lundi 28 mai 2018

Père Onésime Lacouture - 3-12 - Le Saint-Esprit



ONZIÈME INSTRUCTION
LE SAINT-ESPRIT.

«Quand cet Esprit de vérité sera venu; il vous enseignera toute vérité; car il ne parlera pas de lui-même mais il dira tout ce qu’il aura entendu et il vous annoncera les choses à venir». Jo. 16-13.

Pour la plupart des catholiques, le Saint-Esprit est le grand Inconnu. Ils ont une idée bien vague de sa nature et de sa fonction au sein de l’Eglise. A quoi attribuer cette insouciance envers la Troisième Personne de la Sainte Trinité? Toutes les causes peuvent se résumer en celle-ci.

Comme le Saint-Esprit procède du Père et du Fils dans la Trinité, il faut aussi qu’il procède de ces deux Personnes en nous. C’est en proportion que nous vivons la vie de la grâce sanctifiante, qui est la vie du Père et que nous vivons la mentalité de Jésus dans nos facultés spirituelles, que le Saint-Esprit viendra en nous pour nous sanctifier et nous donner l’amour de Dieu qui est sa fonction propre et essentielle.

Or la plupart des chrétiens ne vivent pas suffisamment la vie propre des deux premières personnes divines. Ils estiment si peu la grâce sanctifiante qu’ils la perdent pour des riens. Comme ils commettent le péché mortel facilement! Comme ils restent longtemps dans cet état si triste! C’est donc qu’ils ne tiennent pas beaucoup à la vie du Père dans leur âme. Tous savent que la communion en est la nourriture par excellence et cependant comme ils communient rarement!

Où sont ceux qui ont la mentalité de Jésus? Qui pensent comme lui, parlent comme lui et agissent comme lui? Si peu l’étudient dans la Bible, si peu méditent sur les Evangiles et les Epîtres, qu’ils les connaissent peu. Ils ne l’ont donc pas dans le cœur. On le voit bien puisqu’ils n’en parlent à peu près jamais.

Ils sont tout aux choses du monde et lui donnent le meilleur de leur cœur et de leur temps. Ils s’affectionnent si bien aux bagatelles de la terre qu’ils n’ont plus de place dans leur cœur pour Jésus. Ce qui le concerne ne les intéresse pas ou trop peu.

Or Notre Esprit Saint à nous est celui qui procède de notre vie divine du Père et de notre vie de J.-C.: il ne peut donc pas être plus fort ou plus vivant que les deux premières personnes le sont en nous. Tout chrétien doit donc s’efforcer d’augmenter en lui la vie divine et la mentalité de Jésus, afin d’augmenter son amour pour Dieu ou l’activité du Saint-Esprit en son âme. Ça devrait être là le but de toutes nos prières et de nos désirs. Demandez et vous recevrez.

N’attendons pas de sentir de l’attrait pour lui; il dépasse la vie des sens et même la raison, c’est la foi seule qui nous le révèle, alors il faut le vouloir selon la foi. Nous savons qu’il est Dieu et que c’est lui seul qui va nous sanctifier: c’est assez pour supplier Dieu constamment pour qu’il nous donne son Esprit Saint.

Voici le bon moyen pratique pour augmenter la vie du Saint-Esprit en nous. Saint Paul dit que le nouvel homme créé dans le Christ par l’opération du Saint-Esprit se renouvelle à mesure que le vieil homme créé en Adam et donc l’homme naturel dépérit en nous. Que chacun s’efforce donc de tuer en lui le «païen» en lui soustrayant ce qui l’alimente: les plaisirs sensibles et naturels, donc en pratiquant la mortification et le renoncement à soi-même. Il ne suffit pas d’éviter le péché, il faut en plus détruire toute affection pour les choses créées. Le malheur est que tant de prêtres philosophes se contentent de prêcher contre les péchés et tolèrent et même encouragent les attaches aux plaisirs sensibles. Mais cet amour pour les créatures empêche l’amour divin ou le Saint-Esprit de se donner aux fidèles qui cultivent ces affections naturelles même pour les bonnes choses.

