et ces atomes pour leur donner leur consistance, et leur attraction
particulière. C’est lui qui donne à l’eau ses qualités pour me désaltérer, pour
me laver et pour préparer ma nourriture. C’est lui qui agence tous les éléments
d’un être pour que je m’y complaise et fasse mon bonheur en partie du moins. Il
est donc présent puisqu’il agit dans les êtres.
Si un millionnaire se
dérangeait assez pour venir me porter lui-même un beau cadeau, n’est-ce pas que
je l’apprécierais davantage? Eh bien! Le Créateur lui-même se présente à nous
dans ses dons de toutes sortes. Comme c’est lui qui les maintient dans
l’existence, on peut dire qu’il est présent en eux par son immensité.
Comme toute la bonté d’un
être lui vient d’une communication de l’existence divine, on peut dire que Dieu
est présent en eux pour les faire agir chacun selon le degré de bonté qu’il a
reçu de Dieu. Il l’est d’autant plus que cet être a plus reçu de Dieu. Ainsi,
une âme humaine a plus de la présence divine qu’un simple animal; Dieu est plus
présent dans un ange que dans un homme et plus présent dans la Sainte Humanité
de Jésus que dans le plus grand saint au monde.
Sa présence est la plus
parfaite dans les êtres qui possèdent la grâce sanctifiante, parce qu’elle est
une véritable participation créée à sa nature divine.
Le don de Dieu par
excellence est l’Eucharistie où Jésus est réellement présent par son corps, son
âme et sa divinité. Quelle source d’amour divin nous avons là à notre portée si
nous le voulons. Un catholique devrait rechercher les dons de Dieu en
proportion qu’ils ont plus de divin évidemment. C’est le meilleur moyen
d’arriver à découvrir l’immense amour que Dieu a eu pour nous tous.
Eh bien! Puisque le degré
d’amour pour chacun de nous se manifeste par le degré de bonté que Dieu a mis
dans chacun de ses dons, si nous voulons arriver à cet amour divin, surveillons
justement ce côté divin dans chaque être. Par nature, nous avons l’habitude de
ne considérer que le côté matériel ou naturel des êtres et c’est pour cela que
nous préférons les plaisirs naturels qu’ils nous apportent au divin que Dieu
nous offrait par eux. Aussi dans quels nombreux péchés nous tombons plus ou
moins tous les jours au contact des créatures.
Par exemple, quand le bon
Dieu, pour éprouver les anges, leur présenta dans une vision le futur Messie à
adorer, Lucifer regarda surtout la partie matérielle ou animale de cet
Homme-Dieu et il ne voulut pas l’adorer. Mais Saint Michel s’arrêta à la partie
divine: c’est Dieu qui le veut! Dieu est dans ce Messie! Je l’adore donc! Et du
coup il mérita son ciel, tandis que Lucifer mérita l’enfer.
Remarquons que dans tous
nos péchés c’est que nous avons surtout considéré la partie sensible ou animale
ou naturelle et nous l’avons préférée à la volonté de Dieu. Si nous nous
arrêtions surtout au côté divin, se dire que c’est Dieu qui le veut! On
choisirait cette partie divine et l’on ferait la volonté de Dieu.
Voici un bon principe
dans l’usage des créatures: c’est de voir dans chaque créature, comme en Saint
Jean-Baptiste, une voix qui crie dans le désert: préparez les voies du Seigneur
qui s’en vient. En effet, chaque créature annonce l’arrivée de quelque chose de
divin pour nous, à condition que par la foi nous nous arrêtions au côté divin
de cette créature. Alors nous entrons parfaitement dans le plan de Dieu et nous
recevrons sa grâce qu’il nous avait préparée dans cette créature. Comme la voix
fait penser à celui qui parle, rappelons-nous que Dieu nous parle par ses
créatures et écoutons sa voix divine.
DIEU AGISSANT DANS SES
DONS
Au point de vue de
l’activité, on attribue à l’agent ce que fait son instrument. Personne
n’attribue son opération à un scalpel, mais à tel chirurgien qui maniait le
scalpel. Eh bien! C’est ce que fait Dieu avec tous les êtres qui lui servent
d’instruments pour produire l’effet que lui, le Chirurgien divin, voulait
produire. Tout est donc attribuable à Dieu en dehors du péché. Par exemple,
c’est Dieu qui nous éclaire par son soleil et qui nous réchauffe par lui. C’est
Dieu qui nous nourrit par nos parents, qui exerce notre activité par tous les
êtres qui viennent en contact avec nous.
C’est Dieu donc qui agit
pour nous dans les personnes, telles qu’elles sont avec leurs défauts et leurs
qualités. Si un homme n’a qu’un talent, il ne peut pas agir avec dix et c’est
Dieu qui en est responsable. Quand un lion mange un homme, c’est Dieu qui agit
dans le lion pour manger cet homme. Quand un homme meurt de tuberculose, c’est
Dieu qui l’a fait manger comme par autant de lions dans les microbes qui l’ont
tué aussi efficacement qu’avec des lions!
