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TRENTE-QUATRIÈME
INSTRUCTION LA PRIÈRE.
«Demandez et l’on vous donnera;
cherchez et vous trouverez; frappez et l’on vous ouvrira.» Luc. 11-9.
Plan
: Sa nature Son fondement: les quatre principes fondamentaux. Sa nécessité prêchée par N.S. Ses conditions: le temple de la prière.
SA
NATURE On a beau avoir compris le plan divin pour notre sanctification et être
parfaitement convaincu des vérités qu’il contient et bien décidé de les vivre,
on ne peut absolument rien sans la prière.
«Sans moi, vous ne pouvez rien.» s’applique ici encore plus que partout
ailleurs. L’exécution de ce plan est une
grâce bien précieuse qui ne peut venir que de Dieu. Or plus ses grâces sont importantes et plus
Dieu exige que nous les lui demandions.
Si la retraite finit, c’est la prière qui doit se continuer plus que
jamais. Elle vaut la peine que nous lui
consacrions une méditation spéciale.
La
prière est une élévation de l’âme vers Dieu pour l’adorer, le louer et lui
demander des grâces. Il ne faut pas en
faire simplement une demande passagère comme lorsqu’un enfant demande de
l’argent à son père. C’est plutôt une
inclination constante vers Dieu, venant d’une conviction profonde de notre
extrême indigence en fait de surnaturel.
Imaginons un affamé toujours en face d’un banquet d’un riche de l’autre
côté de la rue. Comme il désire y
prendre part! Même quand il ne dit rien
son coeur crie vers ce banquet, son estomac vide le pousse à la porte de ce
riche pour avoir de quoi manger. Ce
devrait être quelque chose de ce genre que notre prière vers le banquet éternel
de tous les biens que nous n’avons pas du tout sans Dieu. Or une des conditions essentielles pour être
ainsi tournés vers les biens célestes, est de nous vider le coeur de l’amour
des biens créés. Quand un homme a bien
mangé, il n’a pas faim, même pour des mets plus riches. Si un chrétien trouve son bonheur dans les
plaisirs créés il est bien certain qu’il n’a pas faim pour les joies du
paradis, même s’il pense qu’elles sont bien meilleures. Il n’éprouvera cette espèce de faim pour les
plaisirs du ciel qu’en proportion qu’il se vide le coeur de l’affection des
choses de la terre. Donc, il développera
l’esprit de prière à mesure qu’il sacrifie son affection pour ceux du monde.
Les
Saints ont donc raison de toujours accorder la mortification à la prière. De nos jours, les prêtres parlent toujours de
la prière toute seule; ils font des prières, ils demandent aux gens des
prières, mais quand est-ce qu’un prêtre insiste autant sur la mortification que
sur les demandes? On voit des Évêques
demander des prières pour certaines faveurs; ils devraient demander en même
temps des jeûnes au pain et à l’eau de ceux qui peuvent le faire, pour rendre
ces prières acceptables par Dieu.
Autrement les prières seules ne valent pas grand’chose! Qu’on se le dise!…
SON
FONDEMENT
Il
se trouve dans les quatre grands principes fondamentaux à la base de notre
retraite, comme on pourra le voir en les repassant. Le surnaturel. Pour passer de l’ordre naturel à l’ordre
surnaturel qui est le monde divin, il nous faut une assistance spéciale de Dieu
qu’il donne quand on la demande. C’est
cette disproportion entre l’homme et les choses divines qu’il veut obtenir qui
fonde la nécessité de la prière. St
Paul, 2 Cor. 3-5, écrit: «Nous ne sommes
pas capables de produire quoi que ce soit par nous-mêmes et comme de
nous-mêmes, mais Dieu nous en donne la faculté.» De plus Jésus nous avertit que
sans lui nous ne pouvons absolument rien.
On sait que la fin spécifie les moyens: or la fin est divine, donc les
moyens doivent être divins; c’est par la prière qu’on les obtient de Dieu.
