lundi 28 mai 2018

Père Onésime Lacouture - 3-13 - Les dons du Saint-Esprit partie 1



DOUZIÈME INSTRUCTION
LES DONS DU SAINT-ESPRIT.
(PREMIÈRE PARTIE)
«Un rameau sortira du tronc de Jessé et de ses racines croîtra un rejeton. Sur lui reposera l’Esprit de Yahveh: esprit de sagesse et d’intelligence, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et de crainte de Yahveh; il mettra ses délices dans la crainte de Yahveh». Is. 11.
Toute cette activité du Saint-Esprit n’est pas facile à comprendre, et pourtant nous devons la connaître afin de nous mieux plier à ses exigences dans ses différentes manières d’agir dans l’âme.

L’ignorance, là, peut nuire considérablement à l’efficacité de cette action divine. C’est pourquoi il est bon de comparer l’action réciproque des vertus théologales avec celles des dons. Autrement, on est bien exposé à les confondre, surtout parce que leur champ d’opération est pratiquement le même et que tous deux sont des habitudes surnaturelles produites dans l’âme par le Saint-Esprit.
NATURE DES VERTUS THÉOLOGALES.

Ce sont des habitudes surnaturelles que Dieu infuse dans l’âme pour perfectionner nos facultés et leur permettre d’agir divinement. Elles se plient au mode humain d’agir de nos facultés. Nous devons agir selon la manière ordinaire de ces facultés, par exemple, réfléchir, discuter, chercher les meilleurs moyens pour nous conduire à notre fin selon les règles de la prudence humaine, éclairée par la grâce.

Par exemple, c’est comme un enfant qui marche parce que sa mère le tient par la main; c’est lui qui exerce son activité propre, mais aidé par l’activité de sa mère. Ainsi pour faire un acte de foi, c’est moi qui le fais avec un acte de mon intelligence et de ma volonté, mais par le moyen de la grâce que Dieu me donne Les vertus sont donc actives ou produites par notre activité personnelle sous l’influence de la grâce.

Les vertus sont donc produites par deux principes: l’un intérieur, qui est la raison et l’autre extérieur, qui est la grâce. Elles sont supérieures aux dons, mais elles reçoivent d’eux une perfection nouvelle. L’arbre est plus parfait que ses fruits, mais ces derniers lui apportent une perfection appréciable.

On voit tout de suite que l’activité des dons dépend en bonne mesure de la perfection des vertus théologales. Plus elles seront parfaites en nous et plus nous avons des chances de recevoir les dons du Saint-Esprit. Que chacun donc examine comment il pratique ses vertus théologales pour mieux se disposer à recevoir les dons.

Quand on veut récolter de bons fruits, on prend un grand soin des arbres; si donc on veut recevoir les dons, il faut cultiver soigneusement ses vertus théologales. Ceux qui n’ont pas le courage de se servir de leur propre activité pour développer leur vertu de foi, d’espérance et de charité avec la grâce de Dieu, ne doivent pas s’attendre à ce que le Saint-Esprit va encourager leur paresse en produisant lui-même toute l’activité des dons. Qu’ils fassent ce qui dépend un peu d’eux-mêmes, et ensuite ils pourront espérer que le Saint-Esprit viendra à leur secours pour les surnaturaliser davantage. Il nous faut vivre habituellement dans le monde surnaturel des trois vertus théologales pour être l’objet des dons. Ce n’est que dans ce monde que le Saint-Esprit agit. Allons donc nous présenter à lui dans le surnaturel des vertus pour recevoir ce complément merveilleux que sont les dons.
NATURE DES DONS.

Ils sont des habitudes surnaturelles qui donnent à nos facultés une telle souplesse qu’elles obéissent promptement aux inspirations de la grâce. Ils ne sont pas des motions de la grâce ni des actes passagers du Saint-Esprit, mais des qualités permanentes ou des dispositions qui rendent le chrétien docile aux inspirations de la grâce. Ils sont produits directement par le Saint-Esprit dans l’âme qui est plutôt passive, mais par eux elle reçoit une grande énergie pour agir divinement. Elle devient plus active pour faire l’œuvre de Dieu.

