vendredi 29 mai 2015

Père Onésime Lacouture - 1-36 - La prière

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TRENTE-QUATRIÈME INSTRUCTION LA PRIÈRE.

«Demandez et l’on vous donnera; cherchez et vous trouverez; frappez et l’on vous ouvrira.» Luc.  11-9.

Plan : Sa nature Son fondement: les quatre principes fondamentaux.  Sa nécessité prêchée par N.S.  Ses conditions: le temple de la prière.

SA NATURE On a beau avoir compris le plan divin pour notre sanctification et être parfaitement convaincu des vérités qu’il contient et bien décidé de les vivre, on ne peut absolument rien sans la prière.  «Sans moi, vous ne pouvez rien.» s’applique ici encore plus que partout ailleurs.  L’exécution de ce plan est une grâce bien précieuse qui ne peut venir que de Dieu.  Or plus ses grâces sont importantes et plus Dieu exige que nous les lui demandions.  Si la retraite finit, c’est la prière qui doit se continuer plus que jamais.  Elle vaut la peine que nous lui consacrions une méditation spéciale.
La prière est une élévation de l’âme vers Dieu pour l’adorer, le louer et lui demander des grâces.  Il ne faut pas en faire simplement une demande passagère comme lorsqu’un enfant demande de l’argent à son père.  C’est plutôt une inclination constante vers Dieu, venant d’une conviction profonde de notre extrême indigence en fait de surnaturel.  Imaginons un affamé toujours en face d’un banquet d’un riche de l’autre côté de la rue.  Comme il désire y prendre part!  Même quand il ne dit rien son coeur crie vers ce banquet, son estomac vide le pousse à la porte de ce riche pour avoir de quoi manger.  Ce devrait être quelque chose de ce genre que notre prière vers le banquet éternel de tous les biens que nous n’avons pas du tout sans Dieu.  Or une des conditions essentielles pour être ainsi tournés vers les biens célestes, est de nous vider le coeur de l’amour des biens créés.  Quand un homme a bien mangé, il n’a pas faim, même pour des mets plus riches.  Si un chrétien trouve son bonheur dans les plaisirs créés il est bien certain qu’il n’a pas faim pour les joies du paradis, même s’il pense qu’elles sont bien meilleures.  Il n’éprouvera cette espèce de faim pour les plaisirs du ciel qu’en proportion qu’il se vide le coeur de l’affection des choses de la terre.  Donc, il développera l’esprit de prière à mesure qu’il sacrifie son affection pour ceux du monde.

Les Saints ont donc raison de toujours accorder la mortification à la prière.  De nos jours, les prêtres parlent toujours de la prière toute seule; ils font des prières, ils demandent aux gens des prières, mais quand est-ce qu’un prêtre insiste autant sur la mortification que sur les demandes?  On voit des Évêques demander des prières pour certaines faveurs; ils devraient demander en même temps des jeûnes au pain et à l’eau de ceux qui peuvent le faire, pour rendre ces prières acceptables par Dieu.  Autrement les prières seules ne valent pas grand’chose!  Qu’on se le dise!…

SON FONDEMENT

Il se trouve dans les quatre grands principes fondamentaux à la base de notre retraite, comme on pourra le voir en les repassant.  Le surnaturel.  Pour passer de l’ordre naturel à l’ordre surnaturel qui est le monde divin, il nous faut une assistance spéciale de Dieu qu’il donne quand on la demande.  C’est cette disproportion entre l’homme et les choses divines qu’il veut obtenir qui fonde la nécessité de la prière.  St Paul, 2 Cor.  3-5, écrit: «Nous ne sommes pas capables de produire quoi que ce soit par nous-mêmes et comme de nous-mêmes, mais Dieu nous en donne la faculté.» De plus Jésus nous avertit que sans lui nous ne pouvons absolument rien.  On sait que la fin spécifie les moyens: or la fin est divine, donc les moyens doivent être divins; c’est par la prière qu’on les obtient de Dieu.