Les trois personnes divines sont nécessaires à notre salut. C’est le Père qui nous a créés, c’est le Fils qui nous a rachetés, mais c’est le Saint-Esprit qui nous sanctifie. Ce dernier est donc aussi important pour nous que les deux autres. Respectons cet ordre et occupons-nous de chacune des personnes comme si elle était seule pour nous sauver. Or, un grand nombre de chrétiens ne s’occupent pas assez du Saint-Esprit. Faisons donc cette méditation pour augmenter notre dévotion envers notre sanctificateur. Etudions d’abord… fonction du Saint-Esprit dans…

SA FONCTION DANS LA TRINITÉ

La fonction essentielle d’un être le suit dans toute son existence. Si donc nous découvrons la fonction essentielle du Saint-Esprit au sein de la Trinité, nous saurons qu’il vient en nous pour exercer la même fonction. Il nous faut bien expliquer un peu le mystère de la Trinité pour nous faire une idée du Saint-Esprit. Dieu lui-même nous a révélé assez de ce mystère pour nous ravir d’admiration et nous enflammer de son amour.

Puisque Dieu nous a créés pour participer à cette activité trinitaire, il a dû nous créer un peu à son image. Commençons donc par examiner cette image de la Trinité en nous et de là nous monterons plus facilement au mystère lui-même dans le ciel. Faisons cette étude en priant le Saint-Esprit de nous éclairer de sa lumière divine.

Notre âme est un esprit vivant et immortel, correspondant à la substance du Père. Cet esprit agit et produit des pensées distinctes de lui, puisque ces pensées vont et viennent tandis que l’esprit demeure On admire ses pensées et on les veut: c’est de l’amour; Nous avons donc en notre âme une substance spirituelle, des pensées intellectuelles et une volonté ou de l’amour: ces trois choses constituent notre âme agissante. En Dieu nous retrouvons ces trois choses d’une façon infiniment plus parfaite. Dieu est la vie essentielle, la sagesse infinie et l’amour substantiel. En Dieu ce sont des Personnes formant un seul Dieu, parce qu’elles ont la même essence divine et infinie, distinctes cependant l’une de l’autre.

Le Saint-Esprit est comme le trait d’union entre le Père et le Fils et on l’appelle: l’amour. Il est aussi la sainteté de Dieu ou l’adhésion de la volonté divine pour toutes ses perfections infinies. Cela correspond en nous à notre amour-propre. En Dieu, comme tout est infini et essentiel, son amour-propre est parfaitement légitime et infiniment parfait comme toutes ses autres perfections. Il est aussi le bonheur divin, puisque le bonheur consiste dans l’amour. Les deux premières Personnes trouvent leur amour réciproque dans le Saint-Esprit.

Voilà les grandes lignes de la fonction du Saint-Esprit dans la Trinité. On peut en déduire des conséquences très pratiques pour notre vie spirituelle, comme nous le verrons à mesure que nous avancerons dans cette série.

C’est déjà assez pour montrer que nous devons donner autant d’importance à la troisième personne de la Trinité qu’aux deux autres. Nous avons tort de toujours nous arrêter seulement aux deux premières Personnes; c’est arrêter juste aux portes de l’amour divin! Et de la sainteté! Et du bonheur! Comme en nous, c’est l’abondance de la vie et de la sagesse qui contribue à notre bonheur, ainsi dans la Trinité c’est la vie du Père et la Sagesse du Fils qui constituent les deux éléments qui contribuent à former le Saint-Esprit. Plus nous lui serons dévoués et plus il nous introduira dans l’activité propre des deux premières Personnes: la vie divine et la sagesse divine.