En parlant de l’action du Saint-Esprit, Jésus dit: «Le vent souffle où il veut et tu entends sa voix, mais tu ne sais ni d’où il vient ni où il va; ainsi en est-il de quiconque est né du Saint-Esprit». J. 3-8. L’Esprit agit donc d’une façon qui dépasse notre mode humain. Sans nous consulter, pour ainsi dire, il prend les devants et agit de lui-même, sans que nous ayons le temps de consulter la raison; ce sont des inspiration soudaines qui opèrent en nous sans aucune délibération, mais avec notre consentement. C’est comme un instinct divin qui nous indique comment agir promptement selon l’indication divine.

Par les dons, on voit que l’âme participe d’une façon merveilleuse à la vie intime du Saint-Esprit ou de l’Amour divin. C’est tout ce qu’il y a de plus parfait dans notre vie surnaturelle. C’est un mode qui nous rapproche beaucoup du mode d’agir dans le ciel. C’est l’amour divin qui illumine notre intelligence, fortifie notre volonté et enflamme notre amour pour Dieu et les choses de Dieu. Avec ces dons l’âme est capable de faire des actes héroïques et sublimes pour la gloire de Dieu et le salut des âmes.

C’est encore par les dons que l’âme est dans une disposition prochaine pour recevoir la contemplation infuse. C’est donc un moyen très parfait pour arriver à la plus haute sainteté.

Tous ceux qui sont en état de grâce ont les dons comme des facultés surnaturelles, mais tous ne les ont pas en exercice. Cela dépend de leur développement surnaturel surtout dans la charité. Plus celle-ci est parfaite et plus les dons s’exercent dans l’âme habituellement unie à Dieu. Les dons croissent avec les vertus théologales et ils sont connexes avec la charité et solidaires les uns des autres. C’est tout un organisme surnaturel qui se soutient ensemble comme l’organisme humain; si une partie est malade ou fait défaut, tout le reste s’en ressent.
MOYENS DE DÉVELOPPER LES DONS

Il ne suffit pas de vouloir les dons, il faut suivre la marche ordinaire que Dieu a fixée dans son plan pour nous diviniser totalement. Comme il ne suffit pas de vouloir être en santé pour l’être, mais il faut prendre les moyens que Dieu a mis à notre dispositions pour le devenir.

Nous savons que Dieu greffe le surnaturel sur l’organisme naturel de l’homme. Par exemple, la foi doit s’adapter à la façon de comprendre de l’intelligence. Alors plus l’intelligence est développée et plus la foi pourra agir dans l’homme. On peut donc s’attendre que les dons trouveront un sol d’autant plus propre à leur développement qu’il aura été mieux cultivé. Est-ce qu’un cultivateur récolterait quelque chose s’il se contentait de vouloir une récolte et de prier pour l’avoir? Sûrement non! Eh bien! Il en est de même dans la vie spirituelle dans un composé complexe comme l’homme. Plus son naturel sera parfait et plus le surnaturel a de chances de croître en lui.
VERTUS MORALES.
Pour être souple à l’action du Saint-Esprit dans les dons, il faut que l’homme ait dompté ses passions et se soit débarrassé de ses vices. Car ces tendances animales sont aveugles et ne suivent pas du tout les inspirations divines que Dieu peut donner à l’âme. Elles poussent l’homme justement dans le sens opposé à l’amour de Dieu. Il faut pratiquer une saine ascèse, il faut se mortifier, pratiquer la chasteté, l’humilité et l’obéissance, avoir appris à se renoncer pour n’avoir plus d’attaches aux choses créées, afin d’être libre de suivre les directives du Saint-Esprit.

Trop de directeurs spirituels lancent les âmes dans les sommets de la perfection sans prendre les moyens établis par Dieu pour y parvenir. Aussi après bien des années, on les retrouve encore bien impatients, irritables, susceptibles comme des païens! Et quel orgueil encore! Ils ne sont pas capables de prendre le moindre reproche sans faire des colères insensées. Ils ont brûlé les étapes, sans aucun profit spirituel.

On fait la même erreur au sujet de la communion fréquente.

Combien pensent qu’elle dispense de la pratique des vertus morales! Que d’élèves dans les collèges et les couvents communient tous les jours pendant des années… et comme ils sont imparfaits encore! Comme ils ont acquis peu l’amour de Dieu comme on peut le voir pendant les vacances où très peu vont encore communier ou après leurs études finies. Il leur a manqué la pratique de l’ascèse ou des vertus.