Remarquons qu’un chrétien doit demander des choses surnaturelles en général.  Jésus nous le dit carrément: «Cherchez d’abord le royaume de Dieu et sa justice et tout le reste vous sera donné par surcroît.» Il ne défend pas de demander des choses matérielles, mais il nous montre son inutilité du moment qu’on demande des choses surnaturelles, il nous donnera les autres en plus.  St Paul insiste plus sur cette idée: «Si vous êtes ressuscités avec J-C.  recherchez les choses d’en-haut et non pas celles d’en bas!  N’ayez de goût que pour les choses du ciel!  Voilà celles que nous devons demander!  Que de chrétiens passent leur vie à demander des choses matérielles: une position, la santé, l’argent, du succès dans telle entreprise, etc.  Aussi ils n’obtiennent pas souvent ce qu’ils désirent.  Ils demandent mal, dit St Jacques, parce qu’ils demandent des choses pour satisfaire leur concupiscence.  Ces gens ne montrent pas d’amour de Dieu ni des choses de Dieu, comment pourront-ils résister à leurs grandes tentations qui vont venir sûrement?  Ils risquent donc leur salut parce que sans amour de Dieu St Paul appelle toutes les choses créées du fumier!  Ne perdons pas notre temps à en demander à Dieu!  Quelle folie et quel aveuglement!

La gloire de dieu exige que les hommes reconnaissent Dieu comme l’Auteur de tout au monde et au ciel.  Quel moyen meilleur de l’avouer quand nous sommes obligés de nous mettre à genoux devant lui pour lui demander des grâces?   La prière est donc agréable à Dieu en proportion que nous avouons notre pauvreté et notre incapacité.  Puisque Dieu veut de la gloire, un bon moyen de rendre nos prières plus agréables à Dieu est de les commencer par des louanges et des remerciements pour ce qu’il a déjà fait pour nous.  Ainsi ont fait Moïse, Judith, Esther, David et une foule d’autres grands saints.  Ils sont à imiter sur ce point en particulier.  St F.  de Sales dit que nos meilleures prières sont celles où l’on donne le plus à Dieu.  Lui-même dit qu’il nous donnera la même mesure que nous lui donnons.  Faisons-lui donc ce plaisir au début de notre prière; nous aurons plus de chance d’être exaucés.  Dieu se dira: S’il me remercie pour ce que j’ai déjà fait pour lui, il me remerciera bien encore pour ce que je ferai.  Donnons donc le plus de gloire possible à Dieu avant de demander ses faveurs.  Est-ce qu’on donnerait longtemps à un pauvre qui ne remercie jamais?   Eh bien!  soyons donc bien élevés devant le bon Dieu dans nos prières!…

Le souverain domaine de dieu est un autre fondement de la prière.  Tous les biens appartiennent à Dieu seul; il en est le maître souverain.  C’est pour nous obliger à l’avouer qu’il exige la prière pour nous en donner.  Le pauvre vient auprès des riches quêter le nécessaire; ainsi nous avouons notre pauvreté et la richesse de Dieu quand nous venons quêter par la prière ses grâces.  Même quand nous possédons des biens, naturels ou surnaturels, cette idée que Dieu en est le maître souverain devrait nous pousser à le prier de nous les laisser, car de même qu’il a donné, il peut aussi bien les reprendre.  Plusieurs oublient ce point: quand ils ont ce qui leur suffit, ils ne prient plus.  Souvent c’est pour leur montrer que Dieu en est le maître qu’il les leur enlève.  Peut-être qu’il leur laisserait leurs biens s’ils l’avaient prie de les leur laisser.

LA FOLIE DE LA CROIX DOIT NOUS AIDER À PRIER.

