VINGT-CINQUIÈME
INSTRUCTION
L’ÉGLISE.
«Tu es Pierre et sur
cette pierre je bâtirai mon Eglise et les portes de l’enfer ne prévaudront pas
contre elle». Mt. 16.
Après avoir médité sur
les mystères glorieux de J.-C. et les vertus théologales qui nous mettent dans
le monde surnaturel, il est bon de nous arrêter au moyen que Jésus a établi
pour continuer son oeuvre à travers le monde jusqu’à la fin des temps: l’Eglise.
Car c’est par elle que nous recevons tous les dons célestes que nous avons
exposés jusqu’ici. C’est par elle que J.-C. nous communique ses mérites et sa
doctrine avec sa vie surnaturelle. Il a promis d’être avec son Eglise jusqu’à
la fin du monde pour la protéger contre les attaques de l’enfer. Notre attitude
envers l’Eglise doit être la même qu’envers J.-C.: «Celui qui vous écoute,
m’écoute et celui qui vous méprise, me méprise».
Par Eglise, nous
entendons ici toute l’organisation établie par J.C. pour continuer son oeuvre
de sanctification dans le monde. Elle est constituée par le Pape, les évêques,
les prêtres et tous les fidèles, même ceux qui n’ont pas la foi parce qu’ils
devraient l’avoir. Ils sont comme si j’avais un membre paralysé: quoiqu’il
n’ait pas de vie, il m’appartient même s’il est pratiquement mort. Pour notre
but, nous n’avons pas besoin des distinctions que les manuels de théologie
font, par exemple entre le corps mystique et l’Eglise. Au point de vue concret
et pratique que nous prenons, nous n’avons pas besoin de distinction.
Ainsi, Jésus apostrophe
Saül qui persécutait les chrétiens en lui disant: «Pourquoi me persécutes-tu?».
C’était donc les membres du corps mystique qu’il persécutait. Plus tard, Saint
Paul dit qu’il a persécuté l’Eglise de Dieu. Pour lui donc, le corps mystique
et l’Eglise sont une seule et même chose. Nous faisons de même dans cette
instruction.
La seule distinction que
nous allons faire sera entre les deux éléments qui composent l’Eglise: l’élément
humain et l’élément divin, afin de mieux les juger selon leur nature propre.
Comme dans l’incarnation, les deux natures de Jésus restent distinctes dans
leur activité propre, de même dans l’Eglise, l’humain et le divin gardent leurs
tendances et leur nature propres. Il faut respecter ces caractéristiques pour
ne pas attribuer au divin ce qui n’est qu’humain et nous exposer à mépriser et
à perdre ce qui vient de Dieu comme s’il venait des hommes ou des démons.
«Rendons à Dieu ce qui est à Dieu et à César ce qui est à César!».
Comme Jésus a traité avec
les hommes de son temps tels qu’ils étaient en chair et en os, avec leur
ignorance et leurs défauts, ainsi nous devons prendre l’Eglise telle quelle est
dans son entité réelle et concrète, se composant de la même sorte d’hommes que
Jésus a rencontrés sur son chemin et qu’il a aimés jusqu’a mourir pour eux.
Comme Jésus voyait des âmes immortelles à travers la chair des hommes qu’il
instruisait, nous devons voir J.-C. en arrière et dans les hommes qui composent
et gouvernent son Eglise. Nous allons les considérer séparément pour mieux
connaître ce qui appartient à chacun et régler notre conduite en conséquence.
L’ÉLÉMENT
HUMAIN…
Est celui qui frappe nos
sens dans les hommes qui composent l’Eglise. Nous voudrions exclure cet élément
pour ne voir que du divin dans l’Eglise. Comme les hommes ont eu plus de
difficulté à accepter l’humanité dans Jésus que sa divinité, ainsi ils ont
encore beaucoup de difficulté à admettre l’élément humain dans l’Eglise. On
voudrait que tous les prêtres fussent des anges de perfection. Quand on les
voit aux prises avec toutes les passions humaines et descendre dans les
bas-fond du péché, on en est scandalisé et l’on ne veut plus voir l’Eglise là.
