ONZIÈME
INSTRUCTION
LE
SAINT-ESPRIT.
«Quand cet Esprit de
vérité sera venu; il vous enseignera toute vérité; car il ne parlera pas de
lui-même mais il dira tout ce qu’il aura entendu et il vous annoncera les
choses à venir». Jo. 16-13.
Pour la plupart des
catholiques, le Saint-Esprit est le grand Inconnu. Ils ont une idée bien vague
de sa nature et de sa fonction au sein de l’Eglise. A quoi attribuer cette
insouciance envers la Troisième Personne de la Sainte Trinité? Toutes les
causes peuvent se résumer en celle-ci.
Comme le Saint-Esprit
procède du Père et du Fils dans la Trinité, il faut aussi qu’il procède de ces
deux Personnes en nous. C’est en proportion que nous vivons la vie de la grâce
sanctifiante, qui est la vie du Père et que nous vivons la mentalité de Jésus
dans nos facultés spirituelles, que le Saint-Esprit viendra en nous pour nous
sanctifier et nous donner l’amour de Dieu qui est sa fonction propre et
essentielle.
Or la plupart des
chrétiens ne vivent pas suffisamment la vie propre des deux premières personnes
divines. Ils estiment si peu la grâce sanctifiante qu’ils la perdent pour des
riens. Comme ils commettent le péché mortel facilement! Comme ils restent
longtemps dans cet état si triste! C’est donc qu’ils ne tiennent pas beaucoup à
la vie du Père dans leur âme. Tous savent que la communion en est la nourriture
par excellence et cependant comme ils communient rarement!
Où sont ceux qui ont la
mentalité de Jésus? Qui pensent comme lui, parlent comme lui et agissent comme
lui? Si peu l’étudient dans la Bible, si peu méditent sur les Evangiles et les
Epîtres, qu’ils les connaissent peu. Ils ne l’ont donc pas dans le cœur. On le
voit bien puisqu’ils n’en parlent à peu près jamais.
Ils sont tout aux choses
du monde et lui donnent le meilleur de leur cœur et de leur temps. Ils
s’affectionnent si bien aux bagatelles de la terre qu’ils n’ont plus de place
dans leur cœur pour Jésus. Ce qui le concerne ne les intéresse pas ou trop peu.
Or Notre Esprit Saint à
nous est celui qui procède de notre vie divine du Père et de notre vie de
J.-C.: il ne peut donc pas être plus fort ou plus vivant que les deux premières
personnes le sont en nous. Tout chrétien doit donc s’efforcer d’augmenter en
lui la vie divine et la mentalité de Jésus, afin d’augmenter son amour pour
Dieu ou l’activité du Saint-Esprit en son âme. Ça devrait être là le but de
toutes nos prières et de nos désirs. Demandez et vous recevrez.
N’attendons pas de sentir
de l’attrait pour lui; il dépasse la vie des sens et même la raison, c’est la
foi seule qui nous le révèle, alors il faut le vouloir selon la foi. Nous
savons qu’il est Dieu et que c’est lui seul qui va nous sanctifier: c’est assez
pour supplier Dieu constamment pour qu’il nous donne son Esprit Saint.
Voici le bon moyen
pratique pour augmenter la vie du Saint-Esprit en nous. Saint Paul dit que le
nouvel homme créé dans le Christ par l’opération du Saint-Esprit se renouvelle
à mesure que le vieil homme créé en Adam et donc l’homme naturel dépérit en
nous. Que chacun s’efforce donc de tuer en lui le «païen» en lui soustrayant ce
qui l’alimente: les plaisirs sensibles et naturels, donc en pratiquant la
mortification et le renoncement à soi-même. Il ne suffit pas d’éviter le péché,
il faut en plus détruire toute affection pour les choses créées. Le malheur est
que tant de prêtres philosophes se contentent de prêcher contre les péchés et
tolèrent et même encouragent les attaches aux plaisirs sensibles. Mais cet
amour pour les créatures empêche l’amour divin ou le Saint-Esprit de se donner
aux fidèles qui cultivent ces affections naturelles même pour les bonnes
choses.