Remarquons
qu’un chrétien doit demander des choses surnaturelles en général. Jésus nous le dit carrément: «Cherchez
d’abord le royaume de Dieu et sa justice et tout le reste vous sera donné par
surcroît.» Il ne défend pas de demander des choses matérielles, mais il nous
montre son inutilité du moment qu’on demande des choses surnaturelles, il nous
donnera les autres en plus. St Paul
insiste plus sur cette idée: «Si vous êtes ressuscités avec J-C. recherchez les choses d’en-haut et non pas
celles d’en bas! N’ayez de goût que pour
les choses du ciel! Voilà celles que
nous devons demander! Que de chrétiens
passent leur vie à demander des choses matérielles: une position, la santé,
l’argent, du succès dans telle entreprise, etc.
Aussi ils n’obtiennent pas souvent ce qu’ils désirent. Ils demandent mal, dit St Jacques, parce
qu’ils demandent des choses pour satisfaire leur concupiscence. Ces gens ne montrent pas d’amour de Dieu ni
des choses de Dieu, comment pourront-ils résister à leurs grandes tentations
qui vont venir sûrement? Ils risquent
donc leur salut parce que sans amour de Dieu St Paul appelle toutes les choses
créées du fumier! Ne perdons pas notre
temps à en demander à Dieu! Quelle folie
et quel aveuglement!
La
gloire de dieu exige que les hommes reconnaissent Dieu comme l’Auteur de tout
au monde et au ciel. Quel moyen meilleur
de l’avouer quand nous sommes obligés de nous mettre à genoux devant lui pour
lui demander des grâces? La prière est
donc agréable à Dieu en proportion que nous avouons notre pauvreté et notre
incapacité. Puisque Dieu veut de la
gloire, un bon moyen de rendre nos prières plus agréables à Dieu est de les
commencer par des louanges et des remerciements pour ce qu’il a déjà fait pour
nous. Ainsi ont fait Moïse, Judith,
Esther, David et une foule d’autres grands saints. Ils sont à imiter sur ce point en
particulier. St F. de Sales dit que nos meilleures prières sont
celles où l’on donne le plus à Dieu.
Lui-même dit qu’il nous donnera la même mesure que nous lui
donnons. Faisons-lui donc ce plaisir au
début de notre prière; nous aurons plus de chance d’être exaucés. Dieu se dira: S’il me remercie pour ce que
j’ai déjà fait pour lui, il me remerciera bien encore pour ce que je ferai. Donnons donc le plus de gloire possible à Dieu
avant de demander ses faveurs. Est-ce
qu’on donnerait longtemps à un pauvre qui ne remercie jamais? Eh bien!
soyons donc bien élevés devant le bon Dieu dans nos prières!…
Le
souverain domaine de dieu est un autre fondement de la prière. Tous les biens appartiennent à Dieu seul; il
en est le maître souverain. C’est pour
nous obliger à l’avouer qu’il exige la prière pour nous en donner. Le pauvre vient auprès des riches quêter le
nécessaire; ainsi nous avouons notre pauvreté et la richesse de Dieu quand nous
venons quêter par la prière ses grâces.
Même quand nous possédons des biens, naturels ou surnaturels, cette idée
que Dieu en est le maître souverain devrait nous pousser à le prier de nous les
laisser, car de même qu’il a donné, il peut aussi bien les reprendre. Plusieurs oublient ce point: quand ils ont ce
qui leur suffit, ils ne prient plus.
Souvent c’est pour leur montrer que Dieu en est le maître qu’il les leur
enlève. Peut-être qu’il leur laisserait
leurs biens s’ils l’avaient prie de les leur laisser.
LA
FOLIE DE LA CROIX DOIT NOUS AIDER À PRIER.
Puisque
la sagesse de Dieu est toute contraire à la nôtre dans le sens déjà si souvent
expliqué, nous devons semer toutes nos facultés et toute notre activité
naturelle pour récolter du surnaturel; nous ne pouvons donc absolument rien
bâtir avec nos moyens naturels; nous devons faire comme si nous étions morts à
nous-mêmes; donc nous ne pouvons compter que sur Dieu pour tout. De là la nécessité de le prier constamment
pour tout ce dont nous avons besoin.