Mais là où Dieu agit plus
directement et plus efficacement, c’est dans les êtres surnaturels en
proportion qu’ils participent à sa nature divine. Ainsi il agit plus dans les
vertus théologales de foi, d’espérance et de charité que dans les vertus
morales et plus dans les vertus infuses que dans les vertus acquises. Il agit
plus dans la sainte communion que dans un simple morceau de pain que l’on
mange.
Par conséquent, plus les
êtres sont surnaturels et plus Dieu agit en eux et par eux. Par conséquent, ces
catholiques qui vivent habituellement dans le surnaturel sont donc en contact
avec Dieu dans la même mesure. Dieu agit en sa faveur constamment, de sorte que
ce chrétien devrait développer un grand amour surnaturel de Dieu.
Ainsi, dans la foi, c’est
Dieu lui-même qui éclaire notre intelligence et fortifie notre volonté pour
qu’elle comprenne les vérités surnaturelles et que la volonté les veuille de
toute sa forme. De même dans les autres vertus théologales. Par conséquent,
plus nous vivrons ces hautes vertus surnaturelles et plus nous subissons
l’activité directe de Dieu. Or, rien ne peut faire naître et faire augmenter
l’amour comme la familiarité dans l’action. Les Apôtres ont appris à aimer
J.-C. en passant trois ans dans sa compagnie et en subissant son action directe
pendant ces années.
Eh bien, Dieu fait pour nous ce que Jésus a fait pour
ses Apôtres; il nous instruit de plusieurs manières du royaume de Dieu, il
prend soin de nous pendant tout ce temps, il nous donne sa grâce pour améliorer
notre union avec lui et pour nous approcher davantage de lui dans la sainteté.
Pourquoi tout cela si ce n’est pas pour exciter en nous son amour? Dieu fait
tout par amour et pour l’amour, car il est amour. Pour lui, tout commence dans
l’amour et finit dans l’amour. Faisons de même!
La conclusion est que
tout le bien-être, toute la sagesse et tout le bonheur que nous procurent les
êtres sont autant de bienfaits de Dieu directement. Si nous aimons tant les
bienfaits, combien plus devrions-nous aimer le Bienfaiteur! Surtout quand nous
savons que ce qu’il fait pour nous en ce monde n’est qu’un échantillon de ce
qu’il fera pour nous dans l’éternité. De plus, si l’on pense à tous les autres
bienfaits que Dieu nous aurait faits sans nos péchés, nous avons là encore une
raison de plus de l’aimer davantage.
Si nous prenons
l’habitude de toujours penser à cette action divine par tous les êtres qui
viennent en contact avec nous, l’amour suivra rapidement car le coeur suit la
pensée. Ce à quoi un homme pense habituellement indique ou est son amour.
Essayons donc de penser à cette action divine et nous finirons par aimer Dieu
dans la même proportion.
L’AMOUR EXIGE LA
COMMUNAUTÉ DES BIENS
L’amour égalise tout. Un
riche qui marie une personne pauvre tient à l’enrichir en proportion qu’il
l’aime. Nous avons vu comment Dieu nous a enrichis de toutes sortes de biens
par la création et que par Jésus surtout, il nous a enrichis de tous les biens
de l’ordre surnaturel par la grâce en ce monde et plus tard dans la gloire du
ciel.
Eh bien! Dans la mesure
que nous l’aimons, nous devons lui donner de nos biens en retour de tout ce
qu’il a fait pour nous. Le Père nous a aimés jusqu’à nous donner non seulement
son ciel mais Celui en qui il avait mis toutes ses complaisances, son Fils
unique. Il ne s’est donc pas contenté de paroles à notre égard, mais il nous a
aimés en actes et il a été à la limite de ce qu’il pouvait faire pour nous.
Jésus se plaignait un
jour à Sainte Angèle de Foligno que les hommes l’aimaient trop pour rire! «Je
ne t’ai pas aimée pour rire, moi!», lui disait-il. Il était bien sérieux dans
son amour pour nous quand il s’est fait pauvre de riche qu’il était, qu’il a souffert
sa cruelle passion et qu’il a été crucifié pour nous avoir avec lui au ciel:
c’était de l’amour sérieux et en acte! Il s’est livré entièrement en donnant
jusqu’à sa vie pour l’amour de nous.