Les trois personnes
divines sont nécessaires à notre salut. C’est le Père qui nous a créés, c’est
le Fils qui nous a rachetés, mais c’est le Saint-Esprit qui nous sanctifie. Ce
dernier est donc aussi important pour nous que les deux autres. Respectons cet
ordre et occupons-nous de chacune des personnes comme si elle était seule pour
nous sauver. Or, un grand nombre de chrétiens ne s’occupent pas assez du
Saint-Esprit. Faisons donc cette méditation pour augmenter notre dévotion
envers notre sanctificateur. Etudions d’abord… fonction du Saint-Esprit dans…
SA FONCTION DANS LA
TRINITÉ
La fonction essentielle
d’un être le suit dans toute son existence. Si donc nous découvrons la fonction
essentielle du Saint-Esprit au sein de la Trinité, nous saurons qu’il vient en
nous pour exercer la même fonction. Il nous faut bien expliquer un peu le
mystère de la Trinité pour nous faire une idée du Saint-Esprit. Dieu lui-même
nous a révélé assez de ce mystère pour nous ravir d’admiration et nous
enflammer de son amour.
Puisque Dieu nous a créés
pour participer à cette activité trinitaire, il a dû nous créer un peu à son
image. Commençons donc par examiner cette image de la Trinité en nous et de là
nous monterons plus facilement au mystère lui-même dans le ciel. Faisons cette
étude en priant le Saint-Esprit de nous éclairer de sa lumière divine.
Notre âme est un esprit
vivant et immortel, correspondant à la substance du Père. Cet esprit agit et
produit des pensées distinctes de lui, puisque ces pensées vont et viennent
tandis que l’esprit demeure On admire ses pensées et on les veut: c’est de
l’amour; Nous avons donc en notre âme une substance spirituelle, des pensées
intellectuelles et une volonté ou de l’amour: ces trois choses constituent
notre âme agissante. En Dieu nous retrouvons ces trois choses d’une façon
infiniment plus parfaite. Dieu est la vie essentielle, la sagesse infinie et
l’amour substantiel. En Dieu ce sont des Personnes formant un seul Dieu, parce
qu’elles ont la même essence divine et infinie, distinctes cependant l’une de
l’autre.
Le Saint-Esprit est comme
le trait d’union entre le Père et le Fils et on l’appelle: l’amour. Il est
aussi la sainteté de Dieu ou l’adhésion de la volonté divine pour toutes ses
perfections infinies. Cela correspond en nous à notre amour-propre. En Dieu, comme
tout est infini et essentiel, son amour-propre est parfaitement légitime et
infiniment parfait comme toutes ses autres perfections. Il est aussi le bonheur
divin, puisque le bonheur consiste dans l’amour. Les deux premières Personnes
trouvent leur amour réciproque dans le Saint-Esprit.
Voilà les grandes lignes
de la fonction du Saint-Esprit dans la Trinité. On peut en déduire des
conséquences très pratiques pour notre vie spirituelle, comme nous le verrons à
mesure que nous avancerons dans cette série.
C’est déjà assez pour
montrer que nous devons donner autant d’importance à la troisième personne de
la Trinité qu’aux deux autres. Nous avons tort de toujours nous arrêter
seulement aux deux premières Personnes; c’est arrêter juste aux portes de
l’amour divin! Et de la sainteté! Et du bonheur! Comme en nous, c’est
l’abondance de la vie et de la sagesse qui contribue à notre bonheur, ainsi
dans la Trinité c’est la vie du Père et la Sagesse du Fils qui constituent les
deux éléments qui contribuent à former le Saint-Esprit. Plus nous lui serons
dévoués et plus il nous introduira dans l’activité propre des deux premières
Personnes: la vie divine et la sagesse divine.