C’est pourquoi il est dit des Apôtres, remplis du Saint-Esprit, qu’ils parlaient des grandeurs de Dieu: c’est que le Saint-Esprit qui les pénètre parfaitement les leur révélait. Il en sera de même pour nous; plus nous serons pleins de cet Esprit et plus nous pénétrons dans les profondeurs du mystère de la divinité.

Si Jésus dit que nous devons être une seule chose avec lui, afin d’être une seule chose avec son Père, il est clair que nous devons faire une seule chose aussi avec le Saint-Esprit. Or il passe son éternité à scruter les profondeurs des perfections infinies de Dieu; il trouve là toutes ses complaisances. Eh bien! Tout chrétien doit faire de même; il doit s’efforcer de scruter les perfections divines que la révélation nous a manifestées. On les trouve dans les saintes Ecritures que nous devrions lire assidûment et avec amour, afin d’y trouver la vie éternelle.

Quel dommage que les chrétiens recherchent tant la vie naturelle du corps et la science des hommes, qu’ils soient si indifférents pour la vie éternelle et la sagesse infinie de Dieu!

Nous savons maintenant ce que nous trouverons dans la Sainte Trinité et surtout dans l’Esprit Saint: l’amour, la sainteté et le bonheur. Ce devrait être assez pour nous encourager à étudier le Saint-Esprit et à vivre sa vie d’amour divin. Toute son activité est divine. Rien d’humain là. Eh bien! Plus nous nous dégagerons de notre activité naturelle intentionnelle pour n’agir qu’avec des motifs purement surnaturels et plus nous sentirons les effets de son amour divin en nous. Il ne s’agit pas ici simplement de parler de lui, mais de le vivre exactement comme il le fait dans la Sainte Trinité, tout occupé aux perfections divines. Faisons de même!

DANS L’EGLISE.

Jésus nous indique souvent le rôle du Saint-Esprit dans l’Eglise. «J’ai encore beaucoup de choses à vous dire que vous ne pouvez porter maintenant; le Saint-Esprit y pourvoira quand le moment sera venu». Jo. 14-26. «Il vous enseignera toute vérité». Jo. 16-13. «Il vous suggérera et vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit» «…Il demeurera avec vous». Jo. 14-17 C’est donc lui qui fera comprendre le plan et la doctrine de Jésus et les leur fera pratiquer. Il continuera donc l’œuvre de J.C. d’une façon invisible mais bien réelle.

Les Actes des Apôtres attribuent au Saint-Esprit tous les faits merveilleux et les conversions qui se font par le ministère des Apôtres. «Ils se mirent à parler diverses langues selon que le Saint-Esprit les inspirait». C’est lui qui choisit ceux qui doivent prêcher et les endroits où ils doivent aller, comme dans le cas de Paul et de Barnabé. «Pierre parlait encore quand le Saint-Esprit tomba sur tous ceux qui écoutaient la parole de Dieu». Act. 10-40. Il envoie Paul et Barnabé à Chypre; il leur défend de parler à Bythinie comme ils en avaient l’intention. Act. 22-22. C’est lui qui fait établir les prêtres et des évêques où il en faut. C’est donc le Saint-Esprit qui conduit l’Eglise naissante d’une façon manifeste dans les paroles et les actes. C’est donc encore ce qu’il fait puisqu’il doit la diriger jusqu’à la fin des temps.

La conclusion pratique est que nous devons respecter l’action du Saint-Esprit dans le travail de l’Eglise. A quoi bon trouver à redire contre le choix des prêtres et des évêques; il prend la matière qu’il a sous la main pour ainsi dire, comme il a pris les Apôtres avec leurs défauts naturels, tels qu’ils étaient.

Appliquons donc ici la doctrine de Saint Paul lorsqu’il dit que Dieu a laissé tomber dans l’infidélité les Juifs et il est allé chercher les païens dans l’infidélité pour que tous éprouvent les effets de sa miséricorde divine. Eh bien! C’est encore pour la même raison que le Saint-Esprit choisit des hommes souvent très imparfaits pour ses ministres, afin que la vertu de sa grâce soit plus manifeste et donc sa gloire plus grande. Il veut que tous s’améliorent constamment dans la vertu; tant pis pour celui qui ne le fait pas! Ce n’est pas la faute du Saint-Esprit!