Puisque la sagesse de Dieu est toute contraire à la nôtre dans le sens déjà si souvent expliqué, nous devons semer toutes nos facultés et toute notre activité naturelle pour récolter du surnaturel; nous ne pouvons donc absolument rien bâtir avec nos moyens naturels; nous devons faire comme si nous étions morts à nous-mêmes; donc nous ne pouvons compter que sur Dieu pour tout.  De là la nécessité de le prier constamment pour tout ce dont nous avons besoin.  Comme l’autre partie de la folie de la croix est le mépris des choses créées terrestres, cette partie nous poussera à demander seulement des biens surnaturels; ce qui constitue proprement la vraie prière que Dieu aime.  La prière est donc l’application pratique de la conclusion du plan divin.  Comme il nous faut être transférés en êtres divins.  Dieu seul peut le faire et sa gloire exige que nous le lui demandions jusqu’à ce que Jésus soit complètement formé en nous… ce qui prendra toute la vie.  Donc nous devons prier constamment et jusqu’à la mort pour demander à Dieu de nous sanctifier de sa propre sainteté.  sa nécessité N.S.  l’a prêchée de toutes les façons: par son exemple et par sa doctrine.

On voit qu’il y pense constamment; dès qu’il a une chance au milieu de sa vie publique, il se met en prière.  D’abord il commence sa vie publique par la prière.  «Or il arriva que tout le peuple recevant le baptême et Jésus ayant été baptisé et priant le ciel s’ouvrit et le St Esprit descendit sur lui.» Luc, 321.  Ce que le St Esprit fait là ouvertement est l’image de ce qu’il fait invisiblement quand nous prions sérieusement.  Il descend dans nos coeurs et la preuve que c’est bien lui c’est quand il nous pousse au mépris des créatures et à nous éloigner d elles comme il conduit Jésus tout de suite au désert.  Ceux qui prient sans arriver à s’éloigner des plaisirs du monde montrent qu’ils prient mal, qu’ils ne demandent que des choses matérielles.  Ces gens ne sont pas ressuscités avec Jésus puisqu’ils ont encore le goût des choses de la terre.  Il leur reste beaucoup à faire pour être sauvés.  S’ils demandaient les choses surnaturellement, le signe qu’ils sont exaucés serait dans le fait qu’ils prendraient en dégoût celles de la terre.  Car ces deux amours sont contraires.  Puisqu’ils courent encore après les choses de la terre, c’est une preuve qu’ils n’aiment pas encore celles du ciel… et comment y arriveront-ils?…

«Sa renommée se répandait de plus en plus et l’on venait par troupes nombreuses pour l’entendre et pour être guéri de ses maladies.  Pour lui, il se retirait dans les déserts et priait.» Luc, 5-15.  C’était donc une coutume pour lui de se retirer à l’écart dès qu’il le pouvait afin de prier.

«Le lendemain, s’étant levé longtemps avant le jour, il sortit, alla dans un lieu solitaire et il y pria.» Mc.  1-35.  «En ces jours-là il se retira sur la montagne pour prier et il passa toute la nuit à prier Dieu.  Quand il fit jour, il appela ses disciples et il choisit douze d’entre eux.» Luc.  6-12.  «Après la multiplication des pains, Jésus renvoie la foule, puis il monte sur la montagne pour prier à l’écart et le soir étant venu il était là seul.» Mt.  4-22.  Jusqu’à la quatrième veille.  Sur le Thabor c’est en priant que Jésus est transfiguré.  Ce n’est pas pour rien que le St Esprit a fait écrire ces faits.  Il veut nous montrer cet aspect de la vie de Jésus afin que nous l’imitions dans son esprit de prière.  Il est évident qu’elle était vraiment continuelle en lui comme il l’enseigne à ses disciples C’est quand le chrétien prie pour les choses surnaturelles qu’il se transforme en être divin, ce que Jésus nous montre dans sa transfiguration.