C’est pourquoi il est dit
des Apôtres, remplis du Saint-Esprit, qu’ils parlaient des grandeurs de Dieu:
c’est que le Saint-Esprit qui les pénètre parfaitement les leur révélait. Il en
sera de même pour nous; plus nous serons pleins de cet Esprit et plus nous
pénétrons dans les profondeurs du mystère de la divinité.
Si Jésus dit que nous
devons être une seule chose avec lui, afin d’être une seule chose avec son
Père, il est clair que nous devons faire une seule chose aussi avec le
Saint-Esprit. Or il passe son éternité à scruter les profondeurs des
perfections infinies de Dieu; il trouve là toutes ses complaisances. Eh bien!
Tout chrétien doit faire de même; il doit s’efforcer de scruter les perfections
divines que la révélation nous a manifestées. On les trouve dans les saintes
Ecritures que nous devrions lire assidûment et avec amour, afin d’y trouver la
vie éternelle.
Quel dommage que les
chrétiens recherchent tant la vie naturelle du corps et la science des hommes,
qu’ils soient si indifférents pour la vie éternelle et la sagesse infinie de
Dieu!
Nous savons maintenant ce
que nous trouverons dans la Sainte Trinité et surtout dans l’Esprit Saint:
l’amour, la sainteté et le bonheur. Ce devrait être assez pour nous encourager
à étudier le Saint-Esprit et à vivre sa vie d’amour divin. Toute son activité
est divine. Rien d’humain là. Eh bien! Plus nous nous dégagerons de notre
activité naturelle intentionnelle pour n’agir qu’avec des motifs purement
surnaturels et plus nous sentirons les effets de son amour divin en nous. Il ne
s’agit pas ici simplement de parler de lui, mais de le vivre exactement comme
il le fait dans la Sainte Trinité, tout occupé aux perfections divines. Faisons
de même!
DANS L’EGLISE.
Jésus nous indique
souvent le rôle du Saint-Esprit dans l’Eglise. «J’ai encore beaucoup de choses
à vous dire que vous ne pouvez porter maintenant; le Saint-Esprit y pourvoira
quand le moment sera venu». Jo. 14-26. «Il vous enseignera toute vérité». Jo.
16-13. «Il vous suggérera et vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit»
«…Il demeurera avec vous». Jo. 14-17 C’est donc lui qui fera comprendre le plan
et la doctrine de Jésus et les leur fera pratiquer. Il continuera donc l’œuvre
de J.C. d’une façon invisible mais bien réelle.
Les Actes des Apôtres
attribuent au Saint-Esprit tous les faits merveilleux et les conversions qui se
font par le ministère des Apôtres. «Ils se mirent à parler diverses langues
selon que le Saint-Esprit les inspirait». C’est lui qui choisit ceux qui
doivent prêcher et les endroits où ils doivent aller, comme dans le cas de Paul
et de Barnabé. «Pierre parlait encore quand le Saint-Esprit tomba sur tous ceux
qui écoutaient la parole de Dieu». Act. 10-40. Il envoie Paul et Barnabé à
Chypre; il leur défend de parler à Bythinie comme ils en avaient l’intention.
Act. 22-22. C’est lui qui fait établir les prêtres et des évêques où il en
faut. C’est donc le Saint-Esprit qui conduit l’Eglise naissante d’une façon
manifeste dans les paroles et les actes. C’est donc encore ce qu’il fait
puisqu’il doit la diriger jusqu’à la fin des temps.
La conclusion pratique
est que nous devons respecter l’action du Saint-Esprit dans le travail de
l’Eglise. A quoi bon trouver à redire contre le choix des prêtres et des
évêques; il prend la matière qu’il a sous la main pour ainsi dire, comme il a
pris les Apôtres avec leurs défauts naturels, tels qu’ils étaient.
Appliquons donc ici la
doctrine de Saint Paul lorsqu’il dit que Dieu a laissé tomber dans l’infidélité
les Juifs et il est allé chercher les païens dans l’infidélité pour que tous
éprouvent les effets de sa miséricorde divine. Eh bien! C’est encore pour la
même raison que le Saint-Esprit choisit des hommes souvent très imparfaits pour
ses ministres, afin que la vertu de sa grâce soit plus manifeste et donc sa
gloire plus grande. Il veut que tous s’améliorent constamment dans la vertu;
tant pis pour celui qui ne le fait pas! Ce n’est pas la faute du Saint-Esprit!