On peut ramener ces vertus morales ou pratiques aux quatre vertus cardinales: prudence, justice, force et tempérance. Voilà les moyens établis par Dieu pour préparer l’âme à recevoir la vie surnaturelle correspondant à ces vertus. Ainsi comment se donner aux choses de Dieu si on n’est pas tempérant dans les plaisirs de la terre? Comment un gourmet peut-il désirer la communion fréquente?… Un passionné pour les jeux aimera la prière et la solitude qui préparent à l’union avec Dieu? Tous devraient donc commencer par se purifier de toutes ces passions, non seulement charnelles, mais intellectuelles, comme l’orgueil, l’amour-propre, l’ambition, le respect humain, etc. Perfectionnons donc notre nature humaine le plus possible pour la rendre apte à mieux subir l’influence du surnaturel et même son action directe.

Ces quatre vertus mettent de l’ordre dans tout notre système rationnel: la prudence perfectionne l’intelligence, la justice règle la volonté, la force domine l’appétit irascible et la tempérance l’appétit concupiscible. Mais comme ces deux derniers appétits ne sont susceptibles de moralité que par la volonté, on dit que ces vertus résident dans la volonté. Il faut donc que tout cela soit parfaitement réglé en nous avant de compter sur l’exercice des dons. Or comme cette formation fait lamentablement défaut dans le clergé! Où est le prêtre qui enseigne la pratique de ces vertus dans le détail? Où sont les fidèles qui cultivent ces vertus? Que dirait-on d’un cultivateur qui ne travaille pas sa terre du tout et qui y fait ses semailles? On ne rencontre pas de pareil nigaud dans le peuple! Mais dans le clergé, c’est par milliers ceux qui ignorent comment préparer une âme à recevoir les familiarités de Dieu. Pourtant, Jésus nous donne une très belle parabole à ce sujet dans celle du semeur. Il dit carrément que la semence produit en proportion qu’on a travaillé la terre, qu’on l’a débarrassée des épines, des mauvaises herbes et qu’on sème dans la bonne terre profonde et non sur le bord des chemins ou sur la pierre. La parole de Dieu se sème dans les cœurs exactement comme le grain dans la terre. Il faut donc arracher du cœur tout ce qui est contraire à ce divin. Or, c’est par les vertus morales qu’on nettoie son cœur; commençons par là!
TUER NOS DEUX AMOURS NATURELS.
Dieu est amour et pour aller participer à sa vie divine, il faut avoir son amour. Or son plan est qu’il nous faut semer les biens de la terre pour récolter ceux du paradis. Pour nous permettre de récolter son amour divin, Dieu nous a donné deux amours naturels: l’amour de soi et celui des créatures, qui sont bons en soi évidemment, mais que nous devons semer quand même et précisément pour cela.

La gloire de Dieu exige que nous préférions son amour à quelque chose de bon.

D’abord il faut renoncer à l’amour des créatures même bonnes en soi; je ne dis pas aux créatures, mais à l’affection des créatures. Les créatures ne sont pas rivales de Dieu, mais mon amour pour elles est rival de mon amour pour Dieu.

Nous n’avons qu’un cœur pour aimer Dieu et les choses créées: ce que je donne aux créatures est donc autant d’enlevé à mon amour pour Dieu. Par son premier commandement, Dieu accapare absolument toute notre capacité d’aimer pour lui seul; il n’en reste donc plus pour le créé.

Or les dons sont tout ce qu’il y a de plus parfait dans l’amour divin pour nous. Comment le Saint-Esprit nous les donnerait-il si nous aimons ses rivales à notre affection? Aussi tous les Saints sont d’accord pour nous dire que toute affection ou toute attache pour la moindre créature empêche l’amour de Dieu, empêche l’intelligence des choses de Dieu et met un mur infranchissable entre l’âme et Dieu.

Or les prêtres en général permettent toutes les attaches aux plaisirs créés bons en soi. Mais quand même ils sont bons, l’amour qu’on leur donne est d’autant moins pour l’amour de Dieu. Où sont les chrétiens qui luttent contre ces attaches? Où sont les prêtres qui leur enseignent à faire la guerre à tout amour naturel même bon en soi? Ils sont très rares…

Alors comment le Saint-Esprit donnerait-il ses touches merveilleuses de son amour intime à des hommes qui conservent des amours étrangers au sien? Non, jamais ceux qui ont des attaches n’éprouveront les effets des dons du Saint-Esprit! Or la masse des prêtres comme des fidèles ont des attaches de toutes sortes, comme le tabac, les jeux, les cinémas, la télévision, les courses, la bourse, le luxe, les chiens, les chats même! Ces gens ne recevront pas l’activité des dons. Au contraire ils ont encore une foule de défauts et de mauvaises tendances qu’ils auraient dû corriger par la pratique des vertus morales et le renoncement aux affections des créatures.