Tous les chrétiens devraient avoir cet esprit de prière.  Dès qu’ils peuvent s’esquiver de leur entourage qu’ils se retirent pour prier dans leur chambre et encore mieux dans la chapelle ou l’église s’ils n’en sont pas trop éloignés.  Que de citadins pourraient aller prier à l’église, puisqu’ils sont tout près des églises, au lieu de passer des heures à niaiser aux joutes de sport ou à fumer avec des amis, ou à lire des journaux ou revues mondaines.  Au lieu d’aller aux vues que de femmes pourraient aller aux églises dans l’après-midi et les hommes après leur journée faite pourraient aller passer une bonne heure devant le S.  Sacrement.  Jésus est là en personne et si peu viennent le visiter!  Et ces gens prétendent aller faire leur bonheur au ciel avec lui!  C’est le même Dieu au tabernacle qu’au ciel; s’il les ennuie ici, il les ennuiera dans l’autre monde et ce ne sera pas au ciel.  Quand on aime quelqu’un on fait comme lui.  Si on aime Jésus, qu’on prie comme lui toujours et partout.

Après avoir pratiqué la prière continuelle Jésus nous enseigne à le faire comme lui.  Il veut qu’on importune le ciel par nos demandes, qu’on prie tant qu’on n’obtient pas ce qu’on voulait.  On peut résumer sa doctrine dans deux paraboles qu’il donne lui-même.  St Luc.  11-5: «Si quelqu’un de vous, ayant un ami, va le trouver au milieu de la nuit, disant: Mon ami, prête-moi trois pains, car un de mes amis qui voyage est arrivé chez moi et je n’ai rien à lui offrir; et que de l’intérieur de la maison, l’autre réponde: Ne m’importune pas, la porte est déjà fermée, mes enfants et moi nous sommes au lit, je ne puis me lever pour te donner; je vous le dis en vérité quand même il ne se lèverait pas pour lui donner parce qu’il est son ami il se lèvera à cause de son importunité et lui donnera autant de pains qu’il a besoin.  Et moi je vous dis: demandez et l’on vous donnera; cherchez et vous trouverez, frappez et l’on vous ouvrira.  Car quiconque demande, reçoit; qui cherche, trouve et l’on ouvre à qui frappe.  Quel est parmi vous le père qui, si son enfant lui demande du pain lui donne une pierre, ou, si c’est un poisson, lui donne un serpent, ou s’il demande un oeuf, lui donnera un scorpion???  Si donc vous, tout méchants que vous êtes, vous savez donner à vos enfants de bonnes choses, combien plus votre Père céleste vous donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent?…»

Remarquons que N.S.  promet d’exaucer les prières de ceux qui demandent le St Esprit; donc les choses de Dieu; car lorsqu’on demande les choses matérielles, qui peuvent nuire à notre salut, c’est comme si un enfant demandait un scorpion à son père au lieu d’un oeuf ou un instrument dangereux pour lui, comme un rasoir ou un couteau, le père le lui refuserait sûrement.  Or Dieu nous aime trop pour nous donner des choses qui pourraient nous faire du tort pour notre salut.  Sa promesse est donc sans condition pour les choses surnaturelles; là, s’il nous refuse celles que nous demandons, il nous donnera l’équivalent ou même mieux.  Luc.  18-1: «Il leur dit aussi cette parabole pour montrer qu’il faut toujours prier sans se lasser.  Il y avait, dit-il, dans une certaine ville un juge qui ne craignait pas Dieu et ne se souciait pas des hommes.  Dans la même ville était une veuve qui vint le trouver et lui dit: Faites-moi justice de mon adversaire.  Et longtemps il ne voulait point.  Enfin il se dit en lui-même: quoique je ne craigne pas Dieu, que je n’aie pas de considération pour les hommes, néanmoins parce que cette veuve m’importune, je lui ferai justice, de peur qu’à la fin elle ne vienne me faire quelqu’affront.  Vous entendez, ajouta le Seigneur, ce que dit ce juge d’iniquité?  Et Dieu ne fera pas justice à ses élus, qui crient vers lui jour et nuit, et il souffrira toujours qu’on les opprime?  Je vous le dis, il leur fera justice promptement.» Ce n’est donc pas une question de simple dévotion que la prière, elle est une nécessité pour tout chrétien et pas de temps en temps, mais toujours.  Comme ce n’est pas du luxe d’imiter Jésus, il faut l’imiter dans sa prière continuelle.