Ne nous arrêtons donc
plus aux éléments humains dans les prêtres ou les évêques. Mais surveillons
l’action du Saint-Esprit à travers leurs imperfections et avec leurs
imperfections. Faisons de même dans les événements civils, dans les guerres et
les bouleversements des gouvernements. Le Saint-Esprit saura tirer du bien pour
nos âmes si nous avons foi en lui.
Par exemple, lorsque Dieu
enleva le Canada à la France catholique pour le jeter dans les bras de
l’Angleterre protestante, les contemporains étaient navrés de ce qu’ils
considéraient comme un immense malheur pour la colonie catholique. Cependant
l’histoire montre que ce fut pour le plus grand bien des Canadiens. Quelques
années après éclatait la Révolution française qui paganisa la France et ses
colonies; nous aurions subi le même sort. Mais elle n’avait plus d’influence
sur nous. Et comme nous nous défions de l’Angleterre protestante nous sommes
restés unis à nos prêtres qui nous protégèrent contre le protestantisme de nos
conquérants. C’était donc pour le plus grand bien du Canada quand Dieu envoya
ce grand malheur à notre pays selon le jugement des Français du temps.
Nous pourrions appliquer
ici une parole de Saint Paul qui dit que tout ce qui est arrivé dans l’Ancien
Testament était une figure du nouveau et pour notre instruction. Or dans
l’histoire du peuple de Dieu, l’action divine est très évidente. Par exemple,
tous les faits qui ont contribué à la délivrance du peuple de l’esclavage des
Egyptiens pour le conduire en Terre Promise sont presqu’un miracle continuel.
Ce qui apparaît surtout dans les quarante années de leur marche dans le désert.
Tout était contraire au bon sens humain et tout très pénible à la nature
humaine. Aussi les Juifs n’ont pas cru en cette action divine et ils ont
murmuré comme de vrais païens contre Dieu. Qu’ont-ils gagné? A part deux
hommes, ils sont tous morts en route pour leur châtiment. S’ils s’étaient
soumis à Dieu, ils auraient été soutenus par lui-même d’une façon miraculeuse
et ils auraient été parfaitement heureux même dans ce désert.
Eh bien! Dieu tient
autant à sa gloire pour nous conduire à la vraie Terre Promise du ciel; il va
donc le faire par des moyens que réprouve le bon sens humain. Mais si nous
vivons de foi malgré toutes ces épreuves, elles ne nous nuiront en rien et nous
serons heureux même en ce monde.
Par exemple, on trouve
que son curé agit en païen et n’a pas de vertu, une raison de plus pour mieux
servir Dieu selon l’enseignement de la foi que nous devrions connaître. Dieu ne
nous demandera pas compte de la conduite de notre curé mais de la nôtre. C’est
justement pour que nous servions Dieu uniquement pour son amour que Dieu nous
donne des prêtres imparfaits. S’ils étaient tous des saints, on serait bon
chrétien pour l’amour de notre curé… et Dieu ne le veut pas! Si nous agissons
selon la foi, les fautes de nos prêtres ne pourront jamais nous nuire. Comme le
baptême ne dépend pas de la vertu de celui qui le confère, ainsi la pratique de
notre religion ne dépend pas de la vertu des prêtres. Dieu le fait exprès pour
nous laisser apparemment seuls quand nous voulons bien le servir, afin que nous
le fassions uniquement par amour pour lui et pas pour faire comme les autres.