Ne nous arrêtons donc plus aux éléments humains dans les prêtres ou les évêques. Mais surveillons l’action du Saint-Esprit à travers leurs imperfections et avec leurs imperfections. Faisons de même dans les événements civils, dans les guerres et les bouleversements des gouvernements. Le Saint-Esprit saura tirer du bien pour nos âmes si nous avons foi en lui.

Par exemple, lorsque Dieu enleva le Canada à la France catholique pour le jeter dans les bras de l’Angleterre protestante, les contemporains étaient navrés de ce qu’ils considéraient comme un immense malheur pour la colonie catholique. Cependant l’histoire montre que ce fut pour le plus grand bien des Canadiens. Quelques années après éclatait la Révolution française qui paganisa la France et ses colonies; nous aurions subi le même sort. Mais elle n’avait plus d’influence sur nous. Et comme nous nous défions de l’Angleterre protestante nous sommes restés unis à nos prêtres qui nous protégèrent contre le protestantisme de nos conquérants. C’était donc pour le plus grand bien du Canada quand Dieu envoya ce grand malheur à notre pays selon le jugement des Français du temps.

Nous pourrions appliquer ici une parole de Saint Paul qui dit que tout ce qui est arrivé dans l’Ancien Testament était une figure du nouveau et pour notre instruction. Or dans l’histoire du peuple de Dieu, l’action divine est très évidente. Par exemple, tous les faits qui ont contribué à la délivrance du peuple de l’esclavage des Egyptiens pour le conduire en Terre Promise sont presqu’un miracle continuel. Ce qui apparaît surtout dans les quarante années de leur marche dans le désert. Tout était contraire au bon sens humain et tout très pénible à la nature humaine. Aussi les Juifs n’ont pas cru en cette action divine et ils ont murmuré comme de vrais païens contre Dieu. Qu’ont-ils gagné? A part deux hommes, ils sont tous morts en route pour leur châtiment. S’ils s’étaient soumis à Dieu, ils auraient été soutenus par lui-même d’une façon miraculeuse et ils auraient été parfaitement heureux même dans ce désert.

Eh bien! Dieu tient autant à sa gloire pour nous conduire à la vraie Terre Promise du ciel; il va donc le faire par des moyens que réprouve le bon sens humain. Mais si nous vivons de foi malgré toutes ces épreuves, elles ne nous nuiront en rien et nous serons heureux même en ce monde.

Par exemple, on trouve que son curé agit en païen et n’a pas de vertu, une raison de plus pour mieux servir Dieu selon l’enseignement de la foi que nous devrions connaître. Dieu ne nous demandera pas compte de la conduite de notre curé mais de la nôtre. C’est justement pour que nous servions Dieu uniquement pour son amour que Dieu nous donne des prêtres imparfaits. S’ils étaient tous des saints, on serait bon chrétien pour l’amour de notre curé… et Dieu ne le veut pas! Si nous agissons selon la foi, les fautes de nos prêtres ne pourront jamais nous nuire. Comme le baptême ne dépend pas de la vertu de celui qui le confère, ainsi la pratique de notre religion ne dépend pas de la vertu des prêtres. Dieu le fait exprès pour nous laisser apparemment seuls quand nous voulons bien le servir, afin que nous le fassions uniquement par amour pour lui et pas pour faire comme les autres.