Les Apôtres ont suivi Jésus dans leur insistance pour que nous priions constamment.  St Paul dit aux Thes.  1, 5-17: «Priez sans cesse!» 1 Tim.  2-8: «Je veux que les hommes prient en tout lieu, levant des mains pures sans colère ni agitation de pensée.» Aux Éph.  6-18: «Faites en tout temps par l’esprit toutes sortes de prières et de supplications et pour cela veillez avec une persévérance continuelle et priez pour tous les saints.» On sait que la vie de la Ste Vierge a été une vie de prière continuelle.  Dans toutes ses apparitions, elle recommande la prière avec la pénitence.

Pour mieux comprendre la nécessité de toujours prier, il faut distinguer entre l’ordre naturel et l’ordre surnaturel.  Dans l’ordre naturel, quand on cherche une chose et qu’on l’obtient on cesse de la vouloir.  Puis toutes choses sont limitées en ce monde de sorte qu’on ne cherche pas toujours ou on ne prie pas toujours pour une chose.  Cependant ceux qui aiment les choses de ce monde comme c’est le cas de la plupart des hommes, cet amour les tient tendus constamment vers les plaisirs de la terre pour les désirer et donc les prier pour ainsi dire.  Eh bien!  dans les choses surnaturelles, comme elles sont invisibles et nous dépassent infiniment, nous ne savons pas quand nous les obtenons et Dieu nous le cache précisément pour que nous continuions à les demander.  Car il sait que notre misère est extrême et notre indigence absolue de sorte que nous ne saurons jamais assez insister pour recevoir les grâces surnaturelles qui vont assurer et notre salut et notre perfection dans le salut.

SES CONDITIONS: LE TEMPLE DE LA PRIERE…

On peut renfermer les principales conditions de la prière dans ce qu’on peut appeler: le temple de la prière.  On trouve un bon fondement de cette idée dans l’Écriture sainte et dans la vie des saints.  Jésus parle de notre sanctification comme de la construction d’une tour et St Pierre dit que nous sommes les pierres vivantes du temple du St Esprit.  St Paul parle de bâtir notre édifice spirituel sur J-C.  comme fondement.  Enfin plusieurs saints aiment à se représenter la Ste Trinité comme habitant dans un temple où ils viennent prier.  On peut le construire avec les quatre grands principes fondamentaux et les 4 vertus qui donnent de la gloire à Dieu.

Évidemment il faut se servir de son imagination un peu et pour réussir il faut prendre son temps.  On ira toujours trop vite.  Nous ne sommes pas de purs esprits, mais des animaux raisonnables qui dépendent de l’animal même dans la méditation et dans les raisonnements nécessaires pour pénétrer dans le monde surnaturel avec la grâce de Dieu.  Il faut du temps pour goûter ces vérités et exciter leur amour en nous.  Qu’on ne perde pas son temps à discuter le bon sens de cette conception: les pièces de ce temple sont des vérités que nous devons faire entrer constamment dans la vie spirituelle et c’est en proportion qu’on s’appuie sur elles que nous progressons rapidement.  La plupart des chrétiens s’adressent à Dieu selon leur habitude de s’adresser aux hommes sans se mettre en peine de savoir quelle est l’étiquette pour ainsi dire du Roi de gloire pour bien accueillir nos demandes.  