Comme l’autre partie de la folie de la croix est le mépris des choses
créées terrestres, cette partie nous poussera à demander seulement des biens
surnaturels; ce qui constitue proprement la vraie prière que Dieu aime. La prière est donc l’application pratique de
la conclusion du plan divin. Comme il
nous faut être transférés en êtres divins.
Dieu seul peut le faire et sa gloire exige que nous le lui demandions
jusqu’à ce que Jésus soit complètement formé en nous… ce qui prendra toute la
vie. Donc nous devons prier constamment
et jusqu’à la mort pour demander à Dieu de nous sanctifier de sa propre
sainteté. sa nécessité N.S. l’a prêchée de toutes les façons: par son
exemple et par sa doctrine.
On
voit qu’il y pense constamment; dès qu’il a une chance au milieu de sa vie
publique, il se met en prière. D’abord
il commence sa vie publique par la prière.
«Or il arriva que tout le peuple recevant le baptême et Jésus ayant été
baptisé et priant le ciel s’ouvrit et le St Esprit descendit sur lui.» Luc,
321. Ce que le St Esprit fait là
ouvertement est l’image de ce qu’il fait invisiblement quand nous prions
sérieusement. Il descend dans nos coeurs
et la preuve que c’est bien lui c’est quand il nous pousse au mépris des
créatures et à nous éloigner d elles comme il conduit Jésus tout de suite au
désert. Ceux qui prient sans arriver à
s’éloigner des plaisirs du monde montrent qu’ils prient mal, qu’ils ne
demandent que des choses matérielles.
Ces gens ne sont pas ressuscités avec Jésus puisqu’ils ont encore le
goût des choses de la terre. Il leur
reste beaucoup à faire pour être sauvés.
S’ils demandaient les choses surnaturellement, le signe qu’ils sont
exaucés serait dans le fait qu’ils prendraient en dégoût celles de la
terre. Car ces deux amours sont
contraires. Puisqu’ils courent encore
après les choses de la terre, c’est une preuve qu’ils n’aiment pas encore
celles du ciel… et comment y arriveront-ils?…
«Sa
renommée se répandait de plus en plus et l’on venait par troupes nombreuses
pour l’entendre et pour être guéri de ses maladies. Pour lui, il se retirait dans les déserts et
priait.» Luc, 5-15. C’était donc une
coutume pour lui de se retirer à l’écart dès qu’il le pouvait afin de prier.
«Le
lendemain, s’étant levé longtemps avant le jour, il sortit, alla dans un lieu
solitaire et il y pria.» Mc. 1-35. «En ces jours-là il se retira sur la montagne
pour prier et il passa toute la nuit à prier Dieu. Quand il fit jour, il appela ses disciples et
il choisit douze d’entre eux.» Luc.
6-12. «Après la multiplication
des pains, Jésus renvoie la foule, puis il monte sur la montagne pour prier à
l’écart et le soir étant venu il était là seul.» Mt. 4-22.
Jusqu’à la quatrième veille. Sur
le Thabor c’est en priant que Jésus est transfiguré. Ce n’est pas pour rien que le St Esprit a
fait écrire ces faits. Il veut nous
montrer cet aspect de la vie de Jésus afin que nous l’imitions dans son esprit
de prière. Il est évident qu’elle était
vraiment continuelle en lui comme il l’enseigne à ses disciples C’est quand le
chrétien prie pour les choses surnaturelles qu’il se transforme en être divin,
ce que Jésus nous montre dans sa transfiguration.