Cessons donc de critiquer contre nos supérieurs et contre les prêtres, autrement nous serons punis sévèrement comme les Juifs autrefois quand ils ont murmuré contre Moïse et Aaron. Nous le serons encore plus parce que nous avons plus d’instruction religieuse que les Juifs en avaient et que nous devons avoir plus de foi. Tous ceux qui murmurent montrent qu’ils vivent de raison naturelle et non de foi. Or Dieu nous conduit selon sa lumière divine de la foi; jugeons donc selon la même lumière. Rappelons-nous donc que Dieu aime à faire tout le contraire du bon sens humain précisément pour nous obliger à reconnaître que c’est sa sagesse seule qui mène le monde.

Est-ce que ce n’est pas sagesse divine que de nous faire crucifier tous les jours pour expier comme Jésus nos péchés et pour mériter le ciel? Est-ce que Jésus ne dit pas que nous devons tous porter la croix tous les jours de notre vie? Eh bien! Quoi d’étonnant qu’il nous vienne des croix des personnes avec lesquelles on vit, soit supérieurs, soit égaux, soit inférieurs? Eh bien! Toutes ces contrariétés nous sont envoyées par Dieu justement pour nous faire imiter Jésus dans le portement de sa croix et dans sa passion. «Nous régnerons avec lui, pourvu que nous souffrions avec lui».

Ce qui est dit qu’au commencement du monde, «le Saint-Esprit se mouvait sur les eaux», peut se dire aussi de nos jours. Le Saint-Esprit couvre toute l’Eglise de son action divine et de son influence continuelle pour la protéger contre l’enfer et la conduire au ciel. Il n’a de limites que dans la volonté humaine qui s’oppose souvent à son action divine par ses péchés, ses mauvaises tendances et ses attaches aux créatures.

De nos jours, le pire obstacle à l’action du Saint-Esprit est certainement le philosophisme que nous avons attaqué déjà bien souvent. Comme cette ivraie tient toute la religion dans la tête seulement, le Saint-Esprit qui est amour n’agit pas là. Il veut agir dans les cœurs; c’est donc là qu’il faut mettre notre religion si nous voulons qu’il agisse avec amour en nous. Cet Esprit n’a rien à faire avec la religion abstraite des «in se». C’est le cœur qu’il veut, mais les philosophes tiennent les fidèles uniquement dans la tête avec leur religion abstraite.

Que Dieu nous accorde la grâce de massacrer ce philosophisme diabolique qui infecte tout le clergé en général! Que Dieu nous donne son Saint-Esprit et le monde sera recréé et la face de la terre renouvelée! Cette religion squelette du philosophisme ne nourrit pas les âmes, tandis que la religion du cœur et de l’amour de Dieu ferait des merveilles pour améliorer le monde. Puisse Dieu débarrasser l’Eglise de cette engeance infernale qui est d’autant plus dangereuse qu’elle n’est pas dans ce que les prêtres disent, mais dans ce qu’ils ignorent et donc qu’ils ne disent pas! Que toutes les bonnes âmes prient et se mortifient pour obtenir de Dieu la grâce que les évêques arrivent à voir cette ivraie subtile et néfaste, afin de lui faire une guerre à mort!

DANS L’ÂME.

Evidemment, tout ce que nous venons de dire de la fonction du Saint-Esprit dans l’Eglise s’applique en petit à toute âme chrétienne ou même païenne dans une certaine mesure. Cependant, il est utile de descendre dans quelques détails de la fonction du Saint-Esprit dans chaque homme en particulier.

Pour comprendre cette fonction, il est bon de nous arrêter à notre fin dernière. Nous avons été créés dans l’ordre naturel, mais Dieu nous destine à l’ordre surnaturel. De nous-mêmes, nous ne pouvons rien faire pour nous transformer de simples humains en êtres divins. C’est là le but de l’action du Saint-Esprit en nous: elle est double: nous purifier du péché et nous paganiser parfaitement, puis ensuite nous diviniser parfaitement aussi. En d’autres termes, comme il veut se substituer à nos deux amours naturels pour que nous vivions d’amour surnaturel, il dirige toutes ses grâces à produire ces deux effets en nous.