Commençons par nous conformer aux exigences de sa gloire qui seule met Dieu en branle et nous obtiendrons incomparablement plus de Dieu.  Premier principe: le surnaturel.  Il s’agit pour nous de passer de l’ordre naturel à l’ordre surnaturel par la mentalité.  En nous enseignant à prier Jésus nous fait mettre notre Père aux cieux, c’est donc là qu’il veut que nous allions le chercher, sans préjudice pour la vérité qu’il est aussi au fond de l’âme en état de grâce.  On ferme donc les yeux et les sens à tout ce qui nous entoure et l’esprit alors s’élève graduellement au-dessus des nuages… loin de la terre… au fond des espaces stellaires… aux limites de notre univers.  Demandons à Jésus de nous accompagner pour nous montrer le chemin qu’il a suivi dans son ascension.  Puis au-delà de notre univers sous les portiques du ciel où habite la Trinité.

Notre âme à la mort fera un voyage semblable selon notre façon de voir les choses en ce monde; ce voyage en esprit est une bonne préparation à ce voyage définitif de notre âme à la mort.  On verra avec un peu d’expérience combien cette façon de faire nous met loin des choses sensibles si distrayantes d’ordinaire dans la méditation.  Quand même l’esprit ne pénètre pas au sein de la Trinité par une grâce bien spéciale, le fait qu’il se tient dans le vide loin de ce monde est déjà une bonne préparation aux visites de Dieu par sa grâce.  S’il y en a qui préfèrent aller chercher Dieu au fond de leur âme où il est aussi réellement quand on est en état de grâce, ils n’ont qu’à faire ce chemin dans l’autre sens: le résultat devrait être le même selon la lumière de la foi.  L’important est d’isoler l’esprit des choses sensibles afin qu’il soit plus apte à s’occuper des choses divines absolument insensibles.

Deuxième principe: la gloire de Dieu.  On arrive enfin au ciel qui se présente comme un immense temple fait des plus belles pierres précieuses, comme St Jean vit dans ses visions de l’Apocalypse et qu’il appelle la Jérusalem céleste, toute resplendissante de la majesté divine de la Trinité.  Des millions d’anges et d’élus sont tout étincelants de cette gloire divine qui fait leur bonheur éternel.  Restons là sur le seuil, tranquilles, et contemplons pendant quelques minutes cette splendeur qui nous est destinée.  Essayons de voir des détails: la profondeur sans fond, la largeur immense et l’altitude sans limite de ce déploiement ineffable de bonheur divin.  Il n’y aura pas de fin à ce royaume céleste où J-C. est Roi éternel.  Là il n’y a aucune souffrance, aucun ennui, mais des jouissances éternelles, continuelles qui dépassent tout ce que l’esprit de l’homme peut concevoir.  Voilà une contemplation qui finit par captiver l’esprit et le coeur et qui donne le dégoût des choses de la terre. 

Comme sont éphémères les spectacles les plus beaux en ce monde!  Surtout quand on sait que le moyen normal d’acheter cette vision béatifique est en la payant par les sacrifices des plaisirs de la terre.  Comme ceux qui admirent les vues animées finissent par y penser tout le temps et en vivent, à plus forte raison, ceux qui viendront souvent dans leur temple de la prière, finiront par en faire une vie continuelle et ce sera le commencement de leur vie éternelle du ciel.

Troisième principe: le souverain domaine de Dieu.  Si la gloire de Dieu est comme la voûte de notre temple, le souverain domaine est comme la base ou le fondement du temple; c’est le Père qui soutient tout ce temple tandis que le Fils en est la voûte ou la gloire ou son resplendissement.  C’est le Père qui est l’Auteur des anges, des élus et de toute cette gloire du ciel.  C’est lui qui contrôle tout.  Quel ordre parfait, quelle obéissance dans tous ces êtres!  Quelle paix partout et quel bonheur!  Eh bien!  on se remplira tellement le coeur qu’on accomplira à l’avenir cette même volonté de Dieu dans tout ce que sa divine providence nous enverra sur la terre.  Adieu donc les critiques, les murmures, les reproches et toute révolte de païen.  C’est le même Dieu qui préside aux choses créées sur la terre que dans ce beau ciel.  Si on veut aller en jouir au ciel, il faut commencer par se soumettre à lui dans toutes les choses qu’il nous envoie sur terre.  Quatrième principe: la folie de la croix.  C’est l’activité du St Esprit qui procède du Père et du Fils et donc qui est comme le trait d’union entre les deux, ou les murs qui réunissent la voûte aux fondements.  C’est lui qui nous pousse à semer l’humain pour récolter le divin.  C’est aussi lui qui donne le dégoût des choses de la terre et le goût des choses divines.  Plus on se dépouille de l’affection des choses créées et plus on augmente en amour divin qui est l’Esprit Saint.  Qu’on se remplisse l’esprit et le coeur des récoltes divines que le St Esprit nous donne pour les sacrifices des choses terrestres: on voudra alors lui fournir encore plus de semailles pour augmenter nos récoltes éternelles.  Comme le cultivateur qui veut de grandes moissons sème d’autant plus abondamment, ainsi nous serons plus courageux pour faire des sacrifices à mesure que le coeur sera plein des récoltes célestes entrevues dans notre visite au temple de la prière.