Comme J.-C. a pris sur
lui tous les péchés du monde, et qu’il a été traité par Dieu comme le plus
grand pécheur de la terre, comme s’il était vraiment coupable de tous les
crimes des hommes, pourquoi refuser de croire que son épouse, l’Eglise, peut
descendre bien bas aussi, surtout comme les hommes qui la composent sont de
vrais pécheurs.
Est-ce que Jésus qui
était Dieu ne s’est pas soumis aux conditions de la vie humaine? Il a peiné
dans un travail dur et insignifiant, dans une pauvreté extrême et le mépris des
hommes. Il a été victime de leur ignorance, de leurs sottises, de leurs
exigences dans sa petite boutique de Nazareth. Dans sa vie publique, il a subi
l’opposition systématique des Scribes et des Pharisiens avec l’insouciance du
peuple et une persécution de la part des prêtres juifs, jusqu’à sa passion et
sa mort sur la croix.
Eh bien! Pourquoi
agirait-il autrement pour son Eglise qu’il fonde pour continuer son oeuvre
d’épuration et de sanctification. Elle se trouve liée et soumise à la confusion
de toutes les races, aux changements constants des gouvernements, aux caprices
des nations et des individus, à toutes les passions de chaque génération et aux
persécutions de ses nombreux ennemis.
N’allons pas nier sa
divinité parce que nous voyons ses humiliations. Quand Jésus était couvert de
crachats, de sang et de poussière et de blessures des pieds à la tête, outragé
par les siens qu’il venait sauver, qu’il n’avait ni forme ni beauté, qui aurait
jamais cru que ce fut lui qui régnait dans le ciel? Si donc Jésus s’est livré
aux hommes méchants pour expier nos péchés, il peut bien se livrer encore dans
ses membres mystiques qu’est l’Eglise, afin que chacun supplée à ce qui lui
manque de la passion de J.-C. Cette question est si importante que nous allons
lui consacrer un peu plus de temps, afin d’enlever les causes de scandale qui
font un tort immense à la foi des fidèles.
SCANDALE POUR BEAUCOUP.
Ceux qui ont coutume de tout juger selon la raison humaine sont fort
scandalisés de la mauvaise conduite des catholiques, des défauts des prêtres et
même des évêques. C’est la même erreur de jugement que les juifs ont fait pour
Jésus: ils ne s’arrêtaient qu’à l’humain en lui. Ils disaient. «D’ou lui vient
cette sagesse et comment faitil des miracles?». N’est-ce pas le fils du
charpentier? Et sa mère ne s’appelle-t-elle pas Marie? Et il était pour eux une
pierre d’achoppement. Ils le voyaient si humain qu’ils ne pouvaient pas croire
qu’il fut divin aussi. Les hommes font encore de même pour l’Eglise.
Pourtant, est-ce que
Jésus ne nous avertit pas des futures attaques des démons contre son Eglise
quand il nous dit que les portes de l’enfer ne prévaudront jamais contre elle.
C’était nous dire que les démons essaieraient de la corrompre par leurs armes
ordinaires: l’affection aux choses de la terre, par le luxe et par toutes
sortes de péchés.
L’histoire des hérésies
nous montre clairement combien les démons ont réussi à pervertir ses membres et
ses pasteurs. L’Eglise se présente aux hommes avec une doctrine divine, mais
avec une foule de défauts dans ses prêtres qui se trouvent à faire un tort
immense à sa réputation et qui empêchent les fidèles de prendre toute sa
doctrine céleste.
Son oeuvre d’épuration
est toujours à recommencer avec chaque génération et même avec chaque individu,
car tout chrétien doit lutter toute sa vie contre ses passions, son amour des
choses de la terre et les embûches des démons pour le corrompre de toutes les
façons possibles.