Tous
les chrétiens devraient avoir cet esprit de prière. Dès qu’ils peuvent s’esquiver de leur
entourage qu’ils se retirent pour prier dans leur chambre et encore mieux dans
la chapelle ou l’église s’ils n’en sont pas trop éloignés. Que de citadins pourraient aller prier à
l’église, puisqu’ils sont tout près des églises, au lieu de passer des heures à
niaiser aux joutes de sport ou à fumer avec des amis, ou à lire des journaux ou
revues mondaines. Au lieu d’aller aux
vues que de femmes pourraient aller aux églises dans l’après-midi et les hommes
après leur journée faite pourraient aller passer une bonne heure devant le
S. Sacrement. Jésus est là en personne et si peu viennent
le visiter! Et ces gens prétendent aller
faire leur bonheur au ciel avec lui!
C’est le même Dieu au tabernacle qu’au ciel; s’il les ennuie ici, il les
ennuiera dans l’autre monde et ce ne sera pas au ciel. Quand on aime quelqu’un on fait comme
lui. Si on aime Jésus, qu’on prie comme
lui toujours et partout.
Après
avoir pratiqué la prière continuelle Jésus nous enseigne à le faire comme
lui. Il veut qu’on importune le ciel par
nos demandes, qu’on prie tant qu’on n’obtient pas ce qu’on voulait. On peut résumer sa doctrine dans deux
paraboles qu’il donne lui-même. St
Luc. 11-5: «Si quelqu’un de vous, ayant
un ami, va le trouver au milieu de la nuit, disant: Mon ami, prête-moi trois
pains, car un de mes amis qui voyage est arrivé chez moi et je n’ai rien à lui
offrir; et que de l’intérieur de la maison, l’autre réponde: Ne m’importune
pas, la porte est déjà fermée, mes enfants et moi nous sommes au lit, je ne
puis me lever pour te donner; je vous le dis en vérité quand même il ne se
lèverait pas pour lui donner parce qu’il est son ami il se lèvera à cause de
son importunité et lui donnera autant de pains qu’il a besoin. Et moi je vous dis: demandez et l’on vous
donnera; cherchez et vous trouverez, frappez et l’on vous ouvrira. Car quiconque demande, reçoit; qui cherche,
trouve et l’on ouvre à qui frappe. Quel
est parmi vous le père qui, si son enfant lui demande du pain lui donne une
pierre, ou, si c’est un poisson, lui donne un serpent, ou s’il demande un oeuf,
lui donnera un scorpion??? Si donc vous,
tout méchants que vous êtes, vous savez donner à vos enfants de bonnes choses,
combien plus votre Père céleste vous donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le
lui demandent?…»
Remarquons
que N.S. promet d’exaucer les prières de
ceux qui demandent le St Esprit; donc les choses de Dieu; car lorsqu’on demande
les choses matérielles, qui peuvent nuire à notre salut, c’est comme si un
enfant demandait un scorpion à son père au lieu d’un oeuf ou un instrument
dangereux pour lui, comme un rasoir ou un couteau, le père le lui refuserait
sûrement. Or Dieu nous aime trop pour nous
donner des choses qui pourraient nous faire du tort pour notre salut. Sa promesse est donc sans condition pour les
choses surnaturelles; là, s’il nous refuse celles que nous demandons, il nous
donnera l’équivalent ou même mieux.
Luc. 18-1: «Il leur dit aussi
cette parabole pour montrer qu’il faut toujours prier sans se lasser. Il y avait, dit-il, dans une certaine ville
un juge qui ne craignait pas Dieu et ne se souciait pas des hommes. Dans la même ville était une veuve qui vint
le trouver et lui dit: Faites-moi justice de mon adversaire. Et longtemps il ne voulait point. Enfin il se dit en lui-même: quoique je ne
craigne pas Dieu, que je n’aie pas de considération pour les hommes, néanmoins
parce que cette veuve m’importune, je lui ferai justice, de peur qu’à la fin
elle ne vienne me faire quelqu’affront.
Vous entendez, ajouta le Seigneur, ce que dit ce juge d’iniquité? Et Dieu ne fera pas justice à ses élus, qui
crient vers lui jour et nuit, et il souffrira toujours qu’on les opprime? Je vous le dis, il leur fera justice
promptement.» Ce n’est donc pas une question de simple dévotion que la prière,
elle est une nécessité pour tout chrétien et pas de temps en temps, mais
toujours. Comme ce n’est pas du luxe
d’imiter Jésus, il faut l’imiter dans sa prière continuelle.