Pour soutenir notre voûte qui est la gloire de Dieu nous mettrons nos quatre piliers des vertus qui alimentent la gloire de Dieu.  D’abord: La reconnaissance.  Ce n’est pas un pilier de pierre, mais un pilier vivant, comme tout au ciel; donc, fait d’actes continuels de cette vertu.  Remercions Dieu pour tout ce qu’il a fait pour nous et repassons les principales idées de ce que nous disons à ce sujet durant la retraite.

L’humilité.  Pour laisser à Dieu toute sa gloire, il faut nous humilier; c’est dans la même mesure que nous augmentons la gloire de Dieu.  Cette vertu est donc bien un pilier qui soutient la gloire de Dieu, qui est la voûte du temple.

La patience nous sera encore nécessaire puisque nous ne sommes pas encore au terme de nos épreuves.  Eh bien!  fortifions-nous par la vue de tous ces martyrs et tous ces élus qui ont dû tant souffrir pour mériter leur couronne céleste.  Ils moissonnent dans l’allégresse ce qu’ils ont semé dans les pleurs.  Cela devrait nous donner plus de courage pour endurer les épreuves de notre vie.  Faisons tout de suite quelques actes de patience en pensant à ce qui nous fait encore souffrir sur terre.

Enfin la confiance en Dieu pour tout ce qui nous reste à obtenir de lui pour assurer notre ciel.  Plus notre vie est difficile et plus nous devons compter uniquement sur Dieu pour nous donner les secours nécessaires pour vaincre nos tentations et nos misères de toutes sortes.  Qu’on ne se laisse pas distraire par l’ordre indiqué ici; qu’on suive les grandes lignes de ce plan.  En tout cas, ceux qui le suivront ne perdront pas leur temps dans le vague.  Plus ils se rempliront l’esprit et le coeur de ce temple de la prière et mieux ils prieront.  Qu’on se mette dans ces grands principes fondamentaux et l’on se trouvera en plein surnaturel, uni à la Trinité par J-C.  et en faisant les actes des quatre vertus qui alimentent la gloire de Dieu.  On ne peut pas mieux se disposer à bien prier.  Comme on l’a déjà dit: plus on loue Dieu dans la prière et même avant la prière et plus on a de chance d’être exaucé.  Eh bien!  on a là dans ce temple de la prière une excellente façon de se jeter en plein surnaturel avec les meilleures conséquences pour nous.  Demandons à la Ste Vierge, qui savait si bien prier, de nous aider à nous mettre dans les meilleures dispositions possibles pour bien prier.  Nous voulons passer l’éternité dans un temple de ce genre, habituons-nous par cet exercice très fructueux.  Puisque la mort ne fait qu’immortaliser ce qu’elle trouve en nous, qu’elle nous trouve avec ce temple de la prière bien tracé dans l’âme et alors nous continuerons d’y vivre éternellement dans la gloire du ciel!  Que Dieu nous accorde cette grâce!

Onésime Lacouture, s.j.

28 fév.  1948.  St Ign.  M.

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