Pour les chrétiens à
mentalité plus ou moins païenne qui jugent en général selon l’extérieur, c’est
un scandale pour eux de voir tant de défauts et de vices même dans ceux qui
devraient donner l’exemple d’une vie sainte. Combien déblatèrent contre le
clergé et s’autorisent des fautes des prêtres pour abandonner la pratique de
leur religion! C’est absolument insensé de leur part. Pourquoi offenser Dieu
parce que d’autres l’offensent? Pourquoi faire ce qu’ils reprochent aux autres
de faire? Comme je serais méchant de frapper ma mère parce que l’un de mes
frères l’a frappée? C’est justement la cruauté et la sottise de tous ceux qui
s’éloignent de Dieu parce que des prêtres offensent Dieu.
CAUSE D’INDIFFÉRENCE POUR
BEAUCOUP. Ceux-ci n’abandonnent pas la religion, mais plus ou moins
inconsciemment ils se refroidissent dans la pratique de la religion. Ils ne
viennent pas toujours à la messe et ne reçoivent pas les sacrements souvent;
ils ne s’intéressent pas aux choses de Dieu en voyant l’insouciance des prêtres
pour vivre leur foi. Ils aiment à ressasser les médisances et les calomnies
contre le clergé et naturellement leur zèle des choses divines s’en va vite.
Ils tiennent tant à avoir des prêtres parfaits qu’ils ne songent pas à se
perfectionner eux-mêmes! Ils amélioreraient l’Eglise en se sanctifiant
eux-mêmes: s ils n’ont pas le coeur de faire ce que Dieu demande d’eux,
pourquoi tiennent-ils tant à ce que d’autres satisfassent le bon Dieu? Qu’ils
commencent d’enlever la poutre dans leurs yeux et ensuite ils enlèveront la
paille dans les yeux des autres. C’est un conseil de Jésus pour tout le monde
sans exception!
Pour comprendre un peu
comment il se fait que Dieu laisse faire tant de mal dans le monde, il ne faut
pas regarder le bonheur des hommes seulement, mais aussi la gloire de Dieu qui
vaut encore plus. Dieu nous offre un bonheur qui dépasse la nature humaine et
qui ne nous est pas dû d’aucune façon. C’est un pur don de Dieu et sa gloire
exige que les hommes soient éprouvés pour voir s’ils veulent sincèrement ce
bonheur divin. Dieu veut être préféré à de bonnes choses et à un certain
bonheur naturel bon en soi. C’est pourquoi il permet aux démons et aux passions
humaines d’attirer les hommes aux plaisirs des sens avec les choses créées. De
plus, il faut qu’il respecte leur liberté de sorte qu’il doit les laisser
tomber dans le péché s’ils le veulent. Autrement quelle gloire aurait-il s’il
forçait leur liberté? C’est cette gloire de Dieu qui explique le mal dans le
monde! C’est malheureux pour ceux qui seront damnés, mais c’est malgré la volonté
de Dieu et par leurs propres fautes. Evidemment, si on ne pense qu’au malheur
de ces pauvres damnés, on est porté à disputer Dieu. Mais, la gloire éternelle
de Dieu vaut plus que le bonheur des hommes gagné sans gloire pour Dieu.
Un point que les hommes
oublient trop, c’est que nous sommes tous pécheurs et donc que nous méritons
tous les châtiments du monde et que Dieu peut se servir des hommes comme des
démons pour nous faire souffrir les peines que nos péchés ont méritées.
Puis, comme c’est par
orgueil que nous avons péché, Dieu punit notre jugement et notre volonté ou
notre amour par tout le contraire, dans les prêtres comme dans les autres. La
conduite des autres révoltera notre jugement et notre estime pour eux. Ils nous
rendront la vie amère et triste par leur façon d’agir en manquant à une foule
de leurs devoirs sacrés.