Il faut à tout prix qu’il nous enlève nos attaches même aux bonnes créatures, car son amour divin ne peut supporter de rival. Or nous avons tous des attaches. Voilà pourquoi il nous faut faire la guerre à ces attaches de toutes les façons possibles. Car les saints enseignent qu’une seule attache même met un mur infranchissable entre Dieu et l’âme et que cette âme n’aura pas l’intelligence des choses de Dieu.

Trop de chrétiens pensent qu’il leur faut seulement sortir de leurs péchés pour recevoir les grâces du Saint-Esprit avec son union intime dans l’amour. Comme on vient de le dire: tout amour étranger l’empêche de se donner. Jésus nous a bien dit que nous ne pouvions pas aimer Dieu et le monde: que si on aime l’un, on déteste l’autre. Par conséquent, pour avoir l’amour divin, il faut nous débarrasser de tout amour pour les créatures.

Comme il n’y a pas de bonheur pour des époux dont l’un entretient une affection étrangère, de même le Saint-Esprit boude ceux qui ont des attaches pour quelque créature que ce soit. Le moindre fil empêche un oiseau de voler tant qu’il ne brise pas cette attache, de même la moindre attache empêche l’âme de s’envoler vers Dieu, dans le monde de l’amour.

Voilà pourquoi le Saint-Esprit agit si peu dans nos chrétiens et qu’ils n’ont pas de dévotion pour l’amour divin: leur cœur est déjà pris par l’amour naturel des créatures. Nos prêtres philosophes sont responsables de ce triste état de choses, puisqu’ils permettent ces affections naturelles pour les bonnes choses créées.

Tout ce que nous venons de dire n’est qu’une préparation négative pour recevoir le Saint-Esprit. Est-ce qu’une épouse serait satisfaite si son mari se contentait de ne pas la tuer ni de la blesser? Sûrement non! Elle s’attend à des actes positifs d’amour de toutes sortes dans les petits détails de la vie journalière. Eh bien! Après s’être purifié de ses péchés et de ses attaches, tout catholique doit s’efforcer de faire plaisir constamment au Saint-Esprit dans tous les petits détails de sa vie spirituelle: il doit penser comme Dieu, il doit parler comme J.-C. et il doit aimer comme le Saint-Esprit. Donc il doit vivre habituellement dans l’ordre surnaturel et tout faire uniquement pour des motifs absolument surnaturels.

Il doit parler des choses de Dieu à tout le monde autant que possible, comme on parle à tout le monde de ceux qu’on aime. Qu’il agisse comme en véritable enfant de Dieu, s’efforçant de faire tout ce qu’il sait, lui être agréable, comme de visiter les malades, les pauvres et les secourir, visiter J.-C. au Tabernacle, le recevoir dans la Sainte Communion: en un mot il doit être tout aux choses de Dieu.

Jamais on ne récompense un homme parce qu’il ne tue pas ou ne blesse personne, mais pour des actes de charité, pour des œuvres méritoires et pour son amour qu’il manifeste envers les autres. Qu’on cesse donc de croire en règle en Dieu parce qu’on ne pèche plus mortellement ni véniellement: il faut en plus des actions positives d’amour de Dieu et du prochain. En proportion qu’on fait des actes agréables à Dieu, on éprouvera les effets de la bonté divine en recevant les grâces et les lumières abondantes du Saint-Esprit pour nous sanctifier. Dieu dit qu’il donnera la même mesure que nous lui donnons.

Si nous savions ce que le Saint-Esprit peut faire avec une âme qui s’abandonne parfaitement à son action, nous ferions tout au monde pour lui être agréable en tout, après nous être purifiés de nos péchés et de nos attaches, Jésus lui-même dit que nous ferions même plus que lui avec la grâce.à Dieu.