L’amour de soi est encore un bien plus grand obstacle aux dons que l’amour des créatures. Encore là, nos philosophes n’enseignent pas aux fidèles de le combattre, pas plus qu’ils ne le font eux-mêmes parce qu’il est bon en soi. Ces gens se donnent à eux-mêmes tout ce qu’ils devraient donner à Dieu; ils travaillent pour leur propre gloire; ils recherchent leurs satisfactions en tout, étant pleins d’eux-mêmes. C’est donc impossible que l’amour divin se donne à eux dans ces conditions.

C’est par le Saint-Esprit que nous suivons J.-C. Or Jésus dit: «Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il se renonce lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive!». Il dit de même pour l’amour du monde: «Si quelqu’un aime le monde, la charité du Père n’est pas en lui».

Donc tout chrétien doit combattre absolument ces deux amours naturels pour se disposer à recevoir les dons du Saint-Esprit. Ce n’est pas une question de fuir le péché, mais de cesser d’aimer une créature quelconque pour elle-même. Qu’on ne dise donc pas: fumer une cigarette n’est pas mal en soi. Cela ne fait aucune différence: du moment qu’on la fume par affection. Elle empêche l’amour divin de se donner dans la même proportion.

De même ceux qui écoutent avec amour la radio ou la télévision le font aux dépens de leur amour de Dieu et donc n’auront pas l’exercice des dons. Ne donnons donc aucun amour aux créatures; gardons-le tout pour Dieu comme le veut le premier commandement. «N’aimez pas le monde, ni ce qui est dans le monde; si quelqu’un aime le monde, la charité du Père n’est pas en lui». Or les dons vont avec la charité du Père…
RECUEILLEMENT INTÉRIEUR.
Il est absolument nécessaire aussi pour l’exercice des dons. Il faut que l’âme ait l’habitude de s’entretenir avec Dieu dans le silence intérieur et dans le calme de l’âme. Car si le cœur est pris avec l’affection des créatures, le Saint-Esprit ne se donnera pas à l’âme d’une façon intime. L’amour de Dieu est exclusif et il aime que nous le sachions, que nous nous éloignions de ses rivales, les créatures. Il nous le fait dire par son prophète Osée: «Je te conduirai dans la solitude et là je te parlerai au cœur». L’amour aime à être seul.

Ceux donc qui courent les places publiques, les foules et les bruits du monde n’ont aucune chance d’entendre la voix du Saint-Esprit dans leur cœur. Tous les Saints ont affectionné la solitude et le calme justement pour être seuls avec Dieu et alors ils entendaient les inspirations de Dieu et ils recevaient l’exercice des dons du Saint-Esprit.

Que chacun se fasse une solitude dans le cœur même au milieu du bruit des villes ou du travail. Il suffit de penser que Dieu nous est toujours présent surtout lorsque nous sommes en état de grâce. Est-ce qu’on ne peut pas bien converser avec un ami intime même au milieu des foules, dans les trains, les places publiques et à l’ouvrage? Quand on aimera le bon Dieu, on fera de même pour lui. On pourra converser avec lui au fond du cœur en tout temps et en tout lieu. Cette intimité avec le bon Dieu est une excellente préparation à l’exercice des dons. C’est de l’amour qui appelle l’amour.

Le prophète Ezéchiel se promenait dans la solitude sur les bords du fleuve Chobar quand le Saint-Esprit est descendu sur lui pour en faire son prophète et pour lui révéler les secrets de la Providence divine au sujet du peuple d’Israël. De même Daniel s’abreuvait de divin dans la solitude des bords du Tigre quand le Saint-Esprit lui donna sa fameuse vision de la venue du Messie.