Est-ce que nous n’avons
pas manqué à nos devoirs envers Dieu? Pourquoi sommes-nous scandalisés de voir
que d’autres manquent aux leurs? Dieu veut nous rappeler nos propres
manquements à nos devoirs et nous les faire regretter en voyant que les autres
pèchent comme nous avons péché nous-mêmes. Nous devrions avoir pitié d’eux
comme nous voulons que Dieu ait pitié de nous. Exerçons notre miséricorde
envers eux comme nous voulons que Dieu exerce la sienne envers nous. Dieu est
toute miséricorde: eh bien! pour participer à son activité divine, il nous faut
donc pouvoir exercer la miséricorde envers le prochain. S’il ne péchait jamais,
nous ne pourrions pas l’exercer. Or, ailleurs nous avons montré qu’il est plus
glorieux pour Dieu de pardonner que d’empêcher de tomber dans le péché. La
gloire d’un bon médecin est dans la grandeur des maladies qu’il guérit. Il en
est de même pour Dieu. Sa gloire est plus grande à faire miséricorde que
d’empêcher de tomber dans le péché. •1380 On murmure contre Dieu quand on ne
regarde qu’un côté de son plan divin ou les seuls avantages des hommes. Mais si
on considère l’ensemble de son plan, il faut admirer sa sagesse et sa bonté.
Ainsi, quand Dieu soumet tous les hommes aux suites néfastes du péché originel,
il n’y a pas d’injustice puisqu’il les soumet tous aussi au remède souverain de
la rédemption. Ceux qu’il châtiait dans Adam,
il les sauve dans J.-C. Si nous n’avons pas commis le péché d’Adam, nous
n’avons pas non plus opéré la rédemption qui nous sauve. On voit alors que le
remède est incomparablement supérieur à la conséquence du péché originel.
Personne ne peut donc blâmer Dieu de le perdre. C’est l’homme qui se perd parce
qu’il le veut malgré Dieu.
EXERCICE DE FOI SELON
L’INTENTION DE DIEU. Ce n’est que pendant que nous sommes sur la terre que nous
pouvons exercer la liberté nécessaire au mérite. Elle exige que nous puissions
faire le mal pour que nous ayons du mérite à faire le bien. Il faut donc que
Dieu nous mette dans des circonstances où nous pouvons réellement l’offenser ou
le servir selon notre choix libre aidé de sa grâce. Il nous faut donc des
occasions de pécher. C’est ce que voulait dire Jésus quand il déclare qu’il faut
que le scandale arrive, mais malheur à celui par qui il arrive! Dieu a donné
l’occasion aux anges de pécher; il l’a donnée à nos premiers parents; il faut
qu’il nous la donne à nous aussi. Eh bien! Voilà pourquoi tous les hommes dans
le clergé comme ailleurs sont exposés à pécher et de fait pèchent plus ou moins
selon leur détermination de se sanctifier et la grâce de Dieu.
Par conséquent, au lieu
de murmurer contre les fautes des prêtres, que chacun se surveille lui-même
pour ne pas tomber dans le mal. Il est aussi tenu d’éviter tout péché que
n’importe quel prêtre et que lui aura servi de critiquer la conduite des
prêtres s’il est lui-même en enfer? Or, plus le bon Dieu nous voit sévère pour
les autres, plus il nous abandonne à nos propres forces. Si nous blâmons les
prêtres de tomber, c’est donc que nous pensons que s’ils voulaient ne pas
tomber, ils ne tomberaient pas. Eh bien! Dieu va montrer à ces critiqueurs que
sans Dieu personne ne peut éviter le péché et il les laissera tomber dans le mal
à cause de leur manque de pitié pour les autres qui pèchent.
Tout chrétien doit avoir
de la pitié et de la miséricorde pour tous les pécheurs qu’ils soient laïques
ou prêtres. Il a là une chance de prendre les mêmes sentiments que Jésus a eus
pour nous tous et cela fait plaisir à J.-C. Mais, celui qui est dur pour les
malheureux pécheurs éprouvera aussi la justice sévère de Dieu: Il lui donnera
la même mesure qu’il donne aux pécheurs: la sévérité!