Les
Apôtres ont suivi Jésus dans leur insistance pour que nous priions
constamment. St Paul dit aux Thes. 1, 5-17: «Priez sans cesse!» 1 Tim. 2-8: «Je veux que les hommes prient en tout
lieu, levant des mains pures sans colère ni agitation de pensée.» Aux Éph. 6-18: «Faites en tout temps par l’esprit
toutes sortes de prières et de supplications et pour cela veillez avec une
persévérance continuelle et priez pour tous les saints.» On sait que la vie de
la Ste Vierge a été une vie de prière continuelle. Dans toutes ses apparitions, elle recommande
la prière avec la pénitence.
Pour
mieux comprendre la nécessité de toujours prier, il faut distinguer entre
l’ordre naturel et l’ordre surnaturel.
Dans l’ordre naturel, quand on cherche une chose et qu’on l’obtient on
cesse de la vouloir. Puis toutes choses
sont limitées en ce monde de sorte qu’on ne cherche pas toujours ou on ne prie
pas toujours pour une chose. Cependant
ceux qui aiment les choses de ce monde comme c’est le cas de la plupart des
hommes, cet amour les tient tendus constamment vers les plaisirs de la terre
pour les désirer et donc les prier pour ainsi dire. Eh bien!
dans les choses surnaturelles, comme elles sont invisibles et nous
dépassent infiniment, nous ne savons pas quand nous les obtenons et Dieu nous
le cache précisément pour que nous continuions à les demander. Car il sait que notre misère est extrême et
notre indigence absolue de sorte que nous ne saurons jamais assez insister pour
recevoir les grâces surnaturelles qui vont assurer et notre salut et notre
perfection dans le salut.
SES
CONDITIONS: LE TEMPLE DE LA PRIERE…
On
peut renfermer les principales conditions de la prière dans ce qu’on peut
appeler: le temple de la prière. On
trouve un bon fondement de cette idée dans l’Écriture sainte et dans la vie des
saints. Jésus parle de notre
sanctification comme de la construction d’une tour et St Pierre dit que nous
sommes les pierres vivantes du temple du St Esprit. St Paul parle de bâtir notre édifice
spirituel sur J-C. comme fondement. Enfin plusieurs saints aiment à se
représenter la Ste Trinité comme habitant dans un temple où ils viennent
prier. On peut le construire avec les
quatre grands principes fondamentaux et les 4 vertus qui donnent de la gloire à
Dieu.
Évidemment
il faut se servir de son imagination un peu et pour réussir il faut prendre son
temps. On ira toujours trop vite. Nous ne sommes pas de purs esprits, mais des
animaux raisonnables qui dépendent de l’animal même dans la méditation et dans
les raisonnements nécessaires pour pénétrer dans le monde surnaturel avec la
grâce de Dieu. Il faut du temps pour
goûter ces vérités et exciter leur amour en nous. Qu’on ne perde pas son temps à discuter le
bon sens de cette conception: les pièces de ce temple sont des vérités que nous
devons faire entrer constamment dans la vie spirituelle et c’est en proportion
qu’on s’appuie sur elles que nous progressons rapidement. La plupart des chrétiens s’adressent à Dieu
selon leur habitude de s’adresser aux hommes sans se mettre en peine de savoir
quelle est l’étiquette pour ainsi dire du Roi de gloire pour bien accueillir
nos demandes.
Commençons par nous
conformer aux exigences de sa gloire qui seule met Dieu en branle et nous
obtiendrons incomparablement plus de Dieu.
Premier principe: le surnaturel.
Il s’agit pour nous de passer de l’ordre naturel à l’ordre surnaturel
par la mentalité. En nous enseignant à
prier Jésus nous fait mettre notre Père aux cieux, c’est donc là qu’il veut que
nous allions le chercher, sans préjudice pour la vérité qu’il est aussi au fond
de l’âme en état de grâce. On ferme donc
les yeux et les sens à tout ce qui nous entoure et l’esprit alors s’élève
graduellement au-dessus des nuages… loin de la terre… au fond des espaces
stellaires… aux limites de notre univers.