Ce que Dieu a fait en grand pour ces grands prophètes, il le fera en petit pour tous ceux qui fuient le brouhaha du monde pour s’unir à Dieu et converser avec lui dans les déserts loin des hommes. C’est là que tout à coup il nous vient une lumière spéciale sur un point de la religion qui illumine toute la vie. Une vérité qu’on avait entendue souvent sans en être frappé se présente avec une clarté merveilleuse avec toutes ses conséquences pour la vie pratique. C’est le Saint-Esprit qui a agi par ses dons. Combien de Saints se sont donnés à Dieu par une de ces lumières soudaines du Saint-Esprit!

Ce sont les dons qui font voir le point de vue surnaturel dans le plan divin et dans la religion comme dans notre vie. Que peut-on désirer de plus sur la terre que de voir clair dans tout ce que Dieu a fait pour nous avoir avec lui? Ça vaut bien la peine de tout faire pour nous disposer à recevoir ces dons du Saint-Esprit, qui nous transportent au sein de la Trinité dans la foi, il est vrai, mais encore bien réellement.

On voit comment toute cette préparation revient à détruire nos deux amours naturels qui sont la vie de notre moi païen. Quand ce n’est plus moi qui vis, mais J.-C. qui vit en moi, alors dans la même proportion, c’est le Saint-Esprit qui se charge pour ainsi dire de toute notre activité libre pour l’orienter vers lui. C’est là qu’il aime à agir directement par ses effusions des dons. Il nous fait commencer notre vie au sein de la Trinité avec un mode divin d’agir à la place du mode humain dans les régions inférieures de la vie spirituelle.

Nous ne voulons pas dire que les dons nous font faire des actes miraculeux ou extraordinaires comme des extases ou des prophéties. Nous voulons parler des actes es plus ordinaires de la vie, mais faits dans la foi pure et avec des motifs absolument surnaturels. Les dons du Saint-Esprit agissent là comme dans les états extraordinaires. Ainsi la Sainte Vierge faisait des choses bien ordinaires mais avec un amour et une intention extraordinairement divine. Tout le divin se trouve non pas dans l’acte lui-même, mais dans le mode ou l’intention et dans le degré de grâce sanctifiante. Plus un acte a de divin en lui et plus il est méritoire devant Dieu.

On comprend combien importante est la mort à soi pour laisser le champ libre au Saint-Esprit! Plus je m’efface et plus il prend ma place pour faire par lui-même ce que je faisais moi-même. Cependant je garde assez de liberté pour acquiescer à son action et ainsi avoir du mérite devant Dieu.

Saint Jean de la Croix dit que l’âme doit se tenir dans un silence recueilli et une solitude absolue pour que le Saint-Esprit puisse réaliser ses désirs sur elle. Il la porte comme une mère qui prend son enfant dans ses bras et il se charge lui-même de sa direction intime. Il règne en elle par l’abondance et la tranquillité de la paix qu’il y répand.

Que tous ceux donc qui veulent vivre des dons se retirent des plaisirs du monde et de tout ce qui peut capter leur attention en dehors des choses de Dieu. Ils doivent faire le vide au fond de l’âme pour que le Saint-Esprit ne trouve aucun rival à son amour. L’amour veut tout ou rien! Car c’est une fin. A plus forte raison l’amour infini!
LA PRIÈRE est nécessaire ici encore plus que jamais pour montrer notre amour pour les dons. Comme il s’agit de faveurs immenses pour nous sanctifier, Dieu fait dépendre ses dons de la prière. Il faut les demander constamment et humblement. Demandons-les en union avec J.-C. qui nous a promis de nous envoyer son Saint-Esprit et en invoquant celle qui est le temple du Saint-Esprit et qui a prié avec les Apôtres pour recevoir le Paraclet à la Pentecôte.

Apprenons par cœur les hymnes et les prières de la liturgie concernant le Saint-Esprit et récitons-les souvent: le Veni, Creator Spiritus, le Veni, Sancte Spiritus, etc.

Il ne faut pas oublier aussi de faire les sacrifices que la Providence divine nous demande au jour le jour. Si personne ne peut montrer plus d’amour pour ses amis qu’en mourant pour eux, nous montrons un grand amour pour J.-C. en mourant un peu dans tous les sacrifices qu’il nous demande. Participer à sa croix, c’est participer à son amour et cela d’une façon bien concrète et pratique.