Que tous donc se défient
de leur «sainte» indignation contre les péchés des prêtres: c’est du paganisme
tout pur, c’est un manque de foi et de charité qui sera puni sévèrement de
Dieu. Ordinairement par les mêmes péchés qu’on a critiqués si sévèrement dans
les autres. Dieu exerce continuellement son infinie miséricorde où il trouve sa
plus grande gloire; eh bien! comment pourrons-nous l’imiter s’il n’y avait pas
de pécheurs autour de nous? Toute amertume dans ce plan disparaît si l’on songe
au remède souverain que Dieu a mis sur le chemin de tout pécheur: les mérites
de J.-C. où chacun peut puiser avec la grâce de Dieu qu’il n’a qu’à demander
pour l’avoir. Ou est l’injustice ou la sévérité de ce plan quand Dieu nous a
donné absolument tout ce dont nous avons besoin pour sortir du péché et éviter
l’enfer? Voilà comment il faut juger tout ce courant immonde d’iniquités qui
afflige l’Eglise et dans ses pasteurs et dans les fidèles. Toute colère, là,
vient du démon! Mais de Dieu viennent la pitié, la miséricorde et la compassion
avec le zèle de se sanctifier soi-même comme meilleur moyen de purifier en
partie notre bonne Mère l’Eglise que nous devons aimer comme J.-C. l’a aimée et
s’est sacrifié pour la purifier dans son sang. Voilà l’attitude de tout membre
de J.-C. devant les misères qui affligent l’Eglise.
Au lieu donc de
critiquer, ceux qui ont un peu de foi feront comme Jésus: s’offrant en
sacrifice d’une manière ou d’une autre pour expier tous ces péchés du monde;
ils se priveront des plaisirs, même licites comme Jésus a fait pour nous
racheter. Ils donneront de leurs aises, de leur argent, de leur temps pour
faire tout le bien qu’ils pourront par ces sacrifices en faveur du prochain.
Jeûnons pour ceux qui font bonne chère, prions pour ceux qui ne prient pas;
communions pour ceux qui ne communient pas ou trop peu; allons consoler Jésus
dans le Tabernacle où il continue de s’immoler mystiquement pour l’amour de
nous. Comme lui s’est sanctifié pour nous sauver, sanctifions-nous pour sauver
les pécheurs au lieu de déblatérer contre eux. Cessons donc pour toujours
toutes nos critiques contre les prêtres et contre les fidèles qui ne sont pas
aussi bons qu’ils devraient être. Sanctifions-nous…
et cessons de murmurer contre les autres! Dans les familles, on rencontre
de ces sanscoeur qui disputent contre leurs frères, qui n’ont pas soin de leur
mère malade et eux-mêmes ne font rien pour elle.
Saint Paul avait bien
compris la sagesse de Dieu qui permet les péchés. Il se glorifie dans ses
faiblesses et dans ses infirmités, afin que la vertu de Dieu soit plus
manifeste. Il va jusqu’à dire que Dieu a laissé tomber les Juifs dans
l’infidélité et qu’il est allé chercher les païens dans l’infidélité, afin
d’envelopper tout le monde dans sa miséricorde. Qu’on s’arrête à cette parole à
la fois terrible et consolante. Nous n’avons qu’à nous jeter tous dans la
miséricorde divine pour être pardonnés et ainsi glorifier la bonté infinie de
Dieu.
Sachons bien que la
gloire de Dieu est de faire tout le contraire de la sagesse humaine. Car s’il
suit notre sagesse, nous réclamons tout de suite la gloire de ce que nous
faisons. Mais, en faisant le contraire, nous sommes bien obligés d’admettre que
c’est Dieu seul qui a réussi telle chose. Saint Paul affirme souvent que Dieu a
choisi ce qui est insensé selon le monde, afin de confondre la sagesse humaine,
ce qui est faible afin de confondre la force des hommes, enfin ce qui n’est
rien pour que nous soyons obligés de tout attribuer le succès à Dieu seul.
Ainsi Dieu se sert des
pécheurs pour sanctifier les autres; des méchants pour améliorer les bons,
comme il s’est servi des bourreaux pour faire des martyrs. Ainsi il se sert de
tous les imparfaits et les méchants dans tous les rangs de la société
chrétienne pour faire gagner des mérites à leurs victimes.