Demandons à Jésus de nous accompagner pour nous montrer le chemin qu’il
a suivi dans son ascension. Puis au-delà
de notre univers sous les portiques du ciel où habite la Trinité.
Notre
âme à la mort fera un voyage semblable selon notre façon de voir les choses en
ce monde; ce voyage en esprit est une bonne préparation à ce voyage définitif
de notre âme à la mort. On verra avec un
peu d’expérience combien cette façon de faire nous met loin des choses
sensibles si distrayantes d’ordinaire dans la méditation. Quand même l’esprit ne pénètre pas au sein de
la Trinité par une grâce bien spéciale, le fait qu’il se tient dans le vide
loin de ce monde est déjà une bonne préparation aux visites de Dieu par sa
grâce. S’il y en a qui préfèrent aller
chercher Dieu au fond de leur âme où il est aussi réellement quand on est en
état de grâce, ils n’ont qu’à faire ce chemin dans l’autre sens: le résultat
devrait être le même selon la lumière de la foi. L’important est d’isoler l’esprit des choses
sensibles afin qu’il soit plus apte à s’occuper des choses divines absolument
insensibles.
Deuxième
principe: la gloire de Dieu. On arrive
enfin au ciel qui se présente comme un immense temple fait des plus belles
pierres précieuses, comme St Jean vit dans ses visions de l’Apocalypse et qu’il
appelle la Jérusalem céleste, toute resplendissante de la majesté divine de la
Trinité. Des millions d’anges et d’élus
sont tout étincelants de cette gloire divine qui fait leur bonheur
éternel. Restons là sur le seuil,
tranquilles, et contemplons pendant quelques minutes cette splendeur qui nous
est destinée. Essayons de voir des
détails: la profondeur sans fond, la largeur immense et l’altitude sans limite
de ce déploiement ineffable de bonheur divin.
Il n’y aura pas de fin à ce royaume céleste où J-C. est Roi
éternel. Là il n’y a aucune souffrance,
aucun ennui, mais des jouissances éternelles, continuelles qui dépassent tout
ce que l’esprit de l’homme peut concevoir.
Voilà une contemplation qui finit par captiver l’esprit et le coeur et
qui donne le dégoût des choses de la terre.
Comme
sont éphémères les spectacles les plus beaux en ce monde! Surtout quand on sait que le moyen normal
d’acheter cette vision béatifique est en la payant par les sacrifices des
plaisirs de la terre. Comme ceux qui
admirent les vues animées finissent par y penser tout le temps et en vivent, à
plus forte raison, ceux qui viendront souvent dans leur temple de la prière,
finiront par en faire une vie continuelle et ce sera le commencement de leur
vie éternelle du ciel.
Troisième
principe: le souverain domaine de Dieu.
Si la gloire de Dieu est comme la voûte de notre temple, le souverain
domaine est comme la base ou le fondement du temple; c’est le Père qui soutient
tout ce temple tandis que le Fils en est la voûte ou la gloire ou son
resplendissement. C’est le Père qui est
l’Auteur des anges, des élus et de toute cette gloire du ciel. C’est lui qui contrôle tout. Quel ordre parfait, quelle obéissance dans
tous ces êtres! Quelle paix partout et
quel bonheur! Eh bien! on se remplira tellement le coeur qu’on
accomplira à l’avenir cette même volonté de Dieu dans tout ce que sa divine
providence nous enverra sur la terre.