Eh bien! Devant cet amour
infini et éternel, personne n’a le droit d’être mesquin avec Dieu. Que chacun
commence par donner son activité personnelle à Dieu. Que tout ce qu’il fait,
soit pour Dieu seul et totalement. Par exemple, si on donne à Dieu un voyage
que l’on fait, que ce ne soit pas seulement le début de ce voyage qui soit pour
Dieu, mais que tout le voyage jusqu’au terme et tout ce qu’on fait durant ce
voyage soit sûrement pour Dieu. Combien commencent pour Dieu et ensuite ils se
contentent dans toutes sortes de plaisirs comme de vrais païens pour leur
propre satisfaction. Ce sont des demi-mesures que Dieu n’aime pas du tout. Ce
n’est pas là l’aimer comme il nous a aimés… sans mesure.
Si on donne à Dieu nos
travaux comme nous le devons faire, qu’ils soient faits avec la plus grande
perfection que nous pouvons y mettre pour l’amour de Dieu. On n’offre pas à
Dieu des travaux mal faits. On y met tous les talents que Dieu nous a donnés.
N’oublions pas que dans
nos travaux il ne suffit pas de dire en soi et au début: je veux faire ce
travail pour Dieu ou je vous offre ce travail et ensuite rechercher sa propre
gloriole par des motifs naturels quelconques. Il faut que tous nos motifs
soient absolument surnaturels. Autrement quel besoin Dieu a-t-il de nos
oeuvres? Il ne les accepte qu’en autant qu’elles contiennent de l’amour divin.
Or l’amour divin se manifeste par les motifs surnaturels. Les motifs indiquent
le genre d’amour qui nous fait agir. Par conséquent, tout catholique doit
s’assurer que ses motifs sont bien surnaturels s’il veut que ses travaux soient
acceptables à Dieu. C’est l’amour qu’il veut. «Donne-moi ton coeur», ditil!
Voilà qu’il veut en retour de tout l’amour qu’il nous a montré. Comme nous
devons tous nous surveiller dans nos motifs. Les saints ont dû se surveiller
sur ce point. Ils nous avertissent qu’on a beau commencer quelque chose pour
Dieu, la nature est là au fond de l’être avec sa concupiscence et, si nous ne
sommes pas sur nos gardes, c’est elle qui finit par nous suggérer nos motifs
naturels et alors tout est perdu pour Dieu.
Si on assiste à la messe
pour Dieu, que toute la messe soit pour Dieu et pas seulement la signe de croix
au commencement… et ensuite surveiller tous les fidèles qui entrent et qui
sortent, surveiller leurs habits, etc. Habituons-nous à donner absolument tout
à Dieu. Toute la messe, tout un repas, pas seulement la prière du début, et
ensuite s’empiffrer comme un païen et ne choisir que ce qui plaît au palais,
etc. Que pas un motif naturel ne s’y glisse! Car alors c’est une affection
naturelle qui vole l’offrande faite à Dieu.
Si un prêtre offre son
sermon à Dieu, que tout ce qu’il dit et la manière de le dire soit tout pour
Dieu. Qu’il n’aiguille pas son sermon à sa propre gloire pour faire plaisir aux
fidèles plutôt qu’à Dieu.
Mais le don par
excellence que nous pouvons et devons faire à Dieu est le don de soi-même, pas
simplement par une formule d’offrande qui dure le temps qu’on la récite, mais
un don complet et total pour la vie et l’éternité. Or, on sait que notre moi
est fait de nos deux amours naturels: de soi et des créatures. Eh bien, se
donner à Dieu comme il le veut, c’est faire mourir ces deux amours naturels en
leur soustrayant tout ce que peut les alimenter et en acceptant de Dieu tout ce
qui les contrarie. Ce qui veut dire qu’on ne s’impatiente plus du tout de rien!
Qu’on ne murmure contre rien, qu’on ne cultive aucune attache même à une chose
permise.
Ce moi est fait de tout
ce que j’aime, de tout ce qui m’intéresse et qui m’occupe du matin au soir,
dont j’aime à parler à tout le monde et que je voudrais enrichir de tous les
biens du monde! Voilà le don de soi tel qu’il devrait être devant la foi. Je me
suis si bien donné à Dieu que je n’existe plus! Je suis mort! Ce n’est plus moi
qui vis, c’est J.-C. qui vit en moi! Combien de chrétiens seraient capables de
parler de la sorte? Pourtant, c’est la volonté de Dieu expresse. Une fois mort
mystiquement, rien au monde ne devrait m’inquiéter. Dans une épreuve, je ne
dois pas me plaindre, c’est Dieu qui vient chercher simplement ce que je lui ai
donné de plein coeur!
Disons donc avec Saint
Ignace: « Prenez, Seigneur, toute ma liberté! Tout ce que je suis et tout
ce que j’ai, je l’ai reçu de vous. Je vous remets le tout pour que vous en
fassiez ce que vous voudrez. Je vous donne mon intelligence et ma volonté pour
que vous vous en serviez uniquement pour votre gloire et le salut de mon âme!
Donnez-moi votre grâce, cela me suffit! »
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