Le rôle de ceux qui sont
témoins des péchés des autres est bien indiqué par N. S. dans ses apparitions
aux saints. Il leur demande des réparations, des sacrifices pour leur
conversion. Il se plaint de l’indifférence des âmes qui lui sont consacrées et
qui ne font pas assez de sacrifices pour apaiser le courroux de Dieu.
Dieu voulait augmenter
notre foi par les maladies morales des chrétiens. Car il faut plus de foi pour
voir Dieu dans un homme plus ou moins perverti que dans un saint. Il fallait
plus de foi pour voir le divin dans Jésus tout couvert de crachats et bafoué
par le peuple que dans sa transfiguration au Thabor. Eh bien! Il faut plus de
foi pour voir le divin dans l’Eglise quand elle est abîmée d’injures, de maux
de toutes sortes et même de péchés. Qu’on cesse donc de se scandaliser et qu’on
agisse selon la foi et le plan divin que nous connaissons mieux maintenant. Que
le Saint-Esprit nous éclaire encore plus!
L’ÉLÉMENT DIVIN NOUS
DONNE
LA VIE DIVINE. C’est
l’Eglise par la grâce de Dieu qui nous fait enfants de Dieu par le baptême en
nous donnant la grâce sanctifiante. Puis par les autres sacrements, elle
alimente et fortifie cette vie divine reçue au baptême. Si nous venons à la
perdre, elle la ressuscite en nous par le sacrement de pénitence. Elle la
nourrit par l’Eucharistie qui est le pain surnaturel pour nourrir notre vie
surnaturelle. Les autres sacrements contribuent grandement à développer cette
vie divine en nous, comme nous le savons bien déjà.
La prédication est un
aliment important pour soutenir et augmenter la vie divine en nous. Jésus dit
que l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la
bouche de Dieu par ses représentants. Car c’est par la foi que nous concevons
le divin en nous; or la foi nous vient par la prédication en général. Tous ces
moyens qui nous apportent la vie divine nous viennent de l’Eglise établie par
Jésus-Christ. •1393 Ce sont là les principaux moyens pour nous faire vivre la
vie divine. Mais, combien peu en profitent! Quelle insouciance pour ces canaux
de la grâce de Dieu! Combien peu vont communier souvent! ou vont à la messe sur
semaine… et même beaucoup la manquent le dimanche. Ce jour consacré à Dieu
devrait être employé totalement à se sanctifier. Qu’on assiste aux vêpres… et
que les curés en aient! Qu’on lise la Bible au moins le dimanche.
Puisque c’est par la foi
que l’on reçoit cette vie, plus on exerce sa foi dans tous les détails de la
vie et plus notre vie divine augmente en nous. Or, s’efforcer de voir le divin
à travers les personnes et les choses, surtout en proportion qu’elles sont
désagréables et vilaines est très méritoire devant Dieu et nous attire une plus
grande abondance de vie divine. Ainsi, il peut se faire que nous ayons plus de
mérite à endurer une personne malcommode pour l’amour de Dieu que de communier.
Jésus est dans la communion comme dans cette personne. Mais il me faut plus de
foi pour voir Dieu dans cette vilaine personne que dans une belle hostie
blanche qui ne me fait aucune bêtise. Or, on reçoit de la vie divine en
proportion de notre foi. Voilà pourquoi Dieu entoure tous ceux qu’il veut
sanctifier par des personnes désagréables et même méchantes et par des choses
pénibles à la nature. Il veut qu’ils puissent s’exercer constamment dans
l’esprit de foi qui est la condition pour que notre vie divine augmente en
nous. Remercions donc Dieu de ce qu’il a fait son monde pour nous donner cet
exercice surnaturel de sanctification. Cessons de disputer contre tout ce qui
nous fait souffrir. C’est Dieu qui l’a voulu pour notre plus grand bien:
soyons-en reconnaissants.
IL NOUS INSTRUIT. Si Dieu
nous donne sa vie par l’Eglise, il voit aussi à nous instruire dans sa divine
sagesse. Comme de bons parents ne se contentent pas de mettre au monde des
enfants, mais ils les instruisent pour qu’ils soient des hommes intelligents et
capables de faire beaucoup de bien au prochain.