Que de bien à faire dans ce triste monde livré à la vie animale et au paganisme intellectuel avec tous les maux qui affligent l’humanité sous le règne de Satan! Tout remède à ces misères nous dépasse absolument, mais si nous nous unissons à la vie d’amour divin du Saint-Esprit, nous pourrons renouveler la face de la terre et créer un monde nouveau. Où sont les généreux et les anges pour se livrer à l’amour divin comme instruments dociles dans ses mains pour accomplir ces merveilles? Quel est le prix? Le sacrifice des plaisirs des échantillons pour jouir des joies ineffables de l’amour divin dans la contemplation des perfections divines!

LA SOIF DU DIVIN

Comme l’essence du Saint-Esprit est un soupir d’amour réciproque des deux premières personnes divines, si nous voulons participer à son essence nous devons essayer de faire souvent de ces soupirs d’amour vers Dieu. Au début surtout, le Saint-Esprit attend que nous fassions notre petite part en montrant notre bonne volonté d’avances davantage dans le divin. Il ne faut pas s’attendre à sentir de l’attraction pour ces désirs vers l’amour divin. Ils doivent être formés d’après la lumière de la foi. Par elle, nous savons que c’est le Saint-Esprit seul qui nous sanctifie… et qu’il se donne en proportion que nous le désirons. Avec cela, c’est assez pour que nous désirions ardemment recevoir ce divin Esprit dans nos cœurs, afin qu’il nous divinise davantage par ses grâces. Notre éternité va consister à nous abreuver aux sources infinies de la divinité dans l’amour de Dieu. Commençons tout de suite pour continuer dans l’éternité.

Quand Jésus veut exciter la soif de la grâce dans l’âme de la Samaritaine, il commence par lui faire mépriser l’eau naturelle qu’elle est venue chercher. «Ceux qui boivent de cette eau auront encore soif; mais ceux qui boiront de l’eau que je leur donnerai n’auront plus jamais soif! Et la Samaritaine lui demande tout de suite de cette eau merveilleuse… et il lui en donne!

Remarquons que la quatrième béatitude: «Bienheureux ceux qui ont faim et soif de la justice» vient après les trois premières qui demandent le détachement de tout.

Par conséquent pour exciter la soif du divin en nous, il ne suffit pas de la désirer ni de la demander dans la prière, il faut en plus diminuer notre amour pour les choses créées et donc en sacrifier le plus possible. Alors le Saint-Esprit remplacera cet amour naturel par son amour surnaturel de Dieu. Les prêtres devraient toujours exiger des sacrifices en plus de la prière; autrement elle n’est guère efficace. Que d’illusion à croire qu’on préfère Dieu aux choses créées quand on se contente de le lui dire dans la prière! C’est l’amour naturel qu’il faut tailler par des sacrifices; alors on montre vraiment que c’est l’amour divin qu’on veut… et on l’aura dans la même mesure.

Si le cultivateur ne faisait que prier pour une récolte et qu’il ne sème rien, il n’aurait rien! Mais quand il sème justement le grain qu’il aime, son amour passe de sa semence à sa récolte future. Il en sera de même pour nous. Notre amour pour les choses créées passera à l’amour de Dieu à mesure que nous la sèmerons pour l’amour de Dieu.

N’écoutons pas les philosophes qui nous permettent et même nous encouragent à jouir des plaisirs permis sous prétexte qu’ils ne sont pas péchés. Quand même cela est vrai, on ne sème pas alors son amour naturel pour ces choses et l’on ne récoltera pas d’amour surnaturel.

Excitons donc notre soif pour les biens célestes en les contemplant souvent; à force de les avoir dans l’esprit, ils descendront dans le cœur et de là passeront dans la vie. On les voudra de plus en plus et le Saint-Esprit nous les donnera dans la même mesure. «Cherchez et vous trouverez! Demandez et vous recevrez!». Prenons donc ces deux moyens efficaces: désirons le divin et récoltons-le en semant notre amour pour les plaisirs terrestres! Que Dieu nous exauce!

Aucun commentaire:

Publier un commentaire