Cessons donc de critiquer
contre nos supérieurs et contre les prêtres, autrement nous serons punis
sévèrement comme les Juifs autrefois quand ils ont murmuré contre Moïse et
Aaron. Nous le serons encore plus parce que nous avons plus d’instruction religieuse
que les Juifs en avaient et que nous devons avoir plus de foi. Tous ceux qui
murmurent montrent qu’ils vivent de raison naturelle et non de foi. Or Dieu
nous conduit selon sa lumière divine de la foi; jugeons donc selon la même
lumière. Rappelons-nous donc que Dieu aime à faire tout le contraire du bon
sens humain précisément pour nous obliger à reconnaître que c’est sa sagesse
seule qui mène le monde.
Est-ce que ce n’est pas
sagesse divine que de nous faire crucifier tous les jours pour expier comme
Jésus nos péchés et pour mériter le ciel? Est-ce que Jésus ne dit pas que nous
devons tous porter la croix tous les jours de notre vie? Eh bien! Quoi
d’étonnant qu’il nous vienne des croix des personnes avec lesquelles on vit,
soit supérieurs, soit égaux, soit inférieurs? Eh bien! Toutes ces contrariétés
nous sont envoyées par Dieu justement pour nous faire imiter Jésus dans le
portement de sa croix et dans sa passion. «Nous régnerons avec lui, pourvu que
nous souffrions avec lui».
Ce qui est dit qu’au
commencement du monde, «le Saint-Esprit se mouvait sur les eaux», peut se dire
aussi de nos jours. Le Saint-Esprit couvre toute l’Eglise de son action divine
et de son influence continuelle pour la protéger contre l’enfer et la conduire
au ciel. Il n’a de limites que dans la volonté humaine qui s’oppose souvent à
son action divine par ses péchés, ses mauvaises tendances et ses attaches aux
créatures.
De nos jours, le pire
obstacle à l’action du Saint-Esprit est certainement le philosophisme que nous
avons attaqué déjà bien souvent. Comme cette ivraie tient toute la religion
dans la tête seulement, le Saint-Esprit qui est amour n’agit pas là. Il veut
agir dans les cœurs; c’est donc là qu’il faut mettre notre religion si nous
voulons qu’il agisse avec amour en nous. Cet Esprit n’a rien à faire avec la
religion abstraite des «in se». C’est le cœur qu’il veut, mais les philosophes
tiennent les fidèles uniquement dans la tête avec leur religion abstraite.
Que Dieu nous accorde la
grâce de massacrer ce philosophisme diabolique qui infecte tout le clergé en
général! Que Dieu nous donne son Saint-Esprit et le monde sera recréé et la
face de la terre renouvelée! Cette religion squelette du philosophisme ne
nourrit pas les âmes, tandis que la religion du cœur et de l’amour de Dieu
ferait des merveilles pour améliorer le monde. Puisse Dieu débarrasser l’Eglise
de cette engeance infernale qui est d’autant plus dangereuse qu’elle n’est pas
dans ce que les prêtres disent, mais dans ce qu’ils ignorent et donc qu’ils ne
disent pas! Que toutes les bonnes âmes prient et se mortifient pour obtenir de
Dieu la grâce que les évêques arrivent à voir cette ivraie subtile et néfaste,
afin de lui faire une guerre à mort!
DANS L’ÂME.
Evidemment, tout ce que
nous venons de dire de la fonction du Saint-Esprit dans l’Eglise s’applique en
petit à toute âme chrétienne ou même païenne dans une certaine mesure.
Cependant, il est utile de descendre dans quelques détails de la fonction du
Saint-Esprit dans chaque homme en particulier.
Pour comprendre cette
fonction, il est bon de nous arrêter à notre fin dernière. Nous avons été créés
dans l’ordre naturel, mais Dieu nous destine à l’ordre surnaturel. De
nous-mêmes, nous ne pouvons rien faire pour nous transformer de simples humains
en êtres divins. C’est là le but de l’action du Saint-Esprit en nous: elle est
double: nous purifier du péché et nous paganiser parfaitement, puis ensuite
nous diviniser parfaitement aussi. En d’autres termes, comme il veut se
substituer à nos deux amours naturels pour que nous vivions d’amour surnaturel,
il dirige toutes ses grâces à produire ces deux effets en nous.