Dieu nous instruit par
l’Eglise sur son plan divin pour nous sauver et sur les moyens pour exécuter ce
plan selon la volonté de Dieu. Les écrits inspirés que l’Eglise possède
contiennent tous les trésors de sagesse et de science de choses de Dieu qui
suffisent à nous faire aimer les choses divines et à prendre les moyens pour
les mériter.
Si Dieu soumet les hommes
aux attractions des sens et des passions pour les plaisirs de la terre, il leur
donne sa doctrine sur le renoncement à soi-même et sur le mépris des choses
créées avec sa grâce pour faire aiguiller sur les choses de Dieu toute cette
attraction qu’on ressent pour les créatures. Il montre l’avantage même pour ce
monde de sacrifier toutes ces tendances naturelles. Jésus nous promet la
victoire sur tout ce naturel par notre foi. Plus nous serons guidés par la
doctrine de Jésus et plus nous vaincrons la chair et les démons.
Ceux qui reçoivent
fréquemment les sacrements, qui vont à la messe souvent et qui y communient
très souvent; ceux qui en plus exercent leur esprit de foi pour tout juger
selon la lumière divine de la foi: tous ceux-là se préservent facilement des
pièges du monde et des démons, comme de toute la méchanceté des hommes qu’ils
rencontrent sur leur chemin.
Alors, ceux qui murmurent
contre le plan de Dieu ne le connaissent donc pas; ceux qui disputent contre
les misères et les péchés des hommes ignorent donc les moyens que Dieu leur a
donnés pour échapper à ces maux, ou ils ne veulent pas sen servir. Cessons donc
de nous lamenter sur les tristes conditions de vie que Dieu nous a faites sur
la terre… et prenons les moyens qu’il nous a donnés pour en sortir victorieux
pour notre mérite et pour la gloire de Dieu.
DONNE L’AMOUR DE DIEU
comme résultat des deux points précédents; si l’on vit de la vie du Père et que
nous agissons selon la sagesse divine du Verbe, nous allons recevoir vite
l’amour du Saint-Esprit. Car celui qui apprécie un présent ne tarde pas à aimer
le donateur. C’est à mesure que nous apprécions les biens surnaturels que Dieu
nous donne par son Eglise et dont nous avons donné les grandes lignes, qu’un
chrétien arrive à aimer Dieu de plus en plus.
On n’a qu’à lire la vie
des saints pour voir comment ils ont augmenté en amour de Dieu à mesure qu’ils
suivaient mieux les indications données par l’Eglise pour mieux se sanctifier.
Plus ils employaient les moyens mis à leur disposition et plus ils avançaient
en vertu et en amour de Dieu.
Donc si le monde étale
ses pièges dans tous les plaisirs qui sollicitent leur affection, et les démons
aidant, qui les conduisent à leur perte éternelle, Dieu aussi étale tous ses
moyens aussi faciles qu’efficaces pour nous protéger contre les embûches du
monde et des démons et pour nous faire devenir des amants de Dieu. Mais Dieu ne
nous force ni d’un côté ni d’un autre: il expose par l’Eglise les moyens qui
nous sauveront, pourvu évidemment que nous voulions nous en servir. Il ne force
personne, mais nous attire par sa grâce et par ses prêtres, ses saints et les
Saintes Ecritures qui suffisent amplement à nous sanctifier comme l’histoire de
l’Eglise le montre bien. Combien se sont sanctifiés au milieu de la plus grande
corruption. Dans les premiers siècles, on peut difficilement trouver une
société plus corrompue et pourtant il y a la un grand nombre de chrétiens
exemplaires et de martyrs de la foi.
Qu’on cesse donc de gémir
sur la méchanceté du monde et qu’on prenne les moyens de sanctification que
Dieu met à notre disposition par l’Eglise établie, par Jésus-Christ
précisément, pour nous sanctifier au milieu de toute la corruption du monde!
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