Adieu donc les critiques, les murmures, les reproches et toute révolte
de païen. C’est le même Dieu qui préside
aux choses créées sur la terre que dans ce beau ciel. Si on veut aller en jouir au ciel, il faut
commencer par se soumettre à lui dans toutes les choses qu’il nous envoie sur
terre. Quatrième principe: la folie de
la croix. C’est l’activité du St Esprit
qui procède du Père et du Fils et donc qui est comme le trait d’union entre les
deux, ou les murs qui réunissent la voûte aux fondements. C’est lui qui nous pousse à semer l’humain
pour récolter le divin. C’est aussi lui
qui donne le dégoût des choses de la terre et le goût des choses divines. Plus on se dépouille de l’affection des
choses créées et plus on augmente en amour divin qui est l’Esprit Saint. Qu’on se remplisse l’esprit et le coeur des
récoltes divines que le St Esprit nous donne pour les sacrifices des choses
terrestres: on voudra alors lui fournir encore plus de semailles pour augmenter
nos récoltes éternelles. Comme le
cultivateur qui veut de grandes moissons sème d’autant plus abondamment, ainsi
nous serons plus courageux pour faire des sacrifices à mesure que le coeur sera
plein des récoltes célestes entrevues dans notre visite au temple de la prière.
Pour
soutenir notre voûte qui est la gloire de Dieu nous mettrons nos quatre piliers
des vertus qui alimentent la gloire de Dieu.
D’abord: La reconnaissance. Ce
n’est pas un pilier de pierre, mais un pilier vivant, comme tout au ciel; donc,
fait d’actes continuels de cette vertu.
Remercions Dieu pour tout ce qu’il a fait pour nous et repassons les
principales idées de ce que nous disons à ce sujet durant la retraite.
L’humilité. Pour laisser à Dieu toute sa gloire, il faut
nous humilier; c’est dans la même mesure que nous augmentons la gloire de
Dieu. Cette vertu est donc bien un
pilier qui soutient la gloire de Dieu, qui est la voûte du temple.
La
patience nous sera encore nécessaire puisque nous ne sommes pas encore au terme
de nos épreuves. Eh bien! fortifions-nous par la vue de tous ces
martyrs et tous ces élus qui ont dû tant souffrir pour mériter leur couronne
céleste. Ils moissonnent dans
l’allégresse ce qu’ils ont semé dans les pleurs. Cela devrait nous donner plus de courage pour
endurer les épreuves de notre vie.
Faisons tout de suite quelques actes de patience en pensant à ce qui
nous fait encore souffrir sur terre.
Enfin
la confiance en Dieu pour tout ce qui nous reste à obtenir de lui pour assurer
notre ciel. Plus notre vie est difficile
et plus nous devons compter uniquement sur Dieu pour nous donner les secours
nécessaires pour vaincre nos tentations et nos misères de toutes sortes. Qu’on ne se laisse pas distraire par l’ordre
indiqué ici; qu’on suive les grandes lignes de ce plan. En tout cas, ceux qui le suivront ne perdront
pas leur temps dans le vague. Plus ils
se rempliront l’esprit et le coeur de ce temple de la prière et mieux ils
prieront. Qu’on se mette dans ces grands
principes fondamentaux et l’on se trouvera en plein surnaturel, uni à la
Trinité par J-C. et en faisant les actes
des quatre vertus qui alimentent la gloire de Dieu. On ne peut pas mieux se disposer à bien
prier. Comme on l’a déjà dit: plus on
loue Dieu dans la prière et même avant la prière et plus on a de chance d’être
exaucé. Eh bien! on a là dans ce temple de la prière une
excellente façon de se jeter en plein surnaturel avec les meilleures
conséquences pour nous. Demandons à la
Ste Vierge, qui savait si bien prier, de nous aider à nous mettre dans les
meilleures dispositions possibles pour bien prier. Nous voulons passer l’éternité dans un temple
de ce genre, habituons-nous par cet exercice très fructueux. Puisque la mort ne fait qu’immortaliser ce
qu’elle trouve en nous, qu’elle nous trouve avec ce temple de la prière bien
tracé dans l’âme et alors nous continuerons d’y vivre éternellement dans la
gloire du ciel! Que Dieu nous accorde
cette grâce!
Onésime
Lacouture, s.j.
28
fév. 1948. St Ign.
M.
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