Il faut à tout prix qu’il
nous enlève nos attaches même aux bonnes créatures, car son amour divin ne peut
supporter de rival. Or nous avons tous des attaches. Voilà pourquoi il nous
faut faire la guerre à ces attaches de toutes les façons possibles. Car les
saints enseignent qu’une seule attache même met un mur infranchissable entre
Dieu et l’âme et que cette âme n’aura pas l’intelligence des choses de Dieu.
Trop de chrétiens pensent
qu’il leur faut seulement sortir de leurs péchés pour recevoir les grâces du
Saint-Esprit avec son union intime dans l’amour. Comme on vient de le dire:
tout amour étranger l’empêche de se donner. Jésus nous a bien dit que nous ne
pouvions pas aimer Dieu et le monde: que si on aime l’un, on déteste l’autre.
Par conséquent, pour avoir l’amour divin, il faut nous débarrasser de tout
amour pour les créatures.
Comme il n’y a pas de
bonheur pour des époux dont l’un entretient une affection étrangère, de même le
Saint-Esprit boude ceux qui ont des attaches pour quelque créature que ce soit.
Le moindre fil empêche un oiseau de voler tant qu’il ne brise pas cette
attache, de même la moindre attache empêche l’âme de s’envoler vers Dieu, dans
le monde de l’amour.
Voilà pourquoi le
Saint-Esprit agit si peu dans nos chrétiens et qu’ils n’ont pas de dévotion
pour l’amour divin: leur cœur est déjà pris par l’amour naturel des créatures.
Nos prêtres philosophes sont responsables de ce triste état de choses,
puisqu’ils permettent ces affections naturelles pour les bonnes choses créées.
Tout ce que nous venons
de dire n’est qu’une préparation négative pour recevoir le Saint-Esprit. Est-ce
qu’une épouse serait satisfaite si son mari se contentait de ne pas la tuer ni
de la blesser? Sûrement non! Elle s’attend à des actes positifs d’amour de
toutes sortes dans les petits détails de la vie journalière. Eh bien! Après
s’être purifié de ses péchés et de ses attaches, tout catholique doit
s’efforcer de faire plaisir constamment au Saint-Esprit dans tous les petits
détails de sa vie spirituelle: il doit penser comme Dieu, il doit parler comme
J.-C. et il doit aimer comme le Saint-Esprit. Donc il doit vivre habituellement
dans l’ordre surnaturel et tout faire uniquement pour des motifs absolument
surnaturels.
Il doit parler des choses
de Dieu à tout le monde autant que possible, comme on parle à tout le monde de
ceux qu’on aime. Qu’il agisse comme en véritable enfant de Dieu, s’efforçant de
faire tout ce qu’il sait, lui être agréable, comme de visiter les malades, les
pauvres et les secourir, visiter J.-C. au Tabernacle, le recevoir dans la
Sainte Communion: en un mot il doit être tout aux choses de Dieu.
Jamais on ne récompense
un homme parce qu’il ne tue pas ou ne blesse personne, mais pour des actes de
charité, pour des œuvres méritoires et pour son amour qu’il manifeste envers
les autres. Qu’on cesse donc de croire en règle en Dieu parce qu’on ne pèche
plus mortellement ni véniellement: il faut en plus des actions positives
d’amour de Dieu et du prochain. En proportion qu’on fait des actes agréables à
Dieu, on éprouvera les effets de la bonté divine en recevant les grâces et les
lumières abondantes du Saint-Esprit pour nous sanctifier. Dieu dit qu’il
donnera la même mesure que nous lui donnons.
Si nous savions ce que le
Saint-Esprit peut faire avec une âme qui s’abandonne parfaitement à son action,
nous ferions tout au monde pour lui être agréable en tout, après nous être
purifiés de nos péchés et de nos attaches, Jésus lui-même dit que nous ferions
même plus que lui avec la grâce.à Dieu.