C’est le complément de la prière. Puisqu’on demande les biens célestes, il est bon en même temps de montrer qu’on méprise les biens terrestres en les sacrifiant pour l’amour de Dieu. Ces deux bonnes choses sont une préparation à la réception des dons si l’on remplit les autres conditions aussi que nous avons déjà indiquées plus haut.

D’après Saint Thomas, les dons sont nécessaires au salut. 1-11, q. 68, ad 2. Car la Sagesse dit, 7-26: «Dieu n’aime que celui qui habite avec la sagesse». Et dans l’Ecclésiastique, 1-28: «Celui qui n’a pas la crainte de Dieu ne pourra devenir juste». Or la sagesse est le plus élevé des dons et la crainte est la moins élevée. Donc tous sont nécessaires au salut.

Léon XIII, Encyc. sur le Saint-Esprit, écrit: «Le juste qui vit de la vie de la grâce et qui agit par les vertus comme par des facultés a absolument besoin des sept dons du Saint-Esprit».

Les prêtres devraient le savoir et donc les expliquer souvent aux fidèles, afin qu’ils se disposent mieux à les recevoir et qu’ils prient plus pour cette faveur.

Tous ces dons sont connexes avec la charité et en dépendent. Ils se développent et se manifestent selon le degré de charité qu’on a. Ils sont aussi solidaires les uns des autres. Pour augmenter en l’un, il faut augmenter en tous. Cependant il arrive que chaque chrétien brille surtout dans quelques-uns plus que dans les autres, selon son tempérament et la grâce de Dieu.
LEUR DIVISION

Leur division en sept leur vient de la nature des facultés qu’ils perfectionnent. Comme la lumière blanche en passant à travers un prisme se divise en différentes couleurs et nuances, ainsi l’action simple du Saint-Esprit passant par nos facultés se divise en sept dons différents. Les trois moins parfaits: la crainte, la piété et la force perfectionnent la volonté et les quatre autres, l’intelligence.

Supposons qu’on amène à une belle pièce de théâtre un homme presque aveugle, sourd et peu intelligent; que va-t-il prendre de cette pièce? A peu près rien. Ces choses ne l’intéresseront pas. Eh bien! Il en est un peu ainsi dans la vie spirituelle: ceux qui n’ont pas les dons comprennent peu et goûtent encore moins les choses de Dieu; ils restent bien indifférents à leur égard.

Par l’insouciance à peu près générale des fidèles pour les choses spirituelles, on peut en conclure que très peu remplissent les conditions exigées par le Saint-Esprit pour recevoir le dons. C’est guère mieux chez les prêtres et les religieux. Quel dommage que d’avoir fait tant de sacrifices pour être catholique et arrêter justement au moment de recevoir les plus grandes faveurs de Dieu dans ces dons du Saint-Esprit! C’est surtout par eux que nous vivons la vraie vie de Dieu comme dans le ciel, où Dieu produira en nous toute son activité divine et avec nous. Il se réserve toutes nos initiatives et nous conduit comme une mère conduit son enfant par la main… C’est là qu’on devient parfait comme le Père céleste en agissant comme lui, en lui et par lui. Le travail de la perfection consiste à se défaire du mode humain dans les vertus pour prendre le mode divin qui se réalise surtout par les dons. Car même dans la foi, on est exposé à voir les choses à la façon des hommes et donc très imparfaitement. Par exemple, la foi me dit que J.-C. est présent au Tabernacle; je le crois, mais que de nuances dans cette croyance parmi les chrétiens! Quelle indifférence chez la plupart pour ce Jésus! Mais à mesure qu’ils se disposent pour recevoir les dons, ils voient des merveilles dans ce sacrement qu’ils ne voyaient pas avant. De même au sujet de l’amour du prochain, il faut les dons pour voir J.-C. dans son prochain d’une façon pratique et méritoire pour le ciel.

Enfin, en proportion qu’on veut commencer sur terre la vie du ciel en société des trois Personnes de la Trinité, on doit tout faire pour acquérir les dons du Saint-Esprit. Ce sont eux qui donnent le couronnement à notre vie spirituelle dans la grâce sanctifiante. Ce sont eux qui l’illuminent des clartés divines comme prélude de notre vie au ciel.

«Bienheureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils verront Dieu»! Demandons les dons et recherchons-les de toutes nos forces pour notre plus grand bonheur et la plus grande gloire de Dieu! Que Marie Médiatrice de toute grâce nous obtienne ces dons divins!

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