Que de bien à faire dans
ce triste monde livré à la vie animale et au paganisme intellectuel avec tous
les maux qui affligent l’humanité sous le règne de Satan! Tout remède à ces
misères nous dépasse absolument, mais si nous nous unissons à la vie d’amour
divin du Saint-Esprit, nous pourrons renouveler la face de la terre et créer un
monde nouveau. Où sont les généreux et les anges pour se livrer à l’amour divin
comme instruments dociles dans ses mains pour accomplir ces merveilles? Quel
est le prix? Le sacrifice des plaisirs des échantillons pour jouir des joies
ineffables de l’amour divin dans la contemplation des perfections divines!
LA SOIF DU DIVIN
Comme l’essence du
Saint-Esprit est un soupir d’amour réciproque des deux premières personnes
divines, si nous voulons participer à son essence nous devons essayer de faire
souvent de ces soupirs d’amour vers Dieu. Au début surtout, le Saint-Esprit
attend que nous fassions notre petite part en montrant notre bonne volonté
d’avances davantage dans le divin. Il ne faut pas s’attendre à sentir de
l’attraction pour ces désirs vers l’amour divin. Ils doivent être formés
d’après la lumière de la foi. Par elle, nous savons que c’est le Saint-Esprit
seul qui nous sanctifie… et qu’il se donne en proportion que nous le désirons.
Avec cela, c’est assez pour que nous désirions ardemment recevoir ce divin
Esprit dans nos cœurs, afin qu’il nous divinise davantage par ses grâces. Notre
éternité va consister à nous abreuver aux sources infinies de la divinité dans
l’amour de Dieu. Commençons tout de suite pour continuer dans l’éternité.
Quand Jésus veut exciter
la soif de la grâce dans l’âme de la Samaritaine, il commence par lui faire
mépriser l’eau naturelle qu’elle est venue chercher. «Ceux qui boivent de cette
eau auront encore soif; mais ceux qui boiront de l’eau que je leur donnerai
n’auront plus jamais soif! Et la Samaritaine lui demande tout de suite de cette
eau merveilleuse… et il lui en donne!
Remarquons que la
quatrième béatitude: «Bienheureux ceux qui ont faim et soif de la justice»
vient après les trois premières qui demandent le détachement de tout.
Par conséquent pour
exciter la soif du divin en nous, il ne suffit pas de la désirer ni de la
demander dans la prière, il faut en plus diminuer notre amour pour les choses
créées et donc en sacrifier le plus possible. Alors le Saint-Esprit remplacera
cet amour naturel par son amour surnaturel de Dieu. Les prêtres devraient
toujours exiger des sacrifices en plus de la prière; autrement elle n’est guère
efficace. Que d’illusion à croire qu’on préfère Dieu aux choses créées quand on
se contente de le lui dire dans la prière! C’est l’amour naturel qu’il faut
tailler par des sacrifices; alors on montre vraiment que c’est l’amour divin
qu’on veut… et on l’aura dans la même mesure.
Si le cultivateur ne
faisait que prier pour une récolte et qu’il ne sème rien, il n’aurait rien!
Mais quand il sème justement le grain qu’il aime, son amour passe de sa semence
à sa récolte future. Il en sera de même pour nous. Notre amour pour les choses
créées passera à l’amour de Dieu à mesure que nous la sèmerons pour l’amour de
Dieu.
N’écoutons pas les
philosophes qui nous permettent et même nous encouragent à jouir des plaisirs
permis sous prétexte qu’ils ne sont pas péchés. Quand même cela est vrai, on ne
sème pas alors son amour naturel pour ces choses et l’on ne récoltera pas
d’amour surnaturel.
Excitons donc notre soif
pour les biens célestes en les contemplant souvent; à force de les avoir dans
l’esprit, ils descendront dans le cœur et de là passeront dans la vie. On les
voudra de plus en plus et le Saint-Esprit nous les donnera dans la même mesure.
«Cherchez et vous trouverez! Demandez et vous recevrez!». Prenons donc ces deux
moyens efficaces: désirons le divin et récoltons-le en semant notre amour pour
les plaisirs terrestres! Que Dieu nous